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169 résultats pour “le garçon

Sauveur et fils de Marie-Aude MURAIL

Publié le par Hélène

♥ ♥

"On ne sauve pas les gens d'eux-mêmes, Lazare. On peut les aimer, les accompagner, les encourager, les soutenir. Mais chacun se sauve soi-même, s'il le veut, s'il le peut. Tu peux aider les autres, Lazare. Mais tu n'es pas tout puissant."

Sauveur Saint Yves est un martiniquais de 1m90, psychologue qui reçoit des adolescents ressentant un profond mal-être : qu'il s'agisse de Margaux, 14 ans qui se taillade les veines, de Ella, 12 ans qui refuse d'aller à l'école et ne sait pas bien si elle a envie d'être une fille ou un garçon, de Cyrille, 9 ans qui fait encore pipi au lit, de Gabin 16 ans addict aux jeux vidéos et dont la mère est en dépression ou encore des trois soeurs Augagneur 5, 14 et 16 ans déstabilisées par la séparation de leurs parents et par les nouveaux couples que ceux-ci ont choisi de former, tous ont besoin de l'appui de Sauveur. Il essaie de les aider, de les sauver peut-être, même s'il sait que la tâche n'est jamais facile. Il leur montre le chemin, discrètement, avec intelligence, plonge en eux pour en faire ressortir le meilleur. Avec lui, les gens se sentent bien, mieux, en accord avec eux-mêmes. "Je suis tellement bien ici. Tellement moi." dira la petite Ella qui souhaitera continuer de venir, même après avoir compris l'origine de son mal-être.

Mais ce psychologue tellement apprécié efface les ombres des autres pour peut-être occulter ses propres démons. Il évite soigneusement de regarder en face la mort de sa femme, décédée dans un accident de voiture, laissant ainsi dans le déni leur fils, Lazare, 8 ans, un enfant plus mature que les autres. Heureusement, Lazare peut compter sur Paul, son meilleur ami.

Dans ce roman rayonnant, Sauveur réussit même l'exploit de rassurer le lecteur : oui la vie n'est pas facile, oui l'enfance est semée d'embuches, et l'adolescence de piques acérées, oui les parents peuvent être toxiques, mais il existe des personnes bienveillantes capables de nous aider, de nous aimer pour surpasser les épreuves. Il existe de belles personnes. Sauveur nous redonne foi en l'humanité. Et nous excuse d'être faillibles...

 

Présentation de l'éditeur : Ecole des Loisirs

D'autres avis : Repéré chez Noukette et Jérôme ; Eva ; Nadège ; Cathulu

 

Sauveur et fils, Marie-Aude Murail, Ecole des Loisirs, medium, avril 2016, 17 euros

Bonne nouvelle il sort en poche mi mai !

A partir de 13 ans

Publié dans Jeunesse Roman

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Le rêve le plus doux de Doris LESSING

Publié le par Hélène

"Nous portons en nous-mêmes des modèles invisibles aussi inéluctablement personnels que nos empreintes digitales, mais nous ne n'en prenons conscience qu'après avoir regardé autour de nous et reconnu leurs reflets." p. 72

L'action se concentre sur la famille Lennox, principalement dans les années 60, à l'esprit très contrasté. La première partie, assez statique, se déroule toujours dans la maison, autour de la table où se rassemble la famille de Frances et les êtres qu"elle accueille, Rose, Jil, Geoffrey et les autres qui s'ajoutent au fil du temps, partent, reviennent, disparaissent. Mère de substitution, Frances s'occupe de son petit monde avec bienveillance et dévouement. Les apparitions éclair de Johnny le père de ses deux garçons Colin et Andrew, sont souvent le prétexte à des débats passionnés autour des questions politiques, Johnny défendant le communisme avec virulence, quitte à fermer les yeux sur certaines exactions. 

Cette première partie du roman s'axe sur une réflexion sur ces jeunes désoeuvrés qui subissent l'influence du communisme et fustigent le capitalisme, cette génération qui attend aussi "tranquillement que cela lui tombe tout cuit dans le bec sans qu'elle ait à travailler." Pour Julia, la mère de Johnny, cette errance des jeunes est le résultat des deux guerres après lesquelles plus rien ne peut être normal.

La deuxième partie du roman suit Sylvia, une des protégées de Frances, en Afrique, dans un pays imaginaire le Zimlie qui sort d'une guerre et est fortement touché par le sida. Sylvia devenue médecin se bat pour ses idées dans un pays qui reste dévasté.

Ce que j'ai moins aimé : La première partie assez statique, toujours dans la maison, l'action n'avance pas, les scènes se répètent et les situations similaires deviennent lassantes à la longue.

 

Présentation de l'éditeur : J'ai Lu

Du même auteur : Nouvelles africaines tome 1

 

Le rêve le plus doux, Doris Lessing, traduit par Isabelle Delord-Philippe, mars 2008, 8.20 euros

 

Le mois anglais consacré aujourd'hui à Doris Lessing

Publié dans Littérature Europe

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Les huit montagnes de Paolo COGNETTI

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥ ♥

"C'est dans le souvenir que se trouve le plus beau refuge"

Pietro est un enfant de la ville qui passe chaque été à la montagne. Il arpente les sentiers aux côtés de son père, un de ces êtres taiseux qui se livrent parfois au détour d'une promenade. Ses parents décident de s'établir chaque été à Grana, un petit village de la vallée d'Aoste.  Dans ce cocon naturel, à onze ans, Pietro rencontre Bruno, un montagnard de souche qui l'initie aux secrets de sa montagne. Les deux enfants deviennent amis, reliés par cet amour inconditionnel pour les torrents, les alpages et les glaciers.

Plusieurs années plus tard, les liens entre le père et le fils se sont distendus, Pietro a erré entre ville et voyage, et c'est auprès de Bruno qu'il vient se ressourcer pour, peut-être, se réconcilier avec le souvenir de ce père disparu, car "Il n'y a rien de mieux que la montagne pour se souvenir."

Il marche alors littéralement sur les traces de son père, arpentant une montagne que déserte un par un les hommes, descendant dans la vallée pour s'établir. Dans cette atmosphère aérienne, les montagnes apparaissent comme une évidence pour certains.

Avec humanité et bienveillance, Paolo Cognetti nous parle de la vie comme elle va, cahin caha, il évoque les choix quelquefois aléatoires, et derrière la façade qui se fissure, la vie, la passion, l'identité. Bruno le souligne à plusieurs reprises il n'aurait pas pu être quelqu'un d'autre qu'un montagnard, il ne pouvait pas aller à l'encontre de ce qu'il était, profondément. En cet être de la montagne, une once d'absolu irradie, en lui rayonne la pureté et l'intégrité inhérente à ces paysages qui ne trichent pas. La montagne se révèle alors comme un apprentissage, à chacun de trouver sa hauteur, l'endroit précis où il souhaite s'établir et vivre, pleinement, tranquillement.

 

Présentation de l'éditeur : Stock

Du même auteur : Le garçon sauvage

D'autres avis : Nicole ; Télérama ; Audrey

Vous aimerez aussi : Ma rencontre avec l'auteur

 

Les huit montagnes, Paolo Cognetti, traduit de l'italien par Anita Rochedy, Stock, 298 p., 21.50 euros

Merci à l'éditeur.

 

Publié dans Littérature Europe

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Pour Primo Levi de Mario RIGONI STERN

Publié le par Hélène

♥ ♥

Ce court recueil rassemble trois petites nouvelles en honneur de Primo Levi et d'un autre ami cher à l'auteur : Nuto Revelli. Ils sont trois garçons d'une vingtaine d'année en 1939 avec de nombreux points communs : l'expérience de la guerre, les camps pour Primo Levi et Rigoni Stern, la libération et les pérégrinations multiples avant le retour au pays. Tous trois éprouvent aussi une attirance magique pour la montagne. Mais surtout, tous trois ont choisi de témoigner, parce que l'écriture s'est imposée à eux comme une nécessité.

Pour eux écrire signifie continuer à résister "en s'acharnant pourtant à préserver, jusqu'à la limite de ses forces, l'étincelle sans cesse remise en cause d'une incertaine espérance." (Post-face de François Maspero)

Leur témoignage résonne dans l'âme du lecteur :

"Dans la présentation de l'édition scolaire, Primo écrit : "Je serais heureux si je sais que ne serait-ce qu'un seul de mes nouveaux lecteurs a compris combien il est dangereux, le chemin qui part du fanatisme nationaliste et de l'abdication de la raison." p. 24

Les nouvelles insistent sur la force de l'amitié reliant les hommes, la solidarité, l'amour du prochain qui sauve l'âme. Les pages de Mario Rigoni Stern rendent magnifiquement hommage à ses amis de coeur, sa ferveur leur redonne vie...

Ce que j'ai moins aimé : J'avais eu ce livre en cadeau, "pour célébrer le dixième anniversaire de La Fosse aux Ours, ce livre nous été gracieusement offert pour l'achat de deux livres Fosse aux ours". Aujourd'hui il est en vente 8 euros, ce que je trouve excessif pour un petit livre qui fait 49 pages, 59 si on compte la postface !

 

Du même auteur : Les saisons de Giacomo ; Hommes, bois, abeilles 

De Primo Levi : Si c'est un homme ; La Trêve

De Benvenuto Revelli : Le monde des vaincus ; Le disparu de Marburg

 

Pour Primo Levi, Mario Rigoni Stern, Traduction et postface de François Maspero, La fosse aux ours, 2012, 8 euros

Un mois un éditeur : La Fosse aux ours

 

 

 

La bonne Nouvelle du lundi chez Martine

Publié dans Littérature Europe

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Le chardonneret de Donna TARTT

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥

"L'art et rien que l'art, nous avons l'art pour ne point mourir de la vérité." NIETZSCHE

Théo Decker est un jeune new-yorkais de 13 ans qui vit seul avec sa mère. Ce jour-là, après une visite au collège, ils se rendent au musée, et la vie du jeune garçon bascule : un attentat touche une partie du Metropolitan Museum of Art et sa mère meurt dans l'explosion. Reclus dans une pièce au milieu des décombres, il fait la connaissance d'un vieil antiquaire mourant qui le supplie d'accepter une bague et de sauver des décombre une peinture, Le chardonneret de Carel Fabritius. Il lui donne aussi une adresse où se rendre ensuite.

Désœuvré, le jeune Théo s'installe après l'attentat chez les Barbour, son père restant introuvable et ses grands parents répondant aux abonnés absents. Il se décide à se rendre à l'adresse indiquée par le vieil homme et rencontre alors un antiquaire qui bouleversera sa vie. Par la suite son destin suivra des méandres  : des revers de Las Vegas au monde des antiquaires de New-York en passant par Amsterdam, il apprend "l'art de bien jouer avec une mauvaise donne" comme lui a appris son père, l'illusion devenant son credo.

Ce roman de plus de 800 pages est foisonnant, entrainant son lecteur sur des chemins divers : derrière le roman d'apprentissage, se cache toute une réflexion sur le bien, le mal et sur le monde de l'art. "Le bien ne peut-il pas pénétrer parfois par de drôles de portes dérobées ?" Où le mèneront les routes tortueuses embrumées par les drogues empruntées par Théo ? Incidemment, on se surprend à s'attacher à ce jeune homme et à ses pas dans le monde de l'art, incidemment, on se surprend à avancer avec plaisir dans les 800 pages, et la dernière page refermée, incidemment, on regrette presque d'avoir fini l'histoire trop tôt, d'autant plus que la conclusion, très proustienne, éclaire le roman d'un nouvel aura. On comprend alors que seul l'art est immortel, et que tout le sens de la vie tient peut-être finalement dans l'amour des belles choses et dans le rôle que chacun peut jouer pour préserver et faire perdurer ces joyaux.

Et un roman qui offre un sens à la vie n'est pas à négliger !

 

Présentation de l'éditeur : Pocket

Du même auteur : Le maître des illusions

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Dysfonctionnelle de AXL CENDRES

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥

"Même avec une chose que tout le monde croit perdue, on peut faire quelque chose de merveilleux."

Fidèle, Fifi ou Bouboule appartient à une famille qu'elle qualifie de "dysfonctionnelle" : son père fait des séjours réguliers en prison car se trouve un peu trop souvent "au mauvais moment au mauvais endroit", sa mère rescapée des camps effectue des séjours réguliers en maison de repos, si bien que Fifi évolue dans un milieu mouvant, entourée de ses frères et sœurs : Grégorio qui aime un peu trop à la bagarre, Alyson, jolie fille qui aime les mauvais garçons, Dalida qui se sent différente et peu à sa place dans cette famille, Maryline, la sœur dont elle se sent proche, JR, Le James Dean kabyle, et Jésus le divin enfant. Dans le "bar du bout du monde" tenu par son père, havre de paix, les enfants grandissent malgré tout, aux côtés de la grand-mère Zaza et de l'oncle fidèle. Dotée d'une mémoire photographique, Fifi est envoyée dans un lycée des beaux quartiers et là, découvre l'amour...

Certes cette famille est atypique, mais le portrait de la famille de Sarah, issue des beaux quartiers avec un père médecin est aussi éloquent, là aussi règnent incompréhension, disputes, et secrets. Toutes les familles se ressemblent, et il faut réussir à extraire du magma du quotidien pas toujours drôle un peu de magie, des moments de communion, d'harmonie, des moments parfaits qui restent à jamais gravés dans les cœurs. Chez Fifi, ça ne marche pas toujours comme il faudrait, mais "ça tient debout", tant l'être humain est capable de résilience, même au milieu du chaos. Axl Cendres nous offre ici un beau portrait d'adolescente, nimbée d'humanité.

Présentation de l'éditeur : Editions Sarbacane

Publié dans Jeunesse Roman

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Déception et abandon du mois

Publié le par Hélène

Roald DAHL Moi boy, souvenirs d'enfance

Roald Dahl raconte ses années d'enfance, les différentes écoles fréquentées, mettant en avant quelques anecdotes marquantes. Dans chaque établissement fréquenté, il insiste sur  les maltraitances rencontrées : « J’ai été horrifié par ce privilège accordé aux maîtres et aux grands élèves d’infliger des blessures, parfois très graves, à de jeunes enfants. Je ne pouvais pas m’y habituer. Je n’ai jamais pu. » p 117

J'ai de fait regretté qu'il n'insiste pas plus sur ses amitiés, sur sa famille. Je m'attendais de plus à un récit plus humoristique que cela.

Lu par un de mes élèves de 3ème qui a bien accroché au début, s'identifiant au narrateur, mais finalement à la moitié du livre, a perdu le fil.

François PLACE Le vieux fou de dessin

Quatrième de couverture : Il était une fois au Japon, au cœur du XIXe siècle, un petit vendeur des rues, nommé Tojiro. Le jeune garçon rencontre un jour un curieux vieil homme. C'est Katsushika Hokusai, le vieillard fou de dessin, le plus grand artiste japonais, le maître des estampes, l'inventeur des mangas. Fasciné par son talent, Tojiro devient son ami et son apprenti, et le suit dans son atelier…

Mon avis : je trouvais intéressant de faire découvrir Hokusaï aux plus jeunes, mais ce petit roman est un peu trop expéditif à mon goût, ne permettant pas de s'attacher au narrateur ni au peintre.

Mon élève, en 3ème également, a eu la même impression. Passionnée par le dessin de mangas, elle a été déçue. Néanmoins, cela a eu le mérite de lui faire découvrir Hokusaï qu'elle ne connaissait pas du tout. Le livre est plus adapté à un enfant de 9 ans qu'à une adolescente de 14 ans.

Truites et cie et John GIERACH

Les chroniques de ce recueil nous immerge dans le monde des pêcheurs à la recherche du meilleur emplacement, de la meilleur mouche, technique. De fait, si on ne s'intéresse pas vraiment à la pêche il est difficile de se concentrer sur ces histoires. Il me semble que j'avais déjà tenté la lecture de cet auteur avec le même résultat (ICI) : un manque d'intérêt prégnant !

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Une bouche sans personne de Gilles MARCHAND

Publié le par Hélène

"La vie n'est ni belle ni laide, je trouve plutôt qu'elle est originale."

Le narrateur est comptable dans une entreprise lambda et passe sa journée caché dans ses chiffres à éviter toute velléité de contact avec ses collègues. Il retrouve chaque soir dans un café ceux qu'il considère comme ses amis : Sam, Thomas et Lisa, la serveuse. Il connait peu leur vie, mais a plaisir à les côtoyer tous les soirs. Un jour, il décide de se livrer davantage et de raconter peu à peu pourquoi il ne quitte jamais l'écharpe qui cache le bas de son visage. Il évoque alors son grand-père, Pierre-Jean, personnage atypique. Ce grand père "rêveur fantaisiste" racontait des histoires pour faire rire les jeunes femmes et rêver les petits garçons et souhaitait préserver son petit-fils du drame de son enfance.

"La vie est trop courte pour s'accommoder de tout ce qui va de travers. Il ne faut pas hésiter à rêver, les rêves c'est pas fait pour les chiens. Et c'est gratuit."

Petit à petit, sous la férule de son grand-père, le narrateur affronte ses souvenirs pour s'en affranchir, mais lui aussi décide de ne pas s'encombrer de la réalité, ni de la crédibilité, il transforme progressivement son présent pour oublier son passé "Il m'avait expliqué que si j'estimais que le monde n'était pas assez beau et que je n'étais pas en mesure de le changer, personne ne pourrait jamais m'empêcher de l'imaginer tel que je voudrais qu'il soit."

Ce beau conte aux accents fantasques nous emporte aux confins de la réalité, là où tout est plus supportable et admirable...

 

Présentation de l'éditeur : Aux forges de Vulcain ; Points

D'autres avis : Encensé par Noukette dont le billet est même plus beau que le roman ! ; Antigone 

 

Une bouche sans personne, Gilles Marchand, Points, 2016, 259 p., 7.40 euros

 

Sélectionné pour le prix du meilleur roman Points

 

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Une femme au téléphone de Carole FIVES

Publié le par Hélène

Charlène 62 ans est une mère qui trompe sa solitude en passant des appels à sa fille. Appels tour à tour enjoués, culpabilisants, désespérés ou excessifs. Pour cette femme cancéreuse, bipolaire à ses heures, ces appels sont le moyen de se raconter, de se livrer, de partager ses aventures liées à ses rencontres sur des sites de rencontre, de parler de son quotidien entre grisaille et rose bonbon.

"Meetic ? Ah non j'ai arrêté, c'est toujours les mêmes têtes. Ceux qui vont sur Meetic, c'est comme ceux qui vont chez Ikea, ils cherchent des choses standard. Et moi je suis pas standard." p. 15

Après sa visite chez un psy, elle commente : "Elle m'a dit tout ce que mon père m'avait fait, enfin, elle savait tout. C'était très dur, je suis complètement détruite. Maintenant, y a plus qu'à reconstruire. Un nouveau départ. Le problème c'est que le prochain rendez-vous c'est pas avant septembre. Dans deux mois. Je les passe comment juillet-août moi ? Je me colle un panneau "en chantier" ? " p. 44

Elle en profite pour insidieusement envoyer des piques à sa fille, dans une demande constante d'attention, d'amour conjuguée à une toxicité inébranlable.

"Comment ça, on ne fait pas des enfants pour les garder pour soi ? Ce sont des phrases toutes faites ça, qu'on dit quand on n'a pas de coeur. La vérité c'est qu'on fait les enfants pour soi, sinon c'est trop égoïste." p. 76

Au détour de ses critiques, elle distille toutefois des conseils avisés :

"Des disputes ? Mais il faut faire des efforts pour garder un homme voyons, ça ne va pas de soi. Mets-toi à la place de ce pauvre garçon, tu ne repasses pas, tu ne cuisines pas, tu vis dans un foutoir monstrueux, quel avantage a-t-il à vivre avec toi ? Maintenant que vous attendez cet enfant, tu ne peux plus tout envoyer bouler comme avant. Il faut mettre de l'eau dans son vin, bien sûr la vie à deux ce n'est pas toujours drôle, on préfèrerait rester seule bien tranquille, profiter de sa maison, manger une connerie quand on en a envie, regarder le programme qu'on préfère à la télé... Le couple, c'est dur, mais il faut s'accrocher, pour ne pas finir toute seule." p. 83

A travers ce portrait Carole Fives nous offre un texte drôle, intelligent, jubilatoire et profond à la fois, une vraie réussite !

 

Présentation de l'éditeur : Gallimard

Du même auteur :Quand nous serons heureux ; C'est dimanche et je n'y suis pour rien

D'autres avis : Télérama

 

Une femme au téléphone, Carole Fives, L'arbalète Gallimard, janvier 2017, 112 p., 14 euros

 

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La vie devant soi de Romain GARY (Emile AJAR)

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥ ♥

"Dans la vie c'est toujours la panique."

Quartier de Belleville, années 70. Momo, 10 ans vit chez Madame Rosa, une ancienne prostituée qui a créé « une pension sans famille pour les gosses qui sont nés de travers », c'est à dire qu'elle accueille des enfants de prostituées pour les protéger de l'assistance publique ou des "proxinètes", comme dit Momo. Le jeune garçon raconte son quotidien à hauteur d'enfant émaillant son récit de réflexions sur la vie :

"Les gens tiennent à la vie plus qu'à n'importe quoi, c'est même marrant quand on pense à toutes les belles choses qu'il y a dans le monde."

"La vie fait vivre les gens sans faire tellement attention à ce qui leur arrive."

Si Momo a la vie devant lui, Madame Rosa, quant à elle, est hantée par ses souvenirs d'Auschwitz, se laissant gagner peu à peu par la maladie Si son médecin insiste pour qu'elle soit hospitalisée, elle le refuse catégoriquement, soutenue par Momo : 

"Moi je trouve qu'il n'y a pas plus dégueulasse que d'enfoncer la vie de force dans la gorge des gens qui ne peuvent pas se défendre et qui ne veulent plus servir."

L'enfance, la mort, la vieillesse, le milieu des prostituées et des émigrés s'entremêlent savamment pour former une oeuvre atypique, pimentée de trouvailles langagières hors norme, drôles et décalées. Le délabrement de Madame Rosa se niche au coeur du roman, sa dignité lui criant de ne pas finir à l'hôpital, reliée à des tubes, comme un simple légume. L'amour inconditionnel de Momo l'aidera à fuir cet hôpital synonyme de déchéance. 

L'amour fonde le monde de l'enfant et lui permet d'avancer en pensant qu'il a la vie devant soi. Même si la vie est cruelle, son humour et son innocence lui servent de bouclier. 

Les derniers mots du roman sonnent comme une promesse : "Il faut aimer". 

Pour la petite histoire  Romain Gary a reçu le prix Goncourt pour ce roman, sous le nom d'emprunt d'Emile Ajar. En effet Romain Gary s'est joué du Goncourt puisque le règlement n'autorise pas un auteur à recevoir le prestigieux prix deux fois, or il l'avait déjà obtenu en 1956 pour Les Racines du Ciel. Il voulait par cette mystification retrouver une certaine liberté d'expression, loin des critiques. L'affaire fut révélée à la mort de l'auteur en 1980. 

 

 

Présentation de l'éditeur : Folio

D'autres avis : A propos des livres  ; Manou 

 

La vie devant soi, Emile Ajar, Folio, 7.70 euros

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