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1Q84 de Haruki MURAKAMI

Publié le par Hélène

1q841 

♥ ♥ ♥ 

« Le romancier n’est pas quelqu’un qui résout les problèmes. C’est quelqu’un qui pose les questions. » (p.456)

 

L’auteur :

Né à Kyoto en 1949 et élevé à Kobe, Haruki Murakami a étudié le théâtre et le cinéma à l'université Waseda, avant d'ouvrir un club de jazz à Tokyo en 1974. Son premier roman Écoute le chant du vent (1979), un titre emprunté à Truman Capote, lui a valu le prix Gunzo et un succès immédiat. Suivront La Course au mouton sauvage, La Fin des temps, La Ballade de l'impossible, Danse, Danse, Danse et L'éléphant s'évapore (Seuil, 1990, 92, 94, 95 et 98). Exilé en Grèce en 1988, en Italie, puis aux États-Unis, ou il écrit ses Chroniques de l'oiseau à ressort (Seuil, 2001) et Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil (Belfond, 2002 ; 10/18, 2003), il rentre au Japon en 1995, écrit deux livres de non-fiction sur le séisme de Kobe et l'attentat de la secte Aum, un recueil de nouvelles, Après le tremblement de terre (10/18, 2002), Les Amants du spoutnik (Belfond, 2003 ; 10/18, 2004) et le superbe Kafka sur le rivage (Belfond, 2006). Plusieurs fois favori pour le Nobel de littérature, Haruki Murakami a reçu récemment le prestigieux Yomiuri Prize et le prix Kafka 2006.

 

L’histoire :

Aomamé et Tengo, 29 ans tous deux, mènent chacun de leur côté leur vie, leurs amours, leurs activités. Tueuse professionnelle, Aomamé accomplit des missions pour le compte d’une vieille dame. Tengo lui est un génie des maths, apprenti-écrivain et nègre pour un éditeur qui lui demande de réécrire l’autobiographie d’une jeune fille bien mystérieuse.  

Les deux jeunes gens sont destinés à se retrouver mais où ? Quand ? En 1984 ? Dans 1Q84 ? Dans cette vie ? Dans la mort ?  

 

Ce que j’ai aimé :

Pour ceux qui ne connaissent pas encore Haruki Murakami vous découvrirez en commençant ces pages l'attraction qui sévit presque à notre insu et réussit à nous aimanter, sans savoir précisément à quoi cela tient. Peut-être au style, facile, coulant, précis qui fait mouche à chaque phrase. Ou à l’intrigue, mystérieuse et opaque, qui sème judicieusement indices, fausses pistes, nouveau mystère sorti des ténèbres et qui aiguillonnent insidieusement la curiosité du lecteur. Ou encore aux idées, aux questions incessantes sur le monde que pose l’auteur, sans jamais prétendre y répondre.

« Monsieur Komatsu est possédé par la littérature. Les gens comme lui cherchent à découvrir, au moins une fois dans leur vie, quelque chose de véritable, d’authentique. Ensuite, ils ont envie de l’offrir respectueusement au monde. » (p. 213)

 1Q84 est un roman complet qui oscille savamment entre profondeur et futilité : quand par exemple Aonamé apprend à ses élèvres les rudiments de l’autodéfense, on ne sait si l’on doit sourire de ses techniques pour le moins radicales, ou s’inquiéter car, en creux, est pointée l’impuissance des femmes face à la force et à la folie masculine :

« La plupart des hommes sont plus grands et plus forts. Une attaque éclair aux testicules, pour une femme, c’est la seule chance de gagner. C’est bien ce que Mao Tsétoung a dit : cherchez et trouvez le point faible de votre adversaire, prenez-le par surprise et écrasez-le. » (p. 232)

De même on ignore quel sort réserver à ces mystérieux Little People : sont-ils des lutins issus des  romans ancrés dans les mondes surnaturels, ou des allégories de forces sous-jacentes tapies sous une apparente réalité qui vacille ?

 « Que cela me plaise ou non, je me trouve à présent dans l’année 1Q84. L’année 1984 que je connaissais n’existe plus nulle part. Je suis maintenant en 1Q84. L’air a changé, le paysage a changé. Il faut que je m’acclimate le mieux possible à ce monde lourd d’interrogations. Comme un animal lâché dans une forêt inconnue. Pour survivre et assurer ma sauvegarde, je dois en comprendre au plus tôt les règles et m’y adapter. » (p. 200)

« Dans le roman de George Orwell, 1984, comme vous le savez, le personnage de Big Brother est représenté sous la forme d’un dictateur. Il s’agissait à l’époque pour l’auteur d’une allégorie du stalinisme, mais ensuite le terme de Big Brother est devenu le symbole de toute société totalitaire. Il faut porter cela au crédit d’Orwell. Aujourd’hui, alors que nous sommes vraiment en 1984, Big Brother est tellement célèbre qu’il en est devenu trop évident. S’il se manifestait devant nous, nous dirions en le montrant du doigt : « Attention ! prenez garde, lui, là, c’est Big Brother ! » Autrement dit, Big Brother n’a plus sa place sur la scène de notre monde. Ce sont ces Little People qui ont fait leur  entrée. Ne pensez-vous pas que le contraste est extrêmement significatif ? (…) Les Little People sont des êtres invisibles. Nous ne savons pas s’ils sont bons ou mauvais, s’ils possèdent une substance ou non. Pourtant, constamment, ils semblent creuser et démolir le sol sous nos pieds. » (p. 409)

1Q84 est un roman puissant qui repousse les frontières de la réalité pour questionner un monde hermétique aux questionnements des humains. Un roman peuplé de non-dits qu’il s’agit de déchiffrer pour s’adapter au roman comme au monde…

 

Ce que j’ai moins aimé :

-          La perspective de devoir attendre encore jusqu’au mois de mars pour le tome 3 a tendance à me déplaire, en attendant je vais me consoler avec le tome 2 et je si vraiment le suspense est trop prenant, je n’aurai plus qu’à apprendre le japonais…

 

Premières phrases :

 « La radio du taxi diffusait une émission de musique classique en stéréo. C'était la Sinfonietta de Janacek. Etait-ce un morceau approprié quand on est coincé dans des embouteillages ? Ce serait trop dire. D'ailleurs, le chauffeur lui-même ne semblait pas y prêter une oreille attentive. L'homme, d'un âge moyen, se contentait de contempler l'alignement sans fin des voitures devant lui, la bouche serrée, tel un vieux marin aguerri, debout à la proue de son bateau, appliqué à déchiffrer quelque sinistre pressentiment dans la jonction des courants marins. Aomamé, profondément enfoncée dans le siège arrière du véhicule, écoutait, les yeux mi-clos. »

 

D‘autres avis :

 Babélio

 Presse : Télérama

Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Autoportrait de l’auteur en coureur de fond de Haruki MURAKAMI

Millénium de Stieg LARSSON

 

1Q84, Livre I, Avril-juin, Haruki MUAKAMI, Traduit du japonais par Hélène Morita, Belfond, août 2011, 533 p., 23 euros

 

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Publié dans Littérature Asie

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Une bonne épouse indienne de Anne CHERIAN

Publié le par Hélène

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L’auteur :

Anne Cherian est née en Inde et a étudié aux universités de Bombay, de Bangalore et, finalement, de Berkeley en Californie. Elle vit aujourd’hui à Los Angeles. Elle signe là son premier roman.

 

L’histoire :

A la base de la vie de famille en Inde, il y a les mariages arrangés. C’est une des traditions à peu près immuables encore aujourd’hui maintenue par les mères, les grand-mères, les tantes et les belles-mères, très soigneusement à l’insu ou presque des principaux intéressés.

     Neel a beau avoir étudié aux Etats-Unis et être devenu un brillant anesthésiste dans le plus grand hôpital de San Francisco, il n’y échappera pas — malgré son passeport américain et sa pétulante maîtresse californienne. Au cours d’un bref voyage en Inde, le piège se referme sur lui et le voilà marié à Leila qu’il n’a vue qu’une fois.
Certes, elle est belle, douce, cultivée, intelligente — bien plus qu’il ne l’imagine — mais il n’en veut pas. Obligé de la ramener avec lui à San Francisco, il va lui mener la vie dure, avec comme seule idée de s’en débarrasser.

 

Ce que j’ai aimé :

-          C’est une lecture facile, relativement dépaysante, qui  porte un regard neuf sur les mariages arrangés.

 

Ce que j’ai moins aimé :

Je dois avouer que j’ai lu de nombreux passages en diagonale tant ils débordaient de clichés. J’ai trouvé ce roman terriblement attendu, tout est calibré, aucune surprise ne se dévoile au hasard d’une page, et les états d’âme de Neel et de sa belle épouse indienne ont fini par me lasser.

La conclusion de cette cruche chère Leila est de plus très discutable : il vaut mieux faire confiance à sa famille qui nous connait bien pour nous choisir un mari, plutôt que d’opter pour quelqu’un qui ne partage ni notre culture, ni notre situation  sociale, ni notre éducation… Terriblement réducteur et appauvrissant à mon avis (et dangereux quand on sait qu'à une époque Jean-Luc Delarue était considéré comme le gendre idéal pour la ménagère de moins de 50 ans...)

 

Premières phrases :

« Le billet d’avion et l’aérogramme arrivèrent le même jour. L’équipe de nettoyage avait déposé le courrier en une pile bien nette sur le plan de travail de la cuisine. Comme toujours, l’appartement était impeccable, et l’odeur âcre et tenace du produit désinfectant rappelait à Neel l’hôpital. »

 

Vous aimerez aussi :

Quand viennent les cyclones de Anita NAIR

 

Une bonne épouse indienne, Anne Cherian, Traduit de l’anglais par Josette Chicheportiche, Mercure de France, 26,50 €

POCHE : Une bonne épouse indienne, Anne Cherian, Traduit de l’anglais par Josette Chicheportiche, Folio, 7.80 euros

Publié dans Littérature Asie

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Itinéraire d’enfance de DUONG THU HUONG

Publié le par Hélène

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 ♥ ♥ 

 « L’homme doit lutter et gagner. » (p. 338)

  

L’auteur :

 

Née en 1947 au Viêtnam, Duong Thu Huong, pour avoir défendu ses convictions démocratiques, a été emprisonnée en 1991. Elle a vécu en résidence surveillée dans son pays jusqu'en janvier 2006, date de son arrivée à Paris pour la sortie de Terre des oublis (Sabine Wespieser éditeur), dont le succès l'a incitée à rester en France pour se consacrer à l'écriture.

 

L’histoire :

 

Bê a douze ans, sa vie dans le bourg de Rêu s'organise entre sa mère, ses amis, ses voisins et ses professeurs. Son père, soldat, est en garnison à la frontière nord. Mais parce que son caractère est déjà bien trempé et qu'elle ne supporte pas l'injustice, elle prend la défense d'une de ses camarades abusée par un professeur, et se voit brutalement exclue de l'école. Révoltée, elle s'enfuit de chez elle, avec sa meilleure amie, pour rejoindre son père. Commence alors un étonnant périple : les deux adolescentes, livrées à elles-mêmes, sans un sou en poche, voyagent en train, à pied ou en autobus, à travers les montagnes du nord, peuplées par les minorités ethniques. Elles finiront par arriver à destination, après des aventures palpitantes et souvent cocasses : Bê la meneuse, non contente d'avoir travaillé dans une auberge avec son amie, tué le cochon, participé à la chasse au tigre, va également confondre un sorcier charlatan et jouer les infirmières de fortune. Au fil des mois et des rencontres, l'adolescente grandit, mûrit, et fait l'apprentissage de la liberté. Duong Thu Huong avoue avoir donné beaucoup d'elle-même à son héroïne...

 

Ce que j’ai aimé :

 

-          Itinéraire d’enfance rend hommage à la fraîcheur de l’enfance entre désobéissance, rencontres marquantes,  aventures (dont la mythique chasse au tigre) mais aussi injustices et maltraitances.

 

-          La jeune Bê est une enfant optimiste, qui respire la joie de vivre et ses aventures lui ressemblent, même si elle ne  nous épargne pas la pauvreté de ces familles  car « Là où règne l’ignorance, règne aussi la misère. » (p.317) Elle va faire son apprentissage de la vie au fil de ses rencontres et expériences :

 

« Elle m’a fait comprendre que chaque être humain était un mystère dont on parvient rarement à lever le voile et qu’on n’a souvent pas assez de toute une vie pour saisir un seul aspect de la personnalité de quelqu’un. » (p. 232)

 

« Vivre, c’est surmonter les malheurs, la souffrance et l’injustice pour atteindre l’objectif qu’on s’est fixé. » (p. 343)

 

-          C’est un roman facile à lire, agrémenté de petits contes, de croyances populaires, légendes et superstitions…

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Peut-être un peu trop léger 

 

Premières phrases :

 

« J’ai douze ans. Nous habitons le petit bourg de Rêu, ma mère et moi. On y trouve encore un quartier de maisons anciennes, toutes construites sur le même modèle : un bâtiment central soutenu par des colonnes de bois noir poli, quelques arbres fruitiers dans la cour et un grand jardin entouré d’un muret souvent envahi d’une mousse verte. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Du même auteur : Terre des oublis

Autre : Ciel bleu : une enfance dans le Haut Altaï de Galsan TSCHINAG

 

D’autres avis :

 

Stéphie, Schlabaya

 

Itinéraire d’enfance, Duong Thu Huong, roman traduit du vietnamien par Phuong Dang Tran, Sabine Wespieser, 24 euros

 

POCHE : Itinéraire d’enfance, Duong Thu Huong, roman traduit du vietnamien par Phuong Dang Tran, Le livre de poche, 346 p., 6.50 euros

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Ikebukuro West Gate Park de Ira ISHIDA

Publié le par Hélène

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♥ ♥ 

 

L’auteur :

 

Ishida Ira est un auteur japonais. En 1997, le premier volume d’Ikebukuro West Gate Park se voit décerner le prix Orû Yomimono, grand prix de littérature policière. Depuis, l’auteur a publié de nombreux romans dont les deux volumes suivants d’Ikebukuro West Gate Park, et obtenu de nombreux autres prix littéraires.

 

L’histoire :

 

Bienvenue à Ikebukuro Park. Dans ce square ouvert aux aventuriers urbains, à la sortie ouest de la gare d’Ikebukuro, se croisent les filles en minijupe et les musiciens en herbe jusque tard dans la nuit. C’est là que Makoto et sa bande d’amis ont établi leur QG. Makoto a dix-neuf ans, il habite seul avec sa mère. C’est un trouble shooter, un « solutionneur d’embrouilles ». Des embrouilles, il n’en manque pas dans ce quartier où se rencontrent gamins à la dérive, yakuzas, filles perdues et clandestins dans le Japon de l’envers. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

-          Ikebukuro West Gate Park est composé de plusieurs histoires qui ont toutes en commun le jeune Makoto, un jeune homme satellite, vivant comme à l’extérieur du monde qu’il décrit, et aimant porter secours à ceux qui réclament son aide.

 

Il nous conte ses aventures dans un Japon moderne, dans une ville gangrenée par les luttes de clans, et hantée par des personnes pauvres, rongées par la solitude. La lumière qui émane de ce roman est comme crépusculaire,  et l’on ne sait si tout va sombrer dans la nuit ou si un autre jour plus lumineux va s’épanouir. Makoto est une sorte d’ange gardien des habitants, un justicier intelligent qui fait le lien entre les solitudes.

 

« Un petit problème, et hop on nouait des liens, on recevait et on donnait des étincelles qu’on n’oublierait pas. » (p. 149)

 

« Ne pas considérer les êtres humains en bloc, ne pas les réduire à des statistiques. Les règles de base étaient les mêmes, qu’il s’agisse de pondre une chronique, d’écouter les gens raconter leur histoire, ou même de traquer un criminel complètement taré. » ( p. 262)

 

La pauvreté et son corollaire, le pouvoir destructeur de l’argent et du système économique sont des thèmes récurrents au fil des histoires :

 

 « Devenir adulte dans ce monde, c’est sans doute devenir le dernier client de l’histoire de l’humanité. Acheter sans cesse des choses, pour les balancer dans un cœur vide. Haïr les centres commerciaux, ne plus pouvoir supporter la solitude du shopping, et continuer à arpenter les mêmes allées lumineuses parce que vous n’avez nulle part ailleurs où aller. En écoutant le chant des sirènes qui s’élève de cet amoncellement de produits. » (p. 79)

 

Makoto est un être qui prône la simplicité, aussi bien dans ses relations avec les autres que dans son rapport au monde :

 

« Quand j’ai fini de tenir la boutique, je me rends seul au Square Ouest, là où les ormes commencent enfin à perdre leurs feuilles. Banc inconfortable, fontaine inutile, sculptures sans signification. Par-dessus le marché, un vent qui commence à se faire frisquet, et les super bruits de la ville. Et quand je lève les yeux, dans les interstices des immeubles, un ciel d’automne indéfiniment bleu.

C’est gratuit, offert à tout le monde. » (p. 298)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          J’ai été quelque peu lassée par le côté « super-héros » de Makoto, qui,  quoi qu’il advienne réussit toujours intelligemment à résoudre les intrigues qui se posent à lui. Je n’aurais peut-être pas dû lire les deux tomes à la suite…

 

Premières phrases :

 

« J’ai un autocollant de photomaton sous mon portable. Un autocollant défraîchi où on nous voit tous les cinq nous bousculer dans un cadre étroit. Le motif du fond ? Une jungle verte. Des singes vulgaires se trémoussent en quêtant une banane. Rien qui différencie leur monde du nôtre. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Park life de Shuichi YOSHIDA

 

Ikebukuro West Gate Park, ISHIDA Ira, traduit du japonais par Anne Bayard-Sakai, Picquier poche, 8.50 euros le tome I, 7 euros le tome II

 

Merci à Isabelle LACROZE des Editions Picquier.

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Autoportrait de l’auteur en coureur de fond de Haruki MURAKAMI

Publié le par Hélène

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 ♥ ♥ ♥

 

 « Se consumer au mieux à l’intérieur de ses limites individuelles, voilà le principe fondamental de la course, et c’est aussi une métaphore de la vie –et, pour moi, une métaphore de l’écriture. » (p. 106)

 

L’auteur :

 

Haruki Murakami est un écrivain japonais. Il dirige un club de jazz, avant d'enseigner à Princeton durant quatre années. Son premier livre - non traduit - Ecoute le chant du vent, en 1979, lui vaut le prix Gunzo. Expatrié en Grèce, en Italie puis aux Etats-Unis, il rédige Chroniques de l'oiseau à ressort' en 2001 et Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil en 2002. Suite au séisme de Kobe et à l'attentat de Tokyo en 1995, il décide de revenir s'installer au Japon. Il y écrit un recueil de nouvelles Après le tremblement de terre, puis Les Amants du Spoutnik en 2003. Son roman initiatique Kafka sur le rivage, sorti en 2006, l'inscrit définitivement parmi les grands de la littérature internationale. L'oeuvre d'Haruki Murakami oscille entre la pensée bouddhiste qui voit des répercussions à nos actions sur une échelle plus large et la chronique sociale dans un cadre fantastique.

 

L’histoire :

 

Le 1er avril 1978, Murakami décide de vendre son club de jazz pour écrire un roman. Assis à sa table, il fume soixante cigarettes par jour et commence à prendre du poids. S'impose alors la nécessité d'une discipline et de la pratique intensive de la course à pied.
Ténacité, capacité de concentration et talent : telles sont les qualités requises d'un romancier. La course à pied lui permet de cultiver sa patience, sa persévérance. Courir devient une métaphore de son travail d'écrivain.

Courir est aussi un moyen de mieux se connaître, de découvrir sa véritable nature. On se met à l'épreuve de la douleur, on surmonte la souffrance. Corps et esprit sont intrinsèquement liés.

Murakami court. Dix kilomètres par jour, six jours par semaine, un marathon par an. Il court en écoutant du rock, pour faire le vide, sans penser à la ligne d'arrivée. Comme la vie, la course ne tire pas son sens de la fin inéluctable qui lui est fixée…

 

Ce que j’ai aimé :

 

Haruki Murakami réussit le tour de force de convaincre en quelques mots le plus réticent des non-sportifs des bienfaits de la course à pied. Décrivant ceux qui aiment courir comme des personnes souhaitant  vivre leur vie « le plus pleinement possible » (p.105), il permet au plus commun des mortels de rejoindre une communauté qui semblait jusqu’ici fermée à ceux qui ne pratiquent pas ou très peu de sport… Il décrit très adroitement les processus psychiques, psychologiques qui régissent l’esprit durant l’épreuve, la tension omniprésente durant la course, l’effort constant nécessaire, les limites si prégnantes, puis le relâchement, le soulagement libérateur :

 

« A peu près à ce moment-là est née et a grossi en moi une nouvelle impression. Quelque chose que je décrirais ainsi : « J’ai accepté un défi risqué et j’ai trouvé en moi la force de m’y confronter. » Un bonheur personnel, mêlé de soulagement. Le soulagement plus fort sans doute que le bonheur. Comme si un nœud serré très fort, à l’intérieur de moi, se relâchait, peu à peu, un nœud dont je n’avais pas su, jusqu’alors, qu’il se trouvait là, en moi. » (p. 146)

 

 

-          Filant sa métaphore qui consiste à comparer la course à pied et l’écriture, il crée un parallèle lumineux entre les deux activités :

 

 « Pour moi, écrire des romans est fondamentalement un travail physique. L’écriture en soi est peut-être un travail mental. Mais mettre en forme un livre entier, le terminer, ressemble plus au travail manuel, physique. (…) Le processus tout entier –s’asseoir à sa table, focaliser son esprit à la manière d’un rayon laser, imaginer quelque chose qui surgisse d’un horizon vide, créer une histoire, choisir des mots justes, l’un après l’autre, conserver le flux de l’histoire sur les bons rails -, tout cela exige beaucoup plus d’énergie, durant une longue période, que la majorité des gens ne l’imaginent. » (p. 101)

 

« En ce qui me concerne, la plupart des techniques dont je me sers comme romancier proviennent de ce que j’ai appris en courant chaque matin. Tout naturellement, il s’agit de choses pratiques, physiques. Jusqu’où puis-je me pousser ? Jusqu’à quel point est-il bon de s’accorder du repos et à partir de quand ce repos devient –il trop important ? Jusqu’où une chose reste-t-elle pertinente et cohérente et à partir d’où devient-elle étriquée, bornée ? Jusqu’à quel degré dois-je prendre conscience du monde extérieur et jusqu’à quel degré est-il bon que je me concentre profondément sur mon monde intérieur ? Jusqu’à quel point dois-je être confiant en mes capacités ou douter de moi-même ? Je suis sûr que lorsque je suis devenu romancier, si je n’avais pas décidé de courir de longues distances, les livres que j’ai écrits auraient été extrêmement différents. » (p. 105)

 

-          C’est une profonde et belle réflexion sur la vie, sur sa vie que nous offre Haruki Murakami dans ce texte court très accessible à découvrir sans tarder.

 

« Rien dans le monde réel n’est aussi beau que les illusions d’un homme sur le point de perdre conscience. » (p. 86)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Rien, ce titre m’a donné envie de découvrir d’autres romans de cet auteur…

 

Premières phrases :

 

« Un aphorisme prétend qu’un vrai gentleman ne dit pas un mot des femmes avec qui il a rompu ou des impôts qu’il doit payer. Faux, archifaux ! Parce que moi, désolé, je ne suis pas comme ça. Il faudrait en tout cas ajouter une condition pour qu’il y ait un peu de vérité dans cette phrase : « Ne racontez à personne ce que vous faites pour rester en bonne santé. » J’ai le sentiment qu’un homme de qualité ne devrait pas se répandre en public sur les moyens qu’il utilise pour se maintenir en forme. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Le temps qui va, le temps qui vient de Hiromi KAWAKAMI

 

D’autres avis :

 

Blogs : Fred, Yueyin, Mango

Presse : Télérama

 

 

Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, Haruki MURAKAMI, traduit du japonais par Hélène Morita, Belfond, avril 2009, 180 p., 19.50 euros

 POCHE : Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, Haruki MURAKAMI, traduit du japonais par Hélène Morita, 10/18, février 2011, 220 p., 7.40 euros

 

Merci à Marie-Laure PASCAUD des Editions 10/18 pour m'avoir permis de découvrir cet auteur.

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Ru de Kim THUY

Publié le par Hélène

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♥ ♥ ♥

  « La vie est un combat où la tristesse entraîne la défaite. » (p. 22)

  

L’auteur :

 

Kim Thuy a quitté le Vietnam avec d’autres boat people à l’âge de dix ans. Elle vit à Montréal depuis une trentaine d’années. Son parcours est hors du commun. Elle confie avoir fait toutes sortes de métiers –couturière, interprète, avocate, restauratrice – avant de se lancer dans l’écriture (en français) de ce premier roman.

 

L’histoire :

 

Une femme voyage à travers le désordre des souvenirs : l'enfance dans sa cage d'or à Saigon, l'arrivée du communisme dans le Sud-Vietnam, la fuite dans le ventre d'un bateau au large du golfe de Siam, l'internement dans un camp de réfugiés en Malaisie, les premiers frissons dans le froid du Québec. Récit entre la guerre et la paix, 'Ru' dit le vide et le trop-plein, l'égarement et la beauté. De ce tumulte, des incidents tragicomiques, des objets ordinaires émergent comme autant de repères d'un parcours. En évoquant un bracelet en acrylique rempli de diamants, des bols bleus cerclés d'argent ou la puissance d'une odeur d'assouplissant, Kim Thuy restitue le Vietnam d'hier et d'aujourd'hui. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

-          La forme de ce court roman intensifie son propos : les chapitres sont courts, immédiatement évocateurs, l’intensité des souvenirs flirte avec la puissance du propos. La narratrice entremêle avec intelligence différentes périodes. Avec retenue elle convoque ses souvenirs et nous les offre chantés dans une langue poétique riche et variée.

 

-          Son chant déborde d’amour pour les siens, et particulièrement pour sa mère, pilier de la famille qui a permis sans doute le passage sans trop de heurts de ces difficiles épreuves. C’est grâce à elle qu’elle a pu se construire au-delà du drame et avancer vers la lumière…

 

« J’ai aussi compris plus tard que ma mère avait certainement des rêves pour moi, mais qu’elle m’a surtout donné des outils pour me permettre de recommencer à m’enraciner, à rêver. » (p. 30)

 

- Kim Thuy signe là un admirable premier roman qui a reçu le prix RTL Lire en 2010.

 

 «Mon récit n'est pas un récit autobiographique, insiste-t-elle. Ce livre-là n'est pas mon histoire. Je prends l'excuse de raconter «à travers moi» l'histoire de tous ces gens que j'ai croisés. Malgré leurs souffrances, leur immense pauvreté, il y a dans leur histoire une beauté extrême.»

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Rien.

 

Premières phrases :

 

« Je suis venue au monde pendant l’offensive du Têt, aux premiers jours de la nouvelle année du Singe, lorsque les longues chaînes de pétards accrochées devant les maisons explosaient en polyphonie avec la son des mitraillettes. 

J’ai vu le jour à Saïgon, là où les débris des pétards éclatés en mille miettes coloraient le sol de rouge comme des pétales de cerisier, ou comme le sang des deux millions de soldats déployés, éparpillés dans les villes et les villages d’un Vietnam déchiré en deux.»

 

Vous aimerez aussi :

 

Le jour avant le bonheur de Erri DE LUCA

 

D’autres avis :

 

BLOGS : Ankya, Fransoaz, Kathel, Keisha, BelleSahi, Choco, Mango, Isa, Anis

 PRESSE : TéléramaL’express

  

Ru, Kim THUY, Liana Levi, 2010, 143 p., 14 euros

 

challenge littérature au féminin

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Le temps qui va, le temps qui vient de Hiromi KAWAKAMI

Publié le par Hélène

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 ♥ ♥ ♥

 « La vie, c’est toujours quelque chose de décousu. » (p.96)

 

 L’auteur :

 

Hiromi Kawakami est une écrivain japonaise. Kawakami Hiromi a su s’imposer dans le monde littéraire japonais par la tonalité très particulière de son style, à la fois simple et subtil, dont les thèmes privilégiés sont le charme de la métamorphose, l amour et la sexualité.

 

L’histoire :

 

Le vrai héros du dernier roman de Kawakami, c’est ce petit quartier commerçant de Tôkyô où elle a planté son décor : non qu’on nous le décrive en détail, mais c’est à travers la chaleureuse communauté de gens qui l’habitent qu’insensiblement il se déploie et prend corps. Ces voisins sont de tous âges et de toutes conditions : poissonnier, diseur de bonne aventure, enseignante, auxiliaire de vie, chômeuse, un cuisinier et sa patronne, un couple d’imprimeurs, employés de bureau et lycéens... Et chacun à son tour prend la parole dans un livre à la composition surprenante, à la fois très structurée et d’apparence aussi aléatoire que le hasard qui enchevêtre ces vies les unes aux autres. De chapitre en chapitre, chacun passe alternativement du statut de personnage principal à secondaire, et les fils de ces existences séparées peu à peu tissent des liens, entrent en résonance et finissent par se rejoindre et dessiner un motif qui ne deviendra lisible qu’à la fin du roman. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

La construction en chapitres mettant en scène différents personnages permet de rendre l’aspect décousu de la vie des personnages tout en chantant l’immuabilité du monde. Les hommes passent, mais le monde reste. Tous les personnages semblent indécis face à leur vie, aux choix qu’il faut nécessairement faire et peu réussissent finalement à se décider.

 

Le récit de Maki qui clôt le roman est lui teinté d’une lucidité lumineuse :

 

« J’avais vécu, je vivais, et cela suffisait à déterminer les choses à chaque instant. Loin d’être manifeste, le choix avait lieu d’invisible façon, mais le seul fait de connaître quelqu’un, de se croiser, le seul fait d’être là, de respirer, avait des répercussions. Il était impossible de ne pas être impliqué.

Je décidais, quelqu’un décidait, les femmes décidaient, les hommes décidaient, la ronde des causes et des effets qui entraînait la terre dans son mouvement décidait, voilà pourquoi j’étais là où j’étais. » (p. 250)

 

« Jusqu’à ce qu’un jour les hommes disparaissent de l’univers, moi, Heizô, Genji, nous vivons. Perpétués par ceux qui vivent aujourd’hui ici, dans cette ville, dans ce quartier, au fin fond de la mémoire. Et ainsi de suite, de mémoire en mémoire. (…) Vivre était une chose passionnante. Après la mort, comme plus rien de nouveau ni d’intéressant ne se produit, c’est un peu fade. Mais je n’ai pas vécu pour rien. » (p. 277)

 

Nul besoin de chercher un sens, la vie est là, comme le souligne l’auteur dans ce magnifique texte écrit pour le magazine Télérama après le tsunami :

 

« Je ne suis qu'une chose insignifiante. Triste constatation peut-être. Mais c'est justement ce qui rend ma vie précieuse. Minus habens, certes, mais un rassemblement de cent vingt millions de fétus forme le Japon. Jetés à terre par les typhons, écrasés par les séismes, voilà mille ans, deux mille ans que nous vivons. Tant que la vie est là, on peut connaître des instants lumineux sans nombre. La beauté du crépuscule. La magie des pétales des cerisiers que le vent emporte. La valeur inestimable des proches que l'on éprouve soudain, pour un rien. Le plaisir du soleil couchant en compagnie d'amis. L'évocation des plaisirs de la journée qui s'achève dans le moment qui précède le sommeil. »

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Je n’ai pas toujours réussi à comprendre qui était qui car les personnages sont nombreux, pris sur le vif à différents moments de leur vie et le lien qui les relie est souvent subtil…

 

Premières phrases :

 

« Dans la boutique de Uoharu, sur un pan de mur non loin de l’entrée, il y a une photo accrochée avec des punaises.

On y voit deux hommes, deux Occidentaux. En complet sombre, debout, les coudes appuyés sur une table ronde qui leur arrive à hauteur de poitrine. L’un est étiré en longueur comme un fil, l’autre, petit et râblé. Ils ne se dévisagent pas, ils ne fixent pas non plus l’objectif de l’appareil, ils regardent vaguement au loin. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Du même auteur : Les années douces de Hiromi KAWAKAMI

 Autre :

 

Le temps qui va, le temps qui vient, Hiromi Kawakami, Roman traduit du japonais par Elisabeth Suetsugu, Picquier, mars 2011, 277 p., 19 euros

 

Je vous invite à découvrir l'intégralité du texte de Télérama : Japon : les heures d'après, par Hiromi Kawakami, romancière

 

« La vie est l'instabilité même. Cette philosophie de l'impermanence sous-tend le comportement de ceux qui s'entraident en silence. Oui, la vie est synonyme d'impermanence, oui, l'homme est éphémère, oui, chacun est seul quand il naît, seul quand il meurt, c'est justement pour cela qu'il faut s'entraider pour être sauvé. » (Interview Télérama)

   

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 Je remercie Isabelle LACROZE des Editions Picquier pour cette belle découverte.

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Le tigre blanc de Aravind ADIGA

Publié le par Hélène

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♥ ♥ ♥ ♥

 Attention : chef d’œuvre !

 

L’auteur :

 

Aravind Adiga est un journaliste et écrivain indien. Le tigre blanc est son premier roman, il a obtenu le Man Booker Prize en 2008.

 

L’histoire :

 

Sous la forme d’une lettre à Wen Jiabao, Premier Ministre de la Chine en visite officielle en Inde à Bangalore, un homme recherché par la police déroule son histoire à la première personne du singulier.
Le tigre blanc c’est lui, Balram Halwai, l’enfant le plus intelligent du village mais d’une extraction si misérable qu’il n’a pu terminer ses études secondaires. Employé dans une de ces innombrables petites échoppes de thé qui essaiment le long des routes du pays, il doit son salut à l’un de ces nouveaux riches qui lui propose de devenir son chauffeur à Delhi.
Et tandis qu’il conduit son maître d’un centre commercial clinquant à un autre, d’un « call center » à un autre, Balram se rend compte des nouvelles immenses richesses et multiples opportunités qui l’entourent et lui rappellent qu’il ne pourra jamais faire partie de cette Inde prospère et rutilante du 21ème siècle, à moins de ... commettre un crime innommable.(Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

-         J’ai découvert ce roman par l’intermédiaire d’un article de Courrier International qui pointait les romans capables de nous révéler plus sûrement qu’un documentaire la réalité d’un pays.(http://www.courrierinternational.com/article/2011/03/11/ces-romans-qui-en-disent-long-sur-la-marche-du-monde) (Article relayé par Zarline, merci à elle) Coïncidence, ce même jour, une collègue s’est précipitée à mon bureau pour me dire qu’elle venait de lire un livre sensationnel, livre qui n’était autre que celui-ci et qu’en plus, elle pouvait me prêter… Je pense donc tout à fait rationnellement qu’il me fallait lire ce roman. Je ne me suis pas trompée, car j’ai découvert un véritable chef d’œuvre

 

-         Une scène donne le ton de ce roman qui nous éclaire sur l’Inde  de façon si lucide et cruelle : un pauvre est refoulé aux portes du centre commercial car il porte des sandales et non pas des chaussures. Il s’indigne alors : «  Quoi ! Je ne suis pas un être humain, moi aussi ? » Les autres chauffeurs, pauvres eux aussi l’observent de loin : « Ce type a des couilles, commenta un des  chauffeurs. Si nous étions tous comme ça, c’est nous qui dirigerions le pays et eux qui nous cireraient les bottes. » (p.152)

 

-         Le tigre blanc décrit le quotidien de ces indiens asservis dans « la cage à poules », soumis aux riches et condamnés à rester assujettis à leur pauvreté. Ils ne peuvent pas fuir car dans ce cas les représailles envers les membres de leur famille seraient tellement atroces que « pour cela, il ne faut pas être une personne normale, mais un monstre, un dénaturé. » (p. 179) Leur avenir est tout aussi vain :

 

 « J’étais comme un âne. Tout ce que je pourrais faire, si j’avais des enfants, serait de leur apprendre à devenir des ânes comme moi, et à trimballer les gravats des riches. » (p. 194)

 

Et pourtant, celui qui se fait appeler « le tigre blanc » va tenter l’impossible…

 

-         Le récit est rétrospectif, sous forme épistolaire, sa construction est impeccable, pas à pas, le narrateur nous achemine vers sa conclusion, plus efficace que le meilleur des avocats, il nous explique ce qui l’a amené à commettre l’innommable.

 

« Une révolution indienne ?

Non, monsieur. Cela n’arrivera pas. Les habitants de ce pays attendent toujours que la guerre de libération vienne d’ailleurs : de la jungle, des montagnes, de Chine, du Pakistan. Cela n’arrivera pas. Chaque homme doit accomplir son propre pèlerinage de libération.

Le livre de ta révolution est dans tes tripes, jeune Indien. Chie-le, et lis. » (p.300)

 

- Un véritable chef d'oeuvre qui nous fait découvrir effectivement l'Inde sous une autre facette, nous entraînant bien loin des clichés de Bollywood... A lire ABSOLUMENT...

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-         Rien, absolument rien…

 

Premières phrases :

 

« Monsieur le Premier Ministre,

Ni vous ni moi ne parlons anglais, cependant certaines choses ne peuvent se dire que dans cette langue.

L’ex-femme de mon ex-employeur le défunt M. ASHOK, Pinky Madam, m’a appris l’une d’elles. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Les Fabuleuses Aventures d’un Indien malchanceux qui devint milliardaire
de Vikas Swarup

 

D’autres avis : AmandaPapillonKathel, Griotte

 

Merci à Martine pour le prêt.

  

Le tigre blanc, Aravind ADIGA, traduit de l’anglais par Annick LE GOYAT, Buchet-Chastel, 22 euros

Le tigre blanc, Aravind ADIGA, traduit de l’anglais par Annick LE GOYAT, 10/18, avril 2010, 318 p., 8.20 euros

 

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Nouvel an chinois

Publié le par Hélène

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NOUVEL AN CHINOIS 2011
L'année chinoise du LAPIN DE METAL BLANC débute le 3 février 2011.

Le Nouvel An Chinois  农历新年 (nónglì xinnián) aussi appelé Fête du printemps 节(chunjié) ou Fête du Têt au Vietnam est la fête la plus importante pour les communautés chinoises à travers le monde entier.

 

 

Voici quelques romans chinois que j'ai lus et appréciés :

 

Lao Che Les tambours : Dans la ville de Chongqing, livrée à la merci des bombardements japonais, le chanteur Baoqing tente de subvenir aux besoins des siens tout en surveillant le destin de Grace, sa fille adoptive. Mais si la jeune femme est déterminée à lutter contre la fidélité à un système qui la dégrade, c'est compter sans les réticences d'une société désespérément conservatrice. ¨Présentation de l'éditeur)

Chi Li Les sentinelles des blés : Contre l'avis de son mari, Mingli part pour Pékin à la recherche de sa fille adoptive, dont elle est sans nouvelles depuis trois mois.
A Pékin, cette quadragénaire rencontre ceux qui ont croisé Rongrong et découvre le vrai visage de sa fille, une personnalité qu'elle ne soupçonnait pas et qui correspond tellement à la Chine aventurière et affairiste d'aujourd'hui. Cet étonnant voyage à travers lequel Mingli tente de faire parler des inconnus, de les mettre en confiance en se livrant elle-même à quelques confidences, la renvoie peu à peu au socle de mémoire sur lequel s'est construite sa vie, et plus particulièrement à son enfance partagée avec Ruifang, la mère biologique de Rongrong, aujourd'hui perdue dans la folie.
Une mémoire au cours de laquelle brille l'icône des sentinelles des blés, ces graminées que le père de Mingli, un éminent agronome, leur avait appris à reconnaître et qui accompagnent cette histoire comme un leitmotiv poétique. Une très belle méditation sur le sens de la vie. Sans abandonner tout à fait le ton incisif qui a fait sa réputation, Chi Li parle ici avec mélancolie des destins qui divergent, de ce qui sépare les gens et des expériences communes qui les rapprochent. (Présentation de l'éditeur)

 

Qiu XIAOLONG : La danseuse de Mao

 

Dai Sijie Balzac et la petite tailleuse chinoise : En 1971, comme des millions d'autres jeunes citadins chinois, le narrateur et son ami Luo sont envoyés sur une haute montagne isolée voisine du Tibet, où ils seront "éduqués" par les paysans. Les adolescents ont trois chances sur mille de revenir un jour dans leur ville natale. Dans le village voisin, un autre jeune de la ville cache scrupuleusement une valise remplie de livres interdits : Balzac, Flaubert, Hugo, Kipling, Emily Brontë, Rousseau, Dostoïevski... Grâce à ces trésors, la ravissante petite tailleuse, jeune fille convoitée par tous, ne sera plus jamais la même. Écrit avec un accent de vérité confondant, un roman fort qui, tout en nous plongeant dans la Chine communiste, raconte une belle histoire d'amitié et d'amour, auréolée de la magie de la littérature. (Présentation de l'éditeur)

 

François CHENG Le dit de Tianyi : Alors qu'il se trouve en Chine, un énigmatique voyageur rencontre le peintre Tianyi, qu'il connaissait autrefois, et reçoit ses confessions écrites, celles d'un homme proche de la mort, vivant dans un hospice. Son récit s'ouvre sur une drôle d'histoire d'âmes errantes : Tianyi, est dans les années trente, un enfant de 5 ans qui décide de vouer sa vie à la quête de la beauté. Sa recherche esthétique l'amènera à découvrir la culture occidentale en même temps que la tradition picturale chinoise. Le récit se poursuit. Il embrasse un demi-siècle d'histoire. En arrière-plan défilent la guerre sino-japonaise, Paris dans les années cinquante où Tianyi part en exil, puis la révolution culturelle au moment du retour en Chine. Le Dit de Tyanyi est un livre bouleversant qui a connu un succès mondial. (Présentation de l'éditeur)

 

Gao XINGJIAN La montagne de l'âme : Dans les années quatrevingts, un homme s’embarque dans un long voyage pour fuir les troubles du Pékin communiste. Il suit la piste d’une mystérieuse montagne et traverse une Chine méconnue, infiniment riche, qu’il n’imaginait pas… À la recherche de luimême, son voyage est aussi spirituel et philosophique. Un roman poétique, teinté d’autobiographie, considéré comme l’un des chefs d’oeuvre de la littérature du XXe siècle. (Présentation de l'éditeur)

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Une étrange et sublime adresse de Amit CHAUDHURI

Publié le par Hélène

                                                étrange et sublime adresse

 ♥ ♥

  

L’auteur :

 

 Amit CHAUDHURI est un écrivain indien. Il a obtenu le Commonwealth Writers Prize en 1992 pour Une étrange et sublime adresse qui est son premier roman.

 

L’histoire :

 

Un jeune garçon de Bombay vient à passer ses vacances en famille à Calcutta. Il y fait chaud, bien sûr, sa mère et sa tante passent de longues journées allongées sur le grand lit. Sandeep et ses cousins chahutent sur le petit, un lézard lorgne un moustique égaré, le temps semble arrêté.

 

Ce que j’ai aimé :

 

-         Ce récit a beaucoup de charme, il nous peint des scènes vivantes d’une vie somme toute banale, sans soucis, vie qui s’étire langoureusement comme un chat au soleil.

 

« L’écho des fenêtres fermées par Sarasvati dans l’autre pièce, celui des pas de sa tante qui monte l’escalier, deux tasses de thé à la main, et la conversation de deux adultes qui parlent, se taisent, parlent, se taisent, comme le flux et le reflux d’une marée. » (p. 131)

 

-         C’est un récit qui chante les louanges du bonheur au quotidien et s’intéresse davantage au moment, à l’instant plus qu’à la globalité d’une histoire.

 

« Seul importait pour les dieux et les mortels l’accomplissement de ce moment riche et sans fin dans la petite chambre, ce moment de communion secrète, presque clandestine, où celui qui priait et celui qui recevait la prière échappaient à l’ingrate responsabilité du monde. Restaient les oranges, les batashas blanches, les concombres. » (p. 51)

  

Ce que j’ai moins aimé :

 

-         Bizarrement, alors que je suis une adepte des récits qui chantent le quotidien, je n’ai pas été totalement emportée par celui-ci. Peut-être lui manque-t-il justement une histoire dans laquelle sertir les petits bonheurs… Je pense que c’est un roman que je relirai, pour voir si mon manque d’enthousiasme était dû au texte lui-même ou à d’autres facteurs…

-         Je n’ai pas bien compris pourquoi neuf autres récits avaient été ajoutés en fin de recueil. Le premier fragment centré autour du jeune Sandeep se suffisait à lui-même.

 

Premières phrases :

 

« Il aperçut la ruelle. De petites maisons sans beauté, sans intérêt, plantées face à face. La maison de Chhotomama avait un pomélo dans sa cour minuscule et des plantes grimpantes aux fenêtres. Un gamin se cramponnait au portail rouillé, un autre le faisait osciller d’avant en arrière. Ensemble, ils traçaient dans l’espace un petit arc de cercle. »

 

Vous aimerez aussi :

 

 La colère des aubergines de Bulbul SHARMA

 

Je remercie les Editions Picquier.

 

Une étrange et sublime adresse et neuf histoires, Amit CHAUDHURI, traduit de l’anglais (Inde) par Simone MANCEAU, Picquier poche, août 2010, 263 p., 7 euros

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