Ingrédients pour une vie de passions formidables de Luis SEPULVEDA
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"Narrer...résister"
Ce que j'ai aimé :
Au gré de courts chapitres, Luis Sepulveda évoque ici ses souvenirs d'enfance, ses luttes pour les travailleurs, son amour pour la littérature, pour son pays, ses désillusions...
Il témoigne notamment de son admiration pour Salvator Allende, pour son pays natal le Chili, pour son pays d'adoption l'Espagne, bref de son amour inconditionnel pour le Sud. Il dénonce les dérives financières avant la crise, les spéculateurs, et fait preuve d'un engagement qui fait partie de lui-même, pour lui qui ne comprend pas ses amis qui se désintéressent de la politique. Il convoque à ses côtés les personnes qu'il admire : Pablo Neruda, Gabriel Garcia Marquez (Gabo), Tonino Guerra grand scénariste italien et mondial, et nous livre les déambulations de ses réflexions au fil du temps et des pages.
"Il m'est particulièrement difficile d'imaginer une littérature où le conflit entre l'homme et ce qui l'empêche d'être heureux serait absent. Je ne pourrais m'attaquer à la littérature, à l'écriture, sans la conscience d'être la mémoire de mon pays, de mon continent et de l'humanité." p. 21
Il veut témoigner à tout prix, pour ceux qui ne peuvent pas, pour les faibles, pour les muets, pour les morts... Quand il visite le camp de concentration de Bergen-Belsen il lit ces mots :
"Dans un coin de Bergen-Belsen, près des fours crématoires, quelqu'un, je ne sais qui ni quand, a écrit des mots qui sont la pierre angulaire de mon moi d'écrivain, l'oriigne de tout ce que j'écris. Ces mots disaient, disent et diront tant qu'existeront ceux qui s'obstinent à bafouer la mémoire : "J'étais ici et personne ne racontera mon histoire."
Je me suis agenouillé devant ces mots et j'ai juré à celui ou celle qui les avait écrits que je raconterais son histoire, que je lui donnerais ma voix pour que son silence ne soit plus une lourde pierre tombale, celle du plus infâme des oublis. Voilà pourquoi j'écris." p. 22
Certains textes sont plus comiques, comme "La première cigarette" racontant son expérience avec une jeune fille qui refuse de l'embrasser sous prétexte que ce n'est guère hygiénique...
"Tout en tirant sur ma cigarette, j'ai compris que la vie était complexe, que tout était complexe, même l'amour et les bactéries." (p. 105)
En filigrane apparaît l'homme Sepulveda, page après page, anecdote après anecdote, se profile un homme généreux, profondément humain, engagé, passionné jusqu'au bout de ses expériences...
Ce que j'ai moins aimé :
- Un peu décousu, nous passons de considérations politiques, économiques à des souvenirs d'enfance. Il manque une cohérence pour moi, un fil conducteur que ne fournit malheureusement pas le titre (en sachant que le titre original était "Escrituras en tiempos de crisis ")
Premières phrases :
"J'ai six enfants, cinq enfants et une fille, tous adultes, ils m'ont fait cinq fois grand-père et, quand je parviens à réunir toute la famille autour de la table, j'aime qu'ils m'appellent viejo."
Présentation de l'éditeur :
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Du même auteur : Le vieux qui lisait des romans d'amour ; Dernières nouvelles du Sud
D'autres avis :
Ingrédients pour une vie de passions formidables, Luis Sépulveda, traduit de l'espagnol (Chili) par Bertille Hausberg, Métailié, avril 2014, 144 p., 16 euros