L'oeil du prince de Frédérique DEGHELT
♥
"Vivre, c'est chaque jour avoir de la chance."
Ce que j'ai aimé :
Voici le projet ambitieux de l'auteur :
"La place donnée au lecteur est celle d'être l'oeil du prince, c'est à dire d'occuper dans un théâtre cet angle de vue permettant de visualiser la perspective du décor sans déformation. (...) Et en l'occurence, dans le roman, seul le lecteur peut embrasser la perspective des vies successives des héros, des divers évènements à l'intérieur de leur destinée."
"Aucun évènement n'est en soi complètement positif ou totalement négatif. Il est chevillé à d'autres évènements qui vont en découler dans nos vies ou dans celles de nos proches."
Sur le papier le projet était prometteur. Autour de cinq destins, l'auteur brode son canevas. Cinq histoires prennent vie sous forme de journal intime :
- Mélodie adolescente mature est intéressée par le cinéma, c'est une pauvre petite fille riche écoeurée par le monde de ses parents trop riches pour être profonds.
- Yann, endeuillé, part à l'autre bout du monde pour oublier,
- Benoît, assiste au naufrage de son couple et retrouve simultanément un ami d'enfance
- deux résistants correspondent pendant la guerre et vont voir les liens s'intensifier.
- et enfin une vieille dame relie les récits entre eux, tel lecteur qui en sait plus long que les protagonistes.
Le lecteur est en effet le seul à connaître les liens qui unissent les personnages, et un autre secret de famille vient émaillier le récit dans le dernier chapitre.
Ce que j'ai moins aimé :
Malheureusesement, l'auteur accumule les poncifs que ce soit sur :
- les riches, superficiels : riches à l'extérieur mais pauvres à l'intérieur, "Vides et comblés"
- la jeunesse, insouciante : "on n'est pas sérieux quand on a 17 ans."
- la guerre, méchante : "la guerre fait de bien vilaines choses des hommes, du souvenir et de l'aptitude au bonheur." "La guerre nous rend anormaux."
- La torture en temps de guerre, c'est mal : "Je ne pensais pas qu'on puisse ainsi torturer les femmes."
- Le mariage, qui s'érode inexorablement: "Les phrases du quotidien remplacent les vraies échanges."
"Depuis combien de temps n'avons-nous pas eu un fou rire ensemble ?"
- le deuil, long et douloureux
- l'infidélité, ravageuse
- l'amour, si rare "Y a-t-il encore une place pour l'amour dans ce monde ?"
- La vie éphémère quoi "Nos vies sont précaires."
De plus l'écriture est banale, plate, et n'est pas aidée par la forme du journal intime qui peut tomber facilement dans le mièvrerie adolescente.
Ainsi, le projet ambitieux du départ se retrouve avorté, enclumé par ces défauts. C'est dommage...
Premières phrases :
"Je les ai brûlés. Je les ai relus d'abord, puis je les ai brûlés. Sans en oublier un seul. Je n'avais pas peur qu'on les trouve... Je voulais juste qu'ils disparaissent comme ont disparu les années pendant lesquelles je les ai écrits."
Informations sur le livre :
D'autres avis :
L'oeil du prince, Frédérique Deghelt, J'ai lu, septembre 2014, 14 euros
Merci à l'éditeur.