Chasses furtives de Léon MAZZELLA
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"Et l'on se retrouve nu sur le chemin qui mène à soi, cerné par l'existence et serré dans son passé, cherchant la clarté à tâtons comme un aveugle dans la foule tourne sa main vers un corps et usant de son épuisement pour s'excuser auprès de la vie."
Ce que j'ai aimé :
Jean se remémore les moments suspendus passés aux côtés de son grand-père, quand ils vivaient ensemble dans la maison du marais. A l'âge où ses camarades couraient les filles, lui préférait courir la campagne "Il était chasseur de toutes ses fibres. C'était un séducteur d'oiseaux." Il vivait heureux, "entre le presque rien et l'indicible" habité par des rêves à sa mesure :
"Voir, seulement, la bécassine double. Prendre un grand tétras au chant, un seul pour la vie, quelque part dans un pays d'Europe de l'Est. Et parvenir à toucher, de la main, un gros animal -sanglier, cerf, phacochère, antilope - peu m'importait..."
Avec ces Chasses furtives, Jean -alias Léon- souhaite rendre hommage à son grand-père qui s'en est allé trois ans plus tôt rejoindre les cieux aux côtés des oiseaux. Accompagné de son fidèle chien, compagnon de toujours, Jean arpente les marais de son enfance, à l'affût, plongé dans ses souvenirs mélancoliques, "Seul avec son esprit traqué par la disparition des êtres et par la transparence des choses."
Apparaissent quelques personnages derrière le grand-père : la "femme-renarde", le braconnier taiseux, mais les personnages qui survolent poétiquement ces pages et leur donnent tout leur sens restent les oiseaux. Ceux qui relient le passé et le présent, ceux qui planent avec son grand-père, ceux qui témoignent d'une vie harmonieuse avec le monde et la nature, et donnent soudain l'impression d'être à sa place. Ancré dans un monde qui a soudain du sens.
L'émotion à fleur de peau caresse les pages de ces "Chasses furtives" et leur offre toute leur beauté.
"Trente ans après, je me souviens bien de mon urgence à dire, à chacun de mes retours, les impressions intenses volées à l'aurore, les départs pressés pour la chasse, le givre qui habille l'herbe et les branches, le ciel bleu de novembre que le miroir brisé de joncs des marais reflète, la disparition de la dernière étoile, l'orangé timide de l'horizon, l'air qui glace les spoumons. L'insolente beauté de la nature qui me faisait parfois pleurer de bonheur, seul dans les barthes d'Orist, Siest, Pey et Saubusse. La joie gigantesque que cela me procurait. La seule vue d'un vol de vanneaux suffisait alors à me faire chavirer d'un plaisir que je savais étrange et que je renonçais à définir."
Ce que j'ai moins aimé :
-Rien
Premières phrases :
"Jean s'étira et planta son regard au plafond. Il mit ses mains derrière la tête et pensa fort à son grand-père qui faisait toujours la sieste dans cette position, en respirant fort avec le nez à cause de son rhume des foins et qu'il surprenait souvent étendu ainsi sur son lit."
Présentation de l'éditeur :
Sur l'auteur :
http://leonmazzella.hautetfort.com/
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Du même auteur : Les bonheurs de l'aube
Autre : Les romans de Mario RIGONI STERN dont Hommes, bois, abeilles
D'autres avis :
Chasses furtives, Léon Mazzella, Editions Passiflore, 2012, 13 euros