Les temps sauvages de Ian MANOOK
♥♥♥♥
"Les choses ne sont jamais ce qu'elles sont vraiment si tu les regardes de trop près, petite soeur. La steppe est immense, mais ton regard doit l'envelopper et la parcourir d'en haut comme le vent. Comme la vie." p. 387
Ce que j'ai aimé :
Yeruldelgger revient ! Bon il n'est pas en grande forme dans cet opus, un brin désabusé, l'enseignement des moines s'éloignant à grand pas de son esprit rattrapé par la violence extérieure. Etat d'esprit qui est relativement monnaie courante chez les enquêteurs du nord il faut bien le dire, que l'on parle de Wallander, Varg Veum, Erlendur, Harry Hole...- Heureusement, pour contrebalancer cette morosité Yeruldeggerienne, la jeune Oyun, sa collègue tombe dans les bras d'un beau militaire qui sent bon le sable chaud et ses sens -et son bon sens- vont être malmenés par ce bel hidalgo.
Pendant que Oyun se concentre sur une découverte macabre, Yeruldelgger enquête sur le meurtre d'une ancienne associée et sur la disparition de son fils d'adoption et de Gantulka rencontré dans le premier tome. Les chapitres s'enchaînent, dynamiques, fluides, beaucoup moins violents que dans l'opus précédent. L'enquêteur désabusé traque ses vieux démons et la piste le mène jusqu'en Russie, et même en France, dans le port du Havre.
Si Yeruldegger est en petite forme, ce n'est pas le cas de Ian Manook dont l'humour et la bonhomie illuminent chaque page. Ses dialogues sont dignes de Audiard :
"- Et qui te dit que j'ai envie de t'entendre, chinetoque ? Les fouille-merde, je les mets pas sur écoute, moi, je les fracasse. Je vais te mettre sur la feuille de match, et pas pour réchauffer le blanc ! Je vais te montrer qui c'est, Rebroff. Aux quatre coins de la toundra qu'on va te retrouver, congelé par petits bouts, façon glace pilée. Moi quand on cherche le brassage, je cogne plus : je slap shot, je drop le puck, je pète la rondelle !
- C'est quoi, ce numéro de hockeyeux à deux kopecks ? Tu ne peux pas lui fracasser un genou sans faire ton cirque ?
- Désolé, monsieur Orlov, s'excusa le géant en triturant sa crosse. C'était juste pour le psychologique. Je veux dire pour la préparation, quoi. La préparation psychologique, vous savez..."
Il nous fait partager sa joie de vivre et nous invite à savourer tous les plaisirs, qu'ils soient culinaires, nous donnant envie de découvrir les spécialités de Mongolie comme les kuushuurs ou les buzz, des raviolis de mouton : "Ses raviolis avaient juste la bone taille pour être engloutis d'une seule généreuse bouchée gourmande, et la pâte avait la bonne consistance pour rester en bouche chaude et fumante et ne gicler son gras bouillant qu'au premier coup de dents et ainsi libérer la farce de viande." p. 105 ou encore les spécialités de nos régions normandes -plus accessibles - (brandon à la crème patissière parfumée au vieux calva, galette au sucre, tripes), ou qu'ils soient plus sensuels, agrémentés de dentelle...
En résumé dans ces temps sauvages, vous trouverez des militaires qui sentent bon le sable chaud, des professeurs lettrés, des inspecteurs en sous-vêtements, des méchants, des loups, des yacks qui tombent du ciel, un rapace prénommé Voltaire, des dzüüds glacials, et vous rugirez de plaisir dans cette atmosphère si jubilatoire !
A consommer san modération !
Ce que j'ai moins aimé :
- Rien !
Présentation de l'éditeur :
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Du même auteur : Yeruldelgger
Autre : Le dernier lapon de Olivier Truc
Sur la Mongolie : Ciel bleu de Galsan TSCHINAG ; Chaman de Galsan TSCHINAG
D'autres avis :
Les temps sauvages, Ian Manook, Albin Michel, février 2015, 528 p., 22 euros
Merci à l'éditeur.