Les ignorants de Etienne DAVODEAU
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« Le vin, c’est un truc pour se détendre, c’est un point de rencontre, un lien entre les gens ! » (p. 111)
L’auteur :
Je suis né en 1965 dans les Mauges ( c’est une région du Maine & Loire dont le nom viendrait étymologiquement de "MAUvaises GEns" en latin, vous voyez le tableau) . J’y ai passé une enfance formidable . Elle a principalement consisté à me balader avec mes copains dans les champs, à tirer à la fronde d’innocents moineaux puis à ricaner bêtement sur ma mobylette devant les filles.
Partie sur une courbe idéale qui faisait la fierté de mes parents, ma scolarité a reçu en pleine gueule une adolescence tourmentée. S’en est suivi un piqué en flammes assez spectaculaire. Quand je me suis réveillé au milieu des débris , ma main droite cramponnait un document noirci. Il fallait bien me rendre à l’évidence : J’avais mon bac.
À Rennes, je me suis inscrit à la fac, section Arts Plastiques pour une raison qui m’échappe encore. J’y ai étudié (un peu) et dessiné (beaucoup). Avec quelques gaillards qui nourrissaient le même intérêt que moi pour la bande dessinée, nous avons fondé le studio Psurde, modeste association qui nous permit de publier nos premiers travaux, heureusement aujourd’hui introuvables.
Qui étaient ces vaillants pionniers ? Olivier Maunaye, créateur du présent site, Fred Simon (Rails, Le Poisson clown, Popotka), Jean-Luc Simon (coloriste et dessinateur, pour qui j’ai écrit La Gagne), Joub avec qui j’anime Max & Zoé, ainsi que Christophe Hermenier et Thierry Guyader qui ont lâchement abandonné la bande dessinée pour la peinture et la presse.
Après quelques années d’études approximatives mais fort poilantes, j’ai cédé aux encouragements de la femme de ma vie et j’ai écrit le scénario de ce qui allait devenir mon premier livre. Intitulé L’homme qui n’aimait pas les arbres, il s’est niché comme il a pu dans le catalogue Dargaud en 1992. (Source : babélio)
Son blog : http://www.etiennedavodeau.com/
L’histoire :
Par un beau temps d’hiver, deux individus, bonnets sur la tête, sécateur en main, taillent une vigne. L’un a le geste et la parole assurés. L’autre, plus emprunté, regarde le premier, cherche à comprendre « ce qui relie ce type à sa vigne », et s’étonne de la « singulière fusion entre un individu et un morceau de rocher battu par les vents. »
Le premier est vigneron, le second auteur de bandes dessinées.
Pendant un an, Etienne Davodeau a goûté aux joies de la taille, du décavaillonnage, de la tonnellerie ou encore s’est interrogé sur la biodynamie.
Richard Leroy, de son côté, a lu des bandes dessinées choisies par Etienne, a rencontré des auteurs, s’est rendu dans des festivals, est allé chez un imprimeur, s’est penché sur la planche à dessin d’Etienne…
Etienne et Richard échangent leurs savoirs et savoir-faire, mettent en évidence les points que ces pratiques (artistiques et vigneronnes) peuvent avoie ne commun ; et ils sont plus nombreux qu’on ne pourrait l’envisager de prime abord. (Présentation de l’éditeur)
Ce que j’ai aimé :
« Les ignorants » : des hommes vierges de savoir dans un certain domaine, des hommes humbles prêts à s’ouvrir à un autre monde, des hommes beaux qui vont se lancer corps et âme dans une « initiation croisée ». Le titre et le sous-titre ont déjà une aura magique et majestueuse en eux : ils portent l’humanité comme une toile de fond de cette histoire vécue si touchante.
Richard va mener Etienne dans un monde aux mots inconnus : décavaillonnage, ébourgeonnage, palissage, et Etienne va inviter Richard à découvrir son univers artistique peuplé de mots et d’images. Cet enrichissement mutuel se fait dans une tolérance exemplaire, dans la simple volonté d’accéder à la compréhension d’un monde différent du leur. Leur année commune se centre sur l’ouverture, apprentissage de la différence.
Etienne ne comprend pas toujours les logiques de la biodynamie...
« J’ai l’impression que c’est très subjectif, la biodynamie...
- Mais TOUT est subjectif dans le vin !" (p. 91)
... comme Richard reste hermétique à l’art de Moebius. Mais il fera la rencontre des pages de Gibrat, Guibert, Mathieu, Spiegelman, et bien d’autres auteurs qui le toucheront à des degrés divers. Quant à lui Etienne rencontrera des gars qui travaillent au naturel pas au chimique, parce que « la proximité physique et donc mentale, du vigneron avec son travail… pense à ça quand tu bois du vin. » (p. 102)
Les ignorants est truffés de réflexions philosophiques :
« Mais bon, y’a pas de recettes… Il faut de l’attention. Ouvrir les yeux sur les choses élémentaires. » (p.229)
économiques,
« Rester petit, c’est garder le contrôle sur la qualité de notre travail ! Refusons de croître ! » (p.158)
réflexions artistiques comme dans ce passage magnifique dans lequel Marc-Antoine Mathieu évoque sa relation au lecteur :
« Ce qui m’importe par-dessus-tout, c’est qu’ils [ses livres]soient cohérents avec la vision de monde que j’y développe… Ensuite y entre qui veut… »
A la fin de l'album, l’auteur nous livre la liste des vins bus et des BD lues, comme une invitation à nous initier, nous aussi, à ces autres mondes...
Un joyau d’humanité !
Les deux "ignorants" au milieu des coteaux
© Photo F.Roy - Editions Futuropolis
Ce que j’ai moins aimé :
-Rien !
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D’autres avis :
Blogs : Sylire Aifelle - Joelle - Fransoaz
Les ignorants, récit d’une initiation croisée, Etienne DAVODEAU, Futuropolis, octobre 2011, 272 p., 24,9euros