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litterature francaise

L’homme-joie de Christian BOBIN

Publié le par Hélène

                                        homme joie

 ♥ ♥ ♥

 « Ce qui compte c’est la puissance de la joie qui éclate à la vitre de nos yeux. » (p. 105)

  

L’auteur :

 Christian Bobin, né au Creusot en Saône-et-Loire où il demeure, est un écrivain et poète français.

Après avoir étudié la philosophie, il a travaillé pour la bibliothèque municipale d’Autun, à l’Écomusée du Creusot et a été rédacteur à la revue Milieux ; il a également été infirmier psychiatrique.

Ses premiers textes, marqués par leur brièveté et se situant entre l'essai et la poésie, datent des années 1980. Ils sont publiés aux éditions Brandes, Paroles d’Aube, Le temps qu'il fait, chez Théodore Balmoral, et surtout chez Fata Morgana (où il publie notamment Lettres d'or).

Connaissant le succès à partir notamment d'Une petite robe de fête (1991), il reste un auteur assez discret.



L’histoire :

Christian Bobin renoue avec la fibre narrative de ses grands livres : Le Très-Bas, Prisonnier au berceau, et construit son livre en quinze récits : des portraits d’êtres aimés (son père), des rencontres (Maria l’enfant gitane, une mendiante) des figures emblématiques (Soulages, Glenn Gould, Matisse, Pascal), des visions (une branche de mimosa, une cathédrale) et une longue lettre à la femme aimée et perdue, « la plus que vive ». Entre ces récits, viennent des paragraphes courts, parfois écrits à la main, condensés sur une pensée, fulgurants de profondeur et d’humanité. Un même fil rouge unifie tous ces textes, c’est la voix de Bobin, à nulle autre pareille et son regard de poète qui transfigure le quotidien. (Quatrième de couverture)

 Le livre contient la reproduction d’un carnet manuscrit de l’auteur en fac-similé.

 

Ce que j’ai aimé :

Christian Bobin chante le monde, à l’affût d’une apparition qui illuminerait sa journée et l’emplirait de joie. Une fleur, un animal, un éclat de lumière, un rien peut être source d’émerveillement et de joie. Il suffit de simplement être attentif au monde qui nous entoure, présent à soi-même et réceptif à la beauté. Et alors, le miracle a lieu.

 « Il y a une vie qui ne s’arrête jamais. Elle est impossible à saisir. Elle fuit devant nous comme l’oiseau entre les piliers qui sont dans notre cœur. Nous ne sommes que rarement à la hauteur de cette vie. Elle ne s’en soucie pas. Elle ne cesse pas une seconde de combler de ses bienfaits les assassins que nous sommes. » (p. 15)

 « Aucune philosophie au monde n’arrive à la hauteur d’une seule marguerite, d’une seule ronce, d’un seul caillou discutant comme un moine rasé en tête à tête avec le soleil et riant, riant, riant. » (p. 179)

 

Ce que j’ai moins aimé :

Comme toujours je suis moins friande des allusions au Christ…

 

 Premières phrases :

« Partons de ce bleu, si vous voulez bien. Partons de ce bleu dans le matin fraîchi d’avril. Il avait la douceur du velours et l’éclat d’une larme. J’aimerais vous écrire une lettre où il n’y aurait que ce bleu. »

 

 Vous aimerez aussi :

Du même auteur : La part manquante de Christian BOBIN ; Les ruines du ciel de Christian BOBIN

Autre : Nos cheveux blanchiront avec nos yeux de Thomas VINAU

 D’autres avis :

Livres hebdo 

 

L’homme-joie, Christian BOBIN, L’iconoplaste, août 2012, 180 p., 17 euros

 dialogues-croises

 

challenge rentrée littéraire 2012

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Belle famille d'Arthur Dreyfus

Publié le par Hélène

                                          belle-famille.jpg

 Prix orange du livre 2012

 

 

L’auteur :

 

 Arthur Dreyfus est né en 1986. Il est l’auteur d’un premier roman très remarqué, La synthèse du camphre (collection blanche, 2010). Après avoir présenté cet été « La période bleue », il anime aujourd’hui l’émission hebdomadaire « Chantons sous la nuit » sur France Inter.


L’histoire :

«Madec se dirigea vers la cuisine pour chercher un couteau à pointe fine. Comme s'il était surveillé, il s'interdit la lumière. L'obscurité ne faisait pas disparaître les formes, mais les couleurs. Est-ce ainsi que voyaient les gens dans les vieux films? L'enfant ouvrit le tiroir à ustensiles.»

Ensuite un peu de bruit, et beaucoup de silence.

 

Mon avis :

Arthur Dreyfus nous offre ici un récit glauque (méfiez-vous des fourchettes à viande…) en exploitant un fait divers : la disparition de la petite Maddie volatilisée il y a cinq ans alors qu’elle passait ses vacances avec ses parents et ses deux frères au Portugal. (Cf L’Express) Aucune trace de la fillette, après quelques semaines d’enquête, les parents sont soupçonnés. Arthur Dreyfus exploite cette disparition et cette accusation et construit sa fiction autour de ce fait sordide. Ne fait-il que surfer sur le goût malsain des gens pour le fait divers ou va-t-il plus loin ? Il prétend entrer dans l’intimité du couple et de la famille pour mettre en lumière les psychologies tourmentées et les sentiments  compliqués qui peuvent être ressentis par des parents pour leurs enfants.  Rien de bien nouveau au final, une mère peut ne pas aimer son enfant, il suffit de se rendre dans un parc de jeu à la sortie de l’école et d’observer les rapports entre parents et enfants, la même conclusion s’impose rapidement.

Le personnage du frère de Laurence, Tony, joue un rôle prépondérant dans ce roman, bien décidé à lancer un plan média d’envergure, quitte à mobiliser le pape pour faire « du buzz » autour de cette disparition. Arthur Dreyfus cherche sans doute à nous démontrer fort platement combien les médias sont manipulables et combien il est simple de monter une affaire au sommet avec des relations et une bonne communication. Tout n’est qu’apparence et manipulation en ce bas monde… Oui ? Bon…

A ces thématiques pseudo-psychologiques-socialo-médiatiques s’ajoute un style plat sans intérêt :

« Soudain le petit salon se teinta d’une lumière bleutée. Derrière la baie vitrée, un moteur cessa de vrombir. Stéphane courut accueillir les policiers en implorant sa femme de se reposer. Encore groggy, Laurence perçut des voix italiennes, françaises, et anglaises. Son époux dispensait les premiers détails aux forces de l’ordre. Bientôt on viendrait l’interroger.

Laurence pensa à Antonin, à Vladimir. Combien elle les aimait.

Pour eux, elle prit une décision.

Cette déclaration tenait en trois mots, qu’elle prononça à voix basse pour la toute première fois : « Madec a disparu. » » (p. 88)

Sujet-verbe-complément, ba-ba de la phrase dreyfusienne… Quel talent !!

Il est à noter toutefois que le début du roman laissait augurer une toute autre qualité, mais qu’à partir de la plongée dans le fait divers toute cette originalité en puissance, ce ton décalé qui semblait prometteur se délite lamentablement…

Une vraie déception…

 

Premières phrases :

« Granville est située au bord de la Manche à l’extrémité de la région naturelle du Cotentin, elle ferme par le nord la baie du Mont-Saint-Michel et par le sud la côte des havres. Jadis la ville était fameuse pour son port morutier, devenu le premier port coquillier de France. »

 

Vous aimerez aussi :

Une émission de France Inter sur l'attrait des faits divers : http://www.franceinter.fr/emission-le-debat-de-midi-pourquoi-aime-t-on-les-petits-meurtres-en-famille

 

D’autres avis :

Clara, Constance, Canel, Mimi, Jostein, Anna Blume A propos des livres

 

Belle famille, Arthur Dreyfus, Gallimard, janvier 2012, 17.90 euros

grand prix lectrices de elle

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Deux zèbres sur la 30ème rue de Marc MICHEL-AMADRY

Publié le par Hélène

                                              deux-zebres.jpg

 

 

 L’auteur :

Marc Michel-Amadry est directeur de Sotheby’s Suisse et vit à Neuchâtel. Il signe ici son premier roman.

  

L’histoire :

 Pour remplacer ses zèbres morts de faim, Mahmoud Barghouti, directeur du modeste zoo de Gaza, se résout à peindre des rayures à deux ânes. James, correspondant du New York Times au Moyen-Orient, s’empare de ce fait divers insolite, porteur d’un message d’espoir et de paix. Une chronique dont les échos dépassent les frontières et qui bouleverse des destins. Entre Paris et Berlin, New York et Gaza, d’un ambitieux consultant à une artiste peintre branchée, d’un intrépide journaliste de guerre à une volcanique DJ, deux couples sont réunis grâce à la magie de ces zèbres pas comme les autres.

Bijou d’optimisme, sésame vers le bonheur, Deux zèbres sur la 30e Rue est une incitation à oser vivre à la hauteur de ses rêves. Un livre qui fait du bien, à mettre entre toutes les mains. (Présentation de l’éditeur)

Mon avis :

 L'attrait de ce court roman tient pour une grande part dans l'originalité de son point de départ : cette histoire improbable d'ânes rayés pour les transformer en zèbres et faire ainsi rêver les enfants de Gaza est brillante... 

A partir de début prometteur, l'auteur tente de créer une trame en mettant en scène différents personnages à un tournant de leurs vies. L'idée étant de les réunir et de les accomplir grâce aux zèbres. Malheureusement, l'histoire ne décolle pas et l'originalité se perd en chemin au profit d’histoires d’amour somme toute assez banales et d'une mise en abîme peu originale.

 "Il voulait que le récit soit empreint d'humanité. Qu'il soit question d'hommes et de femmes ordinaires qui donnent du sens à leur vie en accomplissant des choses extraordinaires. Il aspirait à raconter que de simples gestes suffisent parfois à susciter de profonds bouleversements, à accomplir des exploits." (p. 62) 

 Malgré son charme diffus, ce roman ne me semble pas encore tout à fait accompli...

 Premières phrases :

« Il pensait à elle tous les jours. Mais pensait-elle seulement à lui ? Cette question, Mathieu se la posait chaque matin tandis qu’il levait les yeux vers le plafond gris de sa chambre. Un gris qui changeait au gré des heures et de la lumière. »

 D’autres avis :

 Théoma 

 

Deux zèbres sur la 30ème Rue, Marc Michel-Amadry, Editions Héloïse d’Ormesson, avril 2012, 126 p., 14 euros

 Un grand merci à Roxane Defer des Editions Eho pour son accueil et sa gentillesse.

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Diane et autres stories en short de Christian LABORDE

Publié le par Hélène

                                                diane et autres stories en short

 

  L’auteur :

 Christian Laborde a publié des romans, Le dictionnaire amoureux du Tour de France, des pamphlets. Aux Éditions Robert Laffont, il a publié Corrida Basta et Le soleil m'a oublié.(Présentation de l’éditeur)


L’histoire :

« L'érotisme, c'est le cinéma intérieur des êtres humains», dit Philippe Sollers. Allez au cinéma avec Christian Laborde. Vous allez aimer le film.

 

Nous disons « nouvelles », les Anglais « short stories » et l'auteur « stories en short ». Pourquoi ? Parce que les héroïnes de ces dix-sept histoires érotiques portent chacune un short. Il y a le short noir d'Irène qui joue au volley-ball, celui de Florence à qui un homme éperdu réussit à dire quelques mots. Il y a le short vert d'une jeune anarchiste, celui que Rebecca retire dès qu'un orage éclate, le short à revers de Mathilde qui rencontre son futur amant au rayon « Biscuits »à Auchan, etc.
Un homme ou une femme fait l'amour autant avec son imagination qu'avec ses organes. Ici l'imagination procède naturellement des mots, c'est-à-dire du style de Christian Laborde, léger mais précis, rapide mais brillant, quand il met en scène les objets du désir. Que démontrent ces délicieuses et excitantes nouvelles ? Que l'érotisme, omniprésent dans la société actuelle, reste une voix personnelle, presque indéfinissable. Il appartient pour chacun d'entre nous au domaine du rêve. En ce sens, il est le contraire de la pornographie qui montre alors que l'érotisme suggère.
Voilà un livre très suggestif et attachant parce que s'y mêlent avec un grand charme le trouble des héros, les coups de tonnerre de la passion sensuelle et même l'amour des bons livres. (Présentation de l’éditeur)

 Mon avis :

Christian Laborde est un homme qui soigne son style. Un homme érudit, à la culture musicale et littéraire lumineuse, culture que ses personnages savent utiliser à bon escient :  

« En lui rendant la monnaie, je lui dirai la nuit je mens, je prends des trains à travers la plaine. Interloquée, elle sourira, et j’ajouterai vous savez, j’ai pas toujours bossé dans ce kiosque, avant j’étais dynamiteur d’aqueducs, voleur d’amphores au fond des criques. Dans ses yeux, je lirai de l’incompréhension, peut-être de la peur. Alors pour la rassurer, je lui soufflerai t’étais pas née»(p.11)

 Naît alors sous nos yeux un texte sensuel, intelligent, vivant et humain...

Mais -car oui, il y a un mais- Christian Laborde n'a pas accordé autant de soin à ses scénarios, du moins à certains, qui frôlent les clichés et la banalité : la voisine qui a un problème de fusibles et qui sonne à votre porte à une heure indûe, la cougar qui s'autorise une partie de jambes en l'air avec l'ami de son fils, le kiosquier amoureux transi d'une belle passante... 

Ainsi l'ensemble de ce recueil reste inégal, certaines nouvelles étant plus sentimentales qu'ouvertement érotiques, certaines assumant leur mièvrerie, et même si l'écriture et le traitement sont assez originaux, Diane et ses copines en short sont assez décevantes... 

 

Premières phrases :

« Le cœur, ça bat, on ne sent rien, on l’entend pas, c’est dans la cage thoracique, au fond. Le cœur, il fait son job de cœur, discret, sans jamais déranger personne, sans jamais se plaindre, arrimé au squelette par un vieux bout de chatterton, de sas en sas, de l’étuve au blizzard, loin du réconfort. »

 

Vous aimerez aussi :

 Littérature érotique  

D’autres avis :

  Stephie

Le Figaro

 

Diane et autres stories en short, Christian Laborde, Robert Laffont, mai 2012, 144 p., 16 euros

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Comme ton père de Guillaume LE TOUZE

Publié le par Hélène

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♥ 

  

L’auteur :

 

Guillaume Le Touze est un écrivain français né au Havre en 1968. Après avoir exercé différents métiers, il est recruté comme maquettiste par la maison d'édition L'Ecole des loisirs, qui publie ses premiers textes pour la jeunesse en 1991. Son premier roman pour adultes suivra en 1992. Il reçoit le Prix Renaudot 1994 pour Comme ton père. Il se consacre aujourd'hui à l'écriture.

 

L’histoire :

 

Avant d'être agrandies et taillées par la main de l'homme, les grottes de Massitissi formaient de simples cavités, nichées dans la montagne d'une région d'Afrique australe. Rien ne les destinait à abriter des rites, à conserver l'écho de conversations humaines.
En 1867, des missionnaires en butte à l'hostilité des Boers y ont trouvé refuge.
A la fin du XXe siècle, un voyageur venu de France choisit, à leur suite, de s'y installer. Son fils le rejoint, quelques années plus tard. Et ces deux êtres retrouvent, en présence l'un de l'autre, des gestes d'apaisement et de vie. Ils ne se sont pas vu vieillir ; mais il importe peu, parfois, de se connaître. L'histoire qui débute avec eux appartient à notre époque.

 

Mon avis :

 

Je me souviens avoir été marquée par ce livre lors de ma première lecture il y a 10 ans environ. J’avais trouvé le rapport père-fils très finement évoqué, de façon touchante et vraie.

Malheureusement je n’ai pas retrouvé mon enthousiasme à la deuxième lecture. Les différents chapitres, l’un consacré à Paul, puis le deuxième à ses ancêtres, puis à son fils, puis à sa femme, tout cela m’a semblé trop éclaté, trop décousu pour former un ensemble cohérent. La simplicité des sentiments m’a bien sûr touchée, mais pas de façon durable, pas en profondeur, peut-être parce que justement les récits sont trop disparates pour s’imprimer concrètement dans nos âmes de lecteurs.

 

Premières phrases :

 

« Jacques,

Ecrire ton nom est un plaisir que je me suis longtemps interdit. Avant d’en tracer les lettres, je l’ai dit à haute voix et il a résonné contre la paroi rocheuse. Ici, très loin de toi, ma bouche a fait vibrer l’air des sonorités de ton nom. »

 

Vous aimerez aussi :

 

 

‘Ta mère de Bernardo CARVALHO

 

 

Comme ton père, Guillaume LE TOUZE, Editions de L’Olivier, septembre 1994, 218 p.,

POCHE : Comme ton père, Guillaume LE TOUZE, Points, septembre 1995, 218 p., 5.34 euros

 

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Eau sauvage de Valérie MREJEN

Publié le par Hélène

                                                             eau-sauvage.jpg

♥ ♥

« On revient toujours vers ses origines. (…) Si l’on me coupe de mes racines, je dépéris. Je ne peux plus marcher. » (p. 67)

 

L’auteur :

Valérie Mréjen, née en 1969 est une romancière, une plasticienne et une vidéaste française. Connue pour ses courts métrages et ses vidéos, Valérie Mréjen expose aussi dans les galeries et les musées d'art contemporain. Elle interroge le langage, ses multiples facettes et sa vacuité, dans des productions courtes inspirées du quotidien comme Au revoir, merci, bonne journée ou Chamonix. Parmi ces autres courts figurent French courvoisier (2009) et Valvert (2010). Également auteur, la réalisatrice française prolonge sa réflexion dans plusieurs romans remarqués : Mon grand-père en 1999, L' Agrume en 2001 et Eau sauvage en 2004, publiés chez Allia.

En ville, son premier long-métrage (coréalisé avec Bertrand Schefer), a été présenté à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes en 2011. (Source : France Inter)

 

L’histoire :

 Un père adresse à sa fille, déjà adulte, des reproches, des demandes, des propositions. Dans le silence qui lui répond, on entend tout : l'exaspération, la culpabilité, le désir d'être ailleurs. Un discours à sens unique, une litanie qui pourrait lasser, mais qui apparaît peu à peu comme un écho familier. (Source : Evene)

 

Ce que j’ai aimé :

Valérie Mréjen peint avec beaucoup de justesse et de sincérité une relation entre un père et sa fille.

 Le portait de ce père est émouvant : homme seul, il parle du fond de sa solitude à sa fille, à ses enfants qui, adultes, ont quitté le domicile parental et ont laissé un vide que rien ne comble.  Les maigres conversations qui s’échafaudent alors ensuite ne parviennent pas à rassasier ce père qui rêverait d’une famille plus unie formant bloc contre le monde extérieur.  Il soliloque, raconte ses journées, ses joies, ses peines, posent des questions pour s’intéresser à la vie de sa fille, la conseille, et répète « on ne se voit jamais… » comme une litanie qui pourrait éradiquer la distance entre les êtres… La voix des enfants ne parvient pas jusqu’à nous, flétrie par le monologue du vieil homme.

 « Non, pas très bien. J’ai beaucoup de problèmes au bureau, avec Rosine on est en froid. Elle se plaint du matin au soir. Je vais vers elle et elle m’accueille par des soupirs. Vous, vous avez vos vies, chacun fait de qu’il a à faire. » (p.56)

  

Ce que j’ai moins aimé :

 La facilité a tendance à frôler la simplicité et il faut un éclairage particulier pour voir dans ce dialogue quotidien autre chose… La profondeur du texte ne se laisse pas facilement apprivoisée…

 

Premières phrases :

« Je crois que je vais prendre une décision très grave parce que maintenant ça commence à bien faire. A partir de demain, c’est terminé, je n’entendrai plus parler de vous. 

Ca n’a pas l’air d’aller ? Tu peux te confier, j’aimerais t’être utile bien que je sois maladroit. Souvent, je n’ose pas demander, j’ai peur de poser des questions. Pourtant, je sens que tu n’es pas à l’aise.»

 

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : L’agrume

Autre : Une rivière verte et silencieuse de Hubert MINGARELLI

 

Eau sauvage, Valérie Mréjen, Editions Allia, janvier 2004, 92 p., 6.20 euros

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L'horizon de Patrick MODIANO

Publié le par Hélène

  horizon.jpg

 ♥ ♥ ♥

 "Des souvenirs en forme de nuages flottants." (p. 156)

  

L'auteur :

   Patrick Modiano est né en 1945 à Boulogne-Billancourt. Il a publié son premier roman, La place de l'étoile, en 1968. Il a reçu le prix Goncourt en 1978 pour Rue des boutiques obscures. Auteur d'une vingtaine de romans et de recueils de nouvelles, il a aussi écrit des entretiens avec Emmanuel Berl et, en collaboration avec Louis Malle, le scénario de Lacombe Lucien. Patrick Modiano a reçu le Grand Prix national des Lettres (1996), le Grand Prix de littérature Paul-Morand (2000) et le Prix mondial Cino Del Luca pour l'ensemble de son oeuvre. (Préserntation : Amazon)

 

L'histoire :

  Jean Bosmans, le personnage principal de L’horizon, a l’habitude de noter sur un carnet les bribes de souvenirs qui lui reviennent de sa jeunesse. À partir du nom de Mérové, il fait ressurgir sa rencontre, vers la fin des années 60, avec Margaret Le Coz, une jeune femme qu’il a fréquentée pendant quelques mois et avec laquelle il partageait le sentiment d’être traqué. Elle, par un certain Boyaval. Lui, par sa mère et son amant.

 

Ce que j'ai aimé :

 Se plonger dans un roman de Modiano, c’est un peu comme s’installer devant un café en compagnie d’un ami et l’écouter captivée raconter son histoire, notre histoire, l’Histoire.

 Il a une telle facilité d’écriture qu’il nous emporte sans effort dans son monde, et le temps file à ses côtés, comme arrêté, comme suspendu. Et tout à coup on relève les yeux et on ne voit plus le monde du même œil, ce qui nous entoure est nimbé d’un halo poétique, nostalgique qu’on ne lui connaissait pas auparavant. Paris, ville bruyante et stressante, ressemble désormais à un village douillet et accueillant, les personnes croisées deviennent de potentielles belles rencontres et nos sentiments eux-mêmes sont sublimés par la magie de l’art.

 L’horizon ne fait pas exception à la règle.

 Alors quand les dernières pages se profilent, on devient fébrile, déçu, sachant qu’il faudra attendre quelque temps avant la prochaine rencontre. Qu’à cela ne tienne, relisons avec délectation les anciens écrits… Rendez-vous « Place de l’Etoile »…

 

Premières phrases :

"Depuis quelque temps Bosmans pensait à certains épisodes de sa jeunesse, des épisodes sans suite, coupés net, des visages sans noms, des rencontres fugitives. Tout cela appartenait à un passé lointain, mais comme ces courtes séquences n'étaient pas liées au reste de sa vie, elles demeuraient en suspens, dans un présent éternel."

  

Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Rue des boutiques obscures

Autre : Les solidarités mystérieuses de Pascal QUIGNARD

 

 D'autres avis :

Télérama ; ; Le magazine Littéraire  ; Le figaro ; Libération 

 

   L'horizon, Patrick MODIANO, Gallimard, mars 2010, 174 p., 16.50 euros

 

12 d'Ys 

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Nous aurons toujours Paris de Eric FAYE

Publié le par Hélène

nous-aurons-toujours-paris.jpg

♥ ♥ ♥ ♥

 

L’auteur :

Éric Faye, né en décembre 1963 à Limoges, est un écrivain français.

Eric Faye a publié sa première fiction, Le Général Solitude, une nouvelle, dans la revue Le Serpent à Plumes en 1992. Trois ans plus tard, il a développé cette nouvelle en un premier roman, éponyme. Ses premiers livres, parus tous deux en 1991, sont un essai sur Ismail Kadaré et un recueil d'entretiens avec cet écrivain. En 1998, son recueil de nouvelles fantastiques Je suis le gardien du phare obtient le Prix des Deux Magots. Son œuvre se partage entre des nouvelles, le plus souvent à caractère absurde ou teintées de fantastique, des romans (dont le roman d'anticipation Croisière en mer des pluies, en 1999 - prix Unesco-Françoise-Gallimard), des essais et des récits, parmi lesquels Mes trains de nuit, puisés dans des voyages à travers l'Asie et l'Europe de 1982 à 2005. Il a dirigé un numéro sur Kafka (Autrement, 1996) et pris part à l'édition des œuvres d'Ismail Kadaré aux éditions Fayard.

(Source: Wikipédia)

 

L’histoire :

Le titre est emprunté au film Casablanca : c’est en se souvenant de leur idylle dans le Paris d’avant l’occupation allemande que les deux amants réussissent à continuer à vivre, à se séparer s’il le faut et à suivre chacun son propre chemin. En puisant dans ce trou de lumière. 

Avec ce livre entièrement dédié à un sentiment, celui du « merveilleux », à sa naissance et son cours à travers la vie d’un homme – la sienne –, l’auteur nous invite à le suivre dans son propre puits de lumière. 

Nous aurons toujours Paris est conçu sous forme de boucle, on passe de l’enfance avec les premières apparitions du merveilleux – que ce soit des mots « magiques », des animaux « fabuleux », des objets magnétiques ou des situations nouvelles – à ses prolongements directs à l’âge d’homme. 

Il n’est donc pas, ou très peu, question de Paris dans ces pages. 
Mais plutôt de pérégrinations et de rencontres : du Japon à l’Afrique, et de Julien Gracq à Ismail Kadaré ou Albert Cossery, quand ce n’est pas l’ombre du toujours énigmatique B. Traven. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

Trouver dans l’enfance l’écho d’une émotion adulte, tel est le fil conducteur de ce roman. Conçu comme un retour aux sources il entremêle subtilement les fils d’aujourd’hui et d’hier pour que de ces combinaisons dorés naissent ou renaissent les raisons d’une attirance particulière. Quelquefois le sentiment de merveilleux connu hier « pose des lapins », d’autres fois il est au rendez-vous, si différent tant le temps a passé qu’une seconde de pause est nécessaire avant de le reconnaître. 

« Le merveilleux, l’enchantement qui renaissent chaque matin sont les neiges éternelles de l’existence. Il faut avancer dans le temps en gardant un œil obstiné sur elles, là-haut, espérant qu’elles ne disparaîtront pas dans les brumes de chaleur et qui, contrairement à celles du Kilimandjaro, elles ne fondront jamais. » (p. 97)

Entre souvenirs d’enfance, évocations de voyages, ou rencontres marquantes, Eric Faye nous plonge dans un univers proustien au charme indéniable. 

« Des nappes profondes de l’enfance, le merveilleux refait quelquefois surface un instant, par un jeu de sources et de puits cachés. L’âge d’homme, au fond, n’est souvent rien d’autre que la quête d’une explication à ces fulgurances, à ces tout petits satori qui zèbrent notre nuit et l’enchantent. » (p. 107)

« Entre le quai fantomatique et Francfort-sur-l’Oder (la frontière), l’express n’a plus jamais ralenti. Le voudrais-je, je ne pourrais pas effacer ces deux minutes de ma mémoire. En des moments rares, le temps nous surprend à glisser, par une porte dérobée, des minutes inexplicables et pourtant capitales, lesquelles, mises bout à bout, ne doivent pas totaliser plus d’une heure ou deux dans une vie entière : collier d’instants dérisoires pour tout autre sue soi mais qui donnent et redonnent envie, comme les prières récitées en suivant les grains du chapelet, de se hisser à la hauteur de soi-même. Quelques mots singuliers entendus enfant dans la conversation des grands, quelques cartes figurant les monuments d’une cité mythique, un livre qui tombe d’un rebord de table et s’ouvre à la page du 2 mai 1950, une villa blanche qui vous rappelle l’Afrique, et un vieux poste de radio, et revoilà la légende du Rosebud, le souvenir qui imprègne le présent et dont le parfum ne se dissipe jamais, et qui aide, transforme l’avenir en un jardin vivable, comme Bogart trouve al force de quitter Ingrid Bergman en lui disant, pendant que l’avion mouline du brouillard sur la piste, We’ll always have Paris. »

 

 

 

Ce que j’ai moins aimé :

Rien

 

Premières phrases :

« C’était au cœur d’un automne qui ne voulait pas devenir automne, à la fin d’un été inextinguible. C’était de nouveau dans un train. A trop vouloir deviner qui va s’asseoir à côté de vous en gare, au petit matin, vous vous trompez avec obstination. »

 

D’autres avis :

Télérama

Blogs : Mango Yves  

 

Nous aurons toujours Paris, Eric Faye, Stock, février 2009, 14.50 euros

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La promesse de l’aube de Romain GARY

Publié le par Hélène

promesse de l'aube

♥ ♥ ♥

 « Je prenais encore la vie pour un genre littéraire ; » (p. 352)

 

L’auteur :

Romain Gary, de son vrai nom Roman Kacew est un romancier français originaire de Pologne septentrionale, unique double lauréat du Prix Goncourt.

Roman Kacew est le fils de Arieh Leib Kacew et de Mina Owczynska. Kacew est le deuxième époux de la mère de Gary. Gary est élevé par sa mère après le départ de son père du foyer conjugal lorsqu'il était enfant. Gary était juif par ses deux parents.

Après la séparation des parents, Gary arrive avec sa mère en France, à Nice, à l'âge de 14 ans. Il étudie le droit à Paris. Naturalisé français en 1935, il est appelé au service militaire pour servir dans l'aviation où il est incorporé en 1938.

Engagé dans les Forces Aériennes Françaises Libres, durant la Seconde Guerre mondiale, Roman prend le pseudonyme de Gary comme nom de résistant. Décoré commandeur de la Légion d'honneur à la fin de la guerre, il embrasse la carrière diplomatique en 1945. Cette même année, paraît son premier roman L'Education européenne. Pendant sa carrière diplomatique, il écrit de nombreuses œuvres, dont le roman Les racines du ciel, pour lequel il reçoit le Prix Goncourt en 1956. Il quitte le Quai d'Orsay en 1961, après avoir représenté la France en Bulgarie, en Suisse, en Bolivie, aux Etats-Unis.

Désireux de surprendre et se renouveler, Romain Gary utilise, tôt dans sa carrière littéraire, des pseudonymes. Ainsi, publie-t-il L'Homme à la colombe, sous le nom de Fosco Sinibaldi, en 1958. Dans les années 1970, il utilise à la fois les noms de Romain Gary, de Shatan Bogat et d'Emile Ajar.

Las d'être la cible de critiques le considérant réactionnaire, du fait de son passé de diplomate gaulliste, il invente une écriture vive et drôle, à rattacher au courant post-moderniste, sous le nom de plume d'Emile Ajar. Son cousin Paul Pawlovic prête corps à cette allégorie et, en 1975, reçoit le Prix Goncourt pour La Vie devant soi. La supercherie est révélée par Romain Gary dans son œuvre posthume Vie et mort d'Emile Ajar.

Époux de l'actrice Jean Seberg de 1963 à 1970, Romain Gary est aussi lié au cinéma pour la réalisation de deux films Les Oiseaux vont mourir au Pérou (1968) et Kill (1971) ainsi que par des adaptations de ses œuvres, telles que Clair de femme (Costa-Gavras) ou La Vie devant soi (Moshé Mizrahi).

Un peu plus d'un an après le suicide de Jean Seberg (30/08/1979), il se donne la mort 108 rue du Bac. (Source : Babélio)

 

romain-gary.jpg

 

L’histoire :

 Ce récit coïncide sur bien des points avec ce que l'on sait de l'auteur des Racines du ciel, et Romain Gary s'est expliqué là-dessus : " Ce livre est d'inspiration autobiographique, mais ce n'est pas une autobiographie. Mon métier d'orfèvre, mon souci de l'an s'est à chaque instant glissé entre l'événement et son expression littéraire, entre la réalité et l'oeuvre qui s'en réclamait. Sous la plume, sous le pinceau, sous le burin, toute vérité se réduit seulement à une vérité artistique. "

Le narrateur raconte son enfance en Russie, en Pologne puis à Nice, le luxe et la pauvreté qu'il a connus tour à tour, son dur apprentissage d'aviateur, ses aventures de guerre en France, en Angleterre, en Ethiopie, en Syrie, en Afrique Equatoriale, il nous raconte surtout le grand amour que fut sa vie. Cette " promesse de l'aube " que l'auteur a choisie pour titre est une promesse dans les deux sens du mot : promesse que fait la vie au narrateur à travers une mère passionnée ; promesse qu'il fait tacitement à cette mère d'accomplir tout ce qu'elle attend de lui dans l'ordre de l'héroïsme et de la réalisation de soi-même.
Le caractère de cette Russe chimérique, idéaliste, éprise de la France, mélange pittoresque de courage et d'étourderie, d'énergie indomptable et de légèreté, de sens des affaires et de crédulité, prend un relief extraordinaire. La suprême preuve d'amour qu'elle donne à son fils est à la hauteur de son coeur démesuré.

Mais les enfants élevés par ces mères trop ferventes restent toujours, dit l'auteur, " frileux " de coeur et d'âme, et chargés d'une dette écrasante qu'ils se sentent incapables d'acquitter. Rarement la piété filiale s'est exprimée avec plus de tendresse, de sensibilité, et cependant avec plus de clairvoyance et d'humour. Et rarement un homme a lutté avec plus d'acharnement pour démontrer " l'honorabilité du monde ", pour " tendre la main vers le voile qui obscurcissait l'univers et découvrir soudain un visage de sagesse et de pitié ". (Quatrième de couverture)

 

Ce que j’ai aimé :

 Dans ce roman magnifique, Romain Gary rend un hommage troublant à sa mère  qui nourrissait de hauts espoirs pour lui et qu’il n’a jamais voulu décevoir. Elle l’a porté vers ce qu’il est devenu avec un dévouement et un amour inconditionnel, unique.

 « [...] Il n'est pas bon d'être tellement aimé, si jeune, si tôt. Ca vous donne de mauvaises habitudes

.romain-gary-promesse-aube.jpg On croit que c'est arrivé. On croit que ça existe ailleurs, que ça peut se retrouver. On compte là-dessus. On regarde, on espère, on attend. Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu’à la fin de ses jours. Après cela, chaque fois qu’une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son cœur, ce ne sont plus que des condoléances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné. Jamais plus, jamais plus, jamais plus. Des bras adorables se referment autour de votre cou et des lèvres très douces vous parlent d’amour mais vous êtes au courant. Vous êtes passé à la source très tôt et vous avez tout bu. Lorsque la soif vous reprend vous avez beau vous jeter de tous côtés, il n’y a plus de puits, il n’y a que des mirages. Vous avez fait, dès la première lueur de l’aube, une étude très serrée de l’amour et vous avez sur vous de la documentation. Partout où vous allez, vous portez en vous le poison des comparaisons et vous passez votre temps à attendre ce que vous avez déjà reçu. Je ne dis pas qu’il faille empêcher les mères d’aimer leurs petits. Je dis simplement qu’il vaut mieux que les mères aient encore quelqu’un d’autre à aimer. » (p. 38)

 Cette mère entière et passionnée lui a aussi communiqué une vision du monde idéalisée, difficile ensuite à  mettre en adéquation avec une réalité bien moins parfaite…

 « (…) elle continua d’évoquer, avec le même sourire confiant, ce pays merveilleux qu’elle avait apporté avec elle dans son baluchon ; quant à moi, élevé dans ce musée imaginaire de toutes les noblesses et de toutes les vertus, mais n’ayant pas le don extraordinaire de ma mère de ne voir partout que les couleurs de son propre cœur, je passai d’abord mon temps à regarder autour de moi avec stupeur et à me frotter les yeux, et ensuite, l’âge d’homme venu, à livrer à la réalité un combat homérique et désespéré, pour redresser le monde et le faire coïncider avec le rêve naïf qui habitait celle que j’aimais si tendrement. 

Oui, ma mère avait du talent – et je ne m’en suis jamais remis. » (p. 45)

 Pour panser ces blessures encore bien prégnantes dans le cœur de l’auteur, il utilise un humour dévastateur pour désarmer la réalité. Ainsi, il raconte ses exploits amoureux avec décalage et bonhomie, comme cette fois où il est allé jusqu’à manger un soulier en caoutchouc pour sa bien-aimée, puis « un éventail japonais, dix mètres de fil de coton, un kilo de noyaux de cerises – Valentine me mâchait, pour ainsi dire, la besogne, en mangeant la chair et en me tendant les noyaux – et trois poissons rouges, que nous étions allés pêcher dans l’aquarium de son professeur De musique. » (p. 85)

 Il explique combien l’humour est salvateur pour lui :

  « Attaqué par le réel sur tous les fronts, refoulé de toutes parts, me heurtant partout à mes limites, je pris l’habitude de me réfugier dans un monde imaginaire et à y vivre, à travers les personnages que j’inventais, une vie pleine de sens, de justice et de compassion. Instinctivement, sans influence littéraire particulière, je découvris l’humour, cette façon habile et entièrement satisfaisante de désamorcer le réel au moment même où il va vous tomber dessus. (…) L’humour est une déclaration de dignité, une affirmation de la supériorité de l’homme sur ce qui lui arrive. » (p.160)

 Ce roman magnifique est un chant d’amour touchant et profond en souvenir de cette mère entière, passionnée par son fils, dévouée entièrement à son bonheur, cette femme unique qui a permis à Romain Gary de devenir celui qu’il est encore aujourd’hui, au-delà du temps et de la mort, un auteur classique incontournable…

 « La création littéraire  devînt pour moi ce qu’elle est toujours, à ses grand moments d’authenticité, une feinte pour tenter d’échapper à l’intolérable, une façon de rendre l’âme pour demeurer vivant. » (p.175)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 Les années de guerre se font plus longues : le récit se fait plus dense, plus long, plus ennuyeux, moins humoristique.

 

Premières phrases :

 « C’est fini. La plage de Big Sur est vide, et je demeure couché sur le sable, à l’endroit même où je suis tombé. La brume marine adoucit les choses ; à l’horizon, pas un mât ; sur un rocher, devant moi, des milliers d’oiseaux ; sur un autre, une famille de phoques : le père émerge inlassablement des flots, un poisson dans le gueule, luisant et dévoué. »

 

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : Une éducation européenne

Autre : Le livre de ma mère de Albert COHEN

 

 

 D’autres avis :

 Blogs : Théoma  Zarline, A girl from earth, Alex, Maggie, Sylvie, Luocine... 

 

La promesse de l’aube, Romain GARY, folio, avril 1973, 7.50 euros

 

12 d'Ys 

  catégorie : Classiques français

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Quand reviennent les âmes errantes de François CHENG

Publié le par Hélène

                                           quand reviennent les âmes errantes

 

  « Toute vie est à refaire

A refaire et à réinventer

Ecoutez, un rossignol chante ! » (p. 154)

 

L’auteur :

 Né en 1929 dans la province de Shandong, François Cheng vit en France depuis 1949. Universitaire, poète, calligraphe, traducteur en chinois de Baudelaire, Rimbaud, René Char, des surréalistes, etc., il est l’auteur de nombreux livres dont, aux éditions Albin Michel, Le Dit de Tianyi (prix Femina), L’Éternité n’est pas de trop ou Cinq méditations sur la beauté. Il a également reçu le Grand Prix de la Francophonie pour l’ensemble de son oeuvre en 2001. Il a été élu à l’Académie française le 13 juin 2002.

 

Quatrième de couverture :

Dans une forme éminemment originale, François Cheng signe là un drame épique où le destin humain, avec toute la complexité des désirs qui l’habitent, se dévoile comme dans les tragédies antiques.

Quand reviennent les âmes errantes, un mystérieux échange se noue, et toute la vie vécue, extrêmes douleurs et extrêmes joies mêlées, se trouve éclairée d’une lumière autre, revécue dans une résonance infinie.

 

Ce que j’ai aimé :

Quand le destin de Chun-niang, « Dame du printemps » croise celui de deux hommes entrés dans sa vie par hasard, Gao Jian-li devenu maître de zhou, cet instrument à cordes proche de la cithare et Jing Ko, mercenaire devenu chevalier, tout l’ordre du monde et de leurs âmes s’en trouve tourmenté. Dans cette ère de la fin du IIIème siècle avant JC, leur amitié triangulaire ne pourra s’épanouir pleinement, heurtée de plein fouet par la vie tourmentée de leur pays.

 « L’ordre antique a fini par s’effondrer, la longue dynastie des Zhou a rendu l’âme. Voici que la vaste terre de Chine se divise en de multiples royaumes rivaux. (…) Partout règnent la violence, le désordre, l’arbitraire, l’injustice. » (p. 11)

 Comme dans les tragédies grecques, cœur et raison vont s’affronter, sans d’autre issue possible que la mort. Jing  Ko va être appelé à jouer un rôle déterminant dans cette lutte continuelle entre les royaumes chinois.  La passion des hommes va le mener vers la mort, cette mort qui permettra peut-être, enfin, la communion des âmes…

 « L’âme ? C’est bien par elle que la vraie beauté d’un corps rayonne, c’est par elle qu’en réalité les corps qui s’aiment communiquent. » (p.123)

 « La grande affaire pour un artiste, j'en suis persuadé maintenant, c'est d'entendre et de donner à entendre l'âme qui l'habite et qui résonne de fait à l'âme cachée de l'univers. » (p 46)

 L’histoire –vraie- de ces trois protagonistes éclaire cette époque tourmentée de l’histoire chinoise.

 

Ce que j’ai moins aimé :

 Malheureusement, le récit de François Cheng n’est qu’une pâle copie des tragédies grecques et le style offert ici reste plat et insignifiant.  Les interrogations tintent faussement à l’oreille du lecteur, accumulant les clichés en des questions existentielles frôlant le ridicule :

 « O mystère ! Qui sommes-nous ? Où sommes-nous » (p. 72)

« Quelle est cette énigmatique force du désir qui nous ballotte, nous pulvérise ? Et vers quel Au-delà ? » (p.72)

 « Orgueil, ambition, ivresse du pouvoir absolu, tout cela habite l’homme, le pousse à la folie. L’humain devient inhumain, et l’inhumain monstrueux. La violence engendrant la violence, celui qui vit de la terreur périt par elle. »  (p. 137)

 Quand reviennent les âmes errantes jette de la poudre aux yeux du lecteur sans parvenir aucunement à l’éblouir…

 

Premières phrases :

 « En ce bas monde, en ce très bas monde, tout est vicissitude, tout est transformation. Le livre des Mutations l’a démontré, les Anciens nous l’ont dit : « Tous les cinquante ans, petit changement ; tous les cinq cent ans, grand chambardement. » »

 

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : Cinq méditations sur la beauté

Autre : Electre de Jean GIRAUDOUX

 

D’autres avis :

 Presse : Le figaro 

 

 Quand reviennent les âmes errantes : drame à trois voix avec chœur, François Cheng, Albin Michel, mars 2012, 166 p., 14 euros

 ChallengeDragonFeu 

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