Lors d'une opération anti-drogue, la capitaine Noémie Chastain de la PJ de paris est blessée en pleine tête, défigurée par un coup de feu. A son retour, ses responsables préfèrent l'éloigner et la parachutent dans un petit village de l'Aveyron, Avalone, avec comme mission de savoir si le commissariat du village doit fermer. Si la rancœur et la colère animent dans un premier temps la jeune femme, l'atmosphère franche et naturelle de la province lui réussit plutôt bien. Quand tout à coup, le squelette d'un enfant disparu depuis vingt-cinq ans refait surface... Noémie devra résoudre ce cold case avec l'aide de ses nouveaux collègues.
Ce que j'ai moins aimé :
- Une psychologie des personnages quelquefois un peu sommaire, l'aspect "gueule cassée" de Noémie passant rapidement au second plan, la bluette amoureuse s'ajoutant de façon artificielle et non nécessaire à l'intrigue.
- Un twist final sentant trop le procédé obligatoire tellement il est peu crédible.
Bilan :
Un roman policier que je n'ai pas lâché, parfait pour l'été, même s'il souffre de quelques défauts !
Dans ce premier tome de la série nous faisons connaissance avec l'équipe de la commissaire Anne Capestan à qui le le divisionnaire Buron confie une équipe de bras-cassés, composés de tous les laissés pour compte de la police judiciaire, alcoolos, homos, porte-poisse, écrivains à l'égo surdimensionné, crétins notoires ... Mais cette équipe va finalement s'avérer plus efficace que prévu...
Rester groupés :
La troupe de Anne Capestan se voit dotée de nouveaux comme Saint-Lô, sorti de l'hôpital psychiatrique dans la peau de d'Artagnan et de Ratafia, rat policier. Ils enquêtent cette fois-ci sur plusieurs assassinats éparpillés sur le territoire et annoncés au préalable. L'ex beau-père de Capestan fait malheureusement partie des victimes...
Si l'enquête est un peu plus molle que dans le premier tome de la série, les touches d'humour sauvent le roman comme cette mythique course poursuite à dos de poneys dans le parc du Luxembourg. L'équipe n'ayant pas les moyens de se payer un logiciel de dessin, ils utilisent les jeux vidéos pour créer des avatars pour la reconnaissance des suspects, sauf qu'il ne faut pas oublier d'éviter de jouer avec cet avatar... Pour couronner le tout, le tome s'achève par un concours de fer d'or Philips qui vaut le détour !
Art de décès :
L'intrigue se déroule cette fois-ci sur un plateau de cinéma, car la capitaine Eva rosière devenue scénariste est accusée du meurtre d'un réalisateur qu'elle avait invectivé et menacé quelques minutes plus tôt.
Bilan des trois tomes :
Un ton enlevé à l'humour ravageur avec des discussions pour savoir si le 36 avait été au 38 si on l'aurait quand même appelé le 36, mais des intrigues un peu longuettes sans grande surprise.
D'autres avis : Poulets grillés : Yves ; Rester groupés : Babélio ; Art de décès : Babélio
Poulets grillés : 2015 Prix du polar des lecteurs de la Librairie Les Arcades de Tournus2015 Prix du meilleur polar francophone2015Prix Arsène Lupin2015 Prix Polar en Séries - Mention Série récurrente
En Dordogne, aux alentours du château de Montaigne des évènements étranges semblent avoir lieu : un jeune homme tombe d'une des plus hautes fenêtres du château et les petites filles de Michel Lespignac, spécialiste de Montaigne, se font enlever. A la croisée des chemins, une mystérieuse jeune fille Caroline Martin...
Pour résoudre ce cas épineux, l'enquête est confiée à Leïla Djemani, récemment promue commissaire et à Jean-Pierre Foucheroux, son ancien chef. Entre secrets de famille et vengeance, tout semble tourner autour d'un manuscrit inédit, un fragment du Supplément au Voyage en Italie rédigé en 1583 par Montaigne.
Ce que j'ai aimé :
- Les références littéraires
« Mes livres peuvent être lus comme de simples romans policiers, mais, si on connaît le texte source sur lequel je m’appuie, on peut s’amuser à reconnaître des citations cachées, des références stylistiques, des noms de personnages codés… C’est comme un clin d’œil permanent, une complicité à trois : un écrivain, une romancière, un lecteur. » dit l'auteur qui s'est spécialisée dans les romans qui entremêlent la vie d'un grand auteur et le polar (Proust, Colette, Yourcenar)
- La peinture du petit monde littéraire d'universitaires, entre rivalités et ambitions démesurées, faux manuscrits, est admirablement bien décrite.
Ce que j'ai moins aimé :
- La temporalité bousculée : les chapitres assez courts ne sont pas chronologiques, si bien que l'on se perd dans l'histoire.
- La fin de certains personnages, assez théâtrale et artificielle
- La psychologie des personnages, notamment de Véronica est difficile à cerner, surtout vers la fin
Bilan :
Une petite déception, l'alliance entre érudition et polar n'étant pas totalement aboutie à mes yeux.
Au cœur des Causses, une femme a disparu alors qu'elle était partie randonner. Quand les anciens parlent de "la tourmente" qui l'a emportée, d'autres explorent d'autres pistes et remontent le temps pour comprendre. Plusieurs personnes prennent alors la parole tour à tour pour dévoiler des secrets bien tapis au creux des montagnes... Qu'il s'agisse de l'assistante sociale de la région, de son mari Michel, de Joseph, paysan reclus dans ses montagnes, ou de Maribé, nouvellement arrivée dans le village, tous ont des choses à cacher... Si au premier abord, les récits semblent déconnectés les uns des autres, page après page, les vies se raccordent pour trouver leur cohérence.
Les êtres, perdus dans cette montagne qu'ils subissent quelquefois, sont hantés par la solitude qu'ils cherchent à combler à tous prix. Ils ne sont pas tous paysans par choix, beaucoup ont subi l'influence familiale, la pression pour reprendre la ferme des parents pesant sur leurs frêles épaules. Certains malfaisants profiteront et abuseront de cette solitude pour jouer avec les sentiments de ces êtres vulnérables.
Parfaitement maîtrisé, ce roman puise ses racines aussi bien dans des sujets d'actualité que dans une fine analyse sociologique des milieux paysans. Il est efficace aussi bien quand il nous plonge dans le Massif Central que quand il nous emmène en Afrique.
Prix Polar en séries de Quais du Polar 2017
• Prix Polar Landerneau 2017 • Prix de l'Académie cévenole Cabri d'or 2017
• Prix Goutte de Sang d’Encre 2017 • Prix du roman Cézam inter-CE 2018
« On n’est pas les sœurs de Bon Secours, merde ! On est la police ! »
Ils font équipe pour une soirée : Virginie, Erik et Aristide, gardiens de la paix, sont chargés d'une mission particulière : reconduire à l'aéroport Charles de Gaulle un étranger en situation illicite. Virginie comprend rapidement que ce retour au pays signifie pour leur passager la mort certaine. Dans ce cas précis, préservent-ils réellement la paix ? Cette mesure est-elle juste ? Qui en prend l'entière responsabilité ?
« La responsabilité est dispersée entre la Préfecture, les gardiens, les escorteurs, la Police aux frontières, les pilotes, les hôtesses, les stewards, pour que chacun ait le confort de penser : ce n’est pas moi, c’est l’autre. »
Dans un récit ramassé particulièrement efficace, Hugo Boris s'interroge sur le droit, la morale, responsabilité. En deux phrases, deux mots, deux silences, il heurte ses personnages et les pousse dans leurs retranchements, créant une intensité percutante. A travers leurs contradictions et hésitations, l'humanité de ces hommes et femmes malmenés transparaît et nous frappe par sa pureté...
"Chacun veut la loi pour les autres et la liberté pour soi, pas vrai ? L'ensemble compte plus que l'individu."
Yeruldelgger a fui la capitale Oulan-Bator pour trouver refuge au coeur du désert de Gobi, loin de la violence du monde. Il espère se ressourcer, se recentrer. Mais c'est sans compter l'arrivée de deux femmes : l'une recherche sa fille disparue et l'autre a aussi une requête à lui soumettre. Yeruldelgger abandonne alors sa retraite spirituelle pour venir en aide à ces âmes perdues...
Au début du roman les failles de Yeruldelgger apparaissent en filigrane, subtiles, émoussant peu à peu le moral de cet homme blessé venu chercher l'apaisement. Mais malheureusement, cet aspect s'efface, d'autres personnages font leur apparition, nombreux, très nombreux, provoquant la disparition progressive de notre héros noyé dans trop d'intrigues différentes et emberlificotées avec un nombre impressionnant de cadavres sur sa route !
Le charme s'efface, l'action tonitruante prend le dessus petit à petit et on en vient à regretter le début du roman, tellement plus juste. Les dénonciations fusent, entre écologie, politiques, abus de pouvoir, non-respect des traditions, un florilège des tous les thèmes liés au pays défilent...
Il s'agit là du dernier opus lié à la série des Yeruldelgger, il était temps que l'auteur passe à autre chose !
"Tolérance zéro, réflexion zéro, voilà la politique en matière de stupéfiants pratiquée dans mon pays pourtant dirigé par des premiers de la classe."
Patience Portefeux, 53 ans, est une femme seule, veuve, devant assumer les frais couteux de sa mère à l'hospice. Elle a travaillé toute sa vie en ayant toujours des difficultés pour boucler les fins de mois. Son métier lui offre alors une opportunité décalée : alors qu'elle pratique des traductions d'écoutes téléphoniques dans les enquêtes des stups et du grand banditisme, un magot lui tombe soudain du ciel. De fil en aiguille, elle devient la Daronne...
Ce roman original et très bien écrit met en scène une héroïne au profit atypique, une femme de 53 ans qui rêvait enfant de collectionner les feux d'artifice, rêve fou que la vie a allègrement piétiné. A l'heure de prendre sa revanche, elle n'hésite pas un instant, tant elle est désabusée par la société et les politiques qui la régissent. L'amoralité du monde qui l'entoure, l'illogique d'un système qui fonctionne à l'envers la pousse à jouer ses propres cartes. Par exemple, si elle travaille pour la police, elle est payée au noir par le ministère. "C'est d'ailleurs assez effrayant quand on y pense, que les traducteurs sur lesquels repose la sécurité nationale, ceux-là mêmes qui traduisent en direct les complots fomentés par les islamistes de cave et de garage, soient des travailleurs clandestins sans sécu, ni retraite. Franchement comme incorruptibilité on fait mieux, non ?
Enfin, moi qui suis corrompue, je trouve ça carrément flippant."
De même, elle reste lucide sur la façon dont est menée la lutte contre la drogue en France : avec cette tolérance 0 et des moyens faramineux déployés pour lutter contre les délinquants, mais, parallèlement et paradoxalement, des français de souche loin d'être irréprochables terrés dans leur campagne et épargnés.
"Quatorze millions d'expérimentateurs de cannabis en France et huit cent mille cultivateurs qui vivent de cette culture au Maroc. Les deux pays sont amis et pourtant ces gamins dont j'écoutais à longueur de journées les marchandages purgeaient de lourdes peines de prison pour avoir vendu leur shit aux gosses de flics qui les poursuivent, à ceux des magistrats qui les jugent ainsi qu'à tous les avocats qui les défendent. Du coup ils deviennent amers et haineux. On ne m'enlèvera pas de l'esprit (même si mon ami flic m'affirme que je me trompe) que cette débauche de moyens, cet acharnement à vider à la petite cuillère la mer de shit qui inonde la France, est avant tout un outil de contrôle des populations en ce qu'elle permet de vérifier l'identité des Arabes et des Noirs dix fois par jour."
Ce que j'ai moins aimé : Le cynisme grinçant de cette anti-héroïne moderne est assez désespérant notamment en ce qui concerne la gestion de la vieillesse et la solitude dans laquelle se meuvent les êtres.
Bilan : Un roman percutant, marquant qui mérite amplement tous les prix obtenus :
Grand Prix de littérature policière - 2017 / Prix Le Point du polar européen - 2017 / Meilleur polar de l'année 2017, selon le Magazine Lire
Pour découvrir qui est cette recluse inclue dans le titre, il faudra attendre avec patience que l'auteure, avec talent, nous emmène dans une direction, puis une autre, prenant plaisir à promener son lecteur au gré de ses intrigues et de ses mots. Elle suit les méandres labyrinthiques de son commissaire préféré, un homme qui va son rythme, ne se presse pas, mais suit son idée fixe sans la lâcher. Il s'aide de la marche pour progresser dans ses pensées : "Les secousses de la marche, de la déambulation, mettent en mouvement les micro-bulles gazeuses qui se promènent dans le cerveau. Elles bougent, se croisent, se cognent; Et quand on cherche des pensées, c'est une des choses à faire."
Il s'attache aux pattes de sa recluse quitte à laisser en route une partie de son équipe. Il ne faudra rien de moins qu'un coup de poing pour remettre les idées en place à un Danglard vacillant, une solution certes un brin violente, mais qui s'avèrera diablement efficace.
La recluse arrivera doucement sur ses pattes de velours et s'installera au fil des pages, comme un fil conducteur qui tisse sa toile lentement. Ceux qu'elle prendra dans ses rets devront se méfier ...
Comme toujours chez Fred Vargas, les personnages sont bien campés et le plaisir des mots se fait sentir avec des dialogues enlevés et spirituels. Un vrai plaisir !
Les Doges, un hameau perdu au fin fond des Cévennes. Gus et Abel ont toujours vécu dans cette région désertée et ce sont adaptés à la solitude. S'ils sont voisins, ils ne se cotoient pas pour autant, pas plus que nécessaires, et chacun passe cet hiver dans son domaine, isolé.
"Un lieu-dit appelé Les Doges, avec deux fermes éloignées de quelques centaines de mètres, de grands espaces, des montagnes, des forêts, quelques prairies, de la neige une partie de l'année, et de la roche pour poser le tout. Il y avait aussi des couleurs qu disaient les saisons, des animaux, et puis des humains, qui tout à tout espéraient et désespéraient, comme des enfants battant le fer de leurs rêves, avec la même révolte enchâssée dans le coeur, les mêmes luttes à mener, qui font les victoires éphémères et les défaites éternelles." p. 9
L'hiver se ressent au plus profond des êtres et des âmes, tant les humains là-bas s'adaptent à leur environnement, ne faisant qu'un avec la terre qu'ils labourent. Leur accord est tellement intense avec la nature, que le jour où Gus rencontre un jeune faon mourant, il reste à ses côtés jusqu'à la fin, en lui parlant.
Mais ce jour-là, des évènements étranges vont déranger le quotidien routinier de Gus, et d'interrogations en interrogations, il se plonge alors dans son passé...
"Gus pensait que c'était décidément une drôle de journée, avec tous ces souvenirs qui s'amenaient, comme des vols de corneilles sorties du brouillard. Des souvenirs dont on ne sait jamais où ils mènent, ni même si ça fait du bien de les avoir, mais qui ressurgissent et s'imposent, sans crier gare"
Des secrets tapis dans les campagnes surgissent alors, sans crier gare, la violence s'invite, la rage palpite au milieu des solitudes. A trop rester esseulés, les êtres ont tendance à inviter la belle et traitresse imagination dans leur foyer, à leurs risques et périls. Même les visiteurs occasionnels planent tels des anges de l'apocalypse.
Dans ce roman atypique, chaque expression est travaillée, en relation avec la terre, les paysans. La psychologie affinée de ces deux bougres les rend attachants au-delà de leurs contradictions. Leur histoire nous porte plus loin qu'une simple intrigue policière, et nous parle de la vie et ses revers, de la vie et ses surprises, de la vie comme elle va, parfois, cahin-caha.
Ce que j'ai moins aimé : la fin, confuse et un peu précipitée, tout à coup tout se dénoue, alors que jusqu'ici les noeuds qui faisaient l'intérêt du roman étaient subtils et lentement amenés.
Dans la sélection du prix polar SNCF et il est possible ce mois-ci de le découvrir en format numérique ici : https://e-livre.sncf.com/page/prix-polar-2017
Grossir le ciel, Franck Bouysse, Le livre de poche, 240 p., janvier 2016, 6.90 euros
Alain Delambre, est un cadre de 57 ans au chômage depuis quatre ans. Ainsi quand un beau jour il est convoqué à un entretien d'embauche, il décide de mettre toutes les chances de son côté. Et pourtant, l'entretient d'embauche d'un nouveau genre répugne à sa femme : il s'agit de participer à un jeu de rôle sous la forme d'une prise d'otages... Sa dignité est en jeu, Alain n'hésite pas.
Toute la première partie du roman présente le point de vue de Alain, cet homme désoeuvré pour qui le travail représente une voie vers le bonheur après tant d'années à errer et à courir après l'argent. Trouver un travail est pour lui une chance salvatrice car cela lui permettrait de payer les traites, "des vacances, des sorties, des inscriptions à la fac, les voitures et la certitude que notre travail appliqué, résolu, nous fournissait la récompense à laquelle nous avions droit." p. 105
Cette nécessité est tellement prégnante qu'Alain bascule peu à peu, et lance une machine qu'il ne peut plus freiner. Hanté par un sentiment d'humiliation ou d'injustice, reclus dans une extrême solitude, armé, Alain n'a plus rien à perdre...
Au moment où le récit s'alourdissait sous le poids des actions d'Alain, l'auteur opère un choix de maitre en quittant son personnage alourdi pour choisir un nouveau point de vue. Et il cumule ensuite les renversements, les surprises, les manipulations, prenant un malin plaisir à surprendre son lecteur. Incidemment, il le mène à porter un regard neuf et désabusé sur notre société moderne régie par des logiques absurdes...
"L'autre jour, il m'est revenu un truc que Charles m'avait dit (lui, avec ses sentences...) : "Si tu veux tuer un homme, commence par lui donner ce qu'il espère le plus. Le plus souvent, ça suffit." p. 441
Ce que j'ai moins aimé :
- Une première partie un peu longue.
- Un style peu travaillé : "Ils ont dû, commente la note, se rencontrer dans une circonstance professionnelle, genre séminaire, salon, etc." p. 165