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roman policier francais

La vérité sur l'affaire Harry Quebert de Joël DICKER

Publié le par Hélène

                    

♥ ♥

"Marcus, savez-vous quel est le seul moyen de mesurer combien vous aimez quelqu'un ?

- Non.

- C'est de le perdre."

 

Mon avis :

Le point fort de ce roman est indéniablement l'intrigue. Haletante, pleine de rebondissements elle rend le lecteur addict, le poussant à prolonger sa lecture jusque tard dans la nuit.

Harry est-il coupable de la disparition de la jeune Nola en 1975 dont on vient de retrouver le cadavre dans le jardin même de Harry. Le narrateur est bien décidé à prouver son innocence et il va aller de découvertes en découvertes...

L'intrigue policière est cohérente et palpitante et elle constitue le squelette du roman, ce qui lui permet de tenir debout. Otez-lui cela, il n'en restera pas grand-chose : des réflexions mièvres sur l'amour, une vision désabusée du monde de l'édition devenu une vaste entreprise marketing, les conclusions superficielles s'enchaînent, que l'on pourrait résumer ainsi :

"L'amour, c'est beau" = "Dans notre société, Marcus, les hommes que l'on admire le plus sont ceux qui bâtissent des ponts, des gratte-ciel et des empires. Mais en réalité, les plus fiers et les plus admirables sont ceux qui arrivent à bâtir l'amour. Car il n'est pas de plus grande et de plus difficile entreprise."

Mais "l'amour c'est compliqué" : « Vous essayez de me parler d'amour, Marcus, mais l'amour, c'est compliqué. L'amour, c'est très compliqué. C'est à la fois la plus extraordinaire et la pire chose qui puisse arriver. Vous le découvrirez un jour. L'amour, ça peut faire très mal. Vous ne devez pas pour autant avoir peur de tomber, et surtout pas de tomber amoureux, car l'amour, c'est aussi très beau, mais comme tout ce qui est beau, ça vous éblouit et ça vous fait mal aux yeux. C'est pour ça que souvent, on pleure après »

"Ecrire, c'est beau aussi" mais "la vie, c'est dur" : "Ecrire c'est être dépendant. De ceux qui vous lisent, ou ne vous lisent pas. La liberté c'est de la foutue connerie ! Personne n'est libre. J'ai une partie de votre liberté dans les mains, de même que les actionnaires de la compagnie ont une partie de la mienne entre les leurs. Ainsi est faite la vie, Goldman. Personne n'est libre. Si les gens étaient lires, ils seraient heureux. Connaissez-vous beaucoup de gens véritablement heureux ?"

"Le monde de l'édition, c'est pas bien" : " Il considérait que sa stratégie n'était ni pire ni meilleure que celle des autres, que le monde des livres était passé du noble art de l'imprimerie à la folie capitaliste du XXI ème siècle, que désormais un livre devait être écrit pour être vendu, que pour vendre un livre il fallait qu'on enparle, et que pour qu'on en parle il fallait s'approprier un espace qui, si on ne le prenait pas soi-même par la force, serait pris pat les autres. Manger ou être mangé."

Les personnages ne sont pas crédibles : comment le narrateur parvient-il à s'immiscer si facilement dans une enquête policière, comment le grand Harry a-t-il pu tomber amoureux de cette "Nola chérie" si mièvre, pourquoi le chargé de l'enquête accepte-t-il le narrateur brusquement après l'avoir rejeté au début du roman, et j'enpasse, autant de questions qui mettent l'accent sur des ficelles grossières, toutes au service de l'intrigue, sans cohérence. De surcroit le style est plat, enfonçant davantage le roman dans une superficialité prégnante. 

Je rejoins donc le choeur de ceux qui se demandent pourquoi et comment ce roman a-t-il pu obtenir le Grand Prix de l'Académie Française ? Pour le prix du Goncourt des Lycéens je le conçois car les lycéens ont dû retrouver le fonctionnement et les problématiques de certaines séries à succés efficaces, mais pour l'Académie française, je m'interroge...

Un bon roman de plage, mais ne cherchez pas plus loin !

Premières phrases :

"Tout le monde parlait du livre. Je ne pouvais plus déambuler en paix dans Manhattan, je ne pouvais plus faire mon joging sans que des promeneurs me reconnaissent et s'exclament : "Hé, c'est Goldman ! C'est l'écrivain !". 

Vous aimerez aussi :

Les apparences de Gillian Flynn

D'autres avis :

Clara ; Violette ; Babélio 

Télérama

La vérité sur l'affaire Harry Quebert, Joël DICKER, De Fallois poche, 2014, 9.20 euros

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Sombre tango d'un maître d'échecs de Jean-François BOUCHARD

Publié le par Hélène

                                       

♥ ♥

"Les échecs sont la traduction sur une planchette de bois de la vie et de la mort, du sang et de la haine, de la colère et de la force. Et le sang, la mort et la haine débordent si souvent de l'échiquier..."

Ce que j'ai aimé :

1927. La Havane. Deux maîtres d'échec s'affrontent : José-Paul Capablanca, enfant prodige cubain, et le russe Alexandre Alekhine, qui tente ici d'acquérir  le titre de champion du monde détenu par Capablanca. Sur fond de réalité historique l'auteur installe sa trame : Capablanca est accompagné par un vieux professeur, le narrateur, aux premières loges pour raconter la partie qui se joue dans l'ombre : en effet Capablanca reçoit de mystérieuses lettres anonymes qui sous-entendent qu'il pourrait empêcher le meurtre d'innocents. Piqué dans son orgueil de joueur, Capablanca se précipite dans les bas-fonds de la Havane pour lutter contre son ennemi anonyme.

 Le suspens est discret, laissant la part belle aux personnages aux personnalités bien marquées : le russe terrassé par ses démons et par l'enjeu des parties, Capablanca, bon viveur grand amoureux des femmes, et le vieux professeur que la vieillesse rattrape inexorablement avec ses lots de regrets et de remords. Les univers de ces êtres sont diamétralement opposés, et pourtant, ils vont s'affronter, s'entraider, se jauger et se juger. Les lecteurs peu amateurs de polar pourront de fait parfaitement apprécier le récit qui oscille entre intrigue vaguement policière et portrait psychologique affûté des deux joueurs et de ceux qui gravitent dans leur ombre.

A l'image du jeu mythique, le roman brille par sa construction calibrée. Un bon moment de lecture !

Ce que j'ai moins aimé :

Les allusions aux évolutions technologiques de l'époque (le téléphone, l'ascenseur...) sont un peu trop marquées.

Infos pour le livre :

Chez Max Milo

Premières phrases :

"La Havane. 1942.

Il arrive que certains hommes soient des miracles de Dieu. Je distrais mes vieux jours en faisant leur connaissance au cours de s longues heures que je passe à la bibliothèque municipale de la Havane. Je lis leur histoire dans les lovres qui leur sont consacrés."

Vous aimerez aussi :

Le duel de iNDRIDASON

D'autres avis :

Yves 

 

Sombre tango d'un maître d'échecs, Jean-François Bouchard, Max Milo, 18 euros

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Fakirs de Antonin VARENNE

Publié le par Hélène

fakirs.jpg

 ♥

 

Grand prix 2010 Meilleur Polar des lecteurs de Points

 

L’auteur :


Né à Paris, Antonin Varenne n’y restera que quelques mois avant d’être enlevé par ses parents pour vivre aux quatre coins de France, puis sur un voilier. Il n’y reviendra qu’à vingt ans, pour poursuivre des études à Nanterre.

Après une maîtrise de philosophie (Machiavel et l’illusion politique), il quitte l’Université, devient alpiniste du bâtiment, vit à Toulouse, travaille en Islande, au Mexique et, en 2005, s’arrime au pied des montagnes Appalaches où il décide de mettre sur papier une première histoire. 

Revenu en France accompagné d’une femme américaine, d’un enfant bilingue et d’un chien mexicain, il s’installe dans la Creuse et consacre désormais son temps à l’écriture.

Antonin Varenne remporte le prix Quais du polar-20 minutes 2012 (Source : Babélio)

http://antoninvarenne.over-blog.com/

 

L’histoire :

 

« On ne sortait des Suicides qu'à la retraite, par démission, via une dépression ou en finissant soi-même avec son arme de service dans la bouche.

De ces options, toutes étaient souhaitées à Guérin, dans un ordre variable. Mais celle que personne n'avait envisagée était qu'il s'y sente comme un poisson dans l'eau.

C'était arrivé. Résultat, le lieutenant Guérin flanqué de son stagiaire, Lambert — avait ajouté à la haine de ses collègues la répulsion viscérale qu'inspirent les pervers, lorsque, plongeant dans ce qui répugne à tous, ils semblent s'y régaler. » 

Ailleurs en France, au bord d'une rivière, John Nichols, un Franco-Américain installé dans un tipi, est convoqué à la gendarmerie de Saint-Céré. Là, on lui apprend la mort de son ami américain, Alan Mustgrave, intervenue alors qu'il s'écorchait en direct sur une scène du Paris underground, fort cotée pour ses spectacles sado-maso.

Soif de pouvoir, suicide, torture... On rit pourtant, jaune ou noir, c'est selon. L'auteur ne nous laisse aucun répit, et nous dépeint, en prime, de magnifiques personnages. (Source : Babélio)

 

 Ce que j’ai aimé :

 

Le commissaire Guérin est un personnage tourmenté, poursuivi par ses démons et par son passé. Mis au « placard » au service des suicides du quai des Orfèvres, et secondé par Lambert, jeune recrue, il croise le destin tragique de Alan Mustgrave, fakir mort sur scène. L’ami d’Alan, John, enquête sur cette mort qui révèle des dessous surprenants…

« En chemin, il chercha un lien entre de ce monde sans revanche possible et un fakir, mort sur scène d’une hémorragie. Evident. Le rapport était une ressemblance parfaite. Un monde d’hommes se tenant maladroitement debout sur des tapis de clous, courant et se fuyant les uns les autres. » (p. 176)

Les personnages sont bien campés psychologiquement, denses, ils dévoilent leur part d'ombre et de lumière au fil des pages. L'intrigue originale et ces personnages tourmentés créent un univers atypique en clair obscur, qui ne laisse pas le lecteur indifférent ! Un livre marquant !

 

 Ce que j’ai moins aimé :

 L'intrigue patine un peu.

Assez glauque...

Premières phrases :

 

« Lambert se bouffait les ongles.

Le clair-obscur plongeait es trois flics dans un espace-temps imprécis, vaseux, perdus dans le compte des jours et des nuits. Une odeur d’alcool et de tabac froid avait empli la petite pièce. La fatigue s’entendait dans les voix mal réveillées, rauques malgré l’heure avancée de la matinée. »

 

Vous aimerez aussi :

 

 Du même auteur : Le gâteau mexicain

Autres : Les romans de Fred Vargas

 

D’autres avis :

 

Babélio

  

Fakirs, Antonin Varenne, Points, 7.20 euros

 

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Tessa de Marc VILLARD

Publié le par Hélène

tessa.jpg

Lundi dernier la SNCF distribuait des courtes nouvelles dans les trains franciliens.

http://www.20minutes.fr/societe/1276387-20140120-ceux-aiment-lire-prendront-train

Parmi celles-ci, j'ai pu découvrir "Tessa" de Marc Villard.

 

Le pitch :

Un braquage qui tourne mal, et voilà Fly, blessé à l'épaule et seul dans les rues de Villeneuve-lès-Avignon. Recherché par les gendarmes, il finit par trouver refuge dans la maison de Tessa, une jeune photographe qui vit seule. (Source : Babélio)

Mon impression est mitigée. En raison sans doute du format de la nouvelle, tout va trop vite :

- le style est coupé au couteau (sujet verbe complément),

- les personnages ont une psychologie assez sommaire : le méchant a tout de même un grand coeur (qui s'ouvre très vite), la jeune fille a un passé trouble qui explique ses dérives actuelles, des profils assez classiques somme toute...

- l'intrigue est peu crédible à mes yeux.

Mais nous sommes tout de même bien au-dessus d'un Guillaume Musso ou d'un Gilles Legardinier...

AInsi sur le dispositif lui-même je dirais que le bilan est plutôt positif puisque finalement il enjoint les voyageurs à lire autre chose que ce qu'ils ont l'habitude de lire. Malheureusement, ils n'ont pas le temps de finir la nouvelle pendant un voyage en train. Il aurait fallu pour ce faire des récits de 20 pages quand ici il en compte une soixantaine.

Un petit macaron posé sur la couverture nous encourage à faire voyager ce livre de main en main : "Ce livre aime le train, faites-le voyager de main en main."

J'aime beaucoup cette idée de livre voyageur, aussi mon exemplaire retrouvera dés demain les banquettes des trains...

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Yeruldelgger de Ian MANOOK

Publié le par Hélène

yeruldelgger.jpg

♥ ♥ ♥ ♥

Un premier roman remarquable !

 

L’auteur :

 Ian Manook a sûrement été le seul beatnick à traverser d'Est en Ouest tous les États-Unis en trois jours pour assister au festival de Woodstock et s'apercevoir en arrivant en Californie qu'il s'ouvrait le même jour sur la côte Est, à quelques kilomètres à peine de son point de départ. C'est dire s'il a la tête ailleurs. Et l'esprit voyageur !

Journaliste, éditeur, publicitaire et désormais romancier, Yeruldelgger est son premier roman, et le premier opus d'une série autour du personnage éponyme qui nous conduit des steppes oubliées de Mongolie aux bas-fonds inquiétants d'Oulan-Bator.
Il vit à Paris.

 Interview ici : http://www.unwalkers.com/entretien-entretien-qui-me-tiens-ian-manook-du-pur-delire/

L’histoire :

 Le corps enfoui d’une enfant, découvert dans la steppe par des nomades mongols, réveille chez le commissaire Yeruldelgger le cauchemar de l’assassinat jamais élucidé de sa propre fille. Peu à peu, ce qui pourrait lier ces deux crimes avec d’autres plus atroces encore, va le forcer à affronter la terrible vérité. Il n’y a pas que les tombes qui soient sauvages en Mongolie. Pour certains hommes, le trafic des précieuses « terres rares » vaut largement le prix de plusieurs vies. Innocentes ou pas.

Dans ce thriller d’une maîtrise époustouflante, Ian Manook nous entraine sur un rythme effréné des déserts balayés par les vents de l’Asie Centrale jusqu’à l’enfer des bas-fonds d’Oulan-Bator. Il y avait la Suède de Mankell, l’Islande d’Indridason, l’Ecosse de Rankin, il y a désormais la Mongolie de Ian Manook !

 

Ce que j’ai aimé :

 L’inspecteur Yeruldelgger est un homme brisé par la mort de sa petite fille Kushi, un homme rongé par la culpabilité, haï par son autre fille Sara qui l’accuse d’être à l’origine de la mort de sa sœur et de la folie de leur mère. Quand un vieil homme lui confie l’âme d’une petite fille dont le corps vient d’être retrouvé enfoui avec son tricycle, il se jette corps et âme dans l’enquête, comme pour expier. Mais ses fantômes le rattrapent rapidement, tenaces. Il lui faudra alors puiser dans l’enseignement des moines du monastère de Yelintey, qu'il a fréquenté enfant sur les conseils de son père qui souhaitait préserver les traditions après la destruction des monastères par le régime.

« Les anciens affirmaient encore à voix basse, se méfiant des délateurs et des espions, qu’un seul moine avait réchappé à la razzia des révolutionnaires et continuait à enseigner, dans les ruines du temple, une pensée plus pure et plus limpide encore que le bouddhisme le plus intransigeant. Il se disait aussi que par deux fois les révolutionnaires étaient revenus en force pour revendiquer définitivement le superstitieux et que par deux fois ils avaient été défaits par ce que le seul survivant avait qualifié de force invisible et mystérieuse. » (p. 194)

Ian Manook nous montre ici une Mongolie partagée entre traditions et modernité, gangrénée par un nationalisme violent. Les traditions se perdent à Oulan Bator :

« Nous avions des espaces immenses, des coutumes et des légendes séculaires, et regarde ce que nous sommes devenus !

- C’est ce que la vie a fait de nous ! soupira la femme.

- Non, c’est faux, la vie ne fait rien de nous. A vie, c’est nous uqi la faison, à coups de renoncements, peurs, abandons, tricheries, colères ! C’est nous qui nous  empêchons d’en faire autre chose que ce qu’elle est. » (p. 480)

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© Pichugin Dmitry - Shutterstock

Dans les steppes néanmoins, les vieillards enseignent les traditions aux plus jeunes pour que ne meure pas l'esprit séculaire de la Mongolie. Yeruldelgger est un personnage qui tente de faire la jonction entre ces deux mondes, entre la violence qu'il cotoie au quotidien et l'âme de la Mongolie, faite de rites et animée par un souffle puissant et salvateur.

L’enquête que  mène Yeruldelgger, aidé par Solongo, médecin légiste et par Oyun son adjointe, le confronte à des groupuscules nazis, à des chinois en colère, à des hommes avides de pouvoir et d’argent, pour qui une vie humaine a bien peu de prix.

De rebondissements en secrets enfouis, le rythme se fait haletant pour ce thriller passionnant, époustouflant, pour un premier roman ! A lire absolument. 

 

Ce que j’ai moins aimé :

 - Rien.

 Premières phrases :

 « Yeruldelgger observait l’objet sans comprendre. D’abord il avait regardé, incrédule, toute l’immensité des steppes de Delgerkhaan. Elles les entouraient comme des océans d’herbe folle sous la houle irisée du vent. Un long moment, silencieux, il avait cherché à se convaincre qu’il était bien là où il se trouvait, et il y était bien. »

 Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : sous le pseudo de Patrick Manoukian "Le temps du voyage, petite causerie sur la nonchalance et les vertus de l'étape" chez Transboréal ; sous le pseudo de Paul Eyghar "Les Bertignac" chez Hugo et cie.

Pour la suite des aventures de Yeruldelgger ce sera peut-être début 2014. On croise les doigts...

AutreLe dernier lapon d’Olivier TRUC ; Les roman de Galsan Tschinag :  Ciel bleu : une enfance dans le Haut Altaï de Galsan TSCHINAG

 

D’autres avis :

 Yves tout aussi enthousiaste... 

 

Yeruldelgger, Ian Manook, Albin Michel, octobre 2013, 542 p., 22 euros

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Meurtre au sommet de José GIOVANNI

Publié le par Hélène

   meutre-au-sommet.jpg 

♥ ♥ ♥

 

  L’auteur :

  Pendant la Seconde Guerre mondiale, José Giovanni entre dans la Résistance Française. La Libération venue, il est accusé de racket. Emprisonné en 1945, il est condamné à mort. Son père, certain de son innocence, oeuvre corps et âme pour le réhabiliter. Après onze années de lutte, José Giovanni obtient la grâce présidentielle. A trente-trois ans, l'homme est enfin libre. Il prend la plume pour se soulager de cette mauvaise expérience, 'Le Trou' paraît en 1957. Deux années plus tard, Jacques Becker l'adapte au cinéma. Ecrivain, il devient aussi scénariste et dialoguiste pour différents grands noms du cinéma : Becker, Sautet… Dans les années soixante, Giovanni se place, à son tour, derrière la caméra : 'Le Rapace', 'Deux hommes dans la ville'... Il devient un fidèle du film noir, et tourne avec les meilleurs acteurs de l'époque : Belmondo, Delon, Gabin, Ventura… Réalisateur pour le cinéma, il l'est également pour la télévision à partir des années quatre-vingts. La décennie suivante, Giovanni délaisse la réalisation au profit de la plume. Auteur de nombreux ouvrages, il tire de son récit autobiographique, 'Il avait dans le coeur des jardins introuvables', le film 'Mon père', dirigé par Bertrand Tavernier. Il décède d'une hémorragie cérébrale, laissant derrière lui une oeuvre très riche. (Source : Evene)

 

L’histoire :

  En cet été 1962, le riche industriel Jean Réno [ça ne s’invente pas !], 45 ans, célibataire, beau gosse, est brutalement rattrapé par son passé trouble. Une raison suffisante pour aller se changer les idées en haute montagne. Au programme : la face nord des Drus, le bivouac au pied du grand névé conique, l'attaque du granit et de ses cheminées étroites et enfin l'ivresse du sommet atteint. La dernière ascension pour Jean Réno, dont le corps s'écrabouille dans une crevasse, huit cents mètres plus bas. Accident ou meurtre ? L'aiguille du Dru pourrait-elle être le terrain idéal du crime parfait ? Chargé de l'enquête par une compagnie d'assurances, Georges, jeune détective parisien, peine à démêler l'écheveau. (Quatrième de couverture)

 

Ce que j’ai aimé :

  Jean Réno est un riche industriel au passé peu reluisant qui va subir le chantage d’un de ses anciens acolytes. Pour échapper à cette pression, il décide de s’aérer à Chamonix et de s’adonner à son activité favorite : l’alpinisme. Malheureusement, il chute en escaladant la face nord des Drus et se tue. Accident, suicide, meurtre ? La compagnie d’assurances décide d’enquêter. Georges, enquêteur de pacotilles est dépêché sur place, mais il pense davantage à courser les jolies filles qu’à découvrir la vérité…

 

 drus2.jpg

En plantant le décor de son roman à Chamonix, José Giovanni navigue en terrain connu puisqu’il est lui-même alpiniste passionné par la haute montagne. Il nous invite donc dans un univers connu, aux côtés de personnages emblématiques du lieu et de l’époque comme les alpinistes Louis Lachenal, Lionel Terray et Gaston Rébuffat, le grand reporter à Paris-Match Gérard Géry, ou encore Louis Janin le patron de l’hôtel de Paris.

L’auteur s’attache également aux valeurs véhiculées par la montagne :

 « La montagne ne lui avait encore jamais menti. Avec elle, il avait toujours su à quoi s’en tenir. Elle siplifiait tous les problèmes, les ramenait à l’essentiel : la vie ou la mort.

Si dans la société des Vallées il existait mille manières de vivre (à plat ventre, à genoux, à quatre pattes, mi-tortue mi-reptile), en haute montagne ceux qui vivaient vivaient debout. Même ceux que la foudre surprenait, on les retrouvait debout.

C’était ça la réponse de la montagne, cette réponse que Réno faisait sienne : vivre debout ou mourir. » (p. 56)

 Les dangers de la montagne et ses morts sont bien présents, mais l'aspect tragique de la destinée de certains est contrebalancé par le ton humoristique donné par le personnage de Georges, dragueur léger et sympathique.

La résolution de l’intrigue est machiavélique, surprenant le lecteur déjà conquis par cette atmosphère hautement fascinante.

 

Ce que j’ai moins aimé :

 Le mystère que le passé trouble de Jean Réno n’est pas levé, alors que ledit mystère est au cœur du chantage exercé sur l’industriel…


Premières phrases :

 « Jean Réno s’approcha d’une fenêtre de son bureau ? De là, il avait une vue d’ensemble sur les laboratoires de produits pharmaceutiques. Il voyait même les grandes lettres noires : LABORATOIRES J. RENO. »

 

Meurtre au sommet, José Giovanni, Hoëbeke, 1997, 213 p., 15 euros

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Les harmoniques de Marcus MALTE

Publié le par Hélène

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Une somptueuse ballade aux accents de jazz

 L’auteur :

 http://marcusmalte.wix.com/marcusmalte#!biographie

 L’histoire :

 Souviens-toi, on rêvait d’un monde de justice… Vera Nad, vingt-six ans, jeune femme au visage d’ange. Morte. Son corps, ou ce qu’il en reste, est retrouvé un matin dans un entrepôt désaffecté. La police conclut à un règlement de comptes entre dealers. Les coupables sont rapidement arrêtés. Affaire classée. Pas pour tous. Mister, le pianiste au grand cœur, et Bob, son acolyte, chauffeur de taxi érudit, ne croient pas à cette version des faits. Vera était leur amie, ils se doivent de mettre au jour la vérité. Une quête qui les conduira des hautes sphères de la politique française jusqu’aux rives lointaines du Danube. De Paris à Vukovar. Des riches demeures des princes aux charniers des Balkans. Du présent au passé. Car en tout temps règnent le mal et la corruption, en tout lieu les plus bas instincts de l’homme se déchaînent. Et seul l’écho des cris des victimes ne meurt jamais. Quatre ans après le phénoménal Garden of love, Marcus Malte renoue avec son duo de personnages fétiches pour composer cette fois une somptueuse ballade aux accents jazz. Un chant d’amour, poignant, dans lequel ces « voix chères qui se sont tues » n’en finissent pas de résonner. (Quatrième de couverture)

 

Ce que j’ai aimé :

 « - Harmeûniques ? C’est quoi les harmeûniques ?

- Les notes derrière les notes, dit Mister. Les notes secrètes. Les ondes fantômes qui se multiplient et se propagent à l’infini, ou presque. Comme des ronds dans l’eau. Comme un écho qui ne meurt jamais. (…° Ce qu’il resta quand il ne reste rien. C’est ça les harmoniques. Pratiquement imperceptibles à l’oreille humaine, et pourtant elles sont là, quelque part, elles existent. (…) Il n’y a pas que la musique qui produit des harmoniques. Le bruit des canons aussi. « (p. 294)

 Mister est pianiste, Bob conducteur de taxis et en enquêtant sur le meurtre d'une jeune femme qu'a connue Mister, ils vont rencontrer une galerie de personnages atypiques : un chanteur à la tire, un accordéoniste aveugle,  un sculpteur manchot, tous des êtres qui connaissent la cruauté du monde et qui croient en la beauté de l’art, en sa capacité qu’il a de transcender la douleur et d’éterniser les sentiments. Qu’il soit musique ou sculpture, il permet d’établir une maigre paroi contre la violence, et de graver dans l’éternité l’innocence et la pureté.

 « C’est alors qu’il faut faire appel à ces chants. Les laisser remonter. D’abord pour que s’apaisent le tremblement des mains et l’entrechoquement des os et pour éviter que l’âme ne se désagrège, qu’elle ne se liquéfie, qu’elle ne se répande comme cette flaque fétide sous la robe en coton. Ensuite pour se persuader que l’humanité n’a pas engendré que porcs et bouchers et ogres barbares, mais aussi quelques fées ou enchanteurs dotés du pouvoir de transformer le bruit en son, les cris en note, les rafales en arpèges, les plaintes en mélodie, les sanglots longs en violons – la vie en harmonie. 

Pour continuer à croire qu’il existe autre chose, autre part. » (p. 51)

 A la recherche des meurtriers de Vera Nad, une jeune femme sans doute idéalisée par le pianiste romantique, assassinée dans conditions tragiques. ils vont se heurter au lourd passé de la guerre des Balkans puis vont aussi découvrir les arcanes des hautes sphères de la politique porté par un style époustouflant, à la fois drôle, puissant, marquant.

Qui se souviendra de nos morts ? qui se souviendra des massacres, des violences ?

Qui sinon aussi les écrivains ?

Un roman jazzy très puissant !

 Ce que j’ai moins aimé :

 Le long développement sur la résolution de l’intrigue.

 

Premières phrases :

 « En d’autres temps, d’autres lieux, elle aurait été la jeune femme accoudée au demi-queue qui ne le quittait pas des yeux pendant qu’il jouait. Où qu’elle fût toujours en exil, toujours funambule sur le fil de la musique – qui sait où il conduit ? Le bout incandescent de sa cigarette se reflétant sur la laque noire du piano comme un phare au milieu de l’océan. »

 

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : Garden of love

Autre : Mapuche

 

D’autres avis :

 Libération  ; Kathel ; Jean-Marc  

 

  Les harmoniques, Marcus Malte, folio, janvier 2013, 7.70 euros

 

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Le cercle de Bernard MINIER

Publié le par Hélène

                                                  cercle.jpg

♥ ♥ ♥

L’auteur :

Bernard Minier est né à Béziers et a grandi dans le Sud-Ouest. Après Glacé, prix du meilleur roman francophone du festival Polar 2011 de Cognac, Le Cercle est son deuxième roman.

 L’histoire :

Un coup de fil surgi du passé, un e-mail énigmatique, qui signe peut-être le retour du plus retors des serial-killers, pré­ci­pi­tent le com­man­dant Martin Servaz dans une enquête dan­ge­reuse, la plus per­son­nelle de sa vie.

Un pro­fes­seur de civi­li­sa­tion anti­que assas­siné, un éleveur de chiens dévoré par ses ani­maux… Pourquoi la mort s’acharne-t-elle sur Marsac, petite ville uni­ver­si­taire du Sud-Ouest, et son cercle d’étudiants réu­nis­sant l’élite de la région ?
Confronté à un uni­vers ter­ri­fiant de per­ver­sité, Servaz va rou­vrir d’ancien­nes et ter­ri­bles bles­su­res et faire l’appren­tis­sage de la peur, pour lui-même comme pour les siens.

Après le succès de Glacé, déjà tra­duit dans de nom­breux pays, Bernard Minier, le maître des atmo­sphè­res som­bres et oppres­san­tes, nous entraîne dans une nou­velle intri­gue à couper le souf­fle, qui renou­velle les lois du genre.

(Présentation de l’éditeur)

 Ce que j’ai aimé :

Dans une atmosphère orageuse et durant un déluge pregnant, le corps d’une jeune enseignante est retrouvé noyé dans sa baignoire. Errant dans son jardin, un jeune homme apparemment drogué, qui n’est autre que le fils de l’amour de jeunesse de Martin Servaz, Marianne. Cette dernière va donc faire appel à lui pour tenter d’innocenter son fils, accusé du meurtre.

Le décor est planté : une ville de province, proche des Pyrénées, un passé qui revient à la charge, un meurtrier toujours en cavale et qui semble se jouer de Martin, des étudiants troubles aux mœurs étranges, et la fille de Martin, Margot, elle-même étudiante à Marsac, peut-être en danger parmi ce paysage peuplé de fantômes venus tout droit du passé. Quelques chapitres sont consacrés à une femme séquestrée, mais les indications restent trop vagues pour faire le rapprochement avec l’intrigue principale. A la fin seulement, tout prendra sens, laissant le lecteur pantelant, en attente fébrile du prochain opus du talentueux Bernard Minier.

 

Ce que j’ai moins aimé :

 Si ce roman est brillamment construit et mené tambour battant, quelques défauts se dessinent en cours de lecture : ainsi les incessantes allusions à l’enquête précédente (Glacé) laissent sur le carreau le lecteur qui ne l’a pas lu, même si l’auteur s’efforce de l’éclairer.  Ensuite ce commandant Servaz semble porter tous les malheurs et les regrets de la terre sur ses épaules, revenant sans cesse vers son passé, vers ce qu’il était, vers ce qu’il a perdu, si bien qu’il stagne psychologiquement parlant. De plus il laisse dans l’ombre les autres protagonistes qui ne semblent être que des ombres dans son sillage.

En résumé, il vaut mieux avoir lu « Glacé » avant de se lancer dans cette lecture, mais cet auteur mérite toute l’attention du lecteur de romans policiers…

 

Premières phrases :

 « Son esprit n’était qu’un cri.

Une plainte.

Dans sa tête, elle criait de désespoir, elle hurlait de rage, sa souffrance, sa solitude… - tout ce qui, mois après mois, l’avait dépouillée de son humanité. »

 Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Glacé

Autre :  Grand prix des lectrices de Elle

D’autres avis :

Théoma Clara, Nadael, Mango, Sandrine, Aproposdelivres...

 Le cercle, Bernard Minier, Xo Editions, octobre 2012, 572 p., 20.90 euros

 grand prix lectrices de elle

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Le dernier lapon d’Olivier TRUC

Publié le par Hélène

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♥ ♥ ♥ ♥ 

 L’auteur :

 Journaliste depuis 1986, il vit à Stockholm depuis 1994 où il est le correspondant du Monde et du Point, après avoir travaillé à Libération. Spécialiste des pays nordiques et baltes, il est aussi documentariste pour la télévision. Il est l’auteur de la biographie d’un rescapé français du goulag, L’Imposteur (Calmann-Lévy).

 

L’histoire :

 L’hiver est froid et dur en Laponie. À Kautokeino, un grand village sami au milieu de la toundra, au centre culturel, on se prépare à montrer un tambour de chaman que vient de donner un scientifique français, compagnon de Paul-Emile Victor. C’est un événement dans le village. Dans la nuit le tambour est volé. On soupçonne les fondamentalistes protestants laestadiens : ils ont dans le passé détruit de nombreux tambours pour combattre le paganisme. Puis on pense que ce sont les indépendantistes sami qui ont fait le coup pour faire parler d’eux.

La mort d’un éleveur de rennes n’arrange rien à l’affaire. Deux enquêteurs de la police des rennes, Klemet Nango le Lapon et son équipière Nina Nansen, fraîche émoulue de l’école de police, sont persuadés que les deux affaires sont liées. Mais à Kautokeino on n’aime pas remuer les vieilles histoires et ils sont renvoyés à leurs courses sur leurs scooters des neiges à travers l’immensité glacée de la Laponie, et à la pacification des éternelles querelles entre éleveurs de rennes dont les troupeaux se mélangent. Au cours de l’enquête sur le meurtre Nina est fascinée par la beauté sauvage d’Aslak, qui vit comme ses ancêtres et connaît parfaitement ce monde sauvage et blanc.

Que s’est-il passé en 1939 au cours de l’expédition de P-E. Victor, pourquoi, avant de disparaître, l’un des guides leur a-t-il donné ce tambour, de quel message était-il porteur ? Que racontent les joïks, ces chants traditionnels que chante le sympathique vieil oncle de Klemet pour sa jeune fiancée chinoise ? Que dissimule la tendre Berit malmenée depuis cinquante ans par le pasteur et ses employeurs ? Que vient faire en ville ce Français qui aime trop les très jeunes filles et a l’air de bien connaître la géologie du coin ? Dans une atmosphère à la Fargo, au milieu d’un paysage incroyable, des personnages attachants et forts nous plongent aux limites de l’hypermodernité et de la tradition d’un peuple luttant pour sa survie culturelle. Un thriller magnifique et prenant, écrit par un auteur au style direct et vigoureux, qui connaît bien la région dont il parle.

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Ce que j’ai aimé :

L'immersion dans un monde totalement différent du nôtre est immédiate et fulgurante : bienvenue dans la nuit polaire illuminée par quelques minutes d'ensoleillement courtes et intenses ("Jeudi 13 janvier. Lever du Soleil : 10h41 ; coucher du soleil : 12h15. 1h34 d'ensoleillement." p. 64)

Dans ces contrées éloignées, les policiers eux-mêmes ont une mission atypique : Nina et Klemet appartiennent à la police des rennes chargés de régler aussi bien les errements des rennes de troupeaux à troupeaux que les accidents :

"Nina avait rempli pour la première fois un constat d'accident de renne.  Elle avait été surprise de voir le formulaire spécifique où il fallait entourer sur le dessin du renne les parties où la bête avait été accidentée. " (p. 53) 

Mais ici comme ailleurs, la mort rôde et peut soudainement prendre ses aises : Mattis, éleveur de rennes est retrouvé mort. Ce qui ressemble au premier abord à un règlement de compte entre propriétaires de rennes se revèle finalement bien plus complexe : la disparition simultanée d'un tambour lapon densifie l'enquête et  aiguille les deux policiers vers un faisceau de pistes remontant à une expédition de Paul Emile Victor dans la région en 1939.

En s'intéressant aux chants lapons, les joïks qui permettent de perpétrer les histoires et traditions des peuples, ainsi qu'aux motifs dessinés sur les tambours, Nina et Klemet vont découvrir que sous la neige, se cachent des trésors attirant la convoitise universelle des hommes...

Le lecteur découvrira pour sa part une communauté divisée en quête de son identité : les samis "dernière population aborigène d'Europe" (p.134) en butte contre l'église suspicieuse face à leur chamanisme, et persécutés encore à notre époque par un racisme ordinaire...

Olivier Truc réussit à allier subtilement des données ethnologiques denses à une intrigue passionnante, et parvient ainsi à tenir le pari difficile de divertir tout en instruisant...

 

Ce que j’ai moins aimé :

 -          Rien.

 

Premières phrases :

 « Aslak trébucha. Signe de fatigue. Normalement, ses pas trouvaient toujours. Le vieil homme n’avait pas lâché son paquet. Il roula sur lui-même. Le choc fut amorti par la couche de bruyère. Un lemming s’en échappa. »

 

Vous aimerez aussi :

Imaqa de Flemming JENSEN

D’autres avis :

Lire les billets de Michel, Yv, Dominique Keisha;  Dasola 

Presse 

 

Le dernier lapon, Olivier Truc, Métailié noir, septembre 2012, 456 p., 22 euros

Merci à Valérie des éditions Métailié.

 Un roman policier à chaudement recommander...

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Arab jazz de Karim MISKE

Publié le par Hélène

arab-jazz.jpg 

 ♥ ♥ ♥

Grand Prix de littérature policière 2012 

  L’auteur :

 Karim Miské est né en 1964 à Abidjan d’un père mauritanien et d’une mère française. Il grandit à Paris avant de partir étudier le journalisme à Dakar. De retour en France, il réalise depuis vingt ans des films documentaires sur des sujets aussi divers que la bio-éthique, les néo-fondamentalismes juifs, chrétiens et musulmans, en passant par la surdité (pour lequel il apprend le langage des signes).

Ses films sont diffusés sur Arte, France 2, Canal +, Channel four et bien d’autres chaines de télévision à travers le monde. En 1997, il publie dans l’ouvrage collectif Le livre du retour (éditions Autrement), un récit qui relate sa découverte du monde arabe, de l’Afrique et de l’Islam lors de son premier voyage en Mauritanie, à l’âge de quinze ans, ainsi que les rapports complexes qu’il entretient depuis avec les différentes composantes de son identité.

À partir de 2010, il écrit plusieurs tribunes sur la racialisation de la société française pour Rue 89 et Le Monde. Il tient à présent un blog, « Chronique des années dix », sur le site des Inrockuptibles. (Présentation de l’éditeur)

 

L’histoire :

 Dans le 19e arrondissement de Paris toutes les communautés, religieuses et ethniques, se côtoient au quotidien. Sushis casher, kebabs, restaurant turc – point de ralliement de tous les jeunes du coin –, la librairie d’occasion farcie de romans policiers jusqu’au plafond, coiffeur juif…

 Seul Ahmed Taroudant – qui a l’horrible privilège de découvrir le corps sanguinolent de sa voisine et amie, Laura Vignola, suspendu au-dessus de son balcon – se tient à distance de cette population cosmopolite : prisonnier d’une histoire personnelle traumatisante, rêveur, lecteur fou de polars… Il constitue le coupable idéal de ce crime abominable.

 Sa découverte l’oblige à sortir de sa torpeur et à collaborer avec le duo de la Crim’ désigné par le commissaire Mercator pour mener l’enquête sur le meurtre : le flamboyant lieutenant Rachel Kupferstein et le torturé lieutenant Jean Hamelot, fils d’un Breton communiste rationaliste, quelque peu égaré dans la capitale. Ensemble, ils ont toutes les cartes pour décrypter les signes et symboles de cette mort ignoble. S’agit-il d’un meurtre symbolique exécuté par un fou de Dieu issu des communautés loubavitch ou salafiste ? Qu’en est-il de l’étrange famille de Laura, originaire de Niort, qui étend son influence jusqu’à New York ? Et de l’apparition dans le quartier du « Godzwill » une nouvelle drogue redoutable ?

 La collaboration des meilleures amies de la victime, Bintou et Aïcha (les sœurs des caïds du quartier), Rebecca – partie à Brooklyn dans l’intention d’épouser un Juif orthodoxe –, avec les lieutenants Kupferstein et Hamelot se révèlera indispensable pour reconstituer la toile d’araignée gigantesque qui, de Paris à New York, tire ses fils entre réseaux de trafics de drogue et communautés religieuses… Arab Jazz, foisonnant, pétri de sons, de musiques et de parfums, est le premier roman de l’auteur : il en a fait un coup de maître. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

Karim Miské est un professionnel de l’envol qui sait en quelques lignes nous plonger dans des univers parallèles dépaysant et planants. Son écriture unique, à la fois poétique et onirique,  résonne en parfaite adéquation avec le lieu bigarré dans lequel il place son intrigue. Dans ce 19ème arrondissement animé, se côtoient musulmans, chrétiens, juifs, pour le meilleur et pour le pire. Ahmed se tient à l’écart de cette foule et de sa vie, traumatisé par un évènement de son passé enfoui dans les limbes de son inconscient. Le meurtre de sa voisine va faire remonter les souvenirs honnis, et il n’aura d’autres choix que d’affronter ses démons qui sont aussi ceux du quartier.

 Les enquêteurs dévoyés dans ce nid vont se confronter à tous les fondamentalistes religieux : témoins de Jéhovah, musulmans extrémistes, juifs radicaux, manipulateurs experts capables d’abolir les volontés des plus faibles pour les rallier à leurs causes… Pour démêler les fils de cet imbroglio religieux, Ahmed leur sera d’une grande aide…

 Pour une fois les policiers ne sont pas des gentils blancs comme neige chargés de pourfendre le mal mais plutôt des êtres humains faillibles.

 Karim Miské fait preuve d’un art de l’esquisse dans la description de ses personnages laissant entrevoir les failles sans les sonder, densifiant les personnalités au fil des pages pour créer des silhouettes insaisissables, préservées.

 

Ce que j’ai moins aimé :

 - Un peu confus vers la fin...

 Premières phrases :

 « Ahmed regarde les nuages dans le ciel, les nuages qui flottent là-bas, les merveilleux nuages.

Ahmed aime la poésie, pourtant il n’en connaît plus que des bribes qui lui reviennent fugitivement telles des bulles à la surface de l’âme. Souvent les vers arrivent seuls, sans auteur ni titre. »

 

Vous aimerez aussi :

 Passage du désir de Dominique SYLVAIN 

 

D’autres avis :

Presse : Lire  ; Télérama  

 

Arab Jazz, Karim Miské, Viviane Hamy éditions, mars 2012, 350 p., 18 euros

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