Inti Flynn, biologiste, s'installe dans les Highlands en Ecosse pour réintroduire les loups dans le but de rétablir l’équilibre écologique dans cette région dévastée par l’élimination de ses prédateurs naturels. Cependant, elle doit faire face à la méfiance et à la résistance des locaux, qui craignent que les loups ne menacent leurs moyens de subsistance, notamment l’élevage de moutons.
En parallèle, Inti est aux prises avec ses propres démons intérieurs. Elle est marquée par un traumatisme familial qui a laissé des cicatrices profondes, notamment en ce qui concerne sa relation avec sa sœur jumelle, Aggie, qui vit avec elle dans les Highlands mais est enfermée dans un mutisme douloureux. Inti, elle-même, est une femme complexe et fragile, souffrant de synesthésie tactile : elle ressent physiquement ce que les autres vivent, ce qui accentue son lien profond avec les loups et la nature.
Ce que j'ai aimé :
McConaghy interroge la relation entre les humains et les animaux, en particulier le rôle que les prédateurs comme les loups jouent dans la régulation des écosystèmes.
"Le réensauvagement de la région est une nécessité absolue qu'il faut entreprendre de toute urgence. Si nous réussissons à étendre la couverture forestière de cent mille hectares d'ici 2026, alors nous serons en mesure de réduire drastiquement les émissions de CO2 qui participent au réchauffement climatique et nous pourrons offrir de nouveaux habitats aux espèces endémiques. La seule manière d'atteindre cet objectif consiste à contrôler la population herbivore et le moyen le plus simple et le plus efficace d'y parvenir est de réintroduire un prédateur essentiel qui vivait ici bien longtemps avant nous. (...) Les écosystèmes ont besoin de superprédateurs parce qu'ils sont à l'origine de changements écologiques qui se répercutent sur la chaine alimentaire. (...) Leur réintroduction modifiera le paysage de manière positive : la faune sauvage disposera d'un nombre croissant d'habitats, la nature du sol sera de meilleure qualité, il y aura moins de crues et de d'inondations, les émissions de CO2 seront neutralisées. Des animaux de toutes tailles et de toutes espèces reviendront vivre sur ces terres. (...) Un écosystème diversifié est un écosystème en bonne santé qui profite à tout le monde."
Finalement, alors qu'elle était méfiante vis à vis des hommes, Inti apprend aussi à les aimer, à faire confiance, à être surprise par certains :
"Il faut survivre à la cruauté, la combattre, mais la douceur est plus envahissante que tout le reste, nos racines profondément entrelacées. C’est ce que nous retenons à l'intérieur, ce que nous emportons, la manière dont nous prenons soin les uns des autres."
Elle apprend l'art subtil de l'équilibriste capable de tolérance et d'humanité dans un monde en feu...
Bilan :
Je pleure encore la beauté du monde est un roman magnifique avec au cœur la fragilité des écosystèmes, mais aussi les relations humaines brisées, et surtout la résilience face aux traumatismes. Charlotte McConaghy offre une œuvre à la fois intime et universelle, où la nature et les êtres humains sont en lutte pour leur survie et leur rédemption. Avec une prose délicate et des personnages profondément humains, McConaghy nous invite à réfléchir sur notre relation avec le monde naturel et sur notre propre capacité à guérir et à changer.