Le dernier lapon d’Olivier TRUC
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L’auteur :
Journaliste depuis 1986, il vit à Stockholm depuis 1994 où il est le correspondant du Monde et du Point, après avoir travaillé à Libération. Spécialiste des pays nordiques et baltes, il est aussi documentariste pour la télévision. Il est l’auteur de la biographie d’un rescapé français du goulag, L’Imposteur (Calmann-Lévy).
L’histoire :
L’hiver est froid et dur en Laponie. À Kautokeino, un grand village sami au milieu de la toundra, au centre culturel, on se prépare à montrer un tambour de chaman que vient de donner un scientifique français, compagnon de Paul-Emile Victor. C’est un événement dans le village. Dans la nuit le tambour est volé. On soupçonne les fondamentalistes protestants laestadiens : ils ont dans le passé détruit de nombreux tambours pour combattre le paganisme. Puis on pense que ce sont les indépendantistes sami qui ont fait le coup pour faire parler d’eux.
La mort d’un éleveur de rennes n’arrange rien à l’affaire. Deux enquêteurs de la police des rennes, Klemet Nango le Lapon et son équipière Nina Nansen, fraîche émoulue de l’école de police, sont persuadés que les deux affaires sont liées. Mais à Kautokeino on n’aime pas remuer les vieilles histoires et ils sont renvoyés à leurs courses sur leurs scooters des neiges à travers l’immensité glacée de la Laponie, et à la pacification des éternelles querelles entre éleveurs de rennes dont les troupeaux se mélangent. Au cours de l’enquête sur le meurtre Nina est fascinée par la beauté sauvage d’Aslak, qui vit comme ses ancêtres et connaît parfaitement ce monde sauvage et blanc.
Que s’est-il passé en 1939 au cours de l’expédition de P-E. Victor, pourquoi, avant de disparaître, l’un des guides leur a-t-il donné ce tambour, de quel message était-il porteur ? Que racontent les joïks, ces chants traditionnels que chante le sympathique vieil oncle de Klemet pour sa jeune fiancée chinoise ? Que dissimule la tendre Berit malmenée depuis cinquante ans par le pasteur et ses employeurs ? Que vient faire en ville ce Français qui aime trop les très jeunes filles et a l’air de bien connaître la géologie du coin ? Dans une atmosphère à la Fargo, au milieu d’un paysage incroyable, des personnages attachants et forts nous plongent aux limites de l’hypermodernité et de la tradition d’un peuple luttant pour sa survie culturelle. Un thriller magnifique et prenant, écrit par un auteur au style direct et vigoureux, qui connaît bien la région dont il parle.
Ce que j’ai aimé :
L'immersion dans un monde totalement différent du nôtre est immédiate et fulgurante : bienvenue dans la nuit polaire illuminée par quelques minutes d'ensoleillement courtes et intenses ("Jeudi 13 janvier. Lever du Soleil : 10h41 ; coucher du soleil : 12h15. 1h34 d'ensoleillement." p. 64)
Dans ces contrées éloignées, les policiers eux-mêmes ont une mission atypique : Nina et Klemet appartiennent à la police des rennes chargés de régler aussi bien les errements des rennes de troupeaux à troupeaux que les accidents :
"Nina avait rempli pour la première fois un constat d'accident de renne. Elle avait été surprise de voir le formulaire spécifique où il fallait entourer sur le dessin du renne les parties où la bête avait été accidentée. " (p. 53)
Mais ici comme ailleurs, la mort rôde et peut soudainement prendre ses aises : Mattis, éleveur de rennes est retrouvé mort. Ce qui ressemble au premier abord à un règlement de compte entre propriétaires de rennes se revèle finalement bien plus complexe : la disparition simultanée d'un tambour lapon densifie l'enquête et aiguille les deux policiers vers un faisceau de pistes remontant à une expédition de Paul Emile Victor dans la région en 1939.
En s'intéressant aux chants lapons, les joïks qui permettent de perpétrer les histoires et traditions des peuples, ainsi qu'aux motifs dessinés sur les tambours, Nina et Klemet vont découvrir que sous la neige, se cachent des trésors attirant la convoitise universelle des hommes...
Le lecteur découvrira pour sa part une communauté divisée en quête de son identité : les samis "dernière population aborigène d'Europe" (p.134) en butte contre l'église suspicieuse face à leur chamanisme, et persécutés encore à notre époque par un racisme ordinaire...
Olivier Truc réussit à allier subtilement des données ethnologiques denses à une intrigue passionnante, et parvient ainsi à tenir le pari difficile de divertir tout en instruisant...
Ce que j’ai moins aimé :
- Rien.
Premières phrases :
« Aslak trébucha. Signe de fatigue. Normalement, ses pas trouvaient toujours. Le vieil homme n’avait pas lâché son paquet. Il roula sur lui-même. Le choc fut amorti par la couche de bruyère. Un lemming s’en échappa. »
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D’autres avis :
Lire les billets de Michel, Yv, Dominique, Keisha; Dasola
Le dernier lapon, Olivier Truc, Métailié noir, septembre 2012, 456 p., 22 euros
Merci à Valérie des éditions Métailié.
Un roman policier à chaudement recommander...