La centrale de Elisabeth FILHOL
♥ ♥ ♥ ♥
Une très belle découverte.
L’auteur :
La centrale est le premier roman d’Elisabeth FILHOL qui travaille en entreprise dans le milieu industriel.
L’histoire :
Le narrateur est un intérimaire qui traverse la France pour accomplir des missions ponctuelles dans les centrales nucléaires. Il nous conte ses expériences, ses rencontres, et cette impression perpétuelle de marcher sur un fil.
Ce que j’ai aimé :
- L’originalité du thème : le roman nous plonge dans un univers aux dangers pernicieux parce qu’invisibles, dans un monde froid et déconcertant, dans l’intimité de celles qui tentent de se fondre en vain dans le paysage, les centrales nucléaires.
« Donc oui, les dangers du nucléaire. Derrière les murs. Une cocotte-minute. Et en attendant d’en sortir, dix-neuf centrales alimentent le réseau afin que tout un chacun puisse consommer, sans rationnement, sans même y penser, d’un simple geste. » (p. 32)
- L’opposition si bien rendue entre cet « employeur » aux actions et aux mots glacés et techniques, et ces employés si sensibles, si faillibles…
- Le style de l’auteur épouse parfaitement cette oscillation incessante : des phrases courtes pour coller à cette atmosphère scientifique, mais tapis au cœur de ces phrases, des éclats d’humanité irradient cette blancheur immaculée…
« On s‘est assis côte à côte sur des pliants, devant la caravane de location. Il ne disait rien. Il avait résumé les faits en trois phrases avant de conclure, j’arrête, et depuis silence sur les ondes, et une expression du visage qui n’encourageait personne. On est restés là, il fumait, j’échangeais avec ceux qui passaient de temps à autre et nous donnaient le bonsoir, la lumière déclinait au-dessus de la Loire, j’avais fini par m’habituer (…) » (p. 136)
Ce que j’ai moins aimé :
- La déconstruction temporelle du récit fait de retours en arrière pas franchement balisés. L’effet était sans doute voulu, pour insister sur le destin de ces hommes, haché, laminé, mais il peut gêner la lecture.
Premières phrases :
« Trois salariés sont morts au cours des six derniers mois, trois agents statutaires ayant eu chacun une fonction d’encadrement ou de contrôle, qu’il a bien fallu prendre au mot par leur geste, et d’eux qui se connaissaient à peine on parle désormais comme de trois frères d’armes, tous trois victimes de la centrale et tombés sur le même front. »
Vous aimerez aussi :
Cour nord d’Antoine CHOPLIN
La centrale, Elisabeth FILHOL, POL, janvier 2010, 144 p., 14.50 euros