La vérité sur l'affaire Harry Quebert de Joël DICKER
♥ ♥
"Marcus, savez-vous quel est le seul moyen de mesurer combien vous aimez quelqu'un ?
- Non.
- C'est de le perdre."
Mon avis :
Le point fort de ce roman est indéniablement l'intrigue. Haletante, pleine de rebondissements elle rend le lecteur addict, le poussant à prolonger sa lecture jusque tard dans la nuit.
Harry est-il coupable de la disparition de la jeune Nola en 1975 dont on vient de retrouver le cadavre dans le jardin même de Harry. Le narrateur est bien décidé à prouver son innocence et il va aller de découvertes en découvertes...
L'intrigue policière est cohérente et palpitante et elle constitue le squelette du roman, ce qui lui permet de tenir debout. Otez-lui cela, il n'en restera pas grand-chose : des réflexions mièvres sur l'amour, une vision désabusée du monde de l'édition devenu une vaste entreprise marketing, les conclusions superficielles s'enchaînent, que l'on pourrait résumer ainsi :
"L'amour, c'est beau" = "Dans notre société, Marcus, les hommes que l'on admire le plus sont ceux qui bâtissent des ponts, des gratte-ciel et des empires. Mais en réalité, les plus fiers et les plus admirables sont ceux qui arrivent à bâtir l'amour. Car il n'est pas de plus grande et de plus difficile entreprise."
Mais "l'amour c'est compliqué" : « Vous essayez de me parler d'amour, Marcus, mais l'amour, c'est compliqué. L'amour, c'est très compliqué. C'est à la fois la plus extraordinaire et la pire chose qui puisse arriver. Vous le découvrirez un jour. L'amour, ça peut faire très mal. Vous ne devez pas pour autant avoir peur de tomber, et surtout pas de tomber amoureux, car l'amour, c'est aussi très beau, mais comme tout ce qui est beau, ça vous éblouit et ça vous fait mal aux yeux. C'est pour ça que souvent, on pleure après »
"Ecrire, c'est beau aussi" mais "la vie, c'est dur" : "Ecrire c'est être dépendant. De ceux qui vous lisent, ou ne vous lisent pas. La liberté c'est de la foutue connerie ! Personne n'est libre. J'ai une partie de votre liberté dans les mains, de même que les actionnaires de la compagnie ont une partie de la mienne entre les leurs. Ainsi est faite la vie, Goldman. Personne n'est libre. Si les gens étaient lires, ils seraient heureux. Connaissez-vous beaucoup de gens véritablement heureux ?"
"Le monde de l'édition, c'est pas bien" : " Il considérait que sa stratégie n'était ni pire ni meilleure que celle des autres, que le monde des livres était passé du noble art de l'imprimerie à la folie capitaliste du XXI ème siècle, que désormais un livre devait être écrit pour être vendu, que pour vendre un livre il fallait qu'on enparle, et que pour qu'on en parle il fallait s'approprier un espace qui, si on ne le prenait pas soi-même par la force, serait pris pat les autres. Manger ou être mangé."
Les personnages ne sont pas crédibles : comment le narrateur parvient-il à s'immiscer si facilement dans une enquête policière, comment le grand Harry a-t-il pu tomber amoureux de cette "Nola chérie" si mièvre, pourquoi le chargé de l'enquête accepte-t-il le narrateur brusquement après l'avoir rejeté au début du roman, et j'enpasse, autant de questions qui mettent l'accent sur des ficelles grossières, toutes au service de l'intrigue, sans cohérence. De surcroit le style est plat, enfonçant davantage le roman dans une superficialité prégnante.
Je rejoins donc le choeur de ceux qui se demandent pourquoi et comment ce roman a-t-il pu obtenir le Grand Prix de l'Académie Française ? Pour le prix du Goncourt des Lycéens je le conçois car les lycéens ont dû retrouver le fonctionnement et les problématiques de certaines séries à succés efficaces, mais pour l'Académie française, je m'interroge...
Un bon roman de plage, mais ne cherchez pas plus loin !
Premières phrases :
"Tout le monde parlait du livre. Je ne pouvais plus déambuler en paix dans Manhattan, je ne pouvais plus faire mon joging sans que des promeneurs me reconnaissent et s'exclament : "Hé, c'est Goldman ! C'est l'écrivain !".
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D'autres avis :
Télérama ;
La vérité sur l'affaire Harry Quebert, Joël DICKER, De Fallois poche, 2014, 9.20 euros