Veiller sur elle de Jean-Baptiste ANDREA
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"Je suis une femme debout au beau milieu des incendies que vous avez allumés"
En 1986, Michelangelo Vitaliani dit "Mimo", est sur le point de rendre son dernier souffle, loin du monde, reclus dans un monastère. Un mystère plane autour de cet homme, non religieux caché dans ce lieu pour "veiller sur elle", elle, sa dernière sculpture, cachée là par le Vatican.
Le fil remonte le temps pour éclairer le destin de cet homme atteint de nanisme mais pourtant destiné à côtoyer les plus puissants. Son père, sculpteur, l'a formé à l'excellence, et quand à douze ans sa mère l'envoie en Italie sur le plateau de Pietra d’Alba, il se fait rapidement remarquer par la famille Orsini, qui règne dans la région. Il rencontre Viola, la fille Orsini, une jeune fille bien décidée à faire voler en éclat les normes étriquées imposées aux femmes de son époque.
Leur relation sera passionnée, entre admiration et rivalité, dans un contexte historique mouvementé, où fascisme et guerres menacent leur liberté.
Ce que j'ai aimé :
Andrea livre une fresque captivante, où l’amour, l’art et l’Histoire s’entrelacent avec une intensité rare. Un souffle romanesque puissant anime ce roman portés par des personnages forts. Viola se revendique comme une "femme debout" prête à s'attaquer à l'adversité :
"Je suis une femme debout au milieu des incendies que vous avez allumés.
Je suis une femme debout, le voyez-vous, sur vos bûchers, autodafés, vos doigts pointés.
Je suis une femme debout, que croyez-vous, que j’allais pleurer sous vos huées, dans la fumée.
De vos lâchetés, de vos bûchers, autodafés, vos doigts pointés.
Depuis que j’ai croqué dans cette pomme, quelque chose me travaille, étonnez-vous.
Une envie de danser, d’inventer des fusées, de vous soigner.
Alors, me brûlerez-vous encore, vous me crucifierez.
Chat noir et camisole, écartelée, vous direz que j’étais folle, un peu sorcière, ou les deux à la fois.
J’ai croqué dans la pomme, j’y croquerai encore, préparez-vous.
Je suis une femme debout, je ne suis pas à genoux."
Les femmes subissent la violence du monde et des hommes de plein fouet :
"- Parce que tu crois que les femmes ne sont pas violentes ? murmura Vittorio.
- Bien sûr que nous le sommes. Contre nous-mêmes, parce qu'il ne nous viendrait pas à l'idée de faire souffrir quelqu'un, mais qu'il faut bien que cette violence que nous respirons et qui nous empoisonne ressorte quelque part." p 392
Mimo, laissé pour compte, trouve sa place grâce à son art mais s'évertue toujours à chercher un sens profond à sa création.
Le roman interroge aussi le rôle des uns et des autres dans la montée du fascisme.
"Personne ne fait jamais rien de mal, la beauté du mal étant précisément qu'il ne demande aucun effort. Il suffit de le regarder passer."