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Les ombres de Kittur de Aravind ADIGA

Publié le par Hélène

                                           ombres de kittur

 ♥ ♥

  « Vous ne comprenez pas que ce monde déraille ? » (p. 192)

  

L’auteur :

 

Aravind Adiga est né à Chennai en 1974. Il a été couronné par le prestigieux Booker Prize en 2008 pour Le Tigre blanc traduit en trente-cinq langues, Romancier avant tout, il écrit aussi pour le New Yorker, le Financial Times et le Sunday Times. Il vit à Bombay.

 L’histoire :

 Kittur est une petite ville imaginaire de l’Inde du sud située sur la côte du Karnataka - entre Goa et Calicut - dont l’auteur du Tigre blanc fait le théâtre de ses dernières histoires. Avec ses castes supérieures et inférieures, ses religions multiples, ses immigrés tamouls, ses enfants des rues, ses rikshawallahs, ses fonctionnaires corrompus, Kittur contient l’Inde tout entière.

On y croise Ziauddin, un de ces garçons faméliques qui hantent toutes les gares de l’Inde, Ramakrishna Xerox, arrêté pour vente illégale de photocopies des Versets Sataniques, Shankara, qui fait exploser une bombe dans son école jésuite, Abbasi, propriétaire musulman d’un atelier de confection qui résiste aux pressions des fonctionnaires corrompus, Soumya, petite fille d’un ouvrier en bâtiment que son père envoie à l’autre bout de la ville chercher sa dose d’héroïne, George D’Souza le jardinier catholique de Madame Gomes, qui peine à établir la juste distance entre maîtresse et serviteur, Murali, le brahmane devenu communiste qui a laissé la vie passer…
Quatorze destinées attachantes, puissantes, envoûtantes, qui incarnent les mêmes enjeux terribles de castes, de classe et de pouvoir que dans Le tigre blanc. Quatorze personnages émouvants, que l’injustice et la misère obligent à accepter l’inéluctable, et dont on suit les épreuves entre 1984 et 1991, années marquantes de l’assassinat d’Indira Gandhi et de son fils Rajiv.

 Ce que j’ai aimé :

 Ces nouvelles offrent une image juste et percutante de l’Inde contemporaine à travers le portrait de ces hommes et ces femmes perdus dans une ville gangrenée par la corruption, l’immoralité ambiante, le Mal serpentant parmi les consciences.  Certains choisiront l'honnêteté quand d'autres abdiqueront devant tant de tentations et de pressions insoutenables... 

La pauvreté règne en effet au cœur du pays et du livre, avec des conséquences désastreuses pour tous :

  "Tu sais quelle est la plus grande différence entre les riches et les pauvres comme nous? Les riches peuvent commettre des erreurs encore et encore. Les pauvres, à la moindre erreur, ils perdent tout." (p.258)

 Les nouvelles courent des années 1980 à 1990, marquées par l'assassinat de Indira Gandhi et de son fils Rajiv, et la situation politique offre une toile de fond non négligeable :

« La seule erreur, Mr Bhatt, rétorqua Mr D’Mello, a été commise le 15 août 1947, lorsque nous avons cru que ce pays pouvait être gouverné par une démocratie au lieu d’une dictature militaire.

-          Oui, oui, c’est juste, acquiesça le jeune professeur. Mais quid de l’état d’urgence ? N’était-ce pas une bonne chose ?

-          Nous avons gaspillé cette chance. Et, maintenant, ils ont assassiné la seule personnalité politique qui savait comment administrer à ce pays les remèdes dont il a besoin. » ( p. 96)

 Les ombres de Kittur nous plonge dans une réalité indienne bien plus sombre que ne le laisse voir le beau monde de Bollywood... 

Ce que j’ai moins aimé :

 L'ensemble est très sombre, comme dans Le tigre blanc, seulement ici la longueur réduite des nouvelles ne permet pas au lecteur de s'attacher suffisamment aux personnages, si bien qu'une lassitude finit par s'installer au fil de la lecture, les histoires étant somme toute assez similaires.

 

Premières phrases :

« Kittur se trouve sur la côte occidentale de l’Inde du Sud, entre Goa et Calicut, à égale distance ou presque de ces deux villes. Elle est bordée par la mer d’Oman à l’ouest, et par la rivière Kaliamma au sud et à l’est. Le relief est vallonné, le sol noir et légèrement acide. »

 

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : Le tigre blanc de Aravind ADIGA

 Autre : La colère des aubergines de Bulbul SHARMA

 

D’autres avis :

Kathel ;  Fransoaz ; Brize ; Lounima  

Les ombres de Kittur, Aravind ADIGA, Traduit de l’anglais (Inde) par Annick LE GOYAT, Buchet Chastel, août 2011, 354 p., 21 euros

Publié dans Littérature Asie

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Le goût de la pluie de Shi ZHECUN

Publié le par Hélène

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♥ ♥ 

 

L’auteur :

 

Shi Zhecun (1905-2003) appartient à cette génération d'écrivains chinois des années 1930 malmenés par les bouleversements politiques qu'a connus la Chine. Après un long silence de plusieurs décennies, durant lequel il enseigna à l'université de Shanghai, il reprit son activité d'écrivain au début des années 1980.

 

Les histoires :

 

La plupart des quatorze nouvelles présentées ici remontent à l'effervescence des années 1920-1930 à Shanghai où, grand lecteur de Freud et de Havelock Ellis, traducteur de Boccace, de Sienkiewicz et surtout de Schnitzler, Shi Zhecun s'attache à explorer les pensées et les tensions intérieures de personnages – ordinaires ou légendaires – confinant souvent au délire et aux hallucinations. Les deux essais, nommés ici « prose de circonstance », illustrent un genre littéraire très prisé en Chine et traitent aussi bien de questions historiques et stylistiques que de sujets anodins tirés de l'observation de la vie quotidienne. Plus qu'un fil conducteur ou un décor, la pluie, qui revient si souvent dans ces pages, est un personnage à part entière. Souvent teintée d'érotisme, elle imprègne subtilement et avec élégance les écrits de Shi Zhecun de ses sons, de ses couleurs, de ses parfums. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

Les nouvelles côtoient des univers très variés : si la première nouvelle « L’éventail » semble orienter le recueil vers des souvenirs d’enfance teintés de mélancolie, d’autres évoquent simplement la vie quotidienne, « Chronique d’un automne à Minhang » nous plonge dans une atmosphère pseudo-policière, « Au théâtre Le Paris » décrit le frôlement de l’adultère,  une apparition surnaturelle dans « Le yaksha » mène un homme aux portes de la folie, folie également évoquée avec une crise de paranoïa à « L’auberge », « L’amour de Shi Xiu » quant à elle semble être une parodie d’un roman traditionnel chinois, « Crépuscule à la saison des pluies » parle juste du partage d’un parapluie, et le recueil se clôt superbement avec un  essai sur la pluie « Le goût de la pluie ».

 

« La pluie de la saison des prunes est un moment de majesté : le vert des feuilles s’est assombri, lespluie.jpg fleurs se sont retirées, coucous et loriots subsistants chantent à l’unisson l’élégie du printemps. Cinq à dix jours durant vous êtes entouré du frémissement paisible de la pluie. Au sortir d’une longue promenade, après avoir franchi les parterres de fleurs, regardez, écoutez : appréciez-vous cette saveur ? Vous n’aurez plus, je crois, la moindre aversion et vous ne pourrez réprimer en vous un sentiment de plénitude. » (p. 304)

 

L’ensemble crée malgré tout une unité sertie par le talent de conteur de Shi Zhecun qui nous promène allègrement dans ces différents mondes avec aisance et intelligence.

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Quelques nouvelles ont moins remporté mon adhésion que d’autres, ce qui est somme toute assez logique dans un recueil de nouvelles. J’ai souvent été déçue par la fin, qui ne sonnait pas assez comme un chute de nouvelle mais clôturait la nouvelle de façon plutôt ouverte.

 

Premières phrases :

 

« Le temps redevenait chaud, hommes et femmes agitaient leurs éventails en marchant dans la rue. Après avoir donné ma vieille veste doublée, je me dis que le moment était venu d’en prendre un à mon tour pour aller au-dehors. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Stéphane FIERE La promesse de Shanghaï

 

D’autres avis :

 

http://www.les-lettres-francaises.fr/wp-content/uploads/2010/09/LF-88-Dec2011.pdf

 

Le goût de la pluie, Nouvelles et prose de circonstance, Shi Zhecun, Gallimard, Bleu de Chine, 2011, 337 p., 24.50 euros

 

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Publié dans Littérature Asie

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1Q84 livre 2 Juillet-septembre de Haruki MURAKAMI

Publié le par Hélène

                                               1q84 tome 2

 

 

 L’auteur :

 

Né à Kyoto en 1949 et élevé à Kobe, Haruki Murakami a étudié le théâtre et le cinéma à l'université Waseda, avant d'ouvrir un club de jazz à Tokyo en 1974. Son premier roman Écoute le chant du vent (1979), un titre emprunté à Truman Capote, lui a valu le prix Gunzo et un succès immédiat. Suivront La Course au mouton sauvage, La Fin des temps, La Ballade de l'impossible, Danse, Danse, Danse et L'éléphant s'évapore (Seuil, 1990, 92, 94, 95 et 98). Exilé en Grèce en 1988, en Italie, puis aux États-Unis, ou il écrit ses Chroniques de l'oiseau à ressort (Seuil, 2001) et Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil (Belfond, 2002 ; 10/18, 2003), il rentre au Japon en 1995, écrit deux livres de non-fiction sur le séisme de Kobe et l'attentat de la secte Aum, un recueil de nouvelles, Après le tremblement de terre (10/18, 2002), Les Amants du spoutnik (Belfond, 2003 ; 10/18, 2004) et le superbe Kafka sur le rivage (Belfond, 2006). Plusieurs fois favori pour le Nobel de littérature, Haruki Murakami a reçu récemment le prestigieux Yomiuri Prize et le prix Kafka 2006.

 

L’histoire (Quatrième de couverture) :

 

Les choses qui restent enfermées dans notre coeur n'existent pas en ce monde. Mais c'est dans notre coeur, ce monde à part, qu'elles se construisent pour y vivre.
Le Livre 1 a révélé l'existence du monde 1Q84.
Certaines questions ont trouvé leur réponse.
D'autres subsistent : qui sont les Little People ? Comment se fraient-ils un chemin vers le monde réel ? Pourquoi deux lunes dans le ciel ? Et la chrysalide de l'air, est-elle ce lieu ou sommeille notre double ?
Ceux qui s'aiment ne sont jamais seuls.
Le destin de Tengo et d'Aomamé est en marche.

 

Mon avis :

Déçue… Déçue à tel point que je ne l’ai pas même fini et que je n’ai pas supplié non plus ma collègue qui l’a lu de me raconter la fin (et pourtant ma collègue adore qu'on la supplie...)

  Alors, pourquoi une telle déception alors que le livre 1 m’avait franchement enthousiasmée (cf mon avis) ?

 - Parce que l’auteur se répète au fil des pages, l’action n’avance pas, repart en arrière, patine, les mêmes paragraphes apparaissent plusieurs fois, bref il s’agit ni plus ni moins de délayage

- Parce que les réflexions frôlent la caricature et la bêtise :

 « Je suis fatigué de vivre dans la haine, dans la rancune. Je suis fatigué de vivre sans aimer personne. Je n’ai pas un seul ami. Pas un seul. Et plus que tout, je suis incapable de m’aimer. Pourquoi ? Parce que je ne peux pas aimer les autres. C’est en aimant, puis en étant aimé, qu’un homme apprend à s’aimer. Tu comprends ce que je te dis ? Quand on ne peut pas aimer, on est incapable de s’aimer vraiment. »

 Et au cas où vous n’auriez pas compris le message, ne vous inquiétez pas, il revient quelques pages plus loin… Une autre réflexion philosophique ?

 « Là où il y a de la lumière, il y a nécessairement de l’ombre, là où il y a de l’ombre, il y a nécessairement de la lumière. Sand lumière il n’y a pas d’ombre, et, dans ombre, pas de lumière. » (p. 288)

 Oui je sais, vous aussi vous pensez que Jean-Claude Vandamne est passé par là, personnellement je ne vois pas d’autres explications…

 - Vous aurez également remarqué un style basique assez déconcertant.

 « Tout est affaire de destin. (…) Il y a là des forces extrêmement puissantes qui se sont mises à l’œuvre et qui m’ont poussée à agir. » (p. 383)

 (Jean-Claude sort de ce corps…)

 - L’intrigue reste invraisemblable : comment un homme peut-il être à ce point obsédé par le souvenir d’une rencontre datant de sa prime enfance ? Sans parler des deux lunes, de la ville des chats et tutti quanti…

 Pour conclure :

 « Si tu as besoin qu’on t’explique pour comprendre, cela veut dire qu’aucune explication ne pourra jamais te faire comprendre. » (p. 227)

Tu l'as dit bouffi Haruki !!

 

Vous aimerez aussi :

   Le livre 1

 D’autres avis :

 

Babélio 

  

Je remercie Brigitte Semler des Editions Belfond qui a accepté de me faire découvrir le tome 2 d’une série qui s’annonçait prometteuse…

 

1Q84, Haruki Murakami, Traduit du japonais par Hélène MoritaBelfond, août 2011, 544 p., 23 euros

 

challenge 1% littéraire 

 

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1Q84 de Haruki MURAKAMI

Publié le par Hélène

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♥ ♥ ♥ 

« Le romancier n’est pas quelqu’un qui résout les problèmes. C’est quelqu’un qui pose les questions. » (p.456)

 

L’auteur :

Né à Kyoto en 1949 et élevé à Kobe, Haruki Murakami a étudié le théâtre et le cinéma à l'université Waseda, avant d'ouvrir un club de jazz à Tokyo en 1974. Son premier roman Écoute le chant du vent (1979), un titre emprunté à Truman Capote, lui a valu le prix Gunzo et un succès immédiat. Suivront La Course au mouton sauvage, La Fin des temps, La Ballade de l'impossible, Danse, Danse, Danse et L'éléphant s'évapore (Seuil, 1990, 92, 94, 95 et 98). Exilé en Grèce en 1988, en Italie, puis aux États-Unis, ou il écrit ses Chroniques de l'oiseau à ressort (Seuil, 2001) et Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil (Belfond, 2002 ; 10/18, 2003), il rentre au Japon en 1995, écrit deux livres de non-fiction sur le séisme de Kobe et l'attentat de la secte Aum, un recueil de nouvelles, Après le tremblement de terre (10/18, 2002), Les Amants du spoutnik (Belfond, 2003 ; 10/18, 2004) et le superbe Kafka sur le rivage (Belfond, 2006). Plusieurs fois favori pour le Nobel de littérature, Haruki Murakami a reçu récemment le prestigieux Yomiuri Prize et le prix Kafka 2006.

 

L’histoire :

Aomamé et Tengo, 29 ans tous deux, mènent chacun de leur côté leur vie, leurs amours, leurs activités. Tueuse professionnelle, Aomamé accomplit des missions pour le compte d’une vieille dame. Tengo lui est un génie des maths, apprenti-écrivain et nègre pour un éditeur qui lui demande de réécrire l’autobiographie d’une jeune fille bien mystérieuse.  

Les deux jeunes gens sont destinés à se retrouver mais où ? Quand ? En 1984 ? Dans 1Q84 ? Dans cette vie ? Dans la mort ?  

 

Ce que j’ai aimé :

Pour ceux qui ne connaissent pas encore Haruki Murakami vous découvrirez en commençant ces pages l'attraction qui sévit presque à notre insu et réussit à nous aimanter, sans savoir précisément à quoi cela tient. Peut-être au style, facile, coulant, précis qui fait mouche à chaque phrase. Ou à l’intrigue, mystérieuse et opaque, qui sème judicieusement indices, fausses pistes, nouveau mystère sorti des ténèbres et qui aiguillonnent insidieusement la curiosité du lecteur. Ou encore aux idées, aux questions incessantes sur le monde que pose l’auteur, sans jamais prétendre y répondre.

« Monsieur Komatsu est possédé par la littérature. Les gens comme lui cherchent à découvrir, au moins une fois dans leur vie, quelque chose de véritable, d’authentique. Ensuite, ils ont envie de l’offrir respectueusement au monde. » (p. 213)

 1Q84 est un roman complet qui oscille savamment entre profondeur et futilité : quand par exemple Aonamé apprend à ses élèvres les rudiments de l’autodéfense, on ne sait si l’on doit sourire de ses techniques pour le moins radicales, ou s’inquiéter car, en creux, est pointée l’impuissance des femmes face à la force et à la folie masculine :

« La plupart des hommes sont plus grands et plus forts. Une attaque éclair aux testicules, pour une femme, c’est la seule chance de gagner. C’est bien ce que Mao Tsétoung a dit : cherchez et trouvez le point faible de votre adversaire, prenez-le par surprise et écrasez-le. » (p. 232)

De même on ignore quel sort réserver à ces mystérieux Little People : sont-ils des lutins issus des  romans ancrés dans les mondes surnaturels, ou des allégories de forces sous-jacentes tapies sous une apparente réalité qui vacille ?

 « Que cela me plaise ou non, je me trouve à présent dans l’année 1Q84. L’année 1984 que je connaissais n’existe plus nulle part. Je suis maintenant en 1Q84. L’air a changé, le paysage a changé. Il faut que je m’acclimate le mieux possible à ce monde lourd d’interrogations. Comme un animal lâché dans une forêt inconnue. Pour survivre et assurer ma sauvegarde, je dois en comprendre au plus tôt les règles et m’y adapter. » (p. 200)

« Dans le roman de George Orwell, 1984, comme vous le savez, le personnage de Big Brother est représenté sous la forme d’un dictateur. Il s’agissait à l’époque pour l’auteur d’une allégorie du stalinisme, mais ensuite le terme de Big Brother est devenu le symbole de toute société totalitaire. Il faut porter cela au crédit d’Orwell. Aujourd’hui, alors que nous sommes vraiment en 1984, Big Brother est tellement célèbre qu’il en est devenu trop évident. S’il se manifestait devant nous, nous dirions en le montrant du doigt : « Attention ! prenez garde, lui, là, c’est Big Brother ! » Autrement dit, Big Brother n’a plus sa place sur la scène de notre monde. Ce sont ces Little People qui ont fait leur  entrée. Ne pensez-vous pas que le contraste est extrêmement significatif ? (…) Les Little People sont des êtres invisibles. Nous ne savons pas s’ils sont bons ou mauvais, s’ils possèdent une substance ou non. Pourtant, constamment, ils semblent creuser et démolir le sol sous nos pieds. » (p. 409)

1Q84 est un roman puissant qui repousse les frontières de la réalité pour questionner un monde hermétique aux questionnements des humains. Un roman peuplé de non-dits qu’il s’agit de déchiffrer pour s’adapter au roman comme au monde…

 

Ce que j’ai moins aimé :

-          La perspective de devoir attendre encore jusqu’au mois de mars pour le tome 3 a tendance à me déplaire, en attendant je vais me consoler avec le tome 2 et je si vraiment le suspense est trop prenant, je n’aurai plus qu’à apprendre le japonais…

 

Premières phrases :

 « La radio du taxi diffusait une émission de musique classique en stéréo. C'était la Sinfonietta de Janacek. Etait-ce un morceau approprié quand on est coincé dans des embouteillages ? Ce serait trop dire. D'ailleurs, le chauffeur lui-même ne semblait pas y prêter une oreille attentive. L'homme, d'un âge moyen, se contentait de contempler l'alignement sans fin des voitures devant lui, la bouche serrée, tel un vieux marin aguerri, debout à la proue de son bateau, appliqué à déchiffrer quelque sinistre pressentiment dans la jonction des courants marins. Aomamé, profondément enfoncée dans le siège arrière du véhicule, écoutait, les yeux mi-clos. »

 

D‘autres avis :

 Babélio

 Presse : Télérama

Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Autoportrait de l’auteur en coureur de fond de Haruki MURAKAMI

Millénium de Stieg LARSSON

 

1Q84, Livre I, Avril-juin, Haruki MUAKAMI, Traduit du japonais par Hélène Morita, Belfond, août 2011, 533 p., 23 euros

 

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Une bonne épouse indienne de Anne CHERIAN

Publié le par Hélène

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L’auteur :

Anne Cherian est née en Inde et a étudié aux universités de Bombay, de Bangalore et, finalement, de Berkeley en Californie. Elle vit aujourd’hui à Los Angeles. Elle signe là son premier roman.

 

L’histoire :

A la base de la vie de famille en Inde, il y a les mariages arrangés. C’est une des traditions à peu près immuables encore aujourd’hui maintenue par les mères, les grand-mères, les tantes et les belles-mères, très soigneusement à l’insu ou presque des principaux intéressés.

     Neel a beau avoir étudié aux Etats-Unis et être devenu un brillant anesthésiste dans le plus grand hôpital de San Francisco, il n’y échappera pas — malgré son passeport américain et sa pétulante maîtresse californienne. Au cours d’un bref voyage en Inde, le piège se referme sur lui et le voilà marié à Leila qu’il n’a vue qu’une fois.
Certes, elle est belle, douce, cultivée, intelligente — bien plus qu’il ne l’imagine — mais il n’en veut pas. Obligé de la ramener avec lui à San Francisco, il va lui mener la vie dure, avec comme seule idée de s’en débarrasser.

 

Ce que j’ai aimé :

-          C’est une lecture facile, relativement dépaysante, qui  porte un regard neuf sur les mariages arrangés.

 

Ce que j’ai moins aimé :

Je dois avouer que j’ai lu de nombreux passages en diagonale tant ils débordaient de clichés. J’ai trouvé ce roman terriblement attendu, tout est calibré, aucune surprise ne se dévoile au hasard d’une page, et les états d’âme de Neel et de sa belle épouse indienne ont fini par me lasser.

La conclusion de cette cruche chère Leila est de plus très discutable : il vaut mieux faire confiance à sa famille qui nous connait bien pour nous choisir un mari, plutôt que d’opter pour quelqu’un qui ne partage ni notre culture, ni notre situation  sociale, ni notre éducation… Terriblement réducteur et appauvrissant à mon avis (et dangereux quand on sait qu'à une époque Jean-Luc Delarue était considéré comme le gendre idéal pour la ménagère de moins de 50 ans...)

 

Premières phrases :

« Le billet d’avion et l’aérogramme arrivèrent le même jour. L’équipe de nettoyage avait déposé le courrier en une pile bien nette sur le plan de travail de la cuisine. Comme toujours, l’appartement était impeccable, et l’odeur âcre et tenace du produit désinfectant rappelait à Neel l’hôpital. »

 

Vous aimerez aussi :

Quand viennent les cyclones de Anita NAIR

 

Une bonne épouse indienne, Anne Cherian, Traduit de l’anglais par Josette Chicheportiche, Mercure de France, 26,50 €

POCHE : Une bonne épouse indienne, Anne Cherian, Traduit de l’anglais par Josette Chicheportiche, Folio, 7.80 euros

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Itinéraire d’enfance de DUONG THU HUONG

Publié le par Hélène

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 ♥ ♥ 

 « L’homme doit lutter et gagner. » (p. 338)

  

L’auteur :

 

Née en 1947 au Viêtnam, Duong Thu Huong, pour avoir défendu ses convictions démocratiques, a été emprisonnée en 1991. Elle a vécu en résidence surveillée dans son pays jusqu'en janvier 2006, date de son arrivée à Paris pour la sortie de Terre des oublis (Sabine Wespieser éditeur), dont le succès l'a incitée à rester en France pour se consacrer à l'écriture.

 

L’histoire :

 

Bê a douze ans, sa vie dans le bourg de Rêu s'organise entre sa mère, ses amis, ses voisins et ses professeurs. Son père, soldat, est en garnison à la frontière nord. Mais parce que son caractère est déjà bien trempé et qu'elle ne supporte pas l'injustice, elle prend la défense d'une de ses camarades abusée par un professeur, et se voit brutalement exclue de l'école. Révoltée, elle s'enfuit de chez elle, avec sa meilleure amie, pour rejoindre son père. Commence alors un étonnant périple : les deux adolescentes, livrées à elles-mêmes, sans un sou en poche, voyagent en train, à pied ou en autobus, à travers les montagnes du nord, peuplées par les minorités ethniques. Elles finiront par arriver à destination, après des aventures palpitantes et souvent cocasses : Bê la meneuse, non contente d'avoir travaillé dans une auberge avec son amie, tué le cochon, participé à la chasse au tigre, va également confondre un sorcier charlatan et jouer les infirmières de fortune. Au fil des mois et des rencontres, l'adolescente grandit, mûrit, et fait l'apprentissage de la liberté. Duong Thu Huong avoue avoir donné beaucoup d'elle-même à son héroïne...

 

Ce que j’ai aimé :

 

-          Itinéraire d’enfance rend hommage à la fraîcheur de l’enfance entre désobéissance, rencontres marquantes,  aventures (dont la mythique chasse au tigre) mais aussi injustices et maltraitances.

 

-          La jeune Bê est une enfant optimiste, qui respire la joie de vivre et ses aventures lui ressemblent, même si elle ne  nous épargne pas la pauvreté de ces familles  car « Là où règne l’ignorance, règne aussi la misère. » (p.317) Elle va faire son apprentissage de la vie au fil de ses rencontres et expériences :

 

« Elle m’a fait comprendre que chaque être humain était un mystère dont on parvient rarement à lever le voile et qu’on n’a souvent pas assez de toute une vie pour saisir un seul aspect de la personnalité de quelqu’un. » (p. 232)

 

« Vivre, c’est surmonter les malheurs, la souffrance et l’injustice pour atteindre l’objectif qu’on s’est fixé. » (p. 343)

 

-          C’est un roman facile à lire, agrémenté de petits contes, de croyances populaires, légendes et superstitions…

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Peut-être un peu trop léger 

 

Premières phrases :

 

« J’ai douze ans. Nous habitons le petit bourg de Rêu, ma mère et moi. On y trouve encore un quartier de maisons anciennes, toutes construites sur le même modèle : un bâtiment central soutenu par des colonnes de bois noir poli, quelques arbres fruitiers dans la cour et un grand jardin entouré d’un muret souvent envahi d’une mousse verte. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Du même auteur : Terre des oublis

Autre : Ciel bleu : une enfance dans le Haut Altaï de Galsan TSCHINAG

 

D’autres avis :

 

Stéphie, Schlabaya

 

Itinéraire d’enfance, Duong Thu Huong, roman traduit du vietnamien par Phuong Dang Tran, Sabine Wespieser, 24 euros

 

POCHE : Itinéraire d’enfance, Duong Thu Huong, roman traduit du vietnamien par Phuong Dang Tran, Le livre de poche, 346 p., 6.50 euros

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Ikebukuro West Gate Park de Ira ISHIDA

Publié le par Hélène

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♥ ♥ 

 

L’auteur :

 

Ishida Ira est un auteur japonais. En 1997, le premier volume d’Ikebukuro West Gate Park se voit décerner le prix Orû Yomimono, grand prix de littérature policière. Depuis, l’auteur a publié de nombreux romans dont les deux volumes suivants d’Ikebukuro West Gate Park, et obtenu de nombreux autres prix littéraires.

 

L’histoire :

 

Bienvenue à Ikebukuro Park. Dans ce square ouvert aux aventuriers urbains, à la sortie ouest de la gare d’Ikebukuro, se croisent les filles en minijupe et les musiciens en herbe jusque tard dans la nuit. C’est là que Makoto et sa bande d’amis ont établi leur QG. Makoto a dix-neuf ans, il habite seul avec sa mère. C’est un trouble shooter, un « solutionneur d’embrouilles ». Des embrouilles, il n’en manque pas dans ce quartier où se rencontrent gamins à la dérive, yakuzas, filles perdues et clandestins dans le Japon de l’envers. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

-          Ikebukuro West Gate Park est composé de plusieurs histoires qui ont toutes en commun le jeune Makoto, un jeune homme satellite, vivant comme à l’extérieur du monde qu’il décrit, et aimant porter secours à ceux qui réclament son aide.

 

Il nous conte ses aventures dans un Japon moderne, dans une ville gangrenée par les luttes de clans, et hantée par des personnes pauvres, rongées par la solitude. La lumière qui émane de ce roman est comme crépusculaire,  et l’on ne sait si tout va sombrer dans la nuit ou si un autre jour plus lumineux va s’épanouir. Makoto est une sorte d’ange gardien des habitants, un justicier intelligent qui fait le lien entre les solitudes.

 

« Un petit problème, et hop on nouait des liens, on recevait et on donnait des étincelles qu’on n’oublierait pas. » (p. 149)

 

« Ne pas considérer les êtres humains en bloc, ne pas les réduire à des statistiques. Les règles de base étaient les mêmes, qu’il s’agisse de pondre une chronique, d’écouter les gens raconter leur histoire, ou même de traquer un criminel complètement taré. » ( p. 262)

 

La pauvreté et son corollaire, le pouvoir destructeur de l’argent et du système économique sont des thèmes récurrents au fil des histoires :

 

 « Devenir adulte dans ce monde, c’est sans doute devenir le dernier client de l’histoire de l’humanité. Acheter sans cesse des choses, pour les balancer dans un cœur vide. Haïr les centres commerciaux, ne plus pouvoir supporter la solitude du shopping, et continuer à arpenter les mêmes allées lumineuses parce que vous n’avez nulle part ailleurs où aller. En écoutant le chant des sirènes qui s’élève de cet amoncellement de produits. » (p. 79)

 

Makoto est un être qui prône la simplicité, aussi bien dans ses relations avec les autres que dans son rapport au monde :

 

« Quand j’ai fini de tenir la boutique, je me rends seul au Square Ouest, là où les ormes commencent enfin à perdre leurs feuilles. Banc inconfortable, fontaine inutile, sculptures sans signification. Par-dessus le marché, un vent qui commence à se faire frisquet, et les super bruits de la ville. Et quand je lève les yeux, dans les interstices des immeubles, un ciel d’automne indéfiniment bleu.

C’est gratuit, offert à tout le monde. » (p. 298)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          J’ai été quelque peu lassée par le côté « super-héros » de Makoto, qui,  quoi qu’il advienne réussit toujours intelligemment à résoudre les intrigues qui se posent à lui. Je n’aurais peut-être pas dû lire les deux tomes à la suite…

 

Premières phrases :

 

« J’ai un autocollant de photomaton sous mon portable. Un autocollant défraîchi où on nous voit tous les cinq nous bousculer dans un cadre étroit. Le motif du fond ? Une jungle verte. Des singes vulgaires se trémoussent en quêtant une banane. Rien qui différencie leur monde du nôtre. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Park life de Shuichi YOSHIDA

 

Ikebukuro West Gate Park, ISHIDA Ira, traduit du japonais par Anne Bayard-Sakai, Picquier poche, 8.50 euros le tome I, 7 euros le tome II

 

Merci à Isabelle LACROZE des Editions Picquier.

Publié dans Littérature Asie

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Autoportrait de l’auteur en coureur de fond de Haruki MURAKAMI

Publié le par Hélène

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 ♥ ♥ ♥

 

 « Se consumer au mieux à l’intérieur de ses limites individuelles, voilà le principe fondamental de la course, et c’est aussi une métaphore de la vie –et, pour moi, une métaphore de l’écriture. » (p. 106)

 

L’auteur :

 

Haruki Murakami est un écrivain japonais. Il dirige un club de jazz, avant d'enseigner à Princeton durant quatre années. Son premier livre - non traduit - Ecoute le chant du vent, en 1979, lui vaut le prix Gunzo. Expatrié en Grèce, en Italie puis aux Etats-Unis, il rédige Chroniques de l'oiseau à ressort' en 2001 et Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil en 2002. Suite au séisme de Kobe et à l'attentat de Tokyo en 1995, il décide de revenir s'installer au Japon. Il y écrit un recueil de nouvelles Après le tremblement de terre, puis Les Amants du Spoutnik en 2003. Son roman initiatique Kafka sur le rivage, sorti en 2006, l'inscrit définitivement parmi les grands de la littérature internationale. L'oeuvre d'Haruki Murakami oscille entre la pensée bouddhiste qui voit des répercussions à nos actions sur une échelle plus large et la chronique sociale dans un cadre fantastique.

 

L’histoire :

 

Le 1er avril 1978, Murakami décide de vendre son club de jazz pour écrire un roman. Assis à sa table, il fume soixante cigarettes par jour et commence à prendre du poids. S'impose alors la nécessité d'une discipline et de la pratique intensive de la course à pied.
Ténacité, capacité de concentration et talent : telles sont les qualités requises d'un romancier. La course à pied lui permet de cultiver sa patience, sa persévérance. Courir devient une métaphore de son travail d'écrivain.

Courir est aussi un moyen de mieux se connaître, de découvrir sa véritable nature. On se met à l'épreuve de la douleur, on surmonte la souffrance. Corps et esprit sont intrinsèquement liés.

Murakami court. Dix kilomètres par jour, six jours par semaine, un marathon par an. Il court en écoutant du rock, pour faire le vide, sans penser à la ligne d'arrivée. Comme la vie, la course ne tire pas son sens de la fin inéluctable qui lui est fixée…

 

Ce que j’ai aimé :

 

Haruki Murakami réussit le tour de force de convaincre en quelques mots le plus réticent des non-sportifs des bienfaits de la course à pied. Décrivant ceux qui aiment courir comme des personnes souhaitant  vivre leur vie « le plus pleinement possible » (p.105), il permet au plus commun des mortels de rejoindre une communauté qui semblait jusqu’ici fermée à ceux qui ne pratiquent pas ou très peu de sport… Il décrit très adroitement les processus psychiques, psychologiques qui régissent l’esprit durant l’épreuve, la tension omniprésente durant la course, l’effort constant nécessaire, les limites si prégnantes, puis le relâchement, le soulagement libérateur :

 

« A peu près à ce moment-là est née et a grossi en moi une nouvelle impression. Quelque chose que je décrirais ainsi : « J’ai accepté un défi risqué et j’ai trouvé en moi la force de m’y confronter. » Un bonheur personnel, mêlé de soulagement. Le soulagement plus fort sans doute que le bonheur. Comme si un nœud serré très fort, à l’intérieur de moi, se relâchait, peu à peu, un nœud dont je n’avais pas su, jusqu’alors, qu’il se trouvait là, en moi. » (p. 146)

 

 

-          Filant sa métaphore qui consiste à comparer la course à pied et l’écriture, il crée un parallèle lumineux entre les deux activités :

 

 « Pour moi, écrire des romans est fondamentalement un travail physique. L’écriture en soi est peut-être un travail mental. Mais mettre en forme un livre entier, le terminer, ressemble plus au travail manuel, physique. (…) Le processus tout entier –s’asseoir à sa table, focaliser son esprit à la manière d’un rayon laser, imaginer quelque chose qui surgisse d’un horizon vide, créer une histoire, choisir des mots justes, l’un après l’autre, conserver le flux de l’histoire sur les bons rails -, tout cela exige beaucoup plus d’énergie, durant une longue période, que la majorité des gens ne l’imaginent. » (p. 101)

 

« En ce qui me concerne, la plupart des techniques dont je me sers comme romancier proviennent de ce que j’ai appris en courant chaque matin. Tout naturellement, il s’agit de choses pratiques, physiques. Jusqu’où puis-je me pousser ? Jusqu’à quel point est-il bon de s’accorder du repos et à partir de quand ce repos devient –il trop important ? Jusqu’où une chose reste-t-elle pertinente et cohérente et à partir d’où devient-elle étriquée, bornée ? Jusqu’à quel degré dois-je prendre conscience du monde extérieur et jusqu’à quel degré est-il bon que je me concentre profondément sur mon monde intérieur ? Jusqu’à quel point dois-je être confiant en mes capacités ou douter de moi-même ? Je suis sûr que lorsque je suis devenu romancier, si je n’avais pas décidé de courir de longues distances, les livres que j’ai écrits auraient été extrêmement différents. » (p. 105)

 

-          C’est une profonde et belle réflexion sur la vie, sur sa vie que nous offre Haruki Murakami dans ce texte court très accessible à découvrir sans tarder.

 

« Rien dans le monde réel n’est aussi beau que les illusions d’un homme sur le point de perdre conscience. » (p. 86)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Rien, ce titre m’a donné envie de découvrir d’autres romans de cet auteur…

 

Premières phrases :

 

« Un aphorisme prétend qu’un vrai gentleman ne dit pas un mot des femmes avec qui il a rompu ou des impôts qu’il doit payer. Faux, archifaux ! Parce que moi, désolé, je ne suis pas comme ça. Il faudrait en tout cas ajouter une condition pour qu’il y ait un peu de vérité dans cette phrase : « Ne racontez à personne ce que vous faites pour rester en bonne santé. » J’ai le sentiment qu’un homme de qualité ne devrait pas se répandre en public sur les moyens qu’il utilise pour se maintenir en forme. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Le temps qui va, le temps qui vient de Hiromi KAWAKAMI

 

D’autres avis :

 

Blogs : Fred, Yueyin, Mango

Presse : Télérama

 

 

Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, Haruki MURAKAMI, traduit du japonais par Hélène Morita, Belfond, avril 2009, 180 p., 19.50 euros

 POCHE : Autoportrait de l’auteur en coureur de fond, Haruki MURAKAMI, traduit du japonais par Hélène Morita, 10/18, février 2011, 220 p., 7.40 euros

 

Merci à Marie-Laure PASCAUD des Editions 10/18 pour m'avoir permis de découvrir cet auteur.

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Ru de Kim THUY

Publié le par Hélène

ru

♥ ♥ ♥

  « La vie est un combat où la tristesse entraîne la défaite. » (p. 22)

  

L’auteur :

 

Kim Thuy a quitté le Vietnam avec d’autres boat people à l’âge de dix ans. Elle vit à Montréal depuis une trentaine d’années. Son parcours est hors du commun. Elle confie avoir fait toutes sortes de métiers –couturière, interprète, avocate, restauratrice – avant de se lancer dans l’écriture (en français) de ce premier roman.

 

L’histoire :

 

Une femme voyage à travers le désordre des souvenirs : l'enfance dans sa cage d'or à Saigon, l'arrivée du communisme dans le Sud-Vietnam, la fuite dans le ventre d'un bateau au large du golfe de Siam, l'internement dans un camp de réfugiés en Malaisie, les premiers frissons dans le froid du Québec. Récit entre la guerre et la paix, 'Ru' dit le vide et le trop-plein, l'égarement et la beauté. De ce tumulte, des incidents tragicomiques, des objets ordinaires émergent comme autant de repères d'un parcours. En évoquant un bracelet en acrylique rempli de diamants, des bols bleus cerclés d'argent ou la puissance d'une odeur d'assouplissant, Kim Thuy restitue le Vietnam d'hier et d'aujourd'hui. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

-          La forme de ce court roman intensifie son propos : les chapitres sont courts, immédiatement évocateurs, l’intensité des souvenirs flirte avec la puissance du propos. La narratrice entremêle avec intelligence différentes périodes. Avec retenue elle convoque ses souvenirs et nous les offre chantés dans une langue poétique riche et variée.

 

-          Son chant déborde d’amour pour les siens, et particulièrement pour sa mère, pilier de la famille qui a permis sans doute le passage sans trop de heurts de ces difficiles épreuves. C’est grâce à elle qu’elle a pu se construire au-delà du drame et avancer vers la lumière…

 

« J’ai aussi compris plus tard que ma mère avait certainement des rêves pour moi, mais qu’elle m’a surtout donné des outils pour me permettre de recommencer à m’enraciner, à rêver. » (p. 30)

 

- Kim Thuy signe là un admirable premier roman qui a reçu le prix RTL Lire en 2010.

 

 «Mon récit n'est pas un récit autobiographique, insiste-t-elle. Ce livre-là n'est pas mon histoire. Je prends l'excuse de raconter «à travers moi» l'histoire de tous ces gens que j'ai croisés. Malgré leurs souffrances, leur immense pauvreté, il y a dans leur histoire une beauté extrême.»

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Rien.

 

Premières phrases :

 

« Je suis venue au monde pendant l’offensive du Têt, aux premiers jours de la nouvelle année du Singe, lorsque les longues chaînes de pétards accrochées devant les maisons explosaient en polyphonie avec la son des mitraillettes. 

J’ai vu le jour à Saïgon, là où les débris des pétards éclatés en mille miettes coloraient le sol de rouge comme des pétales de cerisier, ou comme le sang des deux millions de soldats déployés, éparpillés dans les villes et les villages d’un Vietnam déchiré en deux.»

 

Vous aimerez aussi :

 

Le jour avant le bonheur de Erri DE LUCA

 

D’autres avis :

 

BLOGS : Ankya, Fransoaz, Kathel, Keisha, BelleSahi, Choco, Mango, Isa, Anis

 PRESSE : TéléramaL’express

  

Ru, Kim THUY, Liana Levi, 2010, 143 p., 14 euros

 

challenge littérature au féminin

Publié dans Littérature Asie

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Le temps qui va, le temps qui vient de Hiromi KAWAKAMI

Publié le par Hélène

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 ♥ ♥ ♥

 « La vie, c’est toujours quelque chose de décousu. » (p.96)

 

 L’auteur :

 

Hiromi Kawakami est une écrivain japonaise. Kawakami Hiromi a su s’imposer dans le monde littéraire japonais par la tonalité très particulière de son style, à la fois simple et subtil, dont les thèmes privilégiés sont le charme de la métamorphose, l amour et la sexualité.

 

L’histoire :

 

Le vrai héros du dernier roman de Kawakami, c’est ce petit quartier commerçant de Tôkyô où elle a planté son décor : non qu’on nous le décrive en détail, mais c’est à travers la chaleureuse communauté de gens qui l’habitent qu’insensiblement il se déploie et prend corps. Ces voisins sont de tous âges et de toutes conditions : poissonnier, diseur de bonne aventure, enseignante, auxiliaire de vie, chômeuse, un cuisinier et sa patronne, un couple d’imprimeurs, employés de bureau et lycéens... Et chacun à son tour prend la parole dans un livre à la composition surprenante, à la fois très structurée et d’apparence aussi aléatoire que le hasard qui enchevêtre ces vies les unes aux autres. De chapitre en chapitre, chacun passe alternativement du statut de personnage principal à secondaire, et les fils de ces existences séparées peu à peu tissent des liens, entrent en résonance et finissent par se rejoindre et dessiner un motif qui ne deviendra lisible qu’à la fin du roman. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

La construction en chapitres mettant en scène différents personnages permet de rendre l’aspect décousu de la vie des personnages tout en chantant l’immuabilité du monde. Les hommes passent, mais le monde reste. Tous les personnages semblent indécis face à leur vie, aux choix qu’il faut nécessairement faire et peu réussissent finalement à se décider.

 

Le récit de Maki qui clôt le roman est lui teinté d’une lucidité lumineuse :

 

« J’avais vécu, je vivais, et cela suffisait à déterminer les choses à chaque instant. Loin d’être manifeste, le choix avait lieu d’invisible façon, mais le seul fait de connaître quelqu’un, de se croiser, le seul fait d’être là, de respirer, avait des répercussions. Il était impossible de ne pas être impliqué.

Je décidais, quelqu’un décidait, les femmes décidaient, les hommes décidaient, la ronde des causes et des effets qui entraînait la terre dans son mouvement décidait, voilà pourquoi j’étais là où j’étais. » (p. 250)

 

« Jusqu’à ce qu’un jour les hommes disparaissent de l’univers, moi, Heizô, Genji, nous vivons. Perpétués par ceux qui vivent aujourd’hui ici, dans cette ville, dans ce quartier, au fin fond de la mémoire. Et ainsi de suite, de mémoire en mémoire. (…) Vivre était une chose passionnante. Après la mort, comme plus rien de nouveau ni d’intéressant ne se produit, c’est un peu fade. Mais je n’ai pas vécu pour rien. » (p. 277)

 

Nul besoin de chercher un sens, la vie est là, comme le souligne l’auteur dans ce magnifique texte écrit pour le magazine Télérama après le tsunami :

 

« Je ne suis qu'une chose insignifiante. Triste constatation peut-être. Mais c'est justement ce qui rend ma vie précieuse. Minus habens, certes, mais un rassemblement de cent vingt millions de fétus forme le Japon. Jetés à terre par les typhons, écrasés par les séismes, voilà mille ans, deux mille ans que nous vivons. Tant que la vie est là, on peut connaître des instants lumineux sans nombre. La beauté du crépuscule. La magie des pétales des cerisiers que le vent emporte. La valeur inestimable des proches que l'on éprouve soudain, pour un rien. Le plaisir du soleil couchant en compagnie d'amis. L'évocation des plaisirs de la journée qui s'achève dans le moment qui précède le sommeil. »

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          Je n’ai pas toujours réussi à comprendre qui était qui car les personnages sont nombreux, pris sur le vif à différents moments de leur vie et le lien qui les relie est souvent subtil…

 

Premières phrases :

 

« Dans la boutique de Uoharu, sur un pan de mur non loin de l’entrée, il y a une photo accrochée avec des punaises.

On y voit deux hommes, deux Occidentaux. En complet sombre, debout, les coudes appuyés sur une table ronde qui leur arrive à hauteur de poitrine. L’un est étiré en longueur comme un fil, l’autre, petit et râblé. Ils ne se dévisagent pas, ils ne fixent pas non plus l’objectif de l’appareil, ils regardent vaguement au loin. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Du même auteur : Les années douces de Hiromi KAWAKAMI

 Autre :

 

Le temps qui va, le temps qui vient, Hiromi Kawakami, Roman traduit du japonais par Elisabeth Suetsugu, Picquier, mars 2011, 277 p., 19 euros

 

Je vous invite à découvrir l'intégralité du texte de Télérama : Japon : les heures d'après, par Hiromi Kawakami, romancière

 

« La vie est l'instabilité même. Cette philosophie de l'impermanence sous-tend le comportement de ceux qui s'entraident en silence. Oui, la vie est synonyme d'impermanence, oui, l'homme est éphémère, oui, chacun est seul quand il naît, seul quand il meurt, c'est justement pour cela qu'il faut s'entraider pour être sauvé. » (Interview Télérama)

   

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 Je remercie Isabelle LACROZE des Editions Picquier pour cette belle découverte.

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