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1258 résultats pour “vie parfaite

Titus n'aimait pas Bérénice de Nathalie AZOULAI

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥ 

"On dit qu'il faut un an pour se remettre d'un chagrin d'amour. On dit aussi des tas d'autres choses dont la banalité finit par émousser la vérité."

Prix Médicis 2015

Titus a quitté Bérénice, préférant rester avec sa femme Roma. Bérénice décide alors de rejoindre son homonyme racinienne et plonge corps et âme dans les tragédies  et dans l'oeuvre de Racine. Pour se consoler, pour oublier. La vie du dramaturge défile alors de sa jeunesse à Port Royal à sa mort en passant par le faste de Versailles. L'homme prend forme peu à peu, au-delà du créateur de génie, c'est un homme différent qui apparait, tiraillé entre son éducation religieuse et son attirance pour les lumières.

"Parfois, à la nuit tombée, Jean est épuisé par cette ronde d'éclipses qui commence dès l'aube, cette alternance d'anneaux, où il doit faire entrer toute son âme et qui n'ont jamais la même diamètre, tantôt larges, confortables, tantôt étroits, jusqu'à l'étranglement. Tantôt clairs, tantôt obscurs. La gloire, l'ingratitude, la gloire, l'ingratitude, la gloire, ad nauseam..." p. 147

En étudiant son oeuvre centrée sur la passion et ses débordements, Bérénice espère peut-être comprendre ce qui l'a emportée et l'a laissée transie sur le rivage de la rupture.

"Si vous parvenez à saisir tout ce qui se passe dans l'annonce d'une séparation, vous êtes au coeur de la condition humaines, ses désirs, sa solitude. On peut disséquer la mort d'une âme sans verser une seule goutte de sang." p. 193

Mais :

"Vouloir comprendre ce qu'on appelle l'amour c'est vouloir attraper le vent" p. 288

Dans une langue travaillée, proche de la grâce, l'auteur livre un bel hommage à la littérature, à ces textes classiques essentiels, essentiels pour se sauver, pour pratiquer la catharsis, pour comprendre comment d'autres ont succombé aux passions ou s'en sont affranchis, pour s'échapper un temps d'une réalité trop lourde à porter, pour qu'un personnage nous aide à porter notre destin incertain à bout de bras... Elle évoque la littérature, comme consolation pour "quitter son temps, son époque, construire un objet alternatif à son chagrin, sculpter une forme à travers son rideau de larmes." p. 20

Un texte magnifique !

 

Présentation de l'éditeur : P.O.L et Folio

Vous aimerez aussi : Phèdre de RACINE

 

Titus n'aimait pas Bérénice, Nathalie Azoulai, folio, février 2016, 304 p., 7.70 euros

Merci à l'éditeur

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Merry, Mary, Patty de Lola LAFON

Publié le par Hélène

  ♥ ♥

"Il m'a appris que ce n'est pas le temps qu'on a qui compte mais la façon dont on existe. Ce qu'on décide de faire de son existence."

Février 1974 Patricia Hearst, la fille d'un célèbre magnat de la presse américaine, est enlevée par un groupuscule révolutionnaire. Les revendications sont particulières : le SLA réclame de la nourriture pour les pauvres du pays. Rapidement, Patricia épouse la cause de ses geôliers, tournant le dos au capitalisme pour rallier la cause de ses ravisseurs marxistes.

Lors de son procès, Gene Neveva est chargée de rédiger une "évaluation psychologique" qui permettrait d'innocenter la jeune femme et les actions révolutionnaires qu'elle a accomplie ensuite aux côtés du SLA. Elle choisit une jeune femme effacée, Violaine pour la seconder dans sa recherche de l'identité de la jeune Patricia / Tania. Qui est-elle ? "Une marxiste terroriste, une étudiante paumée, une authentique révolutionnaire, une pauvre petite fille riche, héritière à la dérive une personnalité banale et vide qui a embrassé une cause au hasard, une zombie manipulée, une jeune fille en colère qui tient l'Amérique dans le viseur ?" (p. 15) Qui vise t elle ? Son pays ? Ses parents ? Ou "Ceux qui ne l'ont pas crue, pas écoutée, ceux qui ne choisissent pas leur camp, coupable d'indifférence aux pauvres" ?

Mais au-delà de ces interrogations, pourquoi s'acharne-t-on contre elle et contre celles qui quittent les routes bien tracées de la civilisation ?

Installées dans les Landes, loin de l'Amérique, Violaine et Geneva observent l'envers de l'Amérique et de son système. Violaine, jeune femme anorexique fragile, évolue peu à peu au contact de Geneva et de Patricia. Lola Lafon peint de très beaux portraits féminins, s'interrogeant avec subtilité sur ce qui forge l'identité et sur ces chemins de traverse que la vie peut prendre quelquefois.

 

J'ai eu la chance de rencontrer Lola Lafon lors du forum Fnac, j'en parle ICI

 

Présentation de l'éditeur : Actes Sud

D'autres avis : Télérama ; Bénédicte ; Claudialucia

Vous aimerez aussi : The girls de Emma CLINE

 

Merry, Mary, Patty, Lola lafon, Actes Sud, août 2017, 240 p., 19.8 euros

 

Merci à l'agence Anne et Arnaud.

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Un repas en hiver de Hubert MINGARELLI

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥

Pendant la seconde guerre mondiale trois soldats décident d'échapper aux fusillades matinales éprouvantes en acceptant en contrepartie de partir à la chasse à l'homme juif au fin fond de la forêt polonaise. Il leur faut revenir avec un prisonnier au camp. Le narrateur, Emmerich et Bauer arpentent alors la région, tétanisés par le froid qui règne en cet hiver rigoureux. 

En chemin chacun partage un peu de sa vie avec les autres, dans un élan fraternel consolateur. Ainsi Emmerich avoue s'inquièter pour son fils resté là bas et sur le fait qu'il pourrait prendre un mauvais chemin en apprenant à fumer. Les autres se penchent sur cette épineuse question et réfléchissent aux solutions possibles, permettant ainsi à leur esprit de s'évader loin de cette guerre meurtrière. 

La réalité se rappellent à eux par hasard quand ils trouvent un juif dont le sort semble scellé. Tiraillés par la faim ils s'installent dans une ferme abandonnée avant de ramener leur prisonnier au camp, et se préparent alors un repas avec le peu qu'ils ont. Survient un polonais qui bouscule le fragile équilibre du repas. Profondément antipathique, sa haine contre le juif entraîne chez les soldats un élan protecteur, presque malgré eux. Cette trêve durera-t-elle ?

Il n'est guère évident pour ces hommes d'appréhender le meurtre, et un détail infime peut leur rappeler qu'ils ont face à eux avant tout un homme, qui pourrait être leur fils, leur frère, leur père. Le narrateur est ému par un détail sur le bonnet du juif : un flocon, preuve qu'une mère aimante a tricoté pour lui ce petit dessin minuscule qui le rend pourtant humain.

Ce repas en hiver qu'ils partagent met en lumière les contradictions de ces soldats réduits à n'être que des demi-hommes à cause de cette guerre qu'ils n'ont pas choisie. Ce ne sont ni des bons ni des méchants, ni des anges, ni des brutes, juste des victimes d'une logique implacable absurde. 

 

Présentation de l'éditeur : Stock 

Du même auteur : Une rivière verte et silencieuse ; L'incendie

D'autres avis : Jérôme  ; Clara ; Cathe 

 

Un repas en hiver, Hubert Mingarelli, Stock, 2012, 144 p., 17 euros

Un repas en hiver, Hubert Mingarelli, J'ai Lu, 2014, 7.20 euros

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Captive de Margaret ATWOOD

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥ ♥

En 1873 Grace Marks, seize ans, est condamnée à la prison à perpétuité pour avoir assassiné son jeune employeur et sa gouvernante, avec l'aide de son petit ami, condamné à mort. Etait-elle victime, simple complice, conspiratrice ? A-t-elle feint la folie ? Nul ne le sait réellement. Le Docteur Jordan s'empare du dossier, bien décidé à plonger dans l'âme de Grace pour en sonder les profondeurs. Mais saura-t-il accéder dans ces recoins secrets de l'âme ?

Alors que sa mère le destine à une jeune femme aimante ordinaire, des visions apocalyptiques de ce que serait sa vie s'offrent à lui : "Sa mère croit-elle réellement qu'il puisse être séduit par une telle vision de lui-même - marié à Fidelia Cartwright et emprisonnée dans un fauteuil près de la cheminée, figé dans une sorte de stupeur pétrifiée tandis qu'à côté de lui sa chère femme l'enroulerait lentement dans des fils de soie multicolores, tel un cocon ou une mouche piégée dans la toile d'une araignée ?" p. 392

Peu à peu, il est pris dans les filets de Grace, qui, telle une Shéhérazade brode pour mieux le retenir...

Inspiré d'un sanglant fait divers qui a bouleversé le Canada du XIXe siècle, Margaret Atwood écrit là un roman remarquable dans par sa construction que par ses réflexions. Elle choisit de multiplier supports et points de vue, faisant alterner le point de vue de Grace, celui de Simon, mais aussi des lettres, autant de prismes qui ont tendance à donner une vision déformée des personnages. Qui sont-ils vraiment ? Eux-mêmes le savent si peu... Qui détient la vérité et peut-on dire que cette vérité existe tant l'être est capable de refouler sentiments et pensées ?

"Que de mystères demeurent à découvrir dans le système nerveux, cette toile de structure matérielle et éthérée, ce réseau de fils qui parcourent le corps, compose de mille fils d'Ariane, menant tous au cerveau, ce sombre labyrinthe où gisent, éparpillés, les os humains et où rôdent les monstres...

Et aussi les anges, se dit-il. Et aussi les anges." p. 247

Cette plongée dans l'âme humaine à travers le personnage de Grace s'avère passionnante !
 

Présentation de l'éditeur : 10-18
D'autres avis : Eva

 

Merci à l'éditeur !

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Le discours de Fabrice CARO

Publié le par Hélène

♥ ♥

"La vie est un vélo rouge sans petites roues"

Adrien passe une soirée en famille, mais il est peu concentré et impliqué dans les conversations, son esprit louvoie. Il faut dire qu'à 17h24 il a envoyé un texto à son ex qui a souhaité "faire une pause", à 17h56 Sonia a lu le message envoyé mais sans répondre si bien que son esprit est happé par son téléphone, bien loin des considérations des uns et des autres sur le chauffage au sol. Quand de surcroit son beau-frère lui demande de préparer un discours pour leur mariage, Adrien ne sait plus à quel saint se vouer...

Quelques belles trouvailles voient le jour, comme ce moment où il se confie à sa mère en lui disant qu'il frôle la dépression, et qu'elle lui rétorque, pragmatique, "bois du jus d'orange", ou bien encore ces scènes autour de la tyrannie du texto, mais, mais...

Ce que j'ai moins aimé :

Cette lecture permet de passer un bon moment, grâce à de belles trouvailles mais le ton finit par lasser. Le discours ressemble à un one man show sans grande originalité. J'ai attendu en vain une profondeur rédemptrice, mais sans succès...

Face au discours frivole de la famille, lui se demande "où va le beau quand il n'est plus" et son regard est quelque peu méprisant, condescendant face à eux...

"En fait tout ça n'était qu'une couverture, la taxe d'habitation, le gratin dauphinois, peut-être une profondeur insoupçonnées surgirait-elle tout à coup de nulle part, sous le chauffage au sol, une fois la dalle arrachée, trouverait-on du Shakespeare, du sang, des larmes, de la sueur, de la vodka sur des violons tziganes ?"

Il se place dans la peau d'un pseudo-intellectuel qui redoute de devoir danser "La Chenille" lors du mariage ...

Ces moqueries m'ont semblé finalement gratuites et si j'imagine que l'auteur se moque aussi de cet Adrien dépressif, j'ai fini par rire jaune !

 

Présentation de l'éditeur : Gallimard

Nouvelle collection Sygne

D'autres avis : plus enthousiastes : Noukette ; The autist reading ; Agathe

Du même auteur : Zaï, zaï, zaï , Et si l'amour c'était aimer ?

 

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Recherche femme parfaite de Anne BEREST

Publié le par Hélène

Emilienne, photographe trentenaire décide de se lancer dans un projet ambitieux en vue d'exposer aux rencontres de Arles. Elle traque pour ce faire la femme parfaite, chaque femme photographiée devant lui donner le nom d'une autre femme qu'elle considère comme la femme parfaite. Cette quête lui permet d'amorcer une réflexion sur la femme moderne, sur les pressions sociales qu'elle subit notamment avec l'image de Julie, la voisine de Emilienne, traumatisée par son accouchement et son nouveau rôle de mère. Elle rencontre également une jeune femme libre, Georgia, par qui elle est irrésistiblement attirée.

Au-delà des femmes, l'auteure ausculte aussi notre société moderne, enferrée dans un culte à l'image que propagent les publicités ou encore les réseaux sociaux. Ceux-ci créent des cadres  dans lesquels les êtres essaient de rentrer, ils fantasment l'image qu'ils renvoient aux autres, enfantant un être factice "Aujourd'hui tout le monde met en scène sa vie dans le seul but que cela soit "cool" sur les photos.", "C'est pas ça être libre. Etre libre, c'est faire des choses sans être regardé." La vraie marginalité serait alors de ne pas être référencé sur Google...

Sur un ton plaisant, non dénué d'humour l'auteur use du second degré pour aborder ces problématiques modernes.

Ce que j'ai moins aimé : la bluette sentimentalo-sexuelle qui transforme la jeune femme en adolescente...

Bilan : un bon moment de lecture assez plaisant, surtout dans sa première partie.

 

Présentation de l'éditeur : Grasset ; Folio

D'autres avis : Caroline ; Violette ;

 

Recherche femme parfaite, Anne Berest, folio, janvier 2016, 240 p., 7.20 euros

Merci à l'éditeur.

 

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Elles sont parties pour le nord de Patrick LECOMTE

Publié le par Hélène

1917 la petite Wilma 11 ans vit dans une cabane avec son père trappeur dans le Grand nord canadien. Un jour, de retour d'une expédition dans la ville, son père lui ramène un livre qui va changer sa vie Le merveilleux voyage de Nils Holgersson à travers la Suède. La jeune fille, proche de la nature s'intéresse alors de plus près aux grues blanches qu'elle observe d'un promontoire près de la cabane. Elle aperçoit alors celle qu'elle prénommera Akka, une grue boiteuse qu'elle retrouvera saisons après saisons. Mais les années passant, Wilma comprend que cette espèce à laquelle elle est tant attachée est en voie de disparition. Elle décide alors de lutter pour la préservation de l'espèce.

Ce récit s'inspire de la véritable histoire du déclin de la grue blanche d'Amérique, il suit les différentes grandes étapes de la conservation. Aujourd'hui la situation s'est améliorée mais la menace rôde encore dans l'ombre car il n'en reste que 300.

https://www.registrelep-sararegistry.gc.ca/

Ce que j'ai moins aimé :

Il manque un souffle romanesque à l'histoire : le début était prometteur dans le grand froid canadien, puis les grandes étapes de la préservation prennent le devant de la scène au détriment de l'histoire de la jeune fille. Les sauts temporels annihilent toute tentative pour rentrer dans l'histoire car au moment où l'on s'attache au personnage et aux lieux, l'ellipse temporelle nous amène des années plus tard.

Bilan : Un premier roman qui reste prometteur malgré ses maladresses.

 

Présentation de l'éditeur : Préludes

D'autres avis : Babelio

 

Elles sont parties pour le nord, Patrick Lecomte, Préludes, mars 2016, 288 pages, 14.30 euros

 

Merci à l'éditeur.

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Discours d'un arbre sur la fragilité des hommes de Olivier BLEYS

Publié le par Hélène

♥ ♥

Entre affrontement entre modernité et ancestralité, la famille Zhang vit pauvrement au milieu d'un quartier désafffecté. Les usines et entrepôts ont été laissés à l'abandon et les Zhang vivent dans des conditions précaires dans un vieille maison qui menace de s'écrouler. Mais ils restent unis autour du vieil arbre de la cour, au pied duquel leurs parents sont enterrés. Ils restent fidèles à leurs parents et à leurs valeurs. Wei tient son rôle de chef de famille au sérieux, son épouse Yun le seconde pour élever leur fille Meifen, et prendre soin du beau père Hou Chi attaché à son écran de télé et de la belle mère la vieille Cui. Mas un projet immobilier fleurit dans le quartier, mettant en danger leur fragile équilibre. 

Olivier Bleys s'est inspiré pour ce récit des photographies des "maisons-clou", ces maisons que refusent de quitter leurs propriétaires et qui, décalées, perdurent dans un environnement hostile.  En vingt ans l'expropriation est devenu un problème majeur en Chine et l'auteur a souhaité ainsi mettre en scène des "irréductibles petits chinois" (dit-il) face à la puissance de la bureaucratie chinoise. 

Les propriétaires de cette "maison clou" de Nanning, ville du sud de la Chine, refusent sa destruction et bloquent l'achèvement de la route.  (REUTERS)

@france info

Mes réserves

Si le projet est intéressant, malheureusement des longueurs pèsent sur le récit. Puis, clou du spectacle, tout finit joyeusement dans des clichés qui frisent le Marc Lévy :

"Au fond je suis un homme comme les autres ! Les hommes bâtissent des maisons, labourent des champs, ils tracent des routes et amassent des trésors. Et un jour, ils découvrent que tout cela n'est pas grand-chose, que la vraie valeur de la vie, ce sont d'autres êtres humains, une femme ou un enfant à leurs côtés... Cela, même le plus borné des hommes finit par le comprendre. Il est souvent trop tard." p. 285

Bilan : Un début intéressant, puis la débrouile de Wei devient pathétique voire glauque pour finir par un discours lénifiant sur l'importance des rapports humains. What else ? comme dirait Georges...

 

Présentation de l'éditeur : Albin Michel 

Du même auteur  Concerto pour la main morte

D'autres avis : Nadael 

Sur les maisons clou : Voyager Loin 

 

Discours d'un arbre sur la fragilité des hommes, Olivier Bleys, Albin Michel, 2015, 292 p., 20 euros

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Le dernier jour d'un condamné de Victor HUGO

Publié le par Hélène

"N'y aura-t-il dans ce procès-verbal de la pensée agonisante, dans cette progression toujours croissante de douleurs, dans cette espèce d'autopsie intellectuelle d'un condamné, plus d'une leçon pour ceux qui condamnent ?"

Dans ce plaidoyer pour l'abolition de la peine de mort, Victor Hugo met en scène un homme condamné à mort, attendant jour après jour la fin, présentant ainsi l' "autopsie intellectuelle d'un condamné". Son état mental se dégrade au fur et à mesure, tant ses conditions de détention et la prison elle-même sont inhumaines. Il espère ne pas mourir mais il souhaite aussi cacher sa mort potentielle à sa famille : sa femme et sa mère, gravement malades, risqueraient en effet d'en mourir et sa fille serait alors orpheline.

Cette histoire personnelle touche à l'universel  puisqu'il s'agit d'un homme ordinaire horrifié par son sort funeste. Le destin pathétique de cet homme, renforcé par le point de vue interne, sert la visée moralisatrice et civilisatrice de l'auteur. Pour Victor Hugo, porte parole des classes opprimées, la peine de mort constitue un scandale, résurgence de la barbarie de temps révolus et digne de l'indifférence cruelle des contemporains et des institutions judiciaires. Elle est le symbole terrible d'une société malade, d'une société misérable qui rend les hommes criminels. Pour lui, le rôle de la société est de "corriger pour améliorer", il souhaite un remaniement de la pénalité sous toutes ses formes. "On traitera par la charité  ce mal qu'on traitait par la colère. Ce sera simple et sublime. La croix substituée au gibet. Voilà tout." dit-il dans la préface. La guillotine reste contraire à l'esprit du progrès social cher à Hugo.

Ce texte court et puissant signe le début d'un combat virulent qu'il mènera toute sa vie...

 

Présentation de l'éditeur : Folio

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Eclipses japonaises de Eric FAYE

Publié le par Hélène

♥ ♥

"Je me dis qu'on peut obtenir n'importe quoi d'un être humain qui espère."

Plusieurs disparitions simultanées ont lieu en 1965 et 1970 : qu'il s'agisse d'un GI américain évaporé lors d'une patrouille dans la zone démilitarisée, entre les deux Corées, ou de jeunes filles japonaises, tous disparaissent sans laisser de traces, au grand désarroi de leur famille.

En 1987, le vol 858 de la Korean Air explose en plein vol. Une des terroristes responsable de l'attentat ne parvient pas à fuir, elle est arrêtée, interrogée, et la police finit par l'identifier comme étant une espionne de Corée du Nord, s'exprimant pourtant dans un japonais parfait. 

Le lien entre les disparitions et ces êtres maitrisant parfaitement les codes japonais, se dessinent peu à peu.

Eric Faye met en lumière un pan d'histoire peu connu, mais au-delà de l'aspect historique, il nous parle également de la capacité d'adaptation des êtres humains, qui peuvent se formater en fonction des besoins ou des idéologies. Que signifie appartenir à un pays quand on a été arraché très tôt à sa vie pour être emporté dans un autre monde ?  Ces êtres pourront-ils ensuite faire le chemin inverse et revenir vers leurs origines ?

Ce que j'ai moins aimé : Le choix de la narration ne permet pas de véritablement s'attacher aux destins individuels : Eric Faye choisit en effet d'alterner les points de vue à chaque chapitre, si bien que à peine le portrait d'un personnage est-il esquissé, qu'il s'efface devant un autre, laissant le lecteur démuni, et perdu face à tant de personnalités différentes. De plus certains chapitre sont à la première personne du singulier, d'autre à la troisième personne, accentuant ainsi le côté décousu du roman.

Enfin, la fin du roman, qui cherche à résoudre le sort de chaque personnage, rompt la narration, s'accélérant, puis proposant plusieurs épilogues à des époques différentes.

Bilan : Ce roman a le mérite de livrer des faits réels méconnus, mais, pour moi, il reste bancal dans sa construction et sa narration.

 

Présentation de l'éditeur : Seuil, Points

D'autres avis : Télérama ;

Du même auteur : Nous aurons toujours Paris ♥ ♥ ♥ ♥

 

Eclipses japonaises, Eric Faye, Points, septembre 2017, 240 p., 7 euros

 

Il s'agit de ma première lecture pour le jury du prix du meilleur roman Points

 

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