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litterature afrique

Une enfant de Poto-Poto de Henri LOPES

Publié le par Hélène

                       

♥ ♥

L’auteur :

Né en 1937, Henri Lopès est un écrivain congolais (Brazzaville).Il a assumé de hautes fonctions politiques et administratives dans son pays (Premier ministre de 1973 à 1975) avant de devenir (depuis 1982) fonctionnaire international de l'Unesco à Paris. La récente parution de Le Lys et le Flamboyant aux éditions du Seuil complète un oeuvre jusque là composée d'un recueil de nouvelles (Les Tribaliques, Clé, 1971), et de cinq romans : La Nouvelle Romance (Clé, 1976), Sans Tam-tam (1977), Le Pleurer-Rire (1982), Le Chercheur d'Afrique (Seuil, 1989), et Sur l'Autre Rive (Seuil, 1992). Ses écrits réalisés au Congo révèlent les contradictions de L'Afrique indépendante ; elle évoque surtout le combat que l'individu mène contre les entités collectives en s'appuyant sur la lecture et le savoir. Son oeuvre parisienne très intimiste est une quête identitaire de ses principaux personnages à travers le temps. (Source : africultures)

 

L’histoire :

 

« À la une, la photo d'une foule en liesse... En bas, dans le coin gauche, quelqu'un lève deux doigts. C'est Pélagie. À sa gauche, c'est moi, Kimia... C'était le 15 août 1960. La nuit de notre Indépendance... Pour Pélagie et moi, il s'agissait plus d'une occasion de réjouissance que d'une date historique. » Suit le récit d'une amitié liant deux jeunes femmes que l'évolution de leurs pays va séparer un temps. Amitié profonde, complexe, sillonnée de rivalités, de jalousie et, surtout, mue par une indéfectible solidarité au cœur d'un monde divisé.


Entre Pélagie et Kimia, un Moundélé, comme on appelle les Blancs, là-bas ! Mais ne serait-il pas, lui aussi, un enfant de Poto-Poto ?... Doublant l'intrigue amoureuse, une plongée dans les consciences de trois êtres dont les identités se forgent à la fusion des boues et des glaises des sols d'Afrique et d'ailleurs. À contre-courant des clichés, l'auteur, à l'écriture dépouillée, rapide, cinématographique, nous offre trois palpitants destins en perpétuels dialogues.


De l'Europe aux États-Unis, ce trio fiévreux de passion et d'intelligence reste uni par une aspiration commune, le désir de s'assumer et de se dépasser, que traversent les parfums et les saveurs du Congo dans les rythmes des rumbas du pays bantou. (Quatrième de couverture)

 

Ce que j’ai aimé :

 

Toute la première partie du roman est consacrée aux dernières années de lycée des deux jeunes femmes que sont Pélagie et Kimia. Entre soirées dansantes, partiels aux sujets improbables ("Aux partiels de février, il sema la panique en nous faisant sécher sur un sujet dont le libellé fit penser à un canular : "Quelle est la teneur métaphysique du jaune, quel est le coefficient métaphysique du citron ?"" (p.122)), prétendants pas toujours désirables, rêves de départ pour la France, premiers amours, premières déceptions...

«Au Congo, on danse pour courtiser, pour célébrer la lune, la moisson, le nouveau-né, le mariage, on danse aussi pour exprimer sa tristesse. On danse pour prier. On danse pour pleurer ses morts. On danse pour se recréer, on danse pour dire sa mélancolie. Selon la manière dont on remue sa ceinture, la rumba exprime la joie ou le chagrin ».(p.103)

 

Elles sont surtout fascinée par leur professeur, métis plus noir que les congolais, homme brillant et passionnant, contesté, renvoyé, réintégré...

 

En toile de fond vibre l'indépendance du Congo, les violences inhérentes au nouveau statut du pays, les enlèvements discrets, les cannonades inexpliquées, un climat tendu et dur.

 

Pourtant, ce sont pour les jeunes femmes, les derniers jours paisibles qui ne demandent pas d'efforts, de ceux qui nous portent vers le futur sans grand trouble.

 

Vient ensuite le temps des choix, les départs vers l'étranger pour suivre des études qui éloignent inéluctablement les êtres de leurs amis et de leurs racines...

 

Avec simplicité et intelligence, Henri Lopès rend hommage à son pays et à ses jeunes filles pour qui tout commence et tout finit. Ce roman est aussi pour lui l'occasion de s'exprimer sur des sujets qui lui sont proches comme le métissage, l'amour, les femmes, son pays , ou encore le statut d'écrivain puisque la jeune Kimia devient elle-même écrivain et est amenée à assister à des rencontres avec ses lecteurs :



"Je ne crois pas au bien-fondé de ces rencontres. Elles aident peu à la vente des livres et sont une perte de temps pour les auteurs. Je n'y rencontre jamais les écrivains que j'admire. Aujourd'hui, c'est par les médias que l'on touche les lecteurs. C'est à notre personnage qu'on s'intéresse, pas à notre travail.
Le programme prévoyait l'animation d'ateliers d'écriture. Un exercice vain. L'écrivain est un artisan. Son métier s'apprend, mais pas dans une classe. Il n'est ni un cordon bleu ni un féticheur possédant des recettes et des pouvoirs secrets à transmettre. C'est en lisant qu'on apprend à écrire.
[...]
Pas d'atelier d'écriture ni de conférence ex cathedra. Je lirai mes textes. C'est l'unique introduction à tout débat fructueux. La meilleure.
Paresse ? Fantaisie ? Un peu des deux. Avant tout une intime conviction. La préparation de conférences disperse, mord sur le temps réservé à l'écriture, n'est pas dans la nature de l'artiste. Toute ma philosophie s'exprime dans mes romans. Mes gloses ne peuvent éveiller l'écho que mes romans font résonner en vous."  (page 204)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

La deuxième partie centrée sur la relation triangulaire entre Pélagie, Kimia et Franceschini est beaucoup plus classique et de fait moins passionnante et enrichissante...

 

Premières phrases :

 

« Certains nous appelaient les enfants dipanda, un mot forgé pour traduire indépendance en langue. J’avais alors dix-huit ans, Pélagie un peu plus.

J’ai conservé le numéro de Courrier d’Afrique qui relate les festivités de la nuit de dipanda.

A la une, la photo d’une foule en liesse. L’épreuve est de mauvaise qualité. En bas, dans le coin gauche, quelqu’un lève deux doigts. C’est Pélagie. A sa gauche, c’est moi, Kimia. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Photo de groupe au bord du fleuve de Emmanuel DONGALA

 

D’autres avis :

 

Presse : Le point L'Humanité  

 

Une enfant de Poto-Poto, Henri LOPES, Gallimard, Continents noirs, janvier 2012, 272 p., 17,50 euros

 

Merci aux Editions Gallimard.

 

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A la trace de Deon MEYER

Publié le par Hélène

                     

♥ ♥ ♥

L’auteur :

Né en 1958 à Paarl, en Afrique du Sud, Deon Meyer a été journaliste, puis rédacteur publicitaire et stratège en positionnement Internet, il est aujourd’hui l’auteur unanimement reconnu de best-sellers traduits dans 15 pays. Il vit à Melkbosstrand.

 L’histoire :

Chacun des protagonistes de ce roman aux intrigues apparemment distinctes laisse des traces. Toutes, à un moment donné, vont se croiser.

Milla, mère de famille qui plaque son foyer et rejoint l’Agence de Renseignement Présidentielle au moment où un groupuscule islamiste s’agite de manière préoccupante.

L’aventurier Lemmer qui protège le transfert à la frontière du Zimbabwe de deux inestimables rhinos noirs. Lukas Becker, l’archéologue aux prises avec les gangs de la plaine du Cap. L’ex-flic Mat Joubert, devenu détective privé, chargé d’enquêter sur la disparition d’un cadre de l’Atlantic Bus Company.

Comparée à l’univers du polar américain (corruption, drogue, prostitution), la matière romanesque de À la trace, qui allie « le monde animal, inhérent à notre culture », des contrebandes pittoresques, l’émancipation des femmes, la culture gangsta des villes, frappe par sa richesse et sa diversité.

Deon Meyer est un des rares auteurs qui, tout en maîtrisant avec brio les règles du genre, ouvre grand le champ des problèmes contemporains de son pays. (Présentation de l’éditeur)

Ce que j’ai aimé :

Deon Meyer nous offre trois histoires dans un seul roman :

Celle de Milla, femme au foyer qui décide de fuir son havre oppressant. Obligée de trouver du travail, elle se fait embaucher ni plus ni moins par les services de renseignement sud africains et va se lancer à cœur perdu dans sa mission. Seulement un grain de sable va s’immiscer dans sa vie monotone, faisant exploser en lambeaux toutes ses certitudes. Milla souhaiter une vie trépidante, loin de son quotidien lassant, elle va trouver bien plus que cela...

« Notre vie est composée de vingt-deux mille jours en moyenne. Combien nous restent en mémoire, nommés et datés ? Dix, douze ?... Anniversaires, mariage et divorce, séparations, décès, puis quelques Grandes Premières… Les traces des autres jours s’usent peu à peu. Résultat : la vie consiste en fin de compte en l’équivalent d’un mois de jours dûment enregistrés en mémoire et d’une poignée de souvenirs non datés.

Il faudrait vivre en sorte que chaque jour laisse une trace. » (p. 345)

La deuxième histoire nous permet de retrouver Lemmer et ses failles qui nous emmène au cœur du veld. Lemmer est un personnage passionnant qui garde en lui cette violence sous-jacente, l'entourant d'une aura dense. Il va faire ici la connaissance de Fléa, jeune femme fascinante aux mille facettes...

 

Rhinoceros_en_Afrique_du_Sud.jpg

 

« N’est-ce pas là le problème essentiel de notre communauté ? Nous sommes tous devenus spectateurs, nous restons en marge et commentons, critiquons… Avides de lire, d’entendre et de raconter les malheurs d’autrui, nous participons de loin, du haut de notre supériorité morale. « Eh oui, ils ont eu ce qu’ils ont cherché !... » Personne n’a le courage d’intervenir, de faire quoi que ce soit. » (p. 273)

La troisième histoire est ancrée autour de l’enquête de Mat Joubert qui cherche à expliquer la disparation d’un conducteur de bus. Cette partie du roman permet de mettre en avant les luttes entre bandes rivales mais aussi l’incommunicabilité qui peut régner dans un couple au point qu’on ne connait pas vraiment son conjoint.

On y croise aussi Lukas Becker, archéologue idéaliste aux prises avec des gangs bien plus puissants que lui...

Cette combinaison de destins permet d’offrir un panorama juste de cette Afrique du Sud post- apartheid. Deon Meyer, en nous menant dans des univers différents aux ramifications multiples nous offre la possibilité de nous plonger dans un monde riche, passionnant mais aussi terrifiant, et ceci sans jamais nous lasser.

« Sacré pisteur que ce Meyer, qui traque sa proie sans jamais la lâcher, jusqu'à la dernière page. » (Télérama Christine Ferniot)

 

Ce que j’ai moins aimé :

Plus de 700 pages, c’est lourd à transporter…

 

Premières phrases :

« Ismail Mohammed dévale le Heiliger Lane. Les plis de sa galabiyya blanche s’envolent à chaque foulée ; le col mao est ouvert, comme le veut la mode. Terrifié, il agite les bras pour garder son équilibre. »

 

Vous aimerez aussi :

Du même auteur :  13 heures de Deon MEYER

Autre :  Disgrâce de J.M. COETZEE

 

D’autres avis :

Blogs : Cathulu

Presse : Le figaro  Télérama Jeune Afrique   Lire 

 

A la trace, Deon Meyer, Traduit par Marin Dorst, Seuil Policiers, février 2012,  736 pages, 22.9 € 

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Soulfood équatoriale de Léonora MIANO

Publié le par Hélène

                                              

♥ ♥ ♥

« Au départ, ça n’a l’air de rien. »

 

L’auteur :

 

Léonora Miano est une auteure camerounaise. Elle a reçu un accueil enthousiaste et de très nombreux prix pour L'Intérieur de la nuit (2005). Après Contours du jour qui vient (2006), lauréat du prix Goncourt des lycéens, son troisième roman, Tels des astres éteints (2008), a confirmé la qualité et l'ampleur de son inspiration.

 

L’histoire :

 

La soul food est la nourriture de l'âme des Afro-Américains.
Soulfood, nom d'une gargotte qui fut l'âme de Douala, donne son titre à cet " Exquis " d'une grande densité, où Léonora Miano se livre à une réjouissante chasse aux trésors du langage gourmand sur les rivages du Cameroun : le jazz, sauce tomate glissée dans les sandwichs saxophones, le solo, plat de morue présidant à un destin amoureux... Entre légendes intemporelles et saynètes prises sur le vif, entre secrets culinaires et conseils pleins d'humour pour détourner les traditions, nous sommes ici conviés à un envoûtant voyage en Afrique équatoriale. (4ème de couverture)

 

Présentation de la collection :

 

Petite bibliothèque gourmande contemporaine, cette collection de livres courts propose à des auteurs contemporains d’horizons très différents de donner libre cours à leur imagination gourmande, en s’inspirant d’un jeu à la fois simple et dynamique de mots clefs. Exquis d’écrivains souhaite rendre hommage à la richesse de la langue française pour dire les plaisirs de la nourriture et constituer la mémoire littéraire de la gastronomie. Fictions, rêves et souvenirs, chaque auteur y livre ses voyages personnels au pays de la nourriture, sous différentes formes narratives (récits, nouvelles, dialogues, contes, poèmes…), qui donnent envie de passer à table ou de se mettre aux fourneaux.  Exquis d’écrivains, première collection demandant à des auteurs contemporains de livrer
leurs plaisirs de table et de bouche, s’adresse à tous les lecteurs gourmands et gourmets auxquelles elle propose des textes intimistes et variés, émouvants ou drôles, résolument appétissants et agréables à lire…

 

Ce que j’ai aimé :

 

- « Au départ, ça n’a l’air de rien. » : un petit recueil léger comme un soufflé qui nous parle de recettes et de souvenirs culinaires. Mais Léonora Miano a su épaissir ses anecdotes en leur ajoutant le piment nécessaire à une recette réussie. Si bien que bien loin de n’évoquer que des plats et  des habitudes culinaires, elle nous convie à un voyage chamaré au cœur de son univers.

 

« Ce que sont les peuples, cela ne s’écrit pas dans les livres, et c’est d’ailleurs sans rapport avec leur production en la matière. La civilisation est avant tout dans l’assiette. » (p. 15)

 

«  La sève des plantains tache les vêtements, difficiles à ravoir après. Pendant la préparation, la pluie continue de tomber. On a ouvert la fenêtre de la cuisine.

Une odeur de terre mouillée se mêle à celle des beignets ou à celle des plantains coupés en fine rondelles avant d’être plongés dans l’huile chaude.

Au moment de la dégustation, accoudé sur le rebord  de la fenêtre, on se dit que c’est beau, un orage, quand on n’est pas dessous. » (p. 25)

 

« Dans les BH [beignets-haricots], il y a l’endurance joyeuse de nos peuples. La capacité à fabriquer de la vie avec ces petits riens. Le désir de savoir ce que demain apportera. La foi dans la vie. » (p. 36)

 

- Les récits et les personnages sont variés : un jeune voleur qui fantasme sur un avocat ou un plat de gari aux crevettes, une jeune femme sommée de choisir entre deux prétendants et qui les départagera en les faisant cuisiner un plat  typique, explications sur  l’origine de certains plats, conseils matrimoniaux cocasses « Nul ne doit goûter de votre ndole sans avoir fait ses preuves au préalable. Dans tous les domaines. » (p. 69)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          J’attends maintenant l’invitation dans mon restaurant africain préféré car toutes ces nouvelles m’ont mis l’eau à la bouche… 

 

Premières phrases :

 

« Il est des jours comme celui-ci, où une fringale de rivage me prend. En un rien de temps, je l’aperçois. Le voici. Là, sous mes mains qui cherchent, dans le placard de la cuisine, le gros palet plat et sa petite pierre ronde. Une pierre dense et solide. Elle sert à écraser, une fois posés sur le galet, les ingrédients de la sauce qui me ramènera chez moi. Je la laisse épouser parfaitement le creux de ma main.

 

Vous aimerez aussi :

 

Du même auteur : Blues pour Elise de Léonora MIANO

Autres : Tous les autres livres de cette collection.

 

D’autres avis :

 

Cathulu

 

Soulfood équatoriale, Léonora Miano, Nil Editions, Exquis d’écrivains,  2009, 100 p.,  12 euros

 

 defi Afrika Choupynette

 

 

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L’équation africaine de Yasmina KHADRA

Publié le par Hélène

equation africaine

  « Le poisson rouge ne peut ramener la complexité des océans à la quiétude de son bocal. » (p. 185)

  

L’auteur :

 

Yasmina Khadra est né en 1955 dans le Sahara algérien. Il est aujourd'hui connu et salué dans le monde entier ou ses romans, notamment À quoi rêvent les loups, L'Écrivain, L'Imposture des mots, Cousine K sont traduits dans 40 pays. L'Attentat a reçu, entre autres, le prix des libraires 2006, le prix Tropiques 2006, le grand prix des lectrices Côté Femme et est actuellement en cours d'adaptation cinématographique. Ce que le jour doit à la nuit - Meilleur livre de l'année 2008 (Lire), prix France Télévisions 2008, prix des lecteurs de Corse - sera également porté à l'écran par Alexandre Arcady.

 

L’histoire :

 

Médecin à Francfort, Kurt Krausmann mène une existence ordinaire, limitée à ses allers-retours entre son cabinet de consultation et son appartement bourgeois. Jusqu'au drame familial qui va le précipiter dans le désespoir. Afin de l'aider à surmonter son chagrin, son meilleur ami, Hans, un riche homme d'affaires versé dans l'humanitaire, lui propose de l'emmener sur son voilier jusque dans les Comores, pour les besoins d'une bonne cause. Au large des côtes somaliennes, leur bateau est assailli par des pirates. Kurt et Hans sont enlevés puis transférés dans un campement clandestin. (présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

 

Yasmina Khadra a le mérite de s’intéresser à des problématiques actuelles complexes. Ici, il nous plonge dans une Afrique en proie à la violence, une Afrique désertique et appauvrie par des luttes de pouvoir. Il place face à cette réalité un européen issu d’un milieu aisé, médecin, un homme qui évolue dans des sphères totalement étrangères et qui va se heurter de plein fouet à un monde inconnu.

 « - Je n'ai pas choisi la violence. C'est la violence qui m'a recruté. De mon plein gré ou à mon insu, peu importe. Chacun fait avec ce qu'il a. Je n'en veux à personne en particulier et, par conséquent, je ne vois pas comment ne pas loger tout le monde à la même enseigne. Pour moi, Blanc ou Noir, innocent ou coupable, victime ou bourreau, c'est du pareil au même. Je suis trop daltonien pour distinguer le bon grain de l'ivraie. Et puis, c'est quoi le bon grain, et c'est quoi l'ivraie ? Ce qui est bon pour les uns est mauvais pour les autres. Tout dépend de quel côté on se trouve. Nul besoin d'éprouver du regret ou du remords. Qu'est-ce que ça change lorsque le mal est fait ? Petit, j'avais peut-être un coeur, aujourd'hui il est calcifié. Quand je porte ma main à ma poitrine, je ne perçois que la colère en train de sourdre en moi. Je ne sais pas m'émouvoir puisque personne n'a eut pitié de moi. Je ne suis que le support de mon fusil, et j'ignore qui, de moi ou de mon fusil, commande l'autre. » (p. 142)

 Si vous avez lu ce passage, vous comprendrez tout de suite ce qui ne peut pas fonctionner dans ce roman :

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

Yasmina Khadra, comme dans L’olympe des Infortunes, s’échine à nous administrer une  morale, des phrases et des idées toutes faites :

 « Il n’y a pas d’enfer sur terre, docteur Krausmann, seulement des démons, et ils ne sont pas invincibles. » ( p. 214)

 « L’Afrique ne se voit pas, elle se sent. » (p. 217)

 Le désir de vivre des Africains, est, bien sûr, plus fort que tout :

 « J’ai vu des gens qui n’avaient que la peau sur les os, et d’autres qui avaient perdu le goût de la nourriture, et d’autres jetés en pâture aux chiens et aux vauriens, pas un n’était prêt à céder. Ils meurent la nuit, et au matin ils ressuscitent, nullement dissuadés par la galère qui les guette. » (p. 217)

 Conclusion lumineuse :

  « L’Africain sait que sa vie est son bien le plus précieux. Le chagrin, les joies, la maladie ne sont que pédagogie. L’Africain prend les choses comme elles viennent sans leur accorder plus d’opportunité qu’elles ne le méritent. Et s’il est convaincu que les miracles existent, il ne les exige pas pour autant. Il s’autosuffit, vous comprenez ? Sa sagesse amortit ses déconvenues. » (p. 218)

 «  Si je devais mettre un visage sur la générosité, ce serait le visage d’un Africain. Si je devais mettre un éclat sur la fraternité, il aurait celui d’un rire africain. » (p 219)

 Le ton de ces leçons est proprement lassant, trop sentencieux, trop attendu, tout comme la fin, parfaitement prévisible…

 Son style ampoulé et convenu enlise définitivement cette « Equation africaine »…

 

Premières phrases :

 

«  Lorsque j’ai rencontré l’amour, je m’étais dit, ça y est, je passe de l’existence à la vie et je m’étais promis de veiller à ce que ma joie demeure à jamais. Ma présence sur terre se découvrit un sens et une vocation, et moi une singularité … Avant, j’étais un médecin ordinaire entamant une carrière ordinaire. Je grignotais ma part d’actualité sans réel appétit, négociant par-ci de rares conquêtes féminines aussi dénuées de passion que de traces, me contentant par-là de copains de passage que je retrouvais certains soirs au pub et le week-end en forêt pour une gentille randonnée – bref, de la routine à perte de vue avec de temps à autre un événement aussi fugace et flou qu’une impression de déjà-vu qui ne m’apportait rien de plus qu’un banal fait divers dans un journal… En rencontrant Jessica, j’ai rencontré le monde, je dirais même que j’ai accédé à la quintessence du monde. »

 

Vous aimerez aussi :

 

  Ces âmes chagrines de Léonora MIANO

 

D’autres avis :

 

Charlotte ; Jostein

Le masque et la plume  parle de « non assistance à auteur en danger » de la part de l’éditeur…

 

 

L’équation africaine, Yasmina Khadra, Julliard, août 2011, 336 p., 19 euros

 

Merci aux Editions Julliard.

 

 

challenge 1% littéraire 

 

defi Afrika Choupynette 

 

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Rue Darwin de Boualem SANSAL

Publié le par Hélène

                  

  ♥ ♥

« Le seul véritable inconnu, c’est soi-même. » (p. 46)

L’auteur :

 Boualem Sansal est un écrivain algérien. Boualem Sansal a une formation d'ingénieur et un doctorat d'économie.Il a été enseignant, consultant, chef d'entreprise et haut fonctionnaire au ministère de l'Industrie algérien. Il est limogé en 2003 pour ses prises de positions critiques contre le pouvoir en place particulièrement contre l'arabisation de l'enseignement.

Son ami Rachid Mimouni (1945-1995), l'encourage à écrire. Boualem Sansal publie son premier roman Le Serment des barbares en 1999 qui reçoit le prix du premier roman et le prix des Tropiques. Son livre Poste restante, une lettre ouverte à ses compatriotes, est resté censuré dans son pays. Après la sortie de ce pamphlet, il est menacé et insulté1 mais décide de rester en Algérie. Un autre de ses ouvrages, Petit éloge de la mémoire est un récit épique de l'épopée berbère. Boualem Sansal est lauréat du Grand Prix RTL-Lire 2008 pour son roman Le Village de l'Allemand sorti en janvier 2008, roman qui est censuré en Algérie. Le 9 juin 2011, il remporte le Prix de la paix des libraires allemands.

Il habite près d'Alger.

L’histoire :

 Après la mort de sa mère, Yazid, le narrateur, décide de retourner rue Darwin dans le quartier Belcourt à Alger, où il a vécu son adolescence. « Le temps de déterrer les morts et de les regarder en face » est venu.

Son passé est dominé par la figure de Lalla Sadia, dite Djéda, sa toute-puissante grand-mère adoptive, qui a fait fortune installée dans son fief villageois – fortune dont le point de départ fut le florissant bordel jouxtant la maison familiale.

Né en 1949, Yazid a été aussitôt enlevé à sa mère prostituée, elle-même expédiée à Alger. Il passe une enfance radieuse au village, dans ce phalanstère grouillant d’enfants. Mais quand il atteint ses huit ans, sa mère parvient à l’arracher à l’emprise de la grand-mère maquerelle. C’est ainsi qu’il débarque rue Darwin, dans une famille inconnue. Il fait la connaissance de sa petite sœur Souad. D’autres frères et sœurs vont arriver par la suite, qui connaîtront des destins très divers.
La guerre d’indépendance arrive, et à Alger le jeune Yazid y participe comme tant d’autres gosses, notamment en portant des messages. C’est une période tourmentée et indéchiffrable, qui va conduire ses frères et sœurs à émigrer. Ils ne pourront plus rentrer en Algérie (les garçons parce qu’ils n’ont pas fait leur service militaire, les filles parce qu’elles ont fait leurs études aux frais de l’État algérien). Le roman raconte la diaspora familiale, mais aussi l’histoire bouleversante de Daoud, un enfant de la grande maison, le préféré de Djéda, dont Yazid retrouve un jour la trace à Paris.

 

Ce que j’ai aimé :

-          Rue Darwin est le récit nostalgique d’un homme qui cherche des réponses à ses questions et décident de les résoudre maintenant qu’il n’a plus à se sacrifier pour les autres. Dans un style millimétré Boualem Sansal nous offre un texte puissant sur les origines et la vérité :

« C’est peut-être une loi essentielle de la vie qui veut que l’homme efface son histoire première et la reconstitue de mémoire comme un puzzle impossible, dans le secret, à l’aune de son expérience et après bien des questionnements et des luttes, ainsi et seulement ainsi il peut faire le procès du bien et du mal, ces forces qui le portent dans la vie sur le chemin de son origine. Vire serait donc cela, retrouver le sens premier dans l’errance et la quête… et l’espoir qu’au bout est le fameux paradis perdu, la paix simplement. » (p. 225)

-          Boualem Sansal est un écrivain censuré dans son pays pour ses opinions radicales sur l’islam et ses imams :

« La religion me paraît très dangereuse par son côté brutal, totalitaire. L'islam est devenu une loi terrifiante, qui n'édicte que des interdits, bannit le doute, et dont les zélateurs sont de plus en plus violents. Il faudrait qu'il retrouve sa spiritualité, sa force première. Il faut libérer, décoloniser, socialiser l'islam. »

« Finalement, aujourd'hui, je pense que c'est aux hommes du pouvoir de partir. On a trop cédé, il ne faut plus céder. » (Entretien avec Marianne PAYOT, l’Express, 24 août 2011)

Il évoque dans son roman ses prises de position ainsi que son rapport à la guerre :

« La guerre qui n’apporte pas une paix meilleure n’est pas une guerre, c’est une violence faite à l’humanité et à Dieu, appelée à recommencer encore et encore avec des buts plus sombres et des moyens plus lâches, ce ci pour punir ceux qui l’ont déclenchée de n’avoir pas su la conduire et la terminer comme doit s’achever une guerre : sur une paix meilleure. Aucune réconciliation, aucune repentance, aucun traité, n’y changerait rien, la finalité des guerres n’est pas de chialer en se frappant la poitrine et de se répandre en procès au pied du totem, mais de construire une paix meilleure pour tous et de la vivre ensemble. » (p. 108)

Il décrit notamment cette scène surréaliste durant laquelle Boumediene, en 1973 annonce dans un discours « plus il y a de morts, plus la victoire est belle. »  Et en déduit : « Je découvrais que les grands criminels ne se contentent pas de tuer, comme ils s’y emploient tout le long de leur règne, ils aiment aussi se donner des raisons pressantes de tuer : elles font de leurs victimes des coupables qui méritaient leur châtiment. » (p. 117)

Plus qu'un simple roman familial, Rue Darwin est un roman sur l'identité d'un être dans un monde difficilement habitable.

Ce que j’ai moins aimé :

Je ne saurais dire exactement  pourquoi je n'ai pas été emportée par ce roman, mais il m'a manqué quelque chose, peut-être tout simplement un intérêt pour le sujet évoqué, je ne sais pas, un rien sans doute, qui fait que j'ai avancé péniblement dans cette lecture et que au final je ne m'y retrouve pas.

Ce qui ne m'empêche pas d'insister sur ses qualités indéniables...

Premières phrases :

« Tout est certain dans la vie, le bien, le mal, Dieu, la mort, le temps, et tout le reste, sauf la Vérité. Maiq qu’est ce que la Vérité ? La chose au monde dont on ne doute pas, dont on ne douterait pas un instant si on la savait. Hum… Ce serait donc une chose qui s’accomplit en nous et nous accomplit en même temps ? Elle serait alors plus forte que Dieu, la mort, le bien, le mal, le temps et le reste ?... mais devenant certitude, est-elle toujours la Vérité ? N’est-elle pas alors qu’un mythe, un message indéchiffré indéchiffrable, le souvenir de quelque monde d’une vie antérieure, une voix de l’au-delà ?

C’est de cela que nous allons parler, c’est notre histoire, nous la savons sans la savoir. »

Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Le village de l’allemand

D’autres avis :

L’express

Marianne Desroziers ; Nina

 

Rue Darwin, Boualem SANSAL, Gallimard, août 2011, 17.50 euros

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Publié dans Littérature Afrique

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Ce qu’on peut lire dans l’air de Dinaw MENGESTU

Publié le par Hélène

                                                   ce qu'on peut lire dans l'air

♥ ♥

 

L’auteur :

 À deux ans, Dinaw Mengestu, né en 1978 à Addis Abbeba, a fui l’Éthiopie avec sa famille pour s’installer aux États-Unis. Venu à Paris en 2007 pour la parution de Les Belles choses que porte le ciel, il s’est épris de la France. Il s’est installé à Paris tout en continuant à être régulièrement aux États-Unis pour enseigner, faire des conférences, voir sa famille et faire la promotion de ses romans. Les Belles choses que porte le ciel a connu un beau succés et quand Ce qu’on peut lire dans l’air est paru aux Etats-Unis (septembre 2010), il a été finaliste de la sélection du Independant book store et a gagné le Vilcek Prize.


L’histoire :

Au début des années 1980, Yosef et Mariam, que la révolution éthiopienne a séparés pendant trois ans, se rejoignent aux États-Unis. Pour célébrer leurs retrouvailles, ils s’offrent enfin un voyage de noces, à Nashville. Trente ans plus tard, Jonas Woldemariam, leur fils, en pleine crise existentielle, revient sur leurs pas. Entre de vagues souvenirs d’enfance et le silence de ses parents sur le drame qui les a menés aux Etats-Unis, il reconstitue à tâtons l’histoire de sa famille, sa propre histoire...

 

Ce que j’ai aimé :

 Les parents de Jonas sont des immigrés éthiopiens échus dans un univers américain qui ne sera jamais totalement le leur. La relation qu’ils entretiennent avec leur pays d’accueil est finement évoquée, portée de surcroît par une écriture calibrée. Leur passé flou est réinventé par leur fils en quête de ses origines et de lui-même. : il crée en artiste virtuose une histoire cohérente universelle.

 «  Elle avait collé la tête contre la vitre de séparation pour lui lancer : « Pardon, monsieur, vous êtes de quel pays ? » Elle avait souvent affirmé détester que les gens posent cette question aux chauffeurs de taxi. (…) « Fiche-leur la paix, avait-elle déclaré. Pourquoi seraient-ils obligés de raconter d’où ils viennent ou pourquoi ils ont quitté leur pays ? Pour qu’on leur file un dollar de pourboire en plus ? Personne en demande au vieux chauffeur noir d’où il est ni ce qu’il a vécu, parce que les gens trouveraient ça grossier et dingue. Sauf s’il a un accent. Là, tout est permis. Là, c’est « dites-nous pourquoi vous êtes venu ici et combien ce doit être dur ! » » (p. 131)

 Jonas assiste parallèlement impuissant à la déliquescence de son couple, l’érosion des sentiments ne résistant pas au manque d’identité des deux protagonistes. Les dernières semaines du couple s'égrennent au travers de scènes fugaces et parlantes.

 

Ce que j’ai moins aimé :

 J’ai retrouvé exactement la même atmosphère que dans Les âmes chagrines de Léonora MIANO : quelques personnages épars aux  liens familiaux ténus et problématiques qui s’analysent au travers du vécu de leurs parents et de leurs rapports aux autres. Ce sont des romans très statiques, psychologiques, et il m’a manqué personnellement un élan romanesque, une découverte de nouveautés et d’étrangetés qui m’auraient emportée dans un univers fascinant ou terrifiant.

 

Premières phrases :

 « Sept cent soixante-huit kilomètres séparaient la maison de mes parents, à Peoria, Illinois, de Nashville, Tennessee, distance qu’une Monte-Carlo rouge vieille de sept ans et roulant à cent kilomètres à l’heure environ pouvait parcourir en huit à douze heures, selon que l’on prenait en compte certaines variables telles que le nombre de pancartes proposant un détour vers un haut lieu historique ou la fréquence à laquelle ma mère – Mariam – devait se rendre aux toilettes. »

 

Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Les belles choses que porte le ciel

Autre : Ces âmes chagrines de Léonora MIANO

 

Ce qu’on peut lire dans l’air, Traduit de l’américain par Michèle Albaret-Maatsch, Albin Michel, Terres d’Amérique, 2011, 368 p., 22 euros

 

defi Afrika Choupynette

 

challenge 1% littéraire

 

Publié dans Littérature Afrique

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Ces âmes chagrines de Léonora MIANO

Publié le par Hélène

ces âmes chagrines

 ♥ ♥

 "Quand je parlerais toutes les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas l'amour, je suis un airain qui résonne ou une cymbale qui retentit." (Corinthiens, I, 13, 1)

   

L’auteur :

 

Léonora Miano est née au Cameroun. Après avoir consacré une trilogie à l'Afrique avec L'Intérieur de la nuit, Contours du jour qui vient, prix Goncourt des Lycéens 2006, et Les Aubes écarlates (2009), elle est l'une des premières à avoir fait entrer la population afropéenne dans la littérature en publiant Tels des astres éteints (2008) et Blues pour Elise (2010).

 

L’histoire :

 

Né dans l'Hexagone, Antoine Kingué, dit Snow, n'arrive toujours pas à surmonter la rancoeur qu'il nourrit envers sa mère, coupable de ne l'avoir jamais assez aimé. Elle n'a pas hésité à le laisser en pension alors qu'il n'avait que sept ans et à l'envoyer passer les grandes vacances seul au Mboasu, ce pays subsaharien, où il ne s'est jamais senti à sa place. Tout ça pour une histoire d'amour qui a tourné court. Et puis, il est persuadé que son frère Maxime a reçu plus d'affection que lui.

Pour se venger de cette enfance malheureuse, Snow fait payer ceux qui l'ont fait souffrir, rêve de devenir une vedette adulée, une star dont la vie serait enfin brillante et facile.
Quand son frère lui annonce son retour au pays avec leur mère, Snow voit son univers s'effondrer. Sans plus personne sur qui passer sa rage, il se retrouve face à lui-même.
Débouté par cette existence qui ne cesse de se dérober sous ses pieds, il va être amené à renouer avec une histoire qu'il a toujours reniée, celle de ses origines subsahariennes, là-bas, au Mboasu.

 

Ce que j’ai aimé :

 

 Ces âmes chagrines est un roman qui peut étonner au premier abord tant il semble éloigné de l’univers léger et lumineux de l’auteur. C’est un roman qui parle de solitude, d’abandon, du manque d’amour destructeur, de dépression. Léonora Miano l’explique elle-même : il est basé sur un texte initial ancien, elle avait 30 ans alors et ressassait ses histoires familiales dans un climat de dépression latente. Nous sommes donc bien loin du monde de « Blues pour Elise ». 

 Néanmoins, si le personnage d’Antoine, être déstructuré par l’abandon de sa mère bien décidé à se venger sur les autres, est relalivement sombre, il s’achemine au fil du récit vers une rédemption libératrice et optimiste. Lénora Miano nous enjoint par ce récit à  «éviter l’enfermement, le ressassement de la douleur, éviter l’amertume,  essayer la résilience, essayer d’y croire » et nous offre une lueur d'espoir dans une société gangrénée par la solitude…

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

- Le talent de Léonora Miano permet de ressentir au plus près l'étouffement étriqué dans lequel vit Antoine, si bien que j'ai quelquefois eu du mal à respirer...

 

Premières phrases :

 

« Les femmes venaient de descendre. Il les voyait depuis le balcon de la terrasse donnant sur le jardin privatif, avec ses arbustes élégamment taillés, ses toboggans et balançoires destinés aux enfants des résidents. Philomène, apercevant de loin les voitures du funiculaire qui glissaient le long du câble, avait demandé quel était cet engin. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Du même auteur : Blues pour Elise de Léonora MIANO

Autre : Celles qui attendent de Fatou DIOME

 

Ces âmes chagrines, Léonora MIANO, Plon, août 2011, 280 p., 20 euros

 

 challenge 1% littéraire 

defi Afrika Choupynette

 

Je peux le faire voyager, avis aux amateurs...

Publié dans Littérature Afrique

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L’hibiscus pourpre de Chimamanda NGOZI ADICHIE

Publié le par Hélène

hibiscus-pourpre1.jpg

♥ ♥ ♥ ♥

 

L’auteur :

 Chimamanda Ngozi Adichie a grandi au Nigeria. Ses nouvelles ont été plusieurs fois sélectionnées dans le prestigieux prix littéraires américains ou anglais. L'Hibiscus pourpre est son premier roman. Elle a aujourd'hui 25 ans et partage son temps entre le Nigeria et les Etats-Unis.

 

L’histoire :

Kambili a quinze ans. Son monde est limité aux murs de la résidence luxueuse d'Enugu, au Nigeria, où elle vit avec ses parents et son frère Jaja. Son père, Eugène, est un riche notable qui régit son foyer selon des principes d'une rigueur implacable. Sa générosité et son courage politique (il possède le seul journal indépendant du pays) en font un véritable héros de sa communauté. Mais Eugène est aussi un fondamentaliste catholique, qui conçoit l'éducation de ses enfants comme une chasse au péché où les plus terribles punitions trouvent leur justification dans la foi. Quand un coup d'Etat vient secouer le Nigeria, Eugène, très impliqué dans la crise politique, est obligé d'envoyer Kambili et Jaja chez leur tante. Les deux adolescents y découvrent un foyer bruyant, plein de rires et de musique. Ils prennent goût à une vie simple, qu'ils croyaient dangereuse et païenne, et ouvrent les yeux sur la nature tyrannique de leur père. Lorsque Kambili et son frère reviennent sous le toit paternel, le conflit est inévitable et la maison se transforme en champ de bataille où les enfants vont se révolter pour gagner leur liberté.

 

Ce que j’ai aimé :

-          Le point de vue adopté est celui de la jeune Kambili, et ses propos sont pesés, retenus, bridés par l’autorité d’un père tyrannique pour qui tout écart à la religion est source de réprimande souvent violente. La violence domestique est évoquée avec tact mais sans nous en épargner sa dureté incohérente. Kambili ne comprend pas toutes les scènes qui se déroulent sous ses yeux endoctrinés, mais le lecteur à la conscience aiguisée emplit les vides et prend en pitié cette famille au quotidien assombri par l’ombre intolérante de la figure paternelle.

 -          De la même façon que Kambili éprouve un savant mélange de fascination et de répulsion pour ce père qui reste sa seule référence dans son univers, le lecteur s’interroge sur ce personnage ambivalent qui répand la terreur dans son foyer mais défend par ailleurs des idées progressistes pour son pays le Nigéria en dirigeant le seul journal indépendant du pays :

  « Je voulais faire  la fierté de papa, réussir aussi bien que lui. J’avais besoin qu’il me mette la main sur la nuque en me disant que je réalisais le dessein de Dieu. J’avais besoin qu’il me serre contre lui et me dise qu’à celui à qui on donne beaucoup, on demande aussi beaucoup. J’avais besoin qu’il me sourie, de ce sourire qui illuminait son visage et réchauffait quelque chose au fond de moi. Mais j’étais deuxième. J’étais souillée par l’échec. » (p. 49)

 -          Le goût de la liberté va s’instiller insidieusement dans l’esprit formaté de Kambili, jusqu’à ce qu’elle éclate en mille éclats irisés qui bouleverseront sa vie :

 « Cette nuit-là, je rêvai que je riais, mais ça ne ressemblait pas à mon rire, même si je ne savais pas à quoi ressemblait mon rire. C’était un rire saccadé, rauque et enthousiaste, comme celui de tatie Ifeoma. » (p. 105)

 -          La fin du roman est tout à fait remarquable, offrant un retournement de situation hautement étonnant…

 

Ce que j’ai moins aimé :

 -          La bluette sentimentale n’était peut-être pas nécessaire…

 

Premières phrases :

 « A la maison la débâcle a commencé lorsque Jaja, mon frère, n’est pas allé communier et que Papa a lancé son gros missel en travers de la pièce et cassé les figurines des étagères en verre. Nous venions de rentrer de l’église. Mama plaça les palmes fraîches, mouillées d’eau bénite, sur la table de la salle à manger. »

 

Vous aimerez aussi :

Du même auteur : L’autre moitié du soleil

Autre : Au pays des hommes de Hisham MATAR

 

D’autres avis :

 

Chez Babélio , Kathel 

L’Hibiscus pourpre,  Chimamanda Ngozi Adichie, traduit de l’anglais (Nigeria) par Mona de Pracontal, Editions Anne Carrière, 2004, 416 p., 20,99 euros

 POCHE : L’hibiscus pourpre, Chimamanda NGOZI ADICHIE, Le livre de poche, 2004, 350 p., 6.50 euros

 

defi Afrika Choupynette

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Lisahohé de Théo ANANISSOH

Publié le par Hélène

                                                         lisahohe.jpg

 

  

L’auteur :

 

Théo Ananissoh est togolais. Il est né en 1962. Il vit en Allemagne. Lisahohé est son premier roman.

 

L’histoire :

 

Lisahohé, toute petite ville loin de la capitale d'un pays africain, au cœur d'une savane dont les fosses aux lions et les plaines aux éléphants captivent deux touristes allemandes. Un ancien ministre tout-puissant, Félix Bagamo, a été tué. Un coupable a été trouvé et arrêté ; un peu vite, sans doute. M. A. qui revient à Lisahohé après quinze années d'absence voudrait reparcourir les chemins du passé, mais le voici pris dans la logique d'une enquête involontaire. L'assassinat est-il crapuleux ? Des amis d'enfance sont-ils devenus les politiques criminels d'aujourd'hui ? Mais peut-il vraiment s'agir d'un crime politique ? Et puis, ici, qu'est-ce qu'un crime ? Le narrateur lui-même est-il innocent ?

 

Ce que j’ai aimé :

 

-          Le rythme lancinant épouse parfaitement les errements de ce narrateur revenu dans son pays natal et à la fois avide de marcher sur les traces de son passé, mais aussi réticent par rapport à ce qu’il découvre au fil du temps. Cette hésitation incessante oscillant entre passé, présent et futur émane de chaque conversation, de chaque action de M. A.

 -          L’Afrique à la politique trouble est effleurée au fur et à mesure que l’enquête avance :

 « Les hommes sont des hommes et, en politique, le chemin n’est jamais droit ni propre. Autant d’hommes et de femmes, autant de buts, d’objectifs, de désirs, d’angoisses cachées, de complexes dissimulés ou non. Et il faut faire avec tout ça. » (p. 125)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 -          J’ai eu tendance à m’ennuyer à cette lecture qui a glissé sur moi telle un texte froid et sans humanité. Je n’ai pas saisi où voulait m’emmener l’auteur et j’ai de plus en plus douté avoir envie de l’accompagner dans cette aventure. Comme le livre est court, je suis allée au bout, mais à dire vrai il ne me reste pas grand-chose de cette lecture…

 

Premières phrases :

 « Avant de prendre place sur le siège qu’il m’avait indiqué, je demandai :

« Connaissez-vous l’auberge de la Savane à Lisahohé ? »

Ce fut en français.

«  C’est là que vous allez dormir ? demanda-t-il à son tour, dans son français.

-         Oui. »

 

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : Ténèbres à midi de Théo ANANISSOH

Autre : L’iguifou, Nouvelles rwandaises de Scholastique MUKASONGA

 

D’autres avis :

A girl from earth, La Plume francophone , Hervé

 

Lisahohé, Théo ANANISSOH, Gallimard, Continents Noirs, 2005, 135 p., 13 euros

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Au pays des hommes de Hisham MATAR

Publié le par Hélène

                                           au pays des hommes

♥ ♥ ♥ ♥

 

L’auteur :

 Hisham Matar est né de parents libyens à New York et a passé son enfance en Amérique où son père travaillait pour la délégation libyenne de l’ONU. Sa famille est rentrée à Tripoli lorsqu’il avait 3 ans, il y a alors passé le reste de son enfance. Son père fut arrêté sous le régime Khadaffi et accusé de trahison, ils furent alors obligés de quitter la Libye et de s'exiler d'abord en Egypte au Caire où lui et son frère ont terminé leurs études, puis en Angleterre où il termina ses études et devint architecte.

En 1980, son père, toujours considéré comme dissident par le régime Khadaffi, est kidnappé et rapatrié vers la Libye. Il est d'abord porté disparu, puis en 1986, la faille reçoit deux lettres de sa main qui les informe qu'il est prisonnier dans la prison Abu-Salid de Tripoli. Depuis, plus de nouvelles...

Hisham Matar a commencé par écrire de la poésie et du théâtre. Il a commencé à écrire son premier roman en 2000 'Au Pays des Hommes' qui fut dans la shortlist pour le Booker en 2006.

 

L’histoire :

Tripoli, 1979. La société libyenne étouffe sous le régime autoritaire du colonel Kadhafi mais le jeune Suleiman, neuf ans, a bien d’autres soucis : il s’ennuie sous l’écrasante chaleur estivale. Son père est absent, on le dit en voyage d’affaires. Sa mère, adorée, crainte, erre dans la demeure, de plus en plus souvent ivre, et délire jusqu’à épuisement. Tout est murmure, tout est secret, tout est hostilité.

Mais bientôt le monde du petit Suleiman bascule : en plein centre-ville, un matin, il aperçoit Baba, son père, caché derrière d’épaisses lunettes noires. Pas un signe, pas un geste, l’homme les ignore, sa mère et lui.

Subtilement, la peur et le doute s’installent dans la vie de Suleiman. Qui sont ces hommes en armes qui viennent fouiller la maison ? Pourquoi le père de Karim, son meilleur ami, est-il emmené par la police ? Comment se fait-il que sa mère brûle un à un les livres de la bibliothèque, jusqu’alors véritable trésor familial ?

 

Ce que j’ai aimé :

J’ai repéré ce roman dans un article de Courrier International qui pointait les romans capables de nous en apprendre davantage sur un pays qu’un documentaire. Et en cela, ce roman est effectivement remarquable. En choisissant d’adopter le point de vue du jeune Suleiman, l’auteur parvient à créer une tension implicite plus forte que toutes les explications. Le lecteur adulte peut combler à sa manière les blancs inhérents à l’histoire et découvrir ainsi de multiples ramifications à ce roman qui ne parle pas seulement de la Libye de Kadhafi et des régimes totalitaires, mais qui interroge aussi le courage, la traîtrise, l’amour d’une mère. Il évite le pathos toujours grâce au point de vue de cet enfant un brin égoïste, qui aimerait être le centre du monde, mais sent qu’on lui cache des choses importantes.

 

« De la sollicitude. Je pense que c’est ce que je cherchais désespérément. Une sollicitude chaude, stable, immuable. En un temps de sang et de larmes, dans une Libye pleine d’hommes couverts d’hématomes et maculés d’urine, taraudée par le manque et désireuse de se libérer, j’étais cet enfant ridicule en quête e sollicitude. Et même si je n’y songeais pas en ces termes à l’époque, l’auto-apitoiement avait viré à la détestation de soi. » (p. 227)

 

Si bien que pages après pages, ce roman réussit le rare challenge de devenir universel, et de s’intégrer majestueusement dans la lignée des chefs d’œuvre de la littérature.

 

 Ce que j’ai moins aimé :

 -Rien.

  

Premières phrases :

 « Je me souviens à présent de ce dernier été, c’était avant que l’on ne m’envoie loin d’ici. Nous étions en 1979 et le soleil noyait tout. Tripoli s’étendait au-dessous, éclatante et immobile. Tous les humains, les animaux, les fourmis se mettaient désespérément en quête d’ombre, de ces rares taches grises et miséricordieuses sculptées dans toute cette blancheur. »

 

Vous aimerez aussi :

 Disgrâce de J.M. COETZEE

 

D’autres avis :

 Lecture commune avec A girl from earth

RFI

 

Au pays des hommes, Hisham MATAR, traduit de l’anglais par JF HEL GUEDJ, Denoël et d’ailleurs, 2007, 329 p., 20 euros

 

defi Afrika Choupynette

Publié dans Littérature Afrique

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