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La princesse de Clèves de Madame de LA FAYETTE

Publié le par Hélène

princesse de clèves

♥ ♥

 

"J'avoue que les passions peuvent me conduire ; mais elles ne sauraient m'aveugler." (p. 174)

 

L'auteur :

 

Marie-Madeleine Pioche de La Vergne, comtesse de La Fayette, plus connue sous le nom de Madame de La Fayette, est une femme de lettres française. Elle est née le 18 mars 1634 à Paris, morte le 25 mai 1693. Elle a écrit le premier roman historique français, La Princesse de Clèves, souvent considéré comme le premier roman moderne. (Source : Babélio)

 

L'histoire :

 

À la cour du roi Henri II, une jeune femme ignorante du monde et élevée selon une morale stricte, fait un mariage de convention avec le prince de Clèves avant d’éprouver auprès de M. de Nemours les ravages de la passion amoureuse.

Tenant à la fois des mémoires, du roman baroque et du roman héroïque, La Princesse de Clèves est au confluent de plusieurs genres. Cette œuvre inclassable, à la fois roman et nouvelle, fonde le roman psychologique moderne. (Présentation Hatier)

 

Ce que j'ai aimé :

 

La princesse de Clèves est le récit d’un amour tragique : tragique pour la princesse elle-même parce que cet amour lui est interdit puisqu’elle ne peut s'y livrer sans trahir son mari. Mais tragique aussi pour le prince de Clèves, homme dévoré par la jalousie que sa femme a provoquée malgré elle en lui avouant sincèrement ses sentiments envers le duc de Nemours.

 

"Adieu, Madame, vous regretterez quelque jour un homme qui vous aimait d'une passion véritable et légitime. Vous sentirez le chagrin que trouvent les personnes raisonnables dans ces engagements, et vous connaîtrez la différence d'être aimée, comme je vous aimais, à l'être par des gens qui, en vous témoignant de l'amour, ne cherchent que l'honneur de vous séduire." (Tome IV)

 

Le conflit entre désir et raison imposée par la morale est au cœur du roman, et en transcendant ses aspirations passionnées, la princesse devient un modèle de vertu, un modèle de liberté, et bien plus encore :

 

« Elle sait quels désastres apportent dans la vie d'une femme une passion illégitime, de quel prix il faut payer certaines joies interdites. Elle sait aussi à quelles humiliations elle s'exposerait, dans quels enchaînements de mensonges elle serait entraînée. Son honneur pas plus que sa raison ne lui permettent de faiblir. (...) Il est beau de n'attendre rien de la vertu, ni les récompenses de l'au-delà, ni les satisfactions de la conscience, ni la considération mondaine : rien que la vertu même, si ce mot signifie la dignité habituelle des pensées et de la conduite, la maîtrise de soi, l'intégrité du caractère." (Préface d’Antoine Adam)

 

La tragédie s’étend bien au-delà des seules barrières maritales : quand la princesse sera libre d’avouer ses sentiments au duc de Nemours, elle s’y refusera.  Elle ne veut pas pervertir l'amour qu'elle ressent pour le duc. En y cédant, elle se heurterait à son affaiblissement progressif, à son usure inéluctable, à sa déchéance. Elle vit une passion absolue avec ce qu'elle induit : renoncement et mort, comme dans les tragédies antiques. Choisir la raison c'est construire une vie sans imprévu, monotone, mais choisir la passion est synonyme de douleur et d'aliénation. Pour Madame de La Fayette, tout bonheur est impossible.

 

Le roman peint avec minutie la force des apparences à la cour, la dissimulation constante nécessaire à sa survie dans un monde factice, univers de l’artifice par excellence. Chaque parole, chaque action se doit d’être mesurée, soupesée…  La sincérité de la princesse, somme toute très morale, perdra le prince qui aurait préféré rester dans l’ignorance des sentiments de sa femme adorée.

 

La princesse de Clèves est un roman classique dont l'objectif est de "viser l'essence de l'être humain, la connaissance des valeurs universelles et non conjoncturelles." En cela il  est atemporel, et permet au lecteur de tous les siècles de s'interroger sur des sujets divers afin d'esquisser un semblant de réponse. Les multiples ramifications offertes par la lecture des oeuvres classiques forment l'esprit et le coeur du lecteur moderne bien plus sûrement que la frivolité d'une existence sans art...

 

La beauté de ce roman, la nouveauté du sujet à l'époque et sa façon de manier la morale en feront l’ancêtre du roman moderne.

 

Ce que j'ai moins aimé :

 

Quelques passages plus rebutants concernant les intrigues annexes, sentimentales et politiques.

 

Premières phrases :

 

"La magnificence et la galanterie n'ont jamais paru en France avec tant d'éclat que dans les dernières années du règne de Henri second. Ce prince était galant, bien fait et amoureux ; quoique sa passion pour Diane de Poitiers, duchesse de Valentinois, eût commencé il y avait plus de vingt ans, elle n'en était pas moins violente, et il n'en donnait pas des témoignages moins éclatants."

 

La polémique liée à Nicolas Sarkozy:

 

L’express :

 

La princesse de Clèves défie le président

Par Debril Laurence et Mandonnet Eric et , publié le 26/02/2009 à 18:40

A force de se moquer d'elle, Nicolas Sarkozy en a fait un signe de ralliement contre lui. La princesse de Clèves, première opposante de France?

C'est une liaison ancienne, entamée sur les bancs du lycée, et qu'il ne parvient pas à oublier. L'aurait-elle fait trop souffrir? La princesse de Clèves n'appartient plus seulement à Mme de La Fayette; elle forme désormais avec Nicolas Sarkozy un couple aussi inattendu qu'emblématique. Le président y est pour beaucoup, qui n'a que son nom à la bouche. Pendant la campagne, il la moquait presque autant que son adversaire socialiste. Comme ce 23 février 2006, à Lyon, devant des militants UMP: "L'autre jour, je m'amusais [...] à regarder le programme du concours d'attaché d'administration. Un sadique ou un imbécile, choisissez, avait mis dans le programme d'interroger les concurrents sur La Princesse de Clèves. Je ne sais pas si cela vous est souvent arrivé de demander à la guichetière ce qu'elle pensait de La Princesse de Clèves... Imaginez un peu le spectacle!" 

Son obsession ne le quittera pas après son arrivée à l'Elysée. Le chef de l'Etat l'évoque à nouveau, le 4 avril 2008, lors d'un discours sur la modernisation des politiques publiques et la réforme de l'Etat, en défendant "la possibilité pour quelqu'un d'assumer sa promotion professionnelle sans [...] réciter par coeur La Princesse de Clèves". Lors d'une rencontre organisée par la Ligue de l'enseignement, en juillet 2008, il trouve encore le moyen d'y faire référence. Il lui arrive même d'en parler sans prononcer son nom, dans une allusion limpide, comme dans cette interview à 20 Minutes, en 2007: "Le contribuable n'a pas forcément à payer vos études de littérature ancienne si, au bout, il y a 1 000 étudiants pour deux postes [...]. Le plaisir de la connaissance est formidable, mais l'Etat doit se préoccuper d'abord de la réussite professionnelle des jeunes." 

La princesse de Clèves est devenue le symbole de la résistance à la rentabilité.

A la longue, La Princesse revisitée par le président blesse le coeur des lettrés. Ils organisent la riposte, du réalisateur Christophe Honoré, qui affirme avoir tourné son dernier long-métrage, La Belle Personne, afin "d'apporter un démenti en forme de film", aux enseignants, prompts dorénavant à organiser des lectures publiques de l'oeuvre dans les rues de Paris, d'Avignon et de Montpellier. "Nous croyons que sans la complexité, la réflexion et la culture la démocratie est morte", explique Sophie Rabau, maître de conférences à Paris III, organisatrice de la représentation parisienne. "On veut nous obliger à ne nous intéresser qu'à des choses rentables, qui amélioreront la compétitivité française, s'agace Christine, chercheuse à l'Institut national d'études démographiques. Mais ce n'est pas comme cela qu'on fait évoluer une société! L'université, c'est aussi le lieu de la beauté et pas forcément de la performance, de la pensée et pas toujours de la rentabilité..." 

La Princesse de Clèves n'est plus aujourd'hui le premier roman moderne de la littérature française. C'est devenu à la fois un symbole -l'inutile a-t-il encore le droit à l'existence?- et une attaque contre la personne même du président, caricaturé en être inculte. "Nicolas Sarkozy a seulement voulu souligner le fossé entre les programmes des concours et la réalité quotidienne des gens, explique l'un de ses conseillers. Ceux qui le critiquent manquent-ils à ce point d'humour pour prendre cette histoire au premier degré?" L'Elysée n'a toutefois pas pris l'affaire complètement à la légère. Quelques touches de culture, d'une visite d'exposition à une soirée à la Comédie-Française, sont venues distraire l'agenda présidentiel. Plus que jamais, la princesse de Clèves aura montré à quel point elle pouvait être précieuse... 

A lire aussi : Le Monde, 24 heures philo

 Vous aimerez aussi :

   Le scandale de la saison de Sophie GEE

 

La princesse de Clèves, Madame de la Fayette, plusieurs éditions disponibles.

 A découvrir aussi ici : http://lettres.ac-rouen.fr/francais/tendre/cleve1.html

 

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Une enfant de Poto-Poto de Henri LOPES

Publié le par Hélène

                       

♥ ♥

L’auteur :

Né en 1937, Henri Lopès est un écrivain congolais (Brazzaville).Il a assumé de hautes fonctions politiques et administratives dans son pays (Premier ministre de 1973 à 1975) avant de devenir (depuis 1982) fonctionnaire international de l'Unesco à Paris. La récente parution de Le Lys et le Flamboyant aux éditions du Seuil complète un oeuvre jusque là composée d'un recueil de nouvelles (Les Tribaliques, Clé, 1971), et de cinq romans : La Nouvelle Romance (Clé, 1976), Sans Tam-tam (1977), Le Pleurer-Rire (1982), Le Chercheur d'Afrique (Seuil, 1989), et Sur l'Autre Rive (Seuil, 1992). Ses écrits réalisés au Congo révèlent les contradictions de L'Afrique indépendante ; elle évoque surtout le combat que l'individu mène contre les entités collectives en s'appuyant sur la lecture et le savoir. Son oeuvre parisienne très intimiste est une quête identitaire de ses principaux personnages à travers le temps. (Source : africultures)

 

L’histoire :

 

« À la une, la photo d'une foule en liesse... En bas, dans le coin gauche, quelqu'un lève deux doigts. C'est Pélagie. À sa gauche, c'est moi, Kimia... C'était le 15 août 1960. La nuit de notre Indépendance... Pour Pélagie et moi, il s'agissait plus d'une occasion de réjouissance que d'une date historique. » Suit le récit d'une amitié liant deux jeunes femmes que l'évolution de leurs pays va séparer un temps. Amitié profonde, complexe, sillonnée de rivalités, de jalousie et, surtout, mue par une indéfectible solidarité au cœur d'un monde divisé.


Entre Pélagie et Kimia, un Moundélé, comme on appelle les Blancs, là-bas ! Mais ne serait-il pas, lui aussi, un enfant de Poto-Poto ?... Doublant l'intrigue amoureuse, une plongée dans les consciences de trois êtres dont les identités se forgent à la fusion des boues et des glaises des sols d'Afrique et d'ailleurs. À contre-courant des clichés, l'auteur, à l'écriture dépouillée, rapide, cinématographique, nous offre trois palpitants destins en perpétuels dialogues.


De l'Europe aux États-Unis, ce trio fiévreux de passion et d'intelligence reste uni par une aspiration commune, le désir de s'assumer et de se dépasser, que traversent les parfums et les saveurs du Congo dans les rythmes des rumbas du pays bantou. (Quatrième de couverture)

 

Ce que j’ai aimé :

 

Toute la première partie du roman est consacrée aux dernières années de lycée des deux jeunes femmes que sont Pélagie et Kimia. Entre soirées dansantes, partiels aux sujets improbables ("Aux partiels de février, il sema la panique en nous faisant sécher sur un sujet dont le libellé fit penser à un canular : "Quelle est la teneur métaphysique du jaune, quel est le coefficient métaphysique du citron ?"" (p.122)), prétendants pas toujours désirables, rêves de départ pour la France, premiers amours, premières déceptions...

«Au Congo, on danse pour courtiser, pour célébrer la lune, la moisson, le nouveau-né, le mariage, on danse aussi pour exprimer sa tristesse. On danse pour prier. On danse pour pleurer ses morts. On danse pour se recréer, on danse pour dire sa mélancolie. Selon la manière dont on remue sa ceinture, la rumba exprime la joie ou le chagrin ».(p.103)

 

Elles sont surtout fascinée par leur professeur, métis plus noir que les congolais, homme brillant et passionnant, contesté, renvoyé, réintégré...

 

En toile de fond vibre l'indépendance du Congo, les violences inhérentes au nouveau statut du pays, les enlèvements discrets, les cannonades inexpliquées, un climat tendu et dur.

 

Pourtant, ce sont pour les jeunes femmes, les derniers jours paisibles qui ne demandent pas d'efforts, de ceux qui nous portent vers le futur sans grand trouble.

 

Vient ensuite le temps des choix, les départs vers l'étranger pour suivre des études qui éloignent inéluctablement les êtres de leurs amis et de leurs racines...

 

Avec simplicité et intelligence, Henri Lopès rend hommage à son pays et à ses jeunes filles pour qui tout commence et tout finit. Ce roman est aussi pour lui l'occasion de s'exprimer sur des sujets qui lui sont proches comme le métissage, l'amour, les femmes, son pays , ou encore le statut d'écrivain puisque la jeune Kimia devient elle-même écrivain et est amenée à assister à des rencontres avec ses lecteurs :



"Je ne crois pas au bien-fondé de ces rencontres. Elles aident peu à la vente des livres et sont une perte de temps pour les auteurs. Je n'y rencontre jamais les écrivains que j'admire. Aujourd'hui, c'est par les médias que l'on touche les lecteurs. C'est à notre personnage qu'on s'intéresse, pas à notre travail.
Le programme prévoyait l'animation d'ateliers d'écriture. Un exercice vain. L'écrivain est un artisan. Son métier s'apprend, mais pas dans une classe. Il n'est ni un cordon bleu ni un féticheur possédant des recettes et des pouvoirs secrets à transmettre. C'est en lisant qu'on apprend à écrire.
[...]
Pas d'atelier d'écriture ni de conférence ex cathedra. Je lirai mes textes. C'est l'unique introduction à tout débat fructueux. La meilleure.
Paresse ? Fantaisie ? Un peu des deux. Avant tout une intime conviction. La préparation de conférences disperse, mord sur le temps réservé à l'écriture, n'est pas dans la nature de l'artiste. Toute ma philosophie s'exprime dans mes romans. Mes gloses ne peuvent éveiller l'écho que mes romans font résonner en vous."  (page 204)

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

La deuxième partie centrée sur la relation triangulaire entre Pélagie, Kimia et Franceschini est beaucoup plus classique et de fait moins passionnante et enrichissante...

 

Premières phrases :

 

« Certains nous appelaient les enfants dipanda, un mot forgé pour traduire indépendance en langue. J’avais alors dix-huit ans, Pélagie un peu plus.

J’ai conservé le numéro de Courrier d’Afrique qui relate les festivités de la nuit de dipanda.

A la une, la photo d’une foule en liesse. L’épreuve est de mauvaise qualité. En bas, dans le coin gauche, quelqu’un lève deux doigts. C’est Pélagie. A sa gauche, c’est moi, Kimia. »

 

Vous aimerez aussi :

 

Photo de groupe au bord du fleuve de Emmanuel DONGALA

 

D’autres avis :

 

Presse : Le point L'Humanité  

 

Une enfant de Poto-Poto, Henri LOPES, Gallimard, Continents noirs, janvier 2012, 272 p., 17,50 euros

 

Merci aux Editions Gallimard.

 

Publié dans Littérature Afrique

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A la trace de Deon MEYER

Publié le par Hélène

                     

♥ ♥ ♥

L’auteur :

Né en 1958 à Paarl, en Afrique du Sud, Deon Meyer a été journaliste, puis rédacteur publicitaire et stratège en positionnement Internet, il est aujourd’hui l’auteur unanimement reconnu de best-sellers traduits dans 15 pays. Il vit à Melkbosstrand.

 L’histoire :

Chacun des protagonistes de ce roman aux intrigues apparemment distinctes laisse des traces. Toutes, à un moment donné, vont se croiser.

Milla, mère de famille qui plaque son foyer et rejoint l’Agence de Renseignement Présidentielle au moment où un groupuscule islamiste s’agite de manière préoccupante.

L’aventurier Lemmer qui protège le transfert à la frontière du Zimbabwe de deux inestimables rhinos noirs. Lukas Becker, l’archéologue aux prises avec les gangs de la plaine du Cap. L’ex-flic Mat Joubert, devenu détective privé, chargé d’enquêter sur la disparition d’un cadre de l’Atlantic Bus Company.

Comparée à l’univers du polar américain (corruption, drogue, prostitution), la matière romanesque de À la trace, qui allie « le monde animal, inhérent à notre culture », des contrebandes pittoresques, l’émancipation des femmes, la culture gangsta des villes, frappe par sa richesse et sa diversité.

Deon Meyer est un des rares auteurs qui, tout en maîtrisant avec brio les règles du genre, ouvre grand le champ des problèmes contemporains de son pays. (Présentation de l’éditeur)

Ce que j’ai aimé :

Deon Meyer nous offre trois histoires dans un seul roman :

Celle de Milla, femme au foyer qui décide de fuir son havre oppressant. Obligée de trouver du travail, elle se fait embaucher ni plus ni moins par les services de renseignement sud africains et va se lancer à cœur perdu dans sa mission. Seulement un grain de sable va s’immiscer dans sa vie monotone, faisant exploser en lambeaux toutes ses certitudes. Milla souhaiter une vie trépidante, loin de son quotidien lassant, elle va trouver bien plus que cela...

« Notre vie est composée de vingt-deux mille jours en moyenne. Combien nous restent en mémoire, nommés et datés ? Dix, douze ?... Anniversaires, mariage et divorce, séparations, décès, puis quelques Grandes Premières… Les traces des autres jours s’usent peu à peu. Résultat : la vie consiste en fin de compte en l’équivalent d’un mois de jours dûment enregistrés en mémoire et d’une poignée de souvenirs non datés.

Il faudrait vivre en sorte que chaque jour laisse une trace. » (p. 345)

La deuxième histoire nous permet de retrouver Lemmer et ses failles qui nous emmène au cœur du veld. Lemmer est un personnage passionnant qui garde en lui cette violence sous-jacente, l'entourant d'une aura dense. Il va faire ici la connaissance de Fléa, jeune femme fascinante aux mille facettes...

 

Rhinoceros_en_Afrique_du_Sud.jpg

 

« N’est-ce pas là le problème essentiel de notre communauté ? Nous sommes tous devenus spectateurs, nous restons en marge et commentons, critiquons… Avides de lire, d’entendre et de raconter les malheurs d’autrui, nous participons de loin, du haut de notre supériorité morale. « Eh oui, ils ont eu ce qu’ils ont cherché !... » Personne n’a le courage d’intervenir, de faire quoi que ce soit. » (p. 273)

La troisième histoire est ancrée autour de l’enquête de Mat Joubert qui cherche à expliquer la disparation d’un conducteur de bus. Cette partie du roman permet de mettre en avant les luttes entre bandes rivales mais aussi l’incommunicabilité qui peut régner dans un couple au point qu’on ne connait pas vraiment son conjoint.

On y croise aussi Lukas Becker, archéologue idéaliste aux prises avec des gangs bien plus puissants que lui...

Cette combinaison de destins permet d’offrir un panorama juste de cette Afrique du Sud post- apartheid. Deon Meyer, en nous menant dans des univers différents aux ramifications multiples nous offre la possibilité de nous plonger dans un monde riche, passionnant mais aussi terrifiant, et ceci sans jamais nous lasser.

« Sacré pisteur que ce Meyer, qui traque sa proie sans jamais la lâcher, jusqu'à la dernière page. » (Télérama Christine Ferniot)

 

Ce que j’ai moins aimé :

Plus de 700 pages, c’est lourd à transporter…

 

Premières phrases :

« Ismail Mohammed dévale le Heiliger Lane. Les plis de sa galabiyya blanche s’envolent à chaque foulée ; le col mao est ouvert, comme le veut la mode. Terrifié, il agite les bras pour garder son équilibre. »

 

Vous aimerez aussi :

Du même auteur :  13 heures de Deon MEYER

Autre :  Disgrâce de J.M. COETZEE

 

D’autres avis :

Blogs : Cathulu

Presse : Le figaro  Télérama Jeune Afrique   Lire 

 

A la trace, Deon Meyer, Traduit par Marin Dorst, Seuil Policiers, février 2012,  736 pages, 22.9 € 

Publié dans Littérature Afrique

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Du haut de la montagne, une longue descente de Dave EGGERS

Publié le par Hélène

du haut de la montagne

  

  L’auteur :

 Dave Eggers est un écrivain américain. Il est aussi fondateur du magazine littéraire The Believer et la maison d'édition McSweeney's. Sa femme Vendela Vida est rédactrice en chef du The Believer.


Il a écrit 3 livres populaires : A Heartbreaking Work of Staggering Genius (Une oeuvre déchirante d’un génie renversant) (Éditions Balland, Paris, 2001), You Shall Know Our Velocity(Suive qui peut ), How We Are Hungry (Pourquoi nous avons faim), et What Is the What: The Autobiography of Valentino Achak Deng (Le Grand Quoi : Autobiographie de Valentino Achak Deng).

Il vit à San Francisco Bay Area avec sa femme et leurs deux enfants.

Dave Eggers et Vendela Vida sont les scénaristes de Away We Go, film de Sam Mendes, sorti en 2009. (Source : Babélio)

  L’histoire :

Un groupe de randonneurs s’apprête à attaquer l’ascension du Kilimandjaro. Cinq Américains accompagnés d’un guide et d’une trentaine de porteurs. Rita, Shelly, Grant, Mike, et Jerry veulent se prouver à eux-mêmes ou au reste du monde, qu’ils sont capables de grimper jusqu’au sommet mythique de l’Afrique. Ils ne tardent pas à se rendre compte que la randonnée est loin d’être une partie de plaisir.  Dave Eggers, auteur du Grand Quoi (prix Médicis étranger 2009) signe une nouvelle haletante, dans laquelle l’angoisse et l’absurdité des hommes croissent à mesure que le sommet approche. (Présentation de l’éditeur)

  Mon avis :

Ce récit aurait peut-être gagné à être plus long : il souffre ici de défauts liés pour certains à sa brieveté : l'ascension manque de suspens, l'ensemble manque également de descriptions -et pourtant il me semble que l'ascension d'une montagne comme le Kilimandjaro, même sous la pluie, est sujet à descriptions -, et enfin la fin est décevante, comme s'il avait fallu conclure à tout prix. Reste une sensation d'inachevé, de superficialité, liée aussi au fait que les personnages sont assez sommairement décrits et cernés psychologiquement parlant. 

Une petite déception pour ce récit qui semblait pourtant très prometteur...

Kilimandjaro.jpg
Premières phrases :

« Elle est sur son lit, sur son lit, Rita est sur son lit, les yeux au plafond, dans une chambre tellement bruyante, à une heure tellement matinale, en Tanzanie. Elle est à Moshi. Elle est arrivée la nuit dernière, dans une Jeep conduite par un homme du nom de Godwill. La lumière est éclatante au matin alors que la nuit a été follement, incroyablement noire. »

 

Du haut de la montagne, une longue descente, Dave Eggers, traduit de l’américain par Laurence Viallet, Folio, 97 p., 2 euros

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Nuit tombante de BALADI

Publié le par Hélène

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♥ ♥

Un album intrigant...

 

L’auteur :

Révélé par le mensuel suisse Sauve-qui-peut, Baladi est l'auteur de nombreux ouvrages publiés par AtoZ, B.ü.L.b comix, Mosquito, Delcourt, Atrabile, L'Association, 6 pieds sous terre ou Drozophile. Maints autres de ses récits sont en outre parus en auto-édition et dans diverses revues, dont Psikopat Jade ou Bile noire. (Présentation de l’éditeur)

 

L’histoire :

Que feriez-vous si une belle inconnue vous abordait dans la rue pour vous proposer un petit boulot, porter ses courses? Dada, lui, se surprend à accepter. Il n'est pas au bout de ses surprises. La nuit promet d'être longue. Baladi revisite ici un genre qui lui est cher, le conte, en adaptant une des histoires narrées jadis, dit-on, par une certaine Schéhérazade. Ce troisième album édité par la Cafetière inaugure une série. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

L’atmosphère de récit est teintée de mystère. Dada suit une belle brune jusqu’à chez elle pour porter ses courses. Il y rencontre deux autres belles jeunes femmes qui lui proposent de partager leur repas. Intrigué, fasciné aussi sans doute par ces femmes étranges, Dada accepte leur invitation et plonge alors dans un univers à la fois fascinant et inquiétant. Fascinant parce que ces femmes semblent libérées, prêtes à jouir de tous les plaisirs de la vie dans l’opulence, mais inquiétant car elles ont aussi des mœurs étranges, inexplicables. Que font ces femmes dans cette riche demeure ? Qu’y a t-il dans le coffre qui trône au milieu du salon ? Pourquoi invitent-elles des hommes à dîner?

Baladi nous plonge dans un univers onirique embrumé, influencé par les contes orientaux. Enivré par tant de mystère, le lecteur, tel les compagnons de Shéhérazade est impatient de connaître la suite du récit…

 

Ce que j’ai moins aimé :

Ne pas avoir la suite sous la main…

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Nuit tombante, BALADI, La cafetière, 2004, 60 p. 12 euros

 

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Le blues du braqueur de banque de Flemming JENSEN

Publié le par Hélène

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♥ ♥ ♥

 « La vie est si déconcertante – c’est probablement pour ça que certains y passent autant de temps. » (p. 190)

 

L’auteur :

Flemming Jensen est né en 1948 au Danemark. Il est surtout connu pour ses one-man-shows, ses sketches radio et télé. Et pour ses livres. Lettres à Mogens, d’abord (Mogens, c’est son chien), et tout récemment ímaqa, le grand roman inuit qu’il mijotait depuis vingt-cinq ans.

 

L’histoire :

Max est conseiller politique de haut niveau. Il est l’homme de l’ombre, le génie. Il est malin et avec lui on s’en sort toujours. Seulement cette fois, Max a assassiné son meilleur ami, qui est aussi, accessoirement, le Premier ministre danois.

Coincé entre une insurrection groenlandaise et d’âpres négociations internationales, un match Danemark-Suède et l’intervention d’une jeune scoute peut-être pas si cruche qu’elle en a l’air, quel plan génial pourra-t-il échafauder pour se tirer d’affaire ?

Un texte décalé et burlesque sur fond de satire politique. (Présentation de l’éditeur)

 

Ce que j’ai aimé :

Max est un homme ingénieux, capable de mettre au point les plans les plus rocambolesques pour se sortir d’une situation difficile, et cette capacité à s’adapter fait sa force. Mais cette fois-ci, le hasard lui complique quelque peu la mise :

 « Pourquoi je raconte tout ça ?

Parce que ça peut être une consolation pour beaucoup.

Un exemple du fait que ça peut mal se passer même pour le meilleur d’entre nous. Il n’y avait pas de problème avec ce plan – il y a seulement eu un accident, dont on ne peut pas se préserver.

On peut acheter un parapluie si le temps est à la pluie, mais rester sans défense devant une bouche d’incendie qui explose sur le trottoir. Ça ne fait pas du parapluie une mauvaise idée. » (p. 173)

 En rencontrant la jeune Signe, une jeune scout qui s’est trouvée au mauvais endroit au mauvais moment, sa vie va basculer irrémédiablement.

  « N’oublions pas que cet homme si plein de pouvoir, habitué à jongler avec le destin des gens, n’était rien de plus qu’une personne tout à fait normale. Une personne habitée par l’angoisse, la joie, la tristesse, le bonheur et une nette tendance à la tendresse, comme chacun d’entre nous. 

Au fond, max avait désespérément besoin que quelqu’un s’occupe de lui.» (p. 190)

 Le blues du braqueur de banque est un texte drôle qui ne se prend pas au sérieux et joue de son originalité. Le lecteur est adroitement manipulé par les personnages, et court de surprises en surprises…

 Mais derrière cette apparente légèreté, se cachent des ressources philosophiques, politiques, et psychologiques d’une richesse.

  « C’est pourtant toujours comme ça qu’on résout les problèmes et qu’on évite les ennuis. Pas en supprimant le problème ou l’ennui, mais simplement en reformulant avec intelligence. » (p. 62)

 

Ce que j’ai moins aimé :

-          Rien

 Premières phrases :

 « Dans ce grand classique qu’est Le Radeau, nos créateurs fétiches ont souligné le fait que tout récit se doit d’être composé de trois parties : l’exposition, la description des personnages, le dénouement.

Il m’est important de respecter les célèbres interprètes ainsi que l’homme à l’origine de la pièce. Je me plie donc à cette intangible règle. »

 

Vous aimerez aussi :

  Tribulations d’un précaire de Iain LEVISON

 

Le blues du braqueur de banque, Flemming Jensen, traduit du danois par Andréas saint Bonnet, Gaïa Editions, avril 2012, 189 p., 17 euros

  Livre reçu dans le cadre de l'opération Masse Critique organisée par Babélio.

Publié dans Littérature Europe

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Les plus beaux contes zen de Henri BRUNEL

Publié le par Hélène

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♥ ♥ ♥ ♥

« Chacun de nos instants, s’il est juste, est une goutte d’éternité. » (La femme de glace)

 

L’auteur :

Ancien proviseur de lycée, Henri Brunel a été professeur de yoga pendant plus de trente ans. Il est notamment l'auteur de Restez zen : la méthode du chat et du Guide de relaxation pour ceux qui n'ont pas le temps (le Seuil, 2003), des plus beaux contes zen (Calmann-Lévy, trois tomes, et une version illustrée parue en 2002) de Je confie mes traces aux nuages (Calmann-Lévy, 2002).de Humour Zen et de l'Année zen (Calmann-Lévy, 2003) et du Conte du chat maître zen (Calmann-Lévy, 2004).


Les contes :

Corbeau branche Kyo1
Le Zen s'adresse en ses commencements à des populations de tradition orale. Les moines zen ont souvent recours au conte pour mettre à la portée des plus humbles "la pensée zen", si difficile à saisir en raison même de sa simplicité. Le conte zen : ses histoires de dragons, d'éléphants, de jeunes femmes belles et sages, moines vivant dans des huttes de branchages, d'empereur mélancolique, de truelle enchantée ou de grue cendrée... Derrière le chatoiement du merveilleux récit : le cœur des choses, l'absolu, la "nature du Bouddha". L'intégralité des quatre-vingts contes zen d'Henri Brunel est réunie ici, avec une quarantaine d'illustrations en couleurs des maîtres de l'estampe japonaise des XVIIIe et XIXe siècles.

Ce que j’ai aimé :

Henri Brunel nous offre une série de contes courts puisés dans la littérature zen, d’origine japonaise, quelquefois indienne ou chinoise.  Les personnages peuvent être des animaux, ou des êtres humains, mais leurs aventures sont toujours assorties d'une conclusion s'inscrivant dans la tradition zen : « Rien ne doit faire obstacle à l'expérience personnelle », ou « Chacun de nos instants, s'il est juste, est une goutte d'éternité ».

Les contes de Henri Brunel permettent d’aborder l’univers du zen de façon très ludique et accessible : il est possible de ne lire ces contes que pour leur intérêt littéraire et de puiser ensuite les morales qui s'accordent aux nôtres sans pour autant se déclarer adepte du zen. Les estampes choisies pour illustrer ces contes sont magnifiques,


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« Le Zen,  cette lame nue, cette lumière insolente et impitoyable qui me contraignait à me faire face à ma vie et me renvoya plus ouvert, plus tolérant, plus profond à la foi chrétienne de mon enfance. Vivre, zen, c’est être plus lucide, trier ce qui passe et ce qui demeure, c’est goûter le bonheur du présent, et, coque de noix sur l’océan de l’Absolu, s’arrimer d’instant en instant à l’éternel. » (Préface)

« J’ai jeté cette toute petite chose
Que l’on appelle « Moi »
Et je suis devenu le monde immense » (Sosëki)

« Le Zen unit le visible et l’invisible, l’humble quotidien et la réalité ultime, le relatif et l’Absolu. Le « cyprès dans la cour », la fleur devant soi, le caillou sous nos pas sont les chemins qui mènent à l’au-delà, de l’au-delà, du par-delà. »  (La bannière et le vent)

« Chaque goutte d’eau contient l’océan. » (L’humble moine)


Ce que j’ai moins aimé :


-Rien.


Un conte :


plus beaux contes 2En guise d’au revoir


« Un moine zen se disposait à parler sur la grande place du village. Il avait soigneusement rédigé son discours, et il s’apprêtait à le lire, quand un brusque coup de vent fit s’envoler les feuillets dans les branches du citronnier. Pris au dépourvu, incapable de retrouver le fil de son harangue, il dit :
« Mes amis, voici en résumé, ce que je voulais vous exposer : quand j’ai faim, je mange, quand je suis fatigué, je dors.
-    Mais tout le monde ne fait-il pas comme vous, maître ? interroge quelqu’un dans la foule.
-    Non ! pas de la même façon !
-    Pourquoi, maître ?
-    Quand les gens mangent, ils pensent à mille choses, quand ils s’endorment, ils pensent à leurs problèmes. Voilà pourquoi ils ne font pas comme moi ! »
Alors le moine descendit au milieu d’eux, recueillit les dons, et, à ceux qui le questionnaient encore, il répondit : « Quant aux détails, vous les trouverez dans les branches du citronnier… » »

Vous aimerez aussi :

Petits contes de printemps de Natsume SOSEKI

 

Les plus beaux contes zen, Edition illustrée, Henri Brunel, Calmann-Lévy, janvier 2003, 25.90 euros
POCHE : Librio

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Publié dans Littérature Asie

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Le roi Lézard de Dominique SYLVAIN

Publié le par Hélène

roi lézard

♥ ♥ ♥

 « I am the Lizard King

I can do anything »

 

L’auteur :

Dominique Sylvain est née le 30 septembre 1957 à Thionville en Lorraine. Elle travaille pendant une douzaine d’années à Paris, d’abord comme journaliste, puis comme responsable de la communication interne et du mécénat chez Usinor.

Pendant six ans, elle a vécu avec sa famille en Asie. Ainsi, Tokyo, où elle a passé trois ans, lui a inspiré son premier roman Baka ! (1995). Sœurs de sang et Travestis (1997 et 1998) ont été écrits à Singapour.

Elle habite actuellement à Tokyo et se consacre exclusivement à l’écriture. Ses treize romans ont tous été publiés dans la collection Chemins Nocturnes, aux Éditions Viviane Hamy.

 Son site : http://www.dominiquesylvain.com/

 

L’histoire :

Dans Le Roi Lézard, Louise Morvan élucide le mystère de l’assassinat de son oncle détective, Julian Eden, dont elle a hérité l’agence à la fin des années 70. En effet, le commissaire Serge Clémenti retrouve la piste de l’inspecteur Casadès qui avait été en charge de l’enquête et qui se l’était vu retirer sans raison apparente.

Alors que Clémenti et ses deux acolytes s’épuisent à débusquer le « killer des quais » qui assassine de malheureux SDF, Louise finit par rencontrer elle-même le répugnant Casadès qui lui distille des informations au compte-gouttes, brouillant ainsi les pistes...

 Attention : Ce roman est une version inédite de Travestis, roman de Dominique Sylvain paru en 1998. Ce livre épuisé, lui tenant particulièrement à cœur, l’auteur a souhaité en reprendre l’écriture avant la réimpression envisagée. De déconstruction en reconstruction (au point que même le meurtrier est un autre !) et compte-tenu de l’importance que prenait au fil de la narration, Jim Morrison, le chanteur de The Doors, il a fallu se rendre à l’évidence : il s’agissait là d’un roman différent. Un nouveau titre s’est alors imposé !

 

Ce que j’ai aimé :

 L’oncle de Louise Morvan évoluait dans les milieux artistiques des années soixante-dix et fréquentait notamment le club Rock and Roll Circus « un des clubs les plus dingues et les plus chics de Paris dans les années soixante-dix. » « Cette boîte attirait dandys en chemise à jabot, businessmen en smoking, et faisait renaître Saint-Germain-des-Prés de ses cendres. (…) Un grand escalier en pierre de taille, et enfin, les bouffées de Led Zeppelin, des Beach Boys ou de Clapton en live, les odeurs d’encens et de patchouli. Un sas vers un autre monde. » (p.45) Ainsi il a pu côtoyer producteurs de l’époque, chanteurs, et surtout le mythique Jim Morrison de passage à Paris à cette époque et habitué du Rock and Roll Circus. Certains racontent même que "le roi lézard" serait mort d’une overdose dans les toilettes de ce bar. Notre enquêtrice de choc Louise flirte avec ces personnages troubles, baignés dans un monde opaque, s’évaporant dans des volutes de drogue et de musique.  

 La belle Louise s’adapte parfaitement à cet univers, avançant à tâtons sur une ligne ténue tracée entre deux mondes : la moralité, une relation stable avec l’inspecteur Clémenti, un engagement, et l’attirance trouble pour ces êtres empreints de magie et de mystère, mais aussi de violence et de malheur. Louise oscille dangereusement, moulée dans l’image marquante de son oncle défunt.

 Dans ce paysage troublé, Paris est à la fois un refuge et un danger. L’auteur campe solidement son action dans la ville, comme si la belle capitale était à elle seule un autre personnage. De la Villette aux quais de Seine en passant par Pigalle, l'escapade parisienne fascine le lecteur-touriste témoin de l'enquête tonitruante de Louise.

 Et l'enquête me direz-vous ? Elle n'est que secondaire finalement, se fondant parfaitement dans l'atmosphère et le décor comme si elle faisait corps avec elle. Du grand art !

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Ce que j’ai moins aimé :

-          Rien

 

Premières phrases :

 « L’enfant s’ennuie ferme dans la Studebaker qui roule au milieu du désert, entre Albuquerque et Santa Fe. Le jour se lève. Tous somnolent, sauf le père – un officier de marine toujours concentré – et le gamin, qui a des fourmis dans les jambes. La route rectiligne tranche une interminable plaine de poussière ocre. L’enfant pense que les montagnes bleutées à l’horizon sont à des milliers de kilomètres, que ce voyage n’en finira pas. Mais il se trompe car, après des heures de monotonie, il se passe enfin quelque chose. »

 

Vous aimerez aussi :

 Du même auteur : Passage du désir de Dominique SYLVAIN

Autre : les romans de Fred Vargas

 D’autres avis :

Blog : Moustafette

Presse : Le monde  

 

Le roi Lézard, de Dominique Sylvain, éditions Viviane Hamy, mars 2012, 300 p., 18,50 euros

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Lambeaux de Charles JULIET

Publié le par Hélène

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♥ ♥ ♥

 « Et tu sais qu’en dépit des souffrances, des déceptions et des drames qu’elle charrie, tu sais maintenant de toutes les fibres de ton corps combien passionnante est la vie. » (p. 155)

 

L’auteur :

 Charles Juliet est né en 1934 à Jujurieux (Ain). À trois mois, il est placé dans une famille de paysans suisses qu’il ne quittera plus. À douze ans, il entre dans une école militaire dont il ressortira à vingt, pour être admis à l’École de Santé Militaire de Lyon. Trois ans plus tard, il abandonne ses études pour se consacrer à l’écriture. Il travaille quinze ans dans la solitude avant de voir paraître son premier livre (Fragments préfacé par Georges Haldas). Il vit à Lyon.
Une nouvelle édition en format poche de L'Autre faim aux éditions POL est prévue pour décembre 2011.
En janvier 2012 paraîtra Hadewijch d'Anvers, une femme ardente, dans la collection " Sagesses " de Points.
Charles Juliet prépare pour les éditions P.O.L une anthologie de ses poèmes et le prochain tome de son Journal.

 L’histoire :

Lambeaux est un récit autobiographique dans lequel Charles Juliet évoque sa mère qu’il n’a pas connue – morte de faim après huit ans d’enfermement abusif en hôpital psychiatrique – et le rôle que, malgré cette absence, ou à cause de cette absence, elle a joué dans sa vie d’homme et dans sa formation d’écrivain.
Dans un second temps, il nous relate son parcours : la famille adoptive, l’enfance paysanne, l’école d’enfants de troupe, puis les premières tentatives d’écriture, lesquelles vont progressivement déboucher sur une toute autre aventure : celle de la quête de soi. Une descente aux enfers sera le prix à payer pour qu’un jour puisse éclore la joie grave et libératrice de la seconde naissance.
Dans cette démarche obstinée il trouve la force de se mesurer à sa mémoire pour en arracher les moments les plus enfouis, les plus secrets, et les plus vifs. L’auteur devient son propre historien et nous livre un texte « pour finir encore ». (Présentation de l’éditeur)

 Ce que j’ai aimé :

Charles Juliet nous offre le portrait émouvant d’une mère idéaliste exceptionnelle aux aspirations quasi philosophiques et qui ne peut pas se contenter d’une vie commune banale. Elle se trouve dans l’incapacité d’exprimer son mal-être et sombrera peu à peu, enfermée en elle-même.

 « Toujours en toi cette nostalgie de tu ne sais quoi, ce besoin incoercible d’une vie dégagée de toute entrave une vie libre et riche, vaste, intense, une vie où ne règneraient  que bonté, compréhension et lumière. » (p. 72)

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« T’enfuir… marcher sans fin sur les routes… aller là où tout pourrait recommencer…là où tu ne connaîtrais plus ni la peur ni l’angoisse ni la honte… là où les humains vivraient dans la concorde, n’auraient pour leurs semblables que respect, attention, bonté… là où peut-être le temps ni la mort n’existeraient plus… là où la vie ne serait que joie, bonheur, félicité… Mais  ces rêves et ces divagations sont de courte durée, car la réalité est là, que tu ne saurais oublier. Alors une lourde mélancolie s’empare de toi. Ce que tu ressens et penses est comme amorti, la vie ne te traverse plus, semble s’écouler ailleurs, et il n’est rien qui puisse te tirer de ta désespérance.» (p. 76)

 « Heures merveilleuses des voyages immobiles ! Tu lisais un poème, méditais en contemplant la reproduction d’une toile, dialoguais avec un philosophe de l’Antiquité, et le temps ainsi que tout ce qui t’enténébrait se trouvaient instantanément abolis. Tu rencontrais là ce qui en toi reposait encore dans des limbes, et tu vivais des heures exaltées à sentir que tu t’approchais de la source. Ces hommes et ces femmes dont les œuvres t’ont aidé à te mettre en ordre, dénuder ton centre, glisser parfois à la rencontre de l’impérissable, de quel profond amour tu les as aimés. » ( p. 148)

 

Il ne s’agit pas ici d’établir une véritable biographie, mais plus d’évoquer des états de conscience, de peindre la vie intérieure dense de ces femmes. Les lambeaux de pensée s’ajoutent les uns aux autres pour faire revivre ces mères essentielles. L’écriture permet d’approcher au plus près la magie de l’enfantement.

« En écrivant, se délivrer de ses entraves, et par là même, aider autrui à s’en délivrer. Parler à l’âme de certains. Consoler cet orphelin que les non-aimés, les mal-aimés, les trop-aimés portent en eux. Et en cherchant à apaiser sa détresse, peut-être adoucir d’autres détresses, d’autres solitudes. » (p. 124)

Un très bel hommage rendu à ces mères dévouées et au pouvoir rédempteur de l'écriture...

 Ce que j’ai moins aimé :

 -          Rien

 Premières phrases :

 « Tes yeux. Immenses. Ton regard doux et patient où brûle ce feu qui te consume. Où sans relâche la nuit meurtrit la lumière. Dans l’âtre, le feu qui ronfle, et toi, appuyée de l’épaule contre le manteau de la cheminée. »

 Vous aimerez aussi :

 Le livre de ma mère de Albert COHEN

 

POCHE : Lambeaux, Charles Juliet, Folio, avril 1997, 5.95 euros

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La concession du téléphone d’Andréa CAMILLERI

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥

L’auteur :

Maître du polar à l'italienne, Andrea Camilleri débute en tant que metteur en scène et scénariste pour la télévision, avant de se lancer dans l'écriture. C'est sous l'influence de son ami Sciascia que le Sicilien s'initie aux romans policiers. Il accède à la notoriété grâce au personnage de Montalbano, commissaire singulier, colérique et bon vivant qui fait sa première apparition en 1994 dans 'La Forme de l'eau'. Drogue, mafia et faits divers, autant de thèmes qui vont séduire un large public, au point qu'une série est adaptée pour la télévision en 1998. Le succès est tel que l'on parle désormais de 'phénomène Camilleri', pour évoquer l'écrivain et de son oeuvre. (source : Evene)

 

L’histoire :

Filippo Genuardi jeune sicilien féru des nouvelles technologies souhaite obtenir une ligne téléphonique. Nous sommes en 1891, en Sicile, et le jeune homme doit donc faire sa demande par écrit au préfet de la région. Mais une petite erreur orthographique va entraîner une suite de malentendus : Filippo sera soupçonné d'être un dangereux agitateur qu'il faut neutraliser...

Ce que j’ai aimé :

-          L'originalité de ce roman tient dans son genre épistolaire : seules les lettres que s'envoient les différents protagonistes constituent le fond et le coeur du roman.
André Camilleri écrit d'habitude des romans policiers, mais ici il s'agit plus d'un roman social drôle, d'une récréation dans la série policière de Camilleri.

 

-          L'action se passe en Sicile, à Vigata petite bourgade dans laquelle se situe la plupart des intrigues d'Andréa Camilleri. La vie de cette petite communauté est admirablement bien rendue, de façon très vivante et drôle. Nous sommes en 1891, le téléphone fait tout juste son apparition et l'on se demande pourquoi Filippo tient autant à l'avoir...

 

-          C'est un roman très original, drôle et fin. Il est court, facile à lire et très divertissant. Il pointe du doigt non seulement les lourdeurs administratives, mais aussi les rapports humains quelquefois considérablement compliqués par certains... L'ensemble fait penser à une farce burlesque bien menée, très intelligente.

 

Ce que j’ai moins aimé :

-          Il faut juste un petit effort au début pour situer tous les personnages qui sont nombreux à correspondre entre eux, mais une fois ce petit exercice accompli, le lecteur se régale d'un bout à l'autre de ce petit livre...

D'autres avis :

L'express 

  

La concession du téléphone, Andrea Camilleri, Fayard, 1999, 17.80 euros

POCHE : La concession du téléphone, Andrea Camilleri, Le livre de poche, avril 2001, 281 p., 5.60 euros

 

Vous aimerez aussi :

Publié dans Littérature Europe

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