Un assassin utilise une méthode très sadique pour tuer ses victimes : il convoque une famille et demande à l'un d'eux de choisir qui mourra ou vivra. La police stagne dans son enquête, et fait alors appel à Marzio Montecristo, le patron d’une petite librairie de Cagliari spécialisée dans le polar. Il dirige en effet un club de lecture "les enquêteurs du mardi". Parmi ses membres, il y a Marzio lui-même, mais aussi un prêtre, une femme à la retraite, un vieux dandy et une jeune gothique. Un an plus tôt, cette poignée de super-experts a aidé la police à résoudre une affaire particulièrement complexe. Parviendront-ils à élucider ce nouveau mystère ?
La Librairie des chat noirs est la première enquête d’une nouvelle série dans laquelle l’auteur best-seller, Piergiorigio Pulixi, rend hommage à la littérature policière.
Ce que j'ai moins aimé :
- Des scènes très glauques, comme souvent avec cet auteur,
- Des personnages caricaturaux parmi lesquels Marzio, archétype du vendeur désabusé et bougon,
- Des sentiments dignes des émois adolescents
- Une structure expéditive bancale, comme si l'auteur avait voulu s'obliger à écrire une histoire plus courte, un peu plus légère que ses romans précédents, mais sans grande conviction...
- Les vagues essais humoristiques tombent à plat !
« Il y avait un traître à Bletchley Park, qui vendait des informations pendant la guerre. Vous me haïssez peut-être, mais vous avez toutes les deux prêté le même serment que moi : protéger la Grande-Bretagne. Faites-moi sortir de cet asile et aidez-moi à attraper le traître. Vous avez une dette envers moi. »
Tel est le message que reçoit Osla alors que elle se prépare à se rendre au mariage royal de Margaret et Philip. Ce message la replonge dans les années 40 : alors que l’Angleterre se préparait à combattre les nazis, Osla avait été embauchée à Bletchley Park, là où les cerveaux les plus brillants de Grande-Bretagne étaient formés à casser les codes de l’armée allemande. Là-bas, Osla avait rencontré Mab et Beth, devenues des amies au fil du temps, jusqu'à ce qu'une sombre trahison ne les sépare.
Mais un traître émerge des ombres de leur passé, forçant les trois jeunes femmes à renouer leur vieille alliance pour casser un dernier code.
Ce que j'ai aimé :
L'autrice attire notre attention sur des pans moins connus de l'histoire, en se concentrant ici sur Bletchley Park, principal site de décryptage du Royaume Uni pendant la Seconde guerre mondiale, où les chiffres et les codes de plusieurs pays de l'Axe étaient déchiffrés, dont ceux de la machine allemande Enigma, et de la machine de Lorenz. Très documenté, le roman met ainsi en lumière le rôle des femmes qui ont œuvré dans l'ombre pour contribuer à l'effort de guerre.
Ce que j'ai moins aimé :
- Les trois personnages féminins sont quelque peu caricaturaux : la riche demoiselle qui entretient une relation avec un prince, la demoiselle plus modeste qui veut se marier, la demoiselle effacée vivant dans l'ombre de sa mère abusive.
- Les passages sur les relations amoureuses, tombent trop facilement dans la bluette sentimentale.
Le narrateur Milan, douze ans, est le fils d’un Français et d’une Rwandaise. Mais il connait peu l'histoire du pays de sa mère, ne découvrant qu'à travers la télévision les terribles images du génocide des Tutsis en cours. Sa mère a fui le Rwanda en 1973 mais garde un silence assourdissant sur les évènements qui ont marqué sa vie. Milan l'accompagne pour un premier voyage là-bas, il y rencontre sa famille maternelle, mais les informations sur le passé restent parcimonieuses. D'années en années, il n'aura de cesse de percer le mystère de ses racines. Il sera aidé par son cousin Claude et par Sartre, rwandais qui recueille les orphelins du génocide, mais aussi par sa famille proche, Eusébie, Stella, et Rosalie.
Ce que j'ai aimé :
L'histoire du Rwanda apparait par touches, portée par les personnages aux destins et aux réactions différents face au génocide. Les survivants doivent panser leurs blessures tout en cherchant leur identité à travers les myriades du passé, pour, peut-être, espérer une réconciliation.
Ce que j'ai moins aimé :
Le style m'a déçue, trop simple, scolaire, avec des dialogues qui sonnent quelquefois faux.
J'ai eu le sentiment que les sauts temporels hachaient le récit, les personnages finissent par manquer de consistance, perdant de leur élan ou personnalité à chaque changement d'époque.
Dans les Vosges, une usine en difficulté menace de fermer, laissant ses ouvriers face à une crise économique et sociale. Martel, travaille dans cette usine, syndicaliste à bout, il est prêt à tout pour trouver de l'argent. Il se rapproche de Bruce, un homme de main qui travaille pour un mafieux local. Leur mission est de kidnapper une fille sur les trottoirs de Strasbourg pour la revendre à deux caïds. Mais tout ne se passe pas toujours comme prévu... Rita, une enquêtrice sociale en charge des dossiers de travailleurs en détresse aura un rôle déterminant à jouer.
Ce que j'ai aimé :
L'auteur sait créer des personnages profonds, de ces êtres qui errent désœuvrés dans un monde qui les dépasse, des personnes qui s'ennuient, souffrent à cause de leurs propres démons, des relations familiales tendues et de cette pression économique qui les laissent souvent sur le carreau. Ces hommes et ces femmes sont alors amenés à faire des choix moralement ambigus, dans ces situations désespérées liées aux injustices sociales.
Bilan :
Je préfère résolument les romans sociaux de l'auteur à ceux centrés sur des histoires d'amour ou d'infidélité comme Connemara (dont j'avais abandonné la lecture en cours de route) ou Le ciel ouvert. Dans Les animaux la guerre, sont déjà présents tous les thèmes brûlants contenus dans Leurs enfants après eux qui lui vaudra le Goncourt quelques années plus tard. Ce roman a été adapté en mini-série en 2018.
Mardi 12 novembre la médiathèque d'Enghien les Bains organisait une rencontre avec Nicolas Mathieu. Rencontre inspirante qui a permis de mieux connaître l'écrivain.
Le ciel ouvert est le premier récit autobiographique de l'auteur, qui se présente sous la forme d'un recueil de micro-fictions publiées sur Instagram et adressées à son amour clandestin.
"Il s'agissait d'une déclaration d'amour à quelqu'une. Rappelons que cette relation était illicite puisque la jeune femme était mariée, ainsi les posts sur Instagram permettaient de lui déclarer "vois comme je t'aime même si tu es loin". Les mots pouvaient suppléer au silence imposé par l'infidélité. Chaque like était comme une preuve que cette relation avait de la valeur. Puis cela devient une chronique. Les réseaux sociaux me permettent de mettre en mots des idées qui restent vagues tant qu'elles ne sont pas incarnées dans des mots. C'est un moyen de fixer des d'émotion et de pensées.
Pour moi, parler de l'intime n'est pas impudique car si cela est bien conçu, toute plongée dans l'intime se hausse vers quelque chose de collectif.
Dans ce recueil, j'évoque aussi mon fils de 11 ans. Pour moi, la vie est toujours un peu au-dessus de nos forces. Être père est aussi difficile, mais intense. Je suis marqué en effet par le passage du temps, je vis les choses au futur antérieur en me disant "ça aura été". Je tente de retenir le sable qui coule inexorablement entre nos doigts.
Mon père était un taiseux, j'ai constaté l'inefficacité du langage entre mes parents, comme si la langue ne pouvait pas aller chercher ce qui est fondamental. L'écriture est là pour tenter de combler ces silences. Je mets des mots sur ce qui n'était pas dit quand j'étais enfant. C'est une forme de thérapie, même si je vois aussi un psy, et d'ailleurs mes livres me permettent de régler mon psy...
Ce thème du temps qui passe est un motif qui me hante et que l'on retrouve dans tous mes livres, le vrai personnage de mes romans jusqu'à un certain point est là, dans le passage du temps, la mélancolie. Le texte est un climat, un agencement de sensations dans lequel on entre, et je voulais montrer combien le temps qui passe peut affecter. Je vis avec l'idée constante de ce "c'est déjà fini".
La littérature doit faire prendre conscience, elle doit nous désespérer pour nous faire agir en connaissance de cause, pour qu'on comprenne que notre temps n'est pas infini et qu'il ne faut rien lâcher, il faut se cabrer. Elle n'est pas là pour nous remonter le moral, on est là pour en découdre, pour se battre !"
Connemara raconte la relation entre deux personnages aux trajectoires très différentes : Hélène est un modèle de réussite, de succès quand Christophe se laisse vivre.
"Ce roman est une réflexion sur la réussite, sur la question de savoir ce que signifie l'accomplissement. J'ai créé deux personnages aux trajectoires différentes pour réfléchir sur cette réussite. Au lieu de faire un essai, je crée un personnage et je vois ce qui arrive. Hélène incarne une certaine idéologie managériale que j'ai pu subir par le passé. Mes personnages sont aussi une façon de me venger de ce qui m'accable au quotidien."
L'écrivain au travail :
"Pour moi l'écriture n'est pas un don initial, elle demande des efforts, un apprentissage, un entrainement. Elle demande disponibilité et discipline. Elle est comme un muscle. Pour me relancer entre deux romans, cela me coûte à chaque fois. Il s'agit d'un métier dans le sens où on a acquis des compétences, mais à chaque fois, on est face à sa nullité car en écriture il existe beaucoup de mauvais gestes. Je réécris beaucoup. "
La solitude des personnages :
"On a tous des moments, surtout le dimanche, où on regarde sa vie et on se sent seul face à elle. Mais la solitude et l'ennui ont des fonctions d'élucidation de la réalité qui nous aide à faire les bons choix. Si nous sommes toujours dans le divertissement, on ne voit pas ce qui se passe dans notre vie, pour choisir ce qu'on doit faire, cela exige de l'ennui."
"Il est adapté au cinéma en ce moment. Je n'ai pas contribué au scénario des frères Boukherma. Je voulais juste que ce soit une fresque, pas seulement un petit film social, je voulais un souffle, une ivresse, beaucoup de musique."
Le prix Goncourt :
"Le recevoir c'était cap Canavéral, vous décollez pendant deux ans, toute votre vie change en une journée vous vendez beaucoup plus, le regard des gens change sur vous. On devient un objet, comme Miss France, on vous fait tourner, il faut faire le job dans les salons mais après il faut se remettre à bosser, et là c'est dur. On sait qu'on ne fera plus jamais autant de ventes, et c'est difficile à digérer. On vous attend au tournant, on sait qu'on fera un truc moins bon. Il faut avoir une bonne santé mentale, et avouons-le, ce n'est pas tout à fait mon cas..."
Émile et Louise Lecouvreur font l’acquisition de l’Hôtel du Nord, quai de Jemmapes dans les années 20. Parmi les locataires : Renée, qui est aussi la bonne de l’hôtel, et son amant, l’ouvrier Pierre Trimault, qui prend la poudre d’escampette en apprenant qu’il va être père. Des habitués, déjà : les joueurs de cartes, le père Louis et Marius Pluche ; Julot, l’éclusier du canal Saint-Martin.
L'auteur réussit à capturer l'âme de ce lieu de passage et du Paris populaire des années 20 :
"Il fait bon prendre un verre sur le trottoir après une longue journée de chaleur et de travail, quand le soleil s'est couché derrière les vieilles maisons du quai de Valmy et que, peu à peu, le roulement des voitures a fait place au bruit frais des écluses. Les réverbères s'allument, des amoureux s'étreignent dans le square, de vieilles femmes promènent leur chien. Les étoiles reflètent dans l'eau sombre du canal ; l'air fraîchit, un coup de vent qui vient des boulevards extérieurs apporte le murmure de la ville."
Les personnages défilent : ouvriers, chômeurs, jeunes amoureux, prostituées, et petits bourgeois, le canal et le quartier deviennent des symboles d'un monde ouvrier et populaire, plein de vie et de complexité.
Sur le scandale des avortements forcés à la Réunion
Le récit est inspiré des événements historiques datant du début des années 70, autour de la politique de contrôle des naissances à La Réunion, où des pratiques de stérilisation forcée et de contraception imposée ont marqué les vies de nombreuses femmes. Lucie, victime d'une interruption de grossesse forcée assortie d'une stérilisation décide de porter plainte pour lutter contre l'impunité des médecins de l'île. Parallèlement, en France, Marie-Anne, élève de terminale, assiste à la naissance et à l'essor du Mouvement de libération des femmes MLF. Elle a elle même avorté clandestinement et assiste aux premiers débats sur l'IVG
Ce choix de croiser deux destins permet de mettre en relief les difficultés et paradoxes de la lutte menée par les femmes pour disposer de leurs corps. Quelque soit leur choix, elles devraient pouvoir l'assumer sans que des hommes leur expliquent ou imposent ce qu'il faut ou ne faut pas faire.
Bilan :
Cette BD est une œuvre engagée qui éclaire une part méconnue de l’histoire française et illustre la lutte des femmes pour leur autonomie et leur droit de disposer de leur corps.
En 2018, Nicolas Mathieu tombe amoureux d'une jeune femme déjà mariée. Il publie alors sur Instagram des posts qui lui sont destinés "C'était une manière de surmonter la clandestinité, de se donner à soi-même, mais devant les autres, le spectacle d'une relation enviable". Cinq ans après il rassemble ces textes dans ce recueil pour témoigner de ce "sort magnétique" qui l'a parcouru.
Ce que j'ai aimé :
L'auteur ne parle pas seulement de cette relation, somme toute assez ordinaire, mais il en profite pour évoquer sa mélancolie, le temps qui passe et contre lequel il essaie de lutter en vivant plus intensément, plus dangereusement, pour conjurer la mort.
Il évoque aussi son fils, celui qui restera après lui, source d'émerveillement constante.
Son écriture s'évade facilement vers de belles envolées lyriques.
"Nous avons ambitionné de réveiller ces puissances qui en chacun ruminent, ce sentiment qui parfois le matin nous prend à la gorge et nous fait dire, dans notre voiture ou face au miroir, les yeux mouillés et les lèvres pâlies : Bordel, ma vie n'aura-t-elle été que cela ? La certitude de l'amour fut pour nous le signe avant coureur d'une insurrection intime. Dans cette poitrine qui déborde, nous aurons trouvé la preuve que l'existence qui nous est faite ne suffit pas, qu'il n'y a plus lieu d'être sage, que nous voulons tout, et tout de suite. Nous avons rêvé d'ouvrir grand le ciel par-dessus le toit."
"Toute l'enfance on s'imagine que les adultes savent ce qu'ils font. Chaque jour, ils partent bosser, ont des carrières, font semblant chacun dans leur coin, choisissent des yaourts ou leur voiture, rentrent crevés du boulot, vous bordent et tout recommence. Ils savent lire des cartes routières, faire pousser des tomates et parfois même s'aimer longtemps. En réalité, je vais te dire, personne ne sait rien. Tous à notre mesure, nous repoussons pauvrement le désastre, celui du temps, des autres, de notre impuissance, des grands chagrins qui vous prennent quand le volant de badminton est retombé chez le voisin."
Ce que j'ai moins aimé :
- L'aspect intime dévoilé au grand jour peut déranger, même si l'auteur se justifie au début en disant que cela peut aider d'autres destins.
- Le livre est illustré par Aline Zalko mais j'ai trouvé que ses couleurs ne correspondaient pas à l'esprit des textes. L'auteur parle d'incandescence, de lumière, mais je trouve que le fond des textes est plus mélancolique, plus pastel que couleur...
Bilan :
L'ensemble est assez convenu, décevant par rapport à ses romans comme Leurs enfants après eux ou Aux animaux la guerre.
Mathurine est éducatrice de la protection de l'enfance et officie en Guyane française. Elle a reçu un signalement pour Darwyne Massily, un petit garçon de dix ans légèrement handicapé qui vit à Bois Sec, un bidonville aux portes de la forêt amazonienne. L'enfant vit avec sa mère Yolanda, et supporte régulièrement des beaux-pères de passage. Justement un nouvel homme vient d'entrer dans leur vie : Johnson, qui semble plus sympathique que les autres, disparus mystérieusement.
Mathurine rencontre la mère mais peine à voir l'enfant fuyant. Il ne ressemble pas aux autres enfants de son âge. Très solitaire, il a un lien presque magique avec la forêt qui l'entoure. Mathurine, cherche à comprendre ce qui se passe dans la relation mère-fils, et pourquoi Darwyne semble si différent.
Ce que j'ai aimé :
Le roman oscille entre le réalisme social et une forme de mysticisme lié à la forêt amazonienne, un lieu qui devient presque un personnage à part entière, avec son ambiance oppressante, mystérieuse et envoûtante. Colin Niel parvient à créer un équilibre subtil entre le roman social et le fantastique, en incarnant dans des personnages forts les complexités du sujet brûlant de l'enfance maltraitée.