Lancez-vous sur les traces de Don Pablos de Ségovie, un picaro sympathique qui se jette dans des aventures rocambolesques dans les Indes occidentales, à la recherche de la mythique eldorado ! Il prendra diverses identités pour se fondre dans le paysage et surmonter les épreuves qui s'annoncent, et son inventivité, sa capacité à rebondir quoiqu'il arrive lui permettront peut-être de triompher de l'adversité.
Ce que j'en ai pensé :
Si j'ai aimé suivre les aventures déconcertantes de ce drôle de zouave, je regrette de n'avoir pas trouvé autre chose en ces pages que du divertissement pur. Certes l'aventure est au rendez-vous, mais je n'ai pas retrouvé l'humour de De cape et de crocs ou de Garulfo ni la profondeur des Blacksad.
Bilan :
Ce ne sera pas un coup de cœur pour moi, il m'a manqué quelque chose.
"L'art et rien que l'art, nous avons l'art pour ne point mourir de la vérité." NIETZSCHE
Théo Decker est un jeune new-yorkais de 13 ans qui vit seul avec sa mère. Ce jour-là, après une visite au collège, ils se rendent au musée, et la vie du jeune garçon bascule : un attentat touche une partie du Metropolitan Museum of Art et sa mère meurt dans l'explosion. Reclus dans une pièce au milieu des décombres, il fait la connaissance d'un vieil antiquaire mourant qui le supplie d'accepter une bague et de sauver des décombre une peinture, Le chardonneret de Carel Fabritius. Il lui donne aussi une adresse où se rendre ensuite.
Désœuvré, le jeune Théo s'installe après l'attentat chez les Barbour, son père restant introuvable et ses grands parents répondant aux abonnés absents. Il se décide à se rendre à l'adresse indiquée par le vieil homme et rencontre alors un antiquaire qui bouleversera sa vie. Par la suite son destin suivra des méandres : des revers de Las Vegas au monde des antiquaires de New-York en passant par Amsterdam, il apprend "l'art de bien jouer avec une mauvaise donne" comme lui a appris son père, l'illusion devenant son credo.
Ce roman de plus de 800 pages est foisonnant, entrainant son lecteur sur des chemins divers : derrière le roman d'apprentissage, se cache toute une réflexion sur le bien, le mal et sur le monde de l'art. "Le bien ne peut-il pas pénétrer parfois par de drôles de portes dérobées ?" Où le mèneront les routes tortueuses embrumées par les drogues empruntées par Théo ? Incidemment, on se surprend à s'attacher à ce jeune homme et à ses pas dans le monde de l'art, incidemment, on se surprend à avancer avec plaisir dans les 800 pages, et la dernière page refermée, incidemment, on regrette presque d'avoir fini l'histoire trop tôt, d'autant plus que la conclusion, très proustienne, éclaire le roman d'un nouvel aura. On comprend alors que seul l'art est immortel, et que tout le sens de la vie tient peut-être finalement dans l'amour des belles choses et dans le rôle que chacun peut jouer pour préserver et faire perdurer ces joyaux.
Et un roman qui offre un sens à la vie n'est pas à négliger !
Sven est instructeur de plongée sous-marine sur l'île de Lanzarote, il a quitté l'Allemagne pour échapper à tout type de jugement et vivre libre. Arrivent sur l'île Jola et Theo, couple berlinois très glamour, l'une actrice, l'autre écrivain, que doit accompagner Sven pendant quelques semaines, aussi bien durant leur plongée que dans leurs sorties. Mais leur couple au fonctionnement particulier risque de faire basculer l'univers si calme de Sven. Se prendra-t-il dans les rets de la belle Jola ? Qui dit la vérité entre Sven qui raconte froidement les évènements, ou Jola qui se confie à son journal intime ? Quel est le rôle de Théo ? Qui manipule qui ?
Le suspens grandit au fil des pages et de la relation de ce trio amoureux. Les êtres évoluent entre perversité, narcissisme, vengeance, passion, et les cartes se brouillent, laissant des êtres démunis devant la puissance de certains sentiments.
Mes réticences :
- Il s'agit d'un roman très psychologique jouant avec la perversité des êtres et les complications nées des entrelacs de l'âme humaine torturée, la plongée peut être glauque et oppressante...
- Il me semble dommage d'avoir laissé de côté le personnage de Antje, la compagne de Sven, qui aurait peut-être pu apporter un peu d'équilibre et de lumière dans ces relations néfastes...
Bilan :
Un roman parfaitement maîtrisé mais un plongée en apnée glaçante !
En 1672, Mary Rowlandson vit harmonieusement au coeur d'une communauté de puritains venus d'Angleterre pour s'installer dans la baie du Massachusetts. Mais les conflits entre colons et indiens inquiètent la région, et la communauté connait une attaque violente, alors que les hommes sont partis demander de l'aide. Mary est alors capturée par les Indiens, séparée de ses enfants et mise au service d'une femme puissante de la tribu. En tant qu'esclave, elle doit obéir sans rien dire, car à tout instant, elle risque la mort. Mary s'adapte peu à peu à ces nouvelles règles et découvre un monde plus libre que celui auquel elle est habituée en tant que femme.
Mary a réellement existé, capturée en 1875 et gardée en captivité 11 semaines, elle a par la suite écrit le premier témoignage de captivité The Sovereignty and Goodness of God: Being a Narrative of the Captivity and Restoration of Mrs. Mary Rowlandson, dans lequel elle raconte ses épreuves. L'auteure a ici brodé autour de cette histoire, pour mettre l'accent sur la condition des femmes et renverser les échelles de valeur. Aucun des camps n'est plus moral finalement que l'autre, chacun étant capable du pire comme du meilleur.
J'ai trouvé en ce récit les mêmes qualités que dans le célèbre 1001 femmes blanches de Jim Fergus : une aventure passionnante qui permet de réfléchir sur la notion d'altérité et de communauté.
"Il songea aussi que le tissu social craquait de toutes parts, que les lignes de faille se multipliaient. Ce pays était en train d'imploser. (...) Aujourd'hui, tout le monde semblait se chercher des ennemis."
Alors que Martin Servaz doit passer en conseil de discipline, il reçoit un appel de Marianne, son ex femme mystérieusement disparue. En traçant l'appel, il se retrouve au cœur de la forêt pyrénéenne, proche de l'abbaye mystérieuse d'Aiguesvives. Il demande l'aide de Irène Ziegler, mais a beau arpenter les sentiers, Marianne reste introuvable. Mais Servaz se retrouve rapidement bloqué avec les autres habitants, la route principale ayant été saccagée.
Ce que j'ai aimé :
- Le point fort tient dans l'atmosphère de cette vallée, comme hors du monde, ce qu'accentue la coupure volontaire de la route. La vie monastique est comme le symbole de cette vie préservée, que peut pourtant atteindre à tous moments le monde extérieur et sa violence.
- Quelques questionnements intéressants, sur Dieu, sur la mort, sur la vie sociale, qui, sans révolutionner la vie, offrent quelques pistes de réflexion.
"Carl Rogers a dit que la majorité d'entre nous ne sait pas écouter. Selon lui, nous nous sentons obligés de juger, parce qu'il est trop risqué d'écouter. Il a proposé une méthode pour ceux qui s'affrontent verbalement et qui ont des désaccords irréconciliables : "Interrompez la discussion et établissez la règle suivante : chacun ne peut prendre la parole qu’après avoir reformulé correctement l'idée et les sentiments des son interlocuteur, et lorsque ce dernier estime que cette reformulation correspond à ce qu'il a voulu dire."
- L'intrigue et les multiples rebondissements tiennent en haleine le lecteur qui ne peut plus lâcher le roman !
Ce que j'ai moins aimé :
- Les allusions incessantes aux tomes précédents, ce qui me fait dire à nouveau qu'il vaut mieux lire ces policiers dans l'ordre que voici :
- L'aspect assez noir, qui m'a fait faire des cauchemars par la suite : un conseil ne le lisez pas le soir...
- Quelques clichés, comme les risques des réseaux sociaux, la police face à la population en colère, les personnages qui ne sont pas ce qu'ils paraissent...
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Le roman décrit la Première Guerre mondiale vue par un jeune soldat volontaire allemand sur le front ouest. Symbole du pacifisme allemand, le roman devient rapidement un succès de librairie, brûlé lors des autodafés nazis de 1933.
Le jeune Bäumer se laisse convaincre avec ses camarades par leur professeur Kantorek de s'engager volontairement dans l'armée impériale allemande. Leurs idéaux sont bien mis à mal face à la réalité de la guerre, face aux chefs abusifs, à la violence des combats. Irrémédiablement les jeunes hommes innocents changent :
« Nous ne faisons plus partie de la jeunesse. Nous ne voulons plus prendre d’assaut l’univers. Nous sommes des fuyards. Nous avions dix-huit ans et nous commencions à aimer le monde et l’existence ; voilà qu’il nous a fallu faire feu là-dessus. Le premier obus qui est tombé nous a frappés au cœur. Nous n’avons plus aucun goût pour l’effort, l’activité et le progrès. Nous n’y croyons plus ; nous ne croyons qu’à la guerre. »
« Nous sommes délaissés comme des enfants et expérimentés comme des vieilles gens ; nous sommes grossiers, tristes et superficiels : je crois que nous sommes perdus. «p 96
Heureusement, la camaraderie, l'entraide permet de supporter l’innommable comme ce jour où ils partagent une oie. Lors des permissions, ils essaie de retrouver leur univers fixe, un soupçon de normalité. Mais désormais celle-ci leur est refusée.
« Pour moi les gens parlent trop. Ils ont des soucis, des buts, des désirs, que je ne puis concevoir comme eux. Parfois, je suis là assis avec l’un d’eux dans le petit jardin du café et j’essaie de lui expliquer que l’essentiel, en somme, c’est de pouvoir être là assis tranquillement. » p 130
Le narrateur prend alors conscience qu’il ne retrouvera pas sa place, son insouciance :
« Ce que je désire, c’est que la chambre me parle, m’enveloppe et me prenne. Je veux sentir mon intimité avec ce lieu, je veux écouter sa voix, afin que, quand je retournerai au front, je sache ceci : la guerre s’efface et disparait lorsque arrive le moment du retour ; elle est finie, elle ne nous ronge plus, elle n’a sur nous d’autre puissance que celle du dehors. «p133
Ce témoignage puissant met en avant des destinées humaines marquantes, rappelant qu'un soldat est un homme avant d'être allemand ou français, un homme impuissant face à l'absurdité de la guerre et à sa logique implacable, un homme broyé par une mécanique violente.
Dans cette BD pleine de tendresse, vous rencontrerez L'ours Tulipe, qui observe son petit monde d'un oeil philosophique : il tente de calmer les angoisses de Crocus, le serpent anxieux, il calme les ardeurs de l'oiseau Violette, amoureux transi du soleil, il rassure le caillou, désespéré de n'être que lui-même. Ces personnages aux failles touchantes oscillent entre philosophie et absurde, et brossent finalement un portrait très juste de l'âme humaine... Chacun essaie de donner un sens à sa vie, que ce soit par le voyage, par la création, ou en courant à droite à gauche pour combler le vide, mais bien souvent, ils se heurtent au silence du monde...
Un vrai coup de cœur pour débuter cette année ! J'ai hâte de lire les tomes suivants !
Elles sont trois femmes, à qui on apprend à être patientes, malgré les violences morales et subies au sein de leur mariage. Ramla est contrainte de se marier à un homme qu'elle ne connait pas, alors qu'elle devait épouser son aimé, Hindou sa jeune sœur est quant à elle contrainte d'épouser son cousin, alcoolique, drogué, et Safira doit accepter qu'une co-épouse bouleverse son couple et ses habitudes. Impossible d'aller à l'encontre des vœux de leurs famille, impossible de s’abstraire des traditions, elles doivent être patientes et subir sans mot dire une vie qu'elles n'ont pas choisie, une vie violente, physiquement ou moralement.
Mariage forcé, polygamie, viol conjugal, la condition féminine au Sahel est glaçante :
"Il est difficile, le chemin de vie des femmes, ma fille. Ils sont brefs, les moments d'insouciance. Nous n'avons pas de jeunesse. Nous ne connaissons que très peu de joies. Nous ne trouvons le bonheur que là où nous le cultivons. A toi de trouver une solution pour rendre ta vie supportable. Mieux encore, pour rendre ta vie acceptable. c'est ce que j'ai fait, moi , durant toutes ces années. j'ai piétiné mes rêves pour mieux embrasser mes devoirs."
Djaïli Amadou Amal, née en 1975 dans l’extrême-Nord du Cameroun, mariée à dix-sept ans, a connu tout ce qui rend si difficile la vie des femmes du Sahel. Devenue écrivaine, Amal s’est affirmée en militante féministe à la tête de l’association « Femmes du Sahel » devenant ainsi « la voix des sans voix ». Avec ses personnages, elle incarne ces femmes subissant une souffrance inhumaine qui ne peut que révolter.
Ce roman se déploie dans un style simple, auquel on peut reprocher la sécheresse quelquefois, mais qui a l'avantage d'être percutant.
Un témoignage poignant !
Prix Goncourt des Lycéens 2020 Prix Orange du livre en Afrique 2019 Prix de la meilleure auteure africaine 2019 Finaliste du prix Goncourt 2020