Malcom est libraire spécialisé dans les romans policiers. c'est à ce titre que l'agente Gwen appartenant au FBI lui rend visite : en effet Malcom a publié il y a quelques années une liste des huit crimes parfaits de la littérature, et il semblerait qu'un tueur s'amuse à les reproduire. Gwen sollicite donc Malcom pour l'éclairer sur ces meurtres non élucidés.
Bien conçu, avec de multiples rebondissements, le roman connait aussi des temps morts, il s'étire langoureusement comme le chat de l'histoire. Il manque un poil de densité pour faire totalement ronronner le lecteur, même si l'atmosphère reste relativement douillette.
"Allons ! Je sais que je serai prise un jour. Mais j'aurai servi. dépêchons-nous de faire de grandes choses pendant qu'il est encore temps."
En 1947, Charlie, jeune femme de 19 ans, souhaite retrouver sa cousine Rose disparue en France durant la seconde guerre mondiale. Alors qu'elle transite par la France avec sa mère en vue d'un voyage imposé par ses parents, elle en profite pour prendre la tangente et partir sur ses traces. Cela la mène à la porte de Evelyn Gardiner, recluse et sombrant dans l'alcool.
Parallèlement nous découvrons donc l'histoire de Eve, espionne durant la première guerre mondiale, ayant intégré le plus grand réseau d'espionnes de la première guerre, le réseau Alice. Aux côtés de Lili, ces femmes bravent leur peur (la peur est un luxe disent-elles) pour tenter de sauver le pays, ceci au risque de leur vie.
Contre toute attente, Eve accepte de se replonger dans le passé pour aider Charlie et épaulées par le chauffeur de Eve, elles vont sonder les profondeurs de l'histoire et de l'âme humaine.
"Nous chassions tous les trois des souvenirs douloureux parmi les décombres des deux guerres. Et aucun de nous ne semblait les avoir surmontés."
Leur quête les mènera sur les traces de René, collaborateur sans scrupules et jusque Oradour sur Glane, au cœur de l'horreur.
Alliant savamment mystère et romance, ce roman prenant met en avant la force des femmes capables de braver les obstacles pour défendre leurs valeurs. Le réseau Alice et un roman historique puisque ce réseau a réellement existé, mené par la remarquable Louise de Bettignies, baptisée "La reine des espionnes". L'autrice nous raconte dans le postambule la véritable histoire passionnante de ces êtres qui se sont surpassés, faisant ainsi la part du vrai et du faux dans son roman.
Au lycée de Nottawa, un nouveau réseau social apparait leur proposant, sous couvert d'anonymat, de répondre à leurs besoins, mais en échange, des missions leur sont assignées. Le réseau rencontre du succès, en moins d'une semaine, tous les élèves de Nottawa y sont inscrits. Kaylee elle-même, pourtant réticente au début s'inscrit dans l'espoir de sauver son frère qui doit subir une greffe. Mais les élèves commencent à s'affoler quand une mort suspecte a lieu, chacun se demande alors jusqu'où il est prêt à aller pour obtenir ce qu'il veut.
Le suspens est haletant dans ce roman jeune adulte qui s'intéresse aux réseaux sociaux et à leur impact, les chapitres courts s'enchainent, alternant les points de vue.
Il est à noter que Need a obtenu le Prix des Incorruptibles 3e-2nde en 2019
Dans Sido Colette peint le portrait de sa mère, Sidonie, elle chante son amour pour cette femme qui s'émerveille de tout, détachée des contraintes humaines, et inculquant à ses enfants cet amour de la nature et de la liberté.
"Je célèbre la clarté originelle qui, en elle, refoulait, éteignait souvent les petites lumières péniblement allumées au contact de ce qu’elle nommait "le commun des mortels.""
Colette évoque aussi avec nostalgie les autres membres de sa famille, son père qu'elle aurait aimé mieux connaître, ses deux frères et sa sœur Juliette.
Si ce récit autour de l'enfance est émouvant, permettant de mieux comprendre l'autrice, Les vrilles de la vigne, série de courts textes reprenant les thèmes chers à Colette, est un bijou de littérature.
A côté de sujets légers comme son amour des chats, elle évoque aussi son mariage, les infidélités de son mari puis sa nouvelle vie libérée, les moments joyeux passés au music-hall, sa maîtresse, et son amour inconditionnel pour la vie et ses merveilles :
« Quoi ?… ma vie aussi est inutile ? Non, Toby-Chien. Moi, j’aime. J’aime tant tout ce que j’aime ! Si tu savais comme j’embellis tout ce que j’aime, et quel plaisir je me donne en aimant ! Si tu pouvais comprendre de quelle force et de quelle défaillance m’emplit ce que j’aime !… C’est cela que je nomme le frôlement du bonheur. Le frôlement du bonheur… caresse impalpable qui creuse le long de mon dos un sillon velouté, comme le bout d’une aile creuse l’onde… Frisson mystérieux prêt à se fondre en larmes, angoisse légère que je cherche et qui m’atteint devant un cher paysage argenté de brouillard, devant un ciel où fleurit l’aube, sous le bois où l’automne souffle une haleine mûre et musquée… Tristesse voluptueuse des fins de jour, bondissement sans cause d’un cœur plus mobile que celui du chevreuil, tu es le frôlement même du bonheur, toi qui gis au sein des heures les plus pleines… et jusqu’au fond du regard de ma sûre amie… »
« Une journée douce de printemps, ou bien un matin mouillé d’automne, peut-être une nuit de lune, vous sentirez en votre cœur une chose inexprimable et vivante s’étirer voluptueusement, – une couleuvre heureuse qui se fait longue, longue, – une chenille de velours déroulée, – un desserrement, une déchirure soyeuse et bienfaisante comme celle de l’iris qui éclôt… Sans savoir pourquoi, à cette minute, vous nouerez vos mains derrière votre tête, avec un inexplicable sourire… Vous découvrirez, avec une naïveté reconquise, que la lumière est rose à travers la dentelle des rideaux, et doux le tapis aux pieds nus, – que l’odeur des fleurs et celle des fruits mûrs exaltent au lieu d’accabler… Vous goûterez un craintif bonheur, pur de toute convoitise, délicat, un peu honteux, égoïste et soigneux de lui-même… »
Elle chante la vie avec lyrisme et humour, transfigurant la réalité et célébrant le monde de l'enfance, le monde du vivant dans toutes ses acceptions, et pour finir la vie elle-même, l'amour, le plaisir, la liberté et l'intensité des moments vécus.
J'avais découvert ce texte à vingt ans et quelques années après (si peu...) le plaisir reste intact, la fulgurance des émotions résonnant comme une évidence.
En Sardaigne, depuis plusieurs décennies, des meurtres rituels ont lieu : le corps de jeunes filles est retrouvé sur les lieux de culte ancestraux. L'inspecteur Moreno Barrali, inspecteur en chef de la police d'état a passé presque toute sa carrière à enquêter sur ces meurtres, à tel point qu'ils sont devenus comme une obsession pour lui. Alors que la maladie commence à l'handicaper, il demande à deux inspectrices Mara Rais et Eva Croce de poursuivre ses enquêtes. Les deux jeunes femmes ont été mutées au département des "crimes non élucidés" de la police de Cagliari, en signe de punition pour des comportements inadéquats. Quand une nouvelle jeune femme disparait, et est retrouvée morte, cette équipe très spéciale va être confrontée aux pires atrocités.
Ce que j'ai aimé :
Cette première enquête de Maras Rais et Eva Croce nous plonge dans une atmosphère mystérieuse, presque mystique. Le roman très documenté entremêle savamment archéologie, anthropologie et civilisation nuragique.
Le suspens est haletant, glaçant. L'histoire personnelle des deux protagonistes est tout aussi noire, elle se dévoile peu à peu au lecteur avide d'en savoir plus sur ces personnages au caractère bien trempé.
"Celui qui ne sait pas sauver son prochain se perd lui même."
Sur un îlot perdu en Méditerranée, les habitants vivent serrés entre eux, soudés, comme un seul homme. Sur le continent, une dictature fait rage. Quand Benjamin arrive et trouve refuge chez eux, ils ne posent pas de questions inutiles, comme ils n'aiment pas qu'on leur en pose, ils ont foi en l'homme et en son humanité. Ils ont leur propre monde, peuplé de créatures marines fantastiques et ont en eux des valeurs et des idées fortes, n'hésitant pas à dire "non" quand cela s'impose. Ils font front et acceptent Benjamin dans leur univers, observant avec bienveillance son histoire d'amour naissante.
A travers le portrait de ces iliens hors du commun, l'auteur célèbre l'entraide et la tolérance qui devraient gouverner tous les comportements humains.
Sur le modèle de l’Histoire naturelle de Buffon, Audubon, pour accompagner la réédition de ses superbes planches ornithologiques, rédigea des « Vies d’oiseaux » (Bird Biographies). Non seulement il donne le poids, l'envergure, les dimensions de l'oiseau et de son oeuf, il décrit les stades successifs de son développement mais peint aussi l'oiseau en mouvement, vivant dans son élément et ainsi nous transporte au bord des lacs, des fleuves. Avec un enthousiasme communicatif, il évoque sa fascination pour ces volatiles amis, comme ici avec l'oiseau mouche à gorge de rubis :
"Que ne puis-je, cher lecteur, vous faire partager les transports que j'ai éprouvés moi-même en épiant leurs évolutions que l’œil suit à peine, en contemplant leurs tendres manifestations" p81
Il nous donne à voir et à entendre des hirondelles qui jaillissent d'un arbre, la mélodie d'une grive rousse qui défend son nid, une oie du canada qui fait la cour, la marche du grand héron bleu, l'éclosion d’œufs de pewees, et nous communique son admiration pour la finesse de l'odorat chez le vautour. A ses côtés, nous suivons les vols et nous laissons gagner par le lyrisme de ses journées :
Audubon a ainsi fourni un important travail de mémoire, d'autant plus essentiel que sur les 500 espèces et sous espèces qu'il a figurées et décrites, sept sont éteintes, et une vingtaine sont en voie d'extinction avancée. Il pressentait cette évolution, reliant leur disparition à l'altération de leur habitat.
Ce que j'ai moins aimé :
L'homme était d'abord un artiste et ce sont ses planches à qui il doit sa renommée, j'aurais apprécié avoir les représentations de ces oiseaux...
Série 29 Feuillet 33, Cardinaux rouges. (Muséum d’histoire naturelle de La Rochelle / Collection Société des Sciences Naturelles de la Charente-Maritime / L3i)
En 1861 en Géorgie. Scarlett O’Hara a seize ans. Nantie de plusieurs prétendants, elle n'a que l'embarras du choix en tant que riche héritière de Tara, l'exploitation de coton de sa famille. Secrètement amoureuse de Aschley Wilkes, son orgueil est touché quand elle apprend qu'il épouse en réalité sa cousine Mélanie. Le même jour elle rencontre Rhett Butler, à la réputation sulfureuse, et celui-ci découvre son secret. Dépitée, Scarlett se réfugie à Atlanta. Mais la guerre de Sécession met le pays à feu et à sang, opposant le Nord abolitionniste et le Sud ségrégationniste.
Le deuxième tome s'ouvre sur l'année 1866. Scarlett est retournée à Tara, bien décidée à tout faire pour sauver l'exploitation et subvenir aux besoins de ses proches. Ses choix s'avèreront litigieux dans ce contexte, sa morale se rapprochant dangereusement de celle de Rhett Butler. Mais chacun doit s'adapter à un monde finissant pour espérer survivre.
Scarlett personnage fier, imbue d'elle-même, subit la violence de cette guerre de plein fouet, elle connait la faim et la pauvreté, et cette expérience la marquera profondément, si bien que elle n'aura de cesse de trouver une sécurité financière par la suite. Après avoir vu le pire, elle n'a plus peur de rien, sauf de la faim. Elle affronte la réalité avec ses armes séductrices et se bat comme un lion pour garder son train de vie dispendieux, quitte à laisser sa morale de côté, écoutant ainsi le conseil de Rhett : "Il y a autant à tirer du naufrage d'une civilisation que de son édification." Il faudra attendre la fin du roman pour qu'elle tire des leçons de ses erreurs et comprenne l'importance des sentiments. Elle est détestable parce qu'égoïste, mais admirable parce que combattante.
Certes, aujourd'hui le livre fait polémique puisqu'il fait l'apologie de l'esclavage, les noirs esclaves étant présentés comme heureux tandis que les esclaves libres apparaissant comme des êtres sanguinaires symbole du passé colonialiste, mais il ne faut pas oublier que ce roman est avant tout le reflet d'une époque et la trajectoire d'une héroïne hors du commun. Couronné par le prix Pulitzer, immortalisé à l’écran avec les inoubliables Vivien Leigh et Clark Gable, Autant en emporte le vent est unbest-seller, fresque intemporelle sur l’amour et la guerre, peuplée de personnages marquants, elle mérite grandement son succès.
En 1931, Lilly a neuf ans et n'est jamais sortie de sa chambre, enfermée par ses parents qui prétendent la protéger du regard extérieur, puisque leur fille est atteinte d'une difformité. Un beau jour, sa mère la vend à un cirque.
En 1956, Julia a fui sa famille, mais quand sa mère meurt, elle se retrouve héritière d'un vaste domaine avec des chevaux. Elle retourne alors chez elle, et découvre des secrets enfouis dans les coulisses de la maison...
Ce que j'ai aimé :
- Le suspens : quel lien unit les deux jeunes femmes ?
- La vie de Lilly nous permet de découvrir les coulisses de la vie du cirque
Ce que j'ai moins aimé :
- Des scènes de violence aussi bien contre les animaux que contre les humains. Heureusement, la narration de Julia apporte un peu de légèreté par rapport à celle de Lilly. Bilan :
Une lecture plaisante qui profite du ressort toujours efficace du secret de famille.
En 1830, la famille Coombe est installée à Plyn, un port de la côte sud des Cornouailles et Janet se sent irrémédiablement attirée par la mer, marquant ainsi plusieurs générations : tout comme elle, son fils Joseph ressentira cet appel et ses enfants après lui. Janet, Joseph, Christopher et Jennifer sont"tous unis par un étrange et même amour, par un même esprit d'inquiétude et de souffrance, par une semblable intolérable passion pour la beauté et l'indépendance."
L'amour dans l'âme est le premier roman de Daphné Du Maurier publié en 1950 sous le titre La chaîne d'amour. Cette saga familiale s'étend sur cent ans : de 1830 à 1930, quatre générations se succèdent permettant de présenter une vaste fresque des passions humaines. Les sentiments forts s'affrontent, entre amour et incompréhension, le destin des personnages est souvent marqué par le passé, par cette chaîne sans fin se perpétuant au fil des générations. Mais chacun se bat pour asseoir sa place et tenter de trouver un semblant de bonheur dans cette histoire familiale tourmentée.
"Elle conçut l'horreur que l'on doit éprouver à grandir, l'horreur de ne plus rire des choses vraiment drôles, de ne plus courir à perdre haleine, de marcher tristement au lieu de battre les arbres au passage avec une baguette. Elle pensa qu'un jour elle ne trouverait plus délicieux de donner des coups de pied dans les feuilles que l'automne rassemble dans les caniveaux, de construire des campements avec des chaises, de faire des dînettes de brindilles d'herbes ou d'effeuiller les marguerites. Plus de promenades les mains dans les poches, en sifflotant une chanson et en cherchant l'aventure au coin de la rue. " p 410