Londres, janvier 1901 : Lavinia et Maude font connaissance en ce jour mémorable de la mort de la reine Victoria. Leurs familles se rendent en effet au cimetière ce jour-là, pour honorer la reine, et comme leurs tombeaux familial sont voisins, les deux familles Waterhouse et Coleman se rencontrent. Si l'amitié est immédiate entre les deux petites filles, ce n'est guère le cas entre leurs mères respectives, Gertrude Waterhouse incarnant la tradition, et Kitty Coleman aspirant à un vent de liberté. En effet, Kitty peine à trouver sa place dans ce monde, et ce n'est que quand elle découvre la cause des suffragettes qu'elle s'éveille enfin et trouve une raison de vivre. Maude et Lavini observent leur petit monde, copiant, ou s'affranchissant de ces mères modèles.
Ce que j'ai moins aimé : Le fait de choisir la forme du roman choral rompt la linéarité du récit, chaque personnage ayant ses propres préoccupations. De plus, beaucoup de pathos inutile noie la cause des suffragettes dans les pleurs...
Bilan : Lisez plutôt La dame à la licorne, La dernière fugitive ou son incontournable La jeune fille à la perle !
Adèle, 18 ans est sur le point d'accoucher. En ce jour particulier, elle est seule, le père de son enfant étant en prison, si bien que Adèle envisage de donner son enfant pour qu'il soit adopté. Elle souhaite le meilleur pour son enfant et essaie de se persuader que commencer sa vie dans un environnement dégradé auprès d'une mère adolescente n'est pas l'idéal... Parallèlement, Dora rêve de devenir mère, mais le destin s'acharne contre elle à tel point que son couple commence à en souffrir.
Alors que nous sommes à l'orée de deux nouvelles vies pour ces deux femmes, le récit revient sur leur parcours pour mieux comprendre cette heure délicate des choix essentiels pouvant déterminer la trajectoire de toute une vie. Que signifie être parents et donner la vie dans un monde tourmenté ? La question de la responsabilité et de la culpabilité des parents est au coeur du roman, sous l'égide de Dostoïevski...
"Quand tu mets quelqu'un au monde, tu dois l'aimer. Le regarder dans les yeux et lui dire : Tu es en sécurité. Sinon, tu lui donnes la vie mais tu ne lui permets pas de naitre. Tu le tues."
Adèle, Dora, Fabio souffrent mais malgré tout, quelques moments fulgurants les sauvent, au milieu du chaos : une journée à la mer, un restaurant entre mère et filles, un voyage, des instants fugaces qui justifient les aléas et permettent de tenir debout, envers et contre tout. Peuvent-ils prétendre à une vie parfaite ? Non. Seulement à une vie fragile mais éclairée ça et là par de petits miracles qui, de secondes magiques en minutes merveilleuses, créent une certaine forme de perfection...
La vie parfaite, Silvia AVALLONE, Liana Levi, traduit de l'italien par Françoise Brun. «Littérature étrangère» Date de parution : 05-04-2018 14 x 21 cm - 400 pages, 22 euros
La Cérémonie de remise des Prix SNCF du Polar s’est tenue lundi soir à la Maison de la Radio en présence d’auteurs, dessinateurs, réalisateurs et professionnels de la Culture.
Le prix dans la catégorie ROMAN a été attribué à Víctor del Árbol pour son livre Toutes les vagues de l’océan aux Éditions Actes Sud, collection Babel Noir.
Dans cette comédie déjantée, nous faisons la connaissance Lord Emsworth et sa truie de concours qui se complait dans sa solitude et ses habitudes au coeur du château de Blandings, avec son majordome pour tout compagnon. De fait il voit d'un mauvais oeil l'arrivée de sa soeur Connie, élément dévastateur capable de terrasser "Attila le Hun et n’importe quel champion de catch poids lourd". Affolé par tant d'agitation en puissance, il demande alors l'assistance de Galahad, son frère. S'ajoutent à la joyeuse communauté le duc de Dunstable et sa nièce Miss Gilpin qui vient de rompre avec son fiancé John Halliday, qui n'est autre que le filleul de Galahad. (Vous suivez ?) Pour aider le jeune Halliday à reconquérir sa "poupée", Galahad l'invite au château en le faisant passer pour un psychanalyste venu guérir Lord Emsworth de ses errances.
Entre les personnes qui se font assommer par des dindes, d'autres qui suivent les préceptes de Thomas Hardy "On ne savait jamais, lui aurait-il dit, à quel tournant le Destin nous attend avec sa chaussette pleine de sable.", les membres sélects du Pelican Club : "Sous la douce férule duquel j'ai appris à rester calme, à garder le sourire et à toujours penser un rien plus vite que l'homme d'en face.", des hommes fascinés par des tableaux de femmes, on comprend rapidement que les plus fous ne sont pas ceux que l'on croit, et que chacun porte en lui ses tares derrière les convenances...
Cette galerie de personnages décalés crée un roman très divertissant, drôle et enjoué, délicieusement absurde. A découvrir !!
"C'est la guerre qui gagne. Et elle continue à gagner, encore et toujours."
Novembre 1920. Le Soldat Inconnu doit être rapatrié depuis la France en Angleterre. Les préparatifs s'accélèrent pour accueillir comme il se doit cet hommage aux hommes disparus brusquement durant la guerre.
A Londres, trois femmes restent marquées par cette guerre meurtrière : le fiancé d'Evelyn a été tué et elle cotoie chaque jour des anciens soldats puisqu'elle travaille au bureau des pensions de l'armée, Ada espère toujours voir son fils revenir alors qu'il est tombé au front, Hettie accompagne chaque soir d'anciens soldats sur la piste du Hammer-Smith Palais pour six pence la danse. Le frère de Hettie est revenu de la guerre profondément marqué ; les destins de ces trois femmes s'entrecroisent au seuil de cette journée qui se prépare.
La guerre a laissé son lot de séquelles dans les âmes de ces hommes et de ces femmes. Si les hommes restent bien souvent ancrés dans leurs traumatismes, les femmes tentent de libérer la parole pour surmonter les douleurs.
"Je vois tellement de femmes, ici, qui s'accrochent, toutes. Qui s'accrochent à leur fils, à leur amant, à leur mari ou à leur père, tout aussi solidement qu'elles s'accrochent aux photos qu'elles conservent ou aux fragments d'enfance qu'elles apportent avec elles et déposent sur cette table." Elle désigne le plateau d'une main. "Elles sont toutes différentes, et pourtant toutes pareilles. Toutes redoutent de les laisser partir. Et si on se sent coupable, c'est encore plus dur de relâcher les morts. On les garde près de nous, on les surveille jalousement. Ils étaient à nous. On veut qu'ils le restent." Il y a un silence. "Mais ils ne sont pas à nous, poursuit-elle. Et dans un sens, ils ne l'ont jamais été. Ils n'appartiennent qu'à eux-mêmes, et seulement à eux. Tout comme nous nous appartenons. Et c'est terrible par certains côtés, et par d'autres... ça pourrait nous libérer."
Les femmes sont sur le devant de la scène dans ce roman, s'affranchissant peu à peu des carcans masculins. La danse constitue pour certaines un nouvel espace de liberté qui permet d'exorciser les démons effrayants de l'époque. Anna Hope a su créer des portraits de femmes profondément attachants qui chantent avec talent la vie plus forte que la mort...
Becky, Harry et Leon sont jeunes et errent désoeuvrés, perdus dans un monde qui des dépasse, tentant tant bien que mal de s'adapter, mais restant aussi en marge d'une société qu'ils ne reconnaissent pas. La ville de Londres semblent vouloir désespérément les rejeter, les laisser en périphérie, et ils sont comme condamnés à suivre des chemin de traverse, par le biais de la drogue notamment...
"Becky danse avec Charlotte et Gloria. Au sous-sol Pete examine la poudre jaune que Neville vient de confisquer à un gosse. Leon s'envoie en l'air avec une fille appelée Delilah. Harry boit sa bière sur son muret. Chacun cherche une étincelle qui donnera du sens à sa vie. cette miette de perfection fuyante qui fera peut-être battre leur coeur plus fort."
Ils avancent malgré tout en préservant en eux le souffle vital, l'envie, la passion qui les porte et les emporte loin, comme dans cette scène inaugurale durant laquelle ils fuient ensemble dans une voiture.
Un roman assez sombre entremêlant le sexe, la drogue - et très peu le rock'n'roll - qui inaugure l'entrée en littérature de Kate Tempest, rappeuse, poétesse et dramaturge anglaise qui signe ici son premier roman.
Ce que j'ai moins aimé : J'avoue m'être ennuyée, je n'ai pas réussi à m'attacher aux personnages, et l'intrigue est tellement ténue, proche du réel, proposant le portrait de plusieurs personnages qui défilent devant nos yeux et finissent par lasser.
Je reconnais l'éclat du style, la clairvoyance dans la psychologie de cette génération perdue, mais il m'a manqué un souffle romanesque.
Depuis plusieurs années, je participe à des jurys littéraires, et je voulais revenir sur ces belles expériences et vous donner mes préférences :
Le Grand Prix des lectrices de Elle en 2005 :
Les plus :
- des pré-sélections intéressantes, nous recevons en moyenne trois livres par mois : un roman, un policier et un document
- une soirée fastueuse
Les moins :
Le fait que les genres soient mélangés, j'avoue ne pas être très réceptive aux documentaires, comme certains lecteurs peuvent ne pas être réceptifs aux romans policiers...
Voici les articles qui concernaient ce prix : ICI et ICI
Prix des lecteurs de l'Express 2011 :
Je n'en garde pas beaucoup de souvenirs sauf le fait que j'ai découvert le merveilleux D'acierà cette occasion !
L'année suivante, Yves m'avait invité à l'accompagner à la soirée de remise et j'avais pu rencontrer le charmant David Vann qui écrit des romans aussi glaçants que Sukkwann island !
Prix du polar SNCF:
Je participais au tout début, et j'avais aimé car il y avait aussi cette volonté de découvrir des titres. Je me rappelle de réunions assez régulières au sein de la SNCF pour discuter de nos découvertes. Le seul bémol à l'époque était que je devais me procurer les romans moi-même, entre achats et bibliothèque.
J'ai raccroché aux wagons (ahah) du prix seulement l'an dernier et le fonctionnement avait changé : les titres étaient pré-sélectionnés, mais les catégories BD et courts métrages ont fait leur apparition.
Heureuse surprise, cette année les titres sont disponibles en format numérique librement. Par contre côté lectures, je ne m'y reconnais pas, peu de coups de coeur sauf le magnifique 911 !
A noter que la remise du prix aura lieu lundi prochain. Mes billets : ICI pour 2018 et ICI pour 2017
Prix des lecteurs de Pointsen 2018 :
J'ai été globalement déçue par la pré-selection. La soirée n'a pas eu lieu, je vous en reparlerai !
Grand prix des blogueurs Littéraires 2018:
Une sélection en accord avec mes choix (Bakhita forever) mais le prix consiste à émettre juste un vote, il y eut peu d'échanges en amont. Néanmoins la soirée était très réussie...
Le prix Goncourt des lycéens, même si je ne fais pas partie du jury - j'ai un peu passé l'âge du lycée (si peu...) - mais j'ai accompagné deux fois les lycéens, grâce à la Fnac
Les plus :
-Une sélection très large puisqu'elle reprend les titres sélectionnés pour le Goncourt
- De vraies rencontres avec les écrivains sélectionnés
- Un jury volontaire et enthousiaste
- Des choix en adéquation avec mes propres goûts (Petit Pays et L'art de perdre ces deux dernières années)
- de nombreuses réunions avec le jury pour débattre
- Des lauréats qui me plaisent (c'est à cette occasion que j'ai découvert le merveilleux David Thomas)
- Des maisons d'édition variées
- Des rencontres marquantes : Erik Orsenna, Yves, Sophie Adriansen, Aurélie, Dominique, et d'autres encore !
Globalement ce furent de belles expériences, qui m'ont permis de lire des romans vers lesquels je ne serais pas allée de moi-même, et qui m'ont fait rencontré des lecteurs passionnés et passionnants !
Je vous encourage à tenter vous aussi votre chance pour un de ces jurys !
Philip Swallow et Morris Zapp bénéficient d'une permutation de leur poste de professeur pour six mois : Philip part pour l'université d'Euphoria aux Etats-Unis, et Morris pour Rummidge en Angleterre. Philip, homme assez timide laisse derrière lui femmes et enfants avec un certain soulagement, tandis que Morris a été plus ou moins contraint de partir, sa femme souhaitant prendre l'air en vue de demander le divorce.
A Euphoria, les révoltes étudiantes grondent, et la libération sexuelle s'annonce également à grand pas... Ce changement de décor s'avèrera finalement bénéfique pour les deux hommes... David Lodge en profite pour fustiger le microcosme universitaire, érafle le mariage au passage, et nous offre finalement une comédie de moeurs assez drôle !
"Cet après-midi, assis chez Pierre sur Cable Street, il comprenait pour la première fois de sa vie la littérature américaine tandis que le flot de la vie de Poltinus roulait devant lui ; il comprenait cette prodigalité et cette indécence, cette hétérogénéité grégaire, il comprenait Walt Whitman qui avait fait cohabiter des mots qui, en dehors du dictionnaire, ne s'étaient jamais retrouvés ensemble, et Herman Melville qui avait brisé l'atome du roman traditionnel dans l'espoir de faire de la chasse à la baleine une métaphore universelle et qui avait glissé en douce, dans un roman qui s'adressait aux lecteurs les plus puritains que le monde ait jamais connus, un chapitre sur le prépuce de la baleine sans qu'on lui en fasse le moindre grief ; il comprenait pourquoi Mark Twain avait failli écrire une suite à Huckleberry Finn dans laquelle Tom Sawyer devait vendre Huck comme esclave, et pourquoi Stephen Crane avait écrit son grand roman de guerre avant de faire l'expérience de la guerre, et ce que Gertrude Stein voulait dire lorsqu'elle disait que "tout ce que l'on se rappelle est une répétition, mais exister en tant qu'être humain, c'est à dire être, écouter et entendre, ce n'est jamais une répétition" ; il comprenait tout cela, bien qu'il eût été incapable de l'expliquer à ses étudiants - certaines pensées sont trop profondes pour les séminaires - et comprenait aussi, enfin, ce qu'il voulait dire à Hilary."
Ce que j'ai moins aimé : Quelques longueurs... Comme souvent chez David Lodge, certaines allusions littéraires ou universitaires me semblent réservées uniquement aux spécialistes et tombent à plat pour le lecteur lambda...
Bilan : Une lecture assez divertissante, il s'agit du premier tome de la trilogie universitaire de David Lodge, suivront Un tout petit monde et Jeu de société dans lequels nous retrouvons les mêmes personnages.
A Londres la narratrice Anne Beddingfeld assiste sur un quai à une scène glaçante : un homme se tient au bord du quai du métro et soudain, il semble effrayé par la vue de quelqu'un ou quelque chose, trébuche et tombe sur les rails. Surgit alors un homme au complet marron qui se prétend médecin, examine l'homme, puis prend la fuite. De liens en liens, les deux hommes semblent reliés à une villa à louer dans laquelle est retrouvé le corps d'une inconnue.
La jeune Anne, bercée par des récits romantiques, décide de se lancer dans une enquête qui la mènera dans des contrées reculées de l'Afrique du Sud.
Pendant un été de mon adolescence, j'ai lu l'oeuvre intégrale d'Agatha Christie et il se trouve que je gardais un souvenir très marquant de celui-ci. Etait-ce mon âme adolescente romantique qui s'était retrouvée dans la jeune Anne et ses aspirations ? Force est de constater que si cet opus porte la marque talentueuse de la grande Agatha , il n'est pas non plus inoubliable comme peut l'être Le crime de l'Orient Express, Le meurtre de Roger Acroyd, ou encore Dix petits nègres. L'intrigue romantique manque quelque peu de nuances et la jeune Anne et son innocence pourrait prêter à rire.
Bien rythmé, il nous entraine néanmoins avec plaisir dans l'univers de la grande Agatha qui manie toujours le suspens avec subtilité !
"C'est un soir calme et libre, et d'infinie beauté,
L'heure sacrée est muette comme une nonne
Eperdue d'adoration; l'astre rayonne,
Epanoui, sombrant dans sa tranquillité."
Tel Chateaubriand aimant se réfugier au sein d'une nature consolante, Wordsworth a laissé sa marque dans la littérature romantique européenne. Au gré de ses promenades le poète glane des beautés éphémères, s'émerveille devant le monde et la nature qui l'entoure. Il s'émerveille devant un papillon, une jonquille, et chante la vie simple, le réconfort dans la nature, dans sa région duLake District.
"Un langage fidèle à la chose observée, mais libre de liens trop naturalistes, trop prosaïques, vivifie, magnifie, tout en lui gardant silhouette et lignes précises, voire en la canalisant, l'émotion toujours fraiche qu'il éprouve devant l'inépuisable beauté du monde." Préface de François-René Daillie
Néanmoins, il se démarque des romantiques en ne semblant pas souffrir du "mal du siècle." Au contraire, ses sonnets chantent la joie de vivre :
"Comme il est doux, quand la fantaisie à son gré
Berce l'esprit rétif, de flâner dans les bois !
Un lien ancien, rempli d'oiseaux aux mille voix,
Grands arbres, berceaux de verdure et fleurs des prés,
Rose sauvage à cloche-pied sur l'aubépine,
Telle une fille hardie qui joue des tours badins
Les semaines de fête avec des baladins, -
Leste sur la tête du Clown. Et qui taquine
La foule au-dessous d'elle. En vérité, je crois
Qu'un tel lieu est pour moi comme un rêve parfois,
Carte du monde entier : par l'oreille et les yeux
Entrent tant de pensées, une telle clarté
De toute chose, qu'à la fin, épouvanté,
Je bondis hors de ce courant délicieux."
Il chante aussi son amour pour sa soeur, son double spirituel et ses vers résonne longtemps dans le coeur du lecteur...