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374 résultats pour “long silence

Juste la fin du monde de Jean-Luc LAGARCE

Publié le par Hélène

♥ ♥ ♥

« C’est comme la nuit en pleine journée, on ne voit rien, j’entends juste les bruits, j’écoute, je suis perdu et je ne retrouve personne. »

Louis rend visite à sa famille pour la première fois depuis des années. Il retrouve sa mère, sa sœur Suzanne, son frère Antoine et sa belle-sœur Catherine. Il a l'intention de leur annoncer sa maladie et sa mort prochaine irrémédiable, mais son arrivée fait ressurgir souvenirs et tensions familiales. Chacun exprime divers reproches et tout se joue alors dans les interstices, dans les silences, les répétitions. Ce qu'on dit, ce qu'on ne dit pas, ce qu'on pense que l'autre pense, ce qu'il ignore. Tout est subtil, lié aux blessures de l'enfance, au fait de se sentir aimé ou pas, rejeté, mis à l'écart, mis en valeur. Quoiqu'il arrive, rien n'est évident tant les relations familiales restent complexes et tant le langage est limité pour exprimer les vagues du conscient et de l'inconscient entremêlées étroitement.

Les êtres se frôlent certains haussent le ton comme Antoine, d'autres se taisent comme Louis, plus discret. Catherine pourrait incarner l'équilibre celle qui rassemble et comprend. Mais c'est la mère qui finalement sera clairvoyante quand elle dira : « […] la journée se terminera ainsi comme elle a commencé, / sans nécessité, sans importance. »

Mes réticences :

A la première lecture, je me suis perdue, et ce n'est qu'une fois que j'ai vu la magnifique adaptation de Xavier Dolan avec ces acteurs exceptionnels que j'ai mieux compris les enjeux de la pièce.

Bilan :

Un texte fort qui vibre longtemps ...

« Je me remets en route avec seul le bruit de mes pas sur le gravier. / Ce sont des oublis comme celui-là que je regretterai. »

Publié dans Théâtre

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Morteparole de Jean VEDRINES

Publié le par Hélène

Ce que j'ai aimé :

Deux hommes, Paul, universitaire rompu à l'exercice de l'oral, tant et plus que les mots finissent par ne plus rien signifier pour ces universitaires devenus des "spectres" années après années. Et Giovan, fils d'immigrés italiens cancre de la classe plus révolutionnaire que bon élève. Ils se retrouvent à l'occasion d'une cérémonie officielle de Paul, dans un grand lycée parisien, sur les bancs d'école qui ont eux aussi perdu leur âme. L'occasion pour Giovan de se souvenir de leur enfance et la foi qu'ils avaient l'un et l'autre dans les mots et dans leur pouvoir de création du monde. Il chante son amour de la parole avant qu'elle ne devienne morte, assujettie par des termes techniques qui ont peu à peu tué sa magie. 

A eux de retrouver le pouvoir des mots...

Ce que j'ai moins aimé :

Malheureusement j'ai trouvé que le propos s'essouflait en balayant les souvenirs des rencontres amoureuses des deux hommes. Je me suis ennuyée en cours de lecture alors que le sujet et l'auteur m'intéressait grandement. Je retenterai ma chance avec un autre titre de lui...

Premières phrases :

"Il élève la voix, Paul.

Il crie.

Lui qui d'habitude parle voilé, assourdi, tellement bas qu'on doit touours faire silence, tendre l'oreille pour saisir ce qu'il murmure. Comme si c'était précieux, sacré. Comme s'il était prêtre, devin."

Informations sur le livre :

Fayard 

D'autres avis :

Repéré chez Cathulu 

 

Morteparole, Jean Védrines, Fayard, août 2014, 256 p., 18 euros

 

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Le Dieu du carnage de Yasmina REZA

Publié le par Hélène

 

Ferdinand le fils d'Alain et Annette Reille voulait faire partie de la bande de Bruno le fils de Véronique et Michel Houillé, mais les deux enfants se sont battus, Ferdinand ayant frappé Bruno au visage avec un bâton.

Véronique et Michel ont donc convié l'autre couple autour d'un clafouti et de tulipes pour s'expliquer en adultes responsables. Mais Alain, Alain avocat qui veut passer sous silence les effets indésirables d'un médicament, passe son temps à répondre au téléphone, Véronique emploie à tout va sa morale, Michel vient d'abandonner le hamster de sa fille dans la rue parce qu'il faisait trop de bruit, et Annette finit par vomir sur les livres d'art de Véronique !

La bienséance en prend alors pour son grade !

S'ensuivent des jugements rédhibitoires :

"L'honnêteté est une idiotie, qui ne fait que nous affaiblir et nous désarmer" Alain

"On s'efforce d'échapper à la mesquinerie ... et on finit humilié et complètement seul..." Véronique

A propos du couple et de la vie de famille "la plus terrible épreuve que Dieu puisse nous infliger."

Entre ironie et ton acerbe, je me suis perdue dans un pessimisme sans fond, servi par une écriture bien creuse, et j'ai refermé le livre avec cette question ô combien philosophique et intellectuelle - à l'image de ce que se veut l'auteure - en suspens au-dessus de mon esprit ignare "So what ?"

 

Du même auteur : Art ; Heureux les heureux

Présentation de l'éditeur : Folio

Publié dans Théâtre

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Idées cadeaux

Publié le par Hélène

 

Un livre que vous offrez en toutes circonstances ?

 La patience des buffles sous la pluie de David THOMAS  

CHENG François La vraie gloire est ici 

SHU Lao Un monde simple et tranquille ; Moi, mon chat et le plaisir des jours

Les livres de Christian BOBIN
 

Un livre pour donner envie de voyager :

OLAFSDOTTIR Audur Ava La vérité sur la lumière

PRUDHOMME Sylvain Par les routes

 

Un livre pour donner envie de rire :

DURRELL Gérald La trilogie de Corfou

RIEL Jorn La vierge froide et autres racontars 

 

Un livre pour donner envie de philosopher : 

Petit traité de philosophie naturelle de Kathleen DEAN MOORE  

Habiter poétiquement le monde- Anthologie manifeste

 

Un livre pour donner envie d'aimer :

SPRAGG Mark Une vie inachevée

DU MAURIER Daphné Rebecca

 

Un livre pour donner envie de rêver :

DELFINO Jean-Paul  Les pêcheurs d'étoiles

KAGGE Erling Quelques grammes de silence

 

Un livre pour donner envie de savourer :

 Une année à la campagne de Sue HUBBELL

KAWAKAMI Hiromi Les années douces 

 

Un livre pour donner envie de se révolter  :

LAURENT Caroline Rivage de la colère

JEAN Michel Kukum

 

Un livre pour donner envie de se cultiver :

 Le Turquetto de Metin ARDITI   

QUINN Kate Le réseau Alice

 

Un livre pour donner envie de cuisiner :

 La colère des aubergines de Bulbul SHARMA  

 

Un livre pour donner envie de lire : 

  La tournée d'automne de Jacques POULIN

YOURCENAR Marguerite Comment Wang Fô fut sauvé

Publié dans Idées cadeaux

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Mon top 2023

Publié le par Hélène

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Remise du prix Goncourt des lycéens 2017

Publié le par Hélène

Hier soir avait lieu la remise du prix Goncourt des lycéens, remis à Alice Zeniter, pour son roman L'art de perdre dans lequel elle raconte le parcours d'une famille de harkis sur plusieurs générations en s'inspirant de l'histoire de sa propre famille.

Un roman traduit du silence

Tahar Ben Jelloun a ouvert le bal des discours en soulignant combien la guerre d'Algérie restait un sujet sensible en raison des mémoires meurtries, et il a admiré le courage de Alice Zeniter qui a su aller encore plus loin en s'intéressant aux harkis. Pour lui, le roman d'Alice Zeniter est un roman traduit du silence car personne n'avait envie de raconter cette part maudite, cette malédiction liée aux harkis et à la guerre d'Algérie, et c'est finalement grâce à la littérature que la parole a pu se faire. Il a remercié les lycéens de leur choix, l'académie Goncourt avait porté L'art de perdre jusqu'à la dernière liste, mais L'ordre du jour de Eric Vuillard l'avait supplanté dans la course finale. Il est heureux qu'aujourd'hui les lycéens le choisissent. Il conclue en disant combien il a été ému par cette histoire qui a levé le voile sur une tragédie sans fin.

30 ans de Goncourt des lycéens

Enrique Martinez, directeur général de la Fnac Darty, a ensuite pris la parole en rappelant que cette édition couronne les 30 ans du Goncourt des Lycéens, avec plus de 30000 lycéens qui ont participé au prix. Il cite une citation de Vargas Llosa qui affirmait que la chose la plus importante qu'il avait pu faire dans sa vie fut d'apprendre à lire. Pour la Fnac il s'agit d'un enjeu important de continuer. La lecture plus que jamais. Le recteur de l'académie de Paris, Gilles Pécout, a lui aussi insisté sur l'importance du prix et de la lecture. Il a remercié Alice Zeniter d'avoir élaboré une oeuvre d'art avec un pan de notre histoire.

De l'importance de la transmission

La présidente du jury des lycéens s'est ensuite exprimée avec beaucoup d'émotion, elle a mis l'accent sur les sensations inoubliables ressenties à la lecture du roman de Alice Zeniter, sur le fait que la lecture lui a permis de développer une maturité et de prendre de la hauteur.

Pour finir, Alice Zeniter, elle-même très émue s'est exprimée. Pour elle il était important de donner des mots à ceux pour qui les mots sont des lieux d'enfermement. Elle voulait aussi parler de la transmission, sur trois générations, de ce qui passe d'une génération à une autre : comment se transmet la culture, mais aussi comment se transmettent les angoisses, les hontes, les traumatismes. Naïma, l'héroïne de son roman est une jeune fille en mouvement, et ce mouvement continue à travers ces lycéens à qui elle a transmis son histoire.

A lire également :

La présentation du prix

Les rencontres régionales du Goncourt à Lille

Le lycée Pierre de Coubertin et le Goncourt des lycéens

Alice Zeniter et le Goncourt des lycéens

Olivier Guez et le Goncourt des lycéens

Alexis Ragougneau et le Goncourt des lycéens

François-Henri Désérable et le Goncourt des lycéens

Ce dernier a d'ailleurs fait une apparition, très fair play pour féliciter sa consoeur.

 

Mon avis sur mes lectures goncourables :

Nos richesses de Kaouther Adimi

Tiens ferme ta couronne de Yannick Haenel

L'art de perdre de Alice Zeniter

Bakhita de Véronique Olmi

Summer de Monica Sabolo

 

Merci aux équipes de la Fnac qui m'ont permis de suivre le prix sur la durée et au réseau Canopé pour leur accueil.

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Vacarme dans la salle de bal de François VALLEJO

Publié le par Hélène

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♥ ♥

« La danse, il faut bien penser où l'on mettra ses pieds » Blaise Pascal

 

L'auteur :

François Vallejo est un écrivain français auteur de sept romans, romans pour lesquelles il a obtenu plusieurs distinctions littéraires.

 

L'histoire :

« Nous pourrions nous ignorer, comme bien des voisins au monde, mais un petit rien établit un lien entre nous, un lien ténu et flou, intermittent, mais déjà plus lourd et plus douloureux à l’épiderme que des chaînes : dès que nous nous enfermons, lui dans sa taupinière, moi dans mon entresol, et que nous séparent seulement lui son plafond, moi mon parquet, ce petit rien entre nous, c’est son grand boucan. Ça barde tout de suite. Voici que du fond de la crypte sur laquelle je m’apprêtais à bâtir avec Célestine une cathédrale de paix vouée au recueillement voluptueux et à la musique de chambre, s’élève un sabbat de bal musette. »

Pour éviter de s’en faire un ennemi, le narrateur – médecin désabusé responsable de la santé de tous les marins du globe transitant par le port du Havre – a l’idée saugrenue de « quémander » le silence auprès de M. Émile afin d’écrire sa pseudo-thèse qui traite… du bal à travers les âges ! Mal lui en prend !

Anodin et loufoque, truffé de quiproquos, le récit aborde très subtilement les rives du « conflit » entre corps et esprit, entre l’un qui danse et l’autre qui ne fait que « penser » la danse, celles de la difficile communication entre les humains.

 

Ce que j'ai aimé :

Pour Monsieur Emile, la danse est tout. La musique, la joie procurée par le mouvement, la technique, la beauté des danseurs, cet ensemble calibré et harmonieux résume son monde. Et cela s'entend, pour le plus grand déplaisir de son voisin, le narrateu,r qui aimerait profiter de son nouvel appartement en silence et non pas en musique... Aussi ce médecin va-t-il prétendre avoir besoin de paix pour rédiger une thèse sur le bal à travers les âges. Mais sa paix sera de courte durée puisque Monsieur Emile sera ravi de rencontrer une personne qui estime sa passion au point de lui consacrer une thèse.

Les deux univers vont alors s'interpénétrer, mais les pages du roman ne nous mènent jamais là où on pensait aller allègrement, en maître absolu, François Vallejo mène résolument la danse, pour le plus grand plaisir de ses partenaires-lecteurs.

Roman jubilatoire, alerte, au rythme rapide, Vacarme dans la salle de danse lance des canaux de réflexion sur l'humain, sur les rapports entre les hommes, qu'ils soient voisins ou en couple, sur la curiosité des uns pour la vie des autres, sur la passion qui anime certains êtres, sur le mystère qui plane finalement sur les uns ou les autres dans une obscurité déroutante. Seul le partage d'une passion pourra peut-être en sauver certains...

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Ce que j'ai moins aimé :

M'en souviendrais-je dans un an ?

 

Premières phrases :

« Emménager dans un nouvel appartement, c'est comme venir au monde : parfois on tombe mal. Et impossible de se débarrasser du mal, à moins d'en crever ; ou de déménager une nouvelle fois, avec l'espoir de la résurrection. Grande affaire. »

 

Vous aimerez aussi :

Du même auteur :  Les sœurs Brelan de François VALLEJO

 

D'autres avis :

Mango 

 

Vacarme dans la salle de bal, François Vallejo, Viviane Hamy, 1998, 160 p., 16.50 euros

 

 

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Une heure de silence de Michael KORYTA

Publié le par Hélène

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♥ ♥

Un roman policier plutôt bien mené.

 

L’auteur :

 

Michael Koryta est un auteur américain, ancien journaliste et détective privé.

 

L’histoire :

 

La mystérieuse propriété baptisée «La Crête aux murmures» et estimée à plusieurs millions de dollars, a longtemps abrité un étrange programme de réinsertion mené par Alexandra Cantrell, soeur d'un ponte de la mafia de Cleveland.

Le détective privé Lincoln Perry en apprend l'existence lorsque débarque dans son bureau Parker Harrison - ancien détenu et «pensionnaire» de la Crête aux murmures - l'implorant de retrouver Alexandra, mystérieusement disparue. Déconcerté et embarrassé par l'instinctive méfiance que lui inspire son client, Perry décide de prendre l'affaire mais se rend vite compte que les os de Joshua Cantrell, l'époux d'Alexandra, ont été découverts au moment même ou Parker s'est décidé à faire appel à lui.

Coïncidence ? Sûrement pas. Pour régler ce dossier dont les pistes sont froides depuis des années, Lincoln Perry, aidé d'un autre détective, va devoir plonger le nez dans les enquêtes de la police mais aussi du FBI, et enfin résoudre disparition et meurtre au risque et au prix de sa vie.

 

Ce que j’ai aimé :

 

L’atmosphère liée à cette maison idéale tapie en pleine nature intrigue le lecteur dés les premières pages. Le décor est attirant, les personnages énigmatiques : on rencontre un ancien meurtrier qui semble s’être réinséré, un détective hésitant, un autre à la retraite, et le troisième hanté par ses échecs. Et surtout la disparition mystérieuse et inexpliquée de ce couple aux valeurs morales aiguillonne la curiosité…

Le point de vue de la jeune Alexandra sur la réinsertion des anciens meurtriers est intéressant et ouvre de nouvelles perspectives...

 

Ce que j’ai moins aimé :

 

-          J’ai moins aimé les imbroglios liés à la mafia locale, j’ai trouvé que l’intrigue perdait de son épaisseur en tombant dans ces poncifs, alors qu’elle aurait pu sans doute partir sur des voies plus originales et passionnantes.

-          Le suspens n’est pas assez exploité car à chaque fois que l’enquête frôle le danger, Lincoln connaît les affres de l’hésitation qui le happent et le font douter de sa mission –la trouille tout simplement … C’est sans doute tout à son honneur de souhaiter protéger ses proches  mais on est loin du personnage de dur à cuire que rien ni personne ne fait reculer, à la Sam Spade …

-          A dire vrai, je n’ai pas vraiment envie de revoir le beau Lincoln, et ça, croyez-en une fan des beaux détectives musclés, ce n’est pas très bon signe… (personne n’a encore remplacé Dahlgren dans mon cœur, qu’on se le dise !)

 

Premières phrases :

 

« Il avait aiguisé son couteau une heure avant de tuer. La police, le procureur et les médias en avaient fait grand cas. Pour eux, il y avait préméditation. Dessein criminel. Meurtre de sang-froid.

Parker Harrison s’était contenté de répondre qu’il aiguisait souvent son couteau le soir.

Un peu léger comme défense. »

 

 

D’autres avis :

Babélio

 

Une heure de silence, une enquête de Lincoln PERRY, Michael KORYTA, Traduit de l’anglais (EU) par Frédéric Grellier, Seuil policiers, octobre 2011, 365 p., 21.50 euros

 

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Arrête avec tes mensonges de Philippe BESSON

Publié le par Hélène

♥ ♥

Barbezieux, 1984. Là où tout commence... Philippe Besson, a 17 ans, des résultats à la hauteur des attentes de son père, instituteur, des amis fidèles. Quelques rumeurs courent déjà sur son attirance pour les garçons et si Philippe ne les alimente pas, il ne les fuit pas non plus, secrètement ravi de se trouver différent des autres, s'éloignant ainsi du rôle d'un enfant modèle qu'on lui assigne... "Je n'aurai pas à suivre la meute. D'instinct, je déteste les meutes. Cela ne m'a pas quitté." Durant cette année de terminale, il tombe sous le charme de Thomas Andrieu, garçon sombre et ténébreux qui se rapproche de lui.  Thomas et Philippe s'organisent des rendez-vous discrets, vivant une parenthèse enchantée, en parallèle de leur vie connue. La fin de l'année de terminale et les routes divergentes risquent de briser cet élan si pur...

"J'écrirai souvent, des années après, sur l'impondérable, sur l'imprévisible qui détermine les évènements.

J'écrirai également sur les rencontres qui changent la donne, sur les conjonctions inattendues qui modifient le cours d'une existence, les croisements involontaires qui font dévier les trajectoires.

Ça commence là, dans l'hiver de mes dix-sept ans."

A l'orée entre autobiographie et fiction, Philippe Besson évoque ici son premier amour, Thomas à la source de des thèmes récurrents de son oeuvre, le manque, "la privation insupportable de l'autre", la tristesse, la folie qui menace, manque qui prend ces racines ici, dans cette première histoire d'amour. Il sèmera dans son oeuvre des allusions à ce Thomas adolescent. Avec délicatesse et subtilité, l'auteur se livre sur ses choix, sur son homosexualité "Mais jamais je ne dévierai. Jamais je ne penserai : c'est mal, ou : j'aurais mieux fait d'être comme tout le monde, ou : je vais leur mentir afin qu'ils m'acceptent. Jamais. Je m'en tiens à ce que je suis. Dans le silence certes. Mais un silence têtu. Fier."

Mais il parle aussi d'un époque, de destins divergents à l'âge où l'avenir se profile, de ceux qui partent et ceux qui restent, dans leur ville natale, du hasard qui crée des trajectoires. Il touche à l'humain quand il parle d'identité, quand il effleure ce qu'il y a en nous que nous ignorons mais que les autres peuvent voir, par une soudaine fulgurance de l'esprit :  Thomas aura cette phrase visionnaire marquante sur Philippe  "Parce que tu partiras et que nous resterons." Il nous parle enfin de mensonges et de vérités, du pouvoir de la fiction et de sa force, face à une vérité rivée douloureuse.

Ainsi, Philippe Besson nous parle de lumière avec une mélancolie infinie ...
 

Prix obtenus : Prix Maison de la Presse 2017 et le Prix Psychologie du roman inspirant 2017. Il sera le président du jury du Prix Psychologies du roman Inspirant 2018, et j'ai la chance de faire aussi partie du jury cette année.

 

Présentation de l'éditeur : Julliard, 10-18

Du même auteur : L'arrière-saison

D'autres avis : Télérama ; Alex ; Sylire ; Benoît  ; Caroline ;

 

Arrête avec tes mensonges, Philippe Besson, 10-18, janvier 2018, 158 p., 6.90 euros

Le roman sera adapté au cinéma par Olivier Peyon.

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Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? de Jeanette WINTERSON

Publié le par Hélène

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♥ ♥

L’auteur :

Née en Angleterre en 1959, Jeanette Winterson a connu le succès dès la parution de son premier roman, Les oranges ne sont pas les seuls fruits (réédité aux Editions de l'Olivier en 2012). Couronnée de prix, elle devient une figure du mouvement féministe. Ses romans baroques, ses essais, notamment sur l'identité sexuelle (Le Sexe des cerises ou Powerbook), ont imposé sa voix singulière dans la littérature britanniqueNée en Angleterre en 1959, Jeanette Winterson a connu le succès dès la parution de son premier roman, Les oranges ne sont pas les seuls fruits (réédité aux Editions de l'Olivier en 2012). Couronnée de prix, elle devient une figure du mouvement féministe. Ses romans baroques, ses essais, notamment sur l'identité sexuelle (Le Sexe des cerises ou Powerbook), ont imposé sa voix singulière dans la littérature britannique.

 L’histoire :

Pourquoi être heureux quand on peut être normal ? Etrange question, à laquelle Jeanette Winterson répond en menant une existence en forme de combat. Dès l'enfance, il faut lutter : contre une mère adoptive sévère, qui s'aime peu et ne sait pas aimer. Contre les diktats religieux ou sociaux. Et pour trouver sa voie. Ce livre est une autobiographie guidée par la fantaisie et la férocité, mais c'est surtout l'histoire d'une quête, celle du bonheur. "La vie est faite de couches, elle est fluide, mouvante, fragmentaire", dit Jeanette Winterson. Pour cette petite fille surdouée issue du prolétariat de Manchester, l'écriture est d'abord ce qui sauve. En racontant son histoire, Jeanette Winterson adresse un signe fraternel à toutes celles - et à tous ceux - pour qui la liberté est à conquérir. (Quatrième de couverture)

 Ce que j’ai aimé :

Jeanette Winterson revient ici sur son enfance passée auprès d'une mère adoptive rigoriste obsédée par sa religion, l'Enfer, le Mal et toute leur bande... Une mère qui l'a mise à la porte parce qu'elle préférait les filles aux garçons.

La question de l'identité est au coeur du roman : comment trouver sa place dans ce monde quand le rejet, l'abandon ont été les seules mères identifiables...  Enfant adoptée, rejetée par sa mère adoptive, Jeanette Winterson n'a pu trouver de salut que dans la littérature, puis dans l'écriture.

« C’est vrai, les histoires sont dangereuses, ma mère avait raison. Un livre est un tapis volant qui vous emporte loin. Un livre est une porte. Vous l’ouvrez. Vous en passez le seuil. En revenez-vous ? » (p. 53)

« Je n’avais personne sur qui compter, mais TS Eliot m’a aidée.

Du coup, quand les gens disent que la poésie est un luxe, qu’elle est optionnelle, qu’elle s’adresse aux classes moyennes instruites, ou qu’elle ne devrait pas être étudiée à l’école parce qu’elle n’est pas pertinente ou tout autre argument étrange et stupide que l’on entend sur la poésie et la place qu’elle occupe dans notre vie, j’imagine que ces gens ont eu la vie facile. Une vie difficile a besoin d’un langage difficile – et c’est ce qu’offre la poésie. C’est ce que propose la littérature – un langage assez puissant pour la décrire. Ce n’est pas un lieu où se cacher. C’est un lieu de découverte. » (p. 55)

Elle évoque ici sa plongée dans l'enfer de la solitude, du manque d'amour source de ses souffrances, puis sa remontée rédemptrice vers la lumière de la vie, de l'envie, de l'amour... 

« En fait, nous avons droit à plus que deux chances – beaucoup plus. Avec mes cinquante années d’expérience, je sais à présent que le va-et-vient entre trouver / perdre, oublier / se souvenir, quitter / retrouver, est incessant. L’existence n’est qu’une question de seconde chance et tant que nous serons en vie, jusqu’à la fin, il restera toujours une autre chance. (p. 53)

La créativité lui permet de se tenir du côté de la santé en racontant une histoire à « la créature », son autre moi devenu fou.

"La vérité est une chose très complexe pour tout un chacun. Pour un écrivain, ce que l'on retranche en dit autant ce que l'on intègre. Que retrouve-t-on par-delà des marges du texte? La photographe cadre son sujet ; les écrivains cadrent leur univers. Mrs Winterson m’a reproché ce que j'avais intégré alors que j'avais plutôt l'impression que le jumeau muet de l'histoire était ce que j'avais retranché. Nous taisons tant de ces choses trop douloureuses. Nous faisons le vœu que ce que nous pouvons raconter apaisera le reste, l'atténuera d'une façon ou d'une autre. Les histoires sont là pour compenser face à un monde déloyal, injuste, incompréhensible, hors de contrôle. Raconter une histoire permet d'exercer un contrôle tout en laissant de l'espace, une ouverture. C'est une version mais qui n'est jamais définitive. On se prend à espérer que les silences seront entendus par quelqu'un d'autre, pour que l'histoire perdure, soit de nouveau racontée. En écrivant, on offre le silence autant que l'histoire. Les mots sont la part du silence qui peut être exprimée."

 Jeanette Winterson évoque sa remontée des Enfers avec subtilité et intelligence. 

 Ce que j’ai moins aimé :

Le ton est beaucoup moins caustique que dans « Les oranges », qui a ma préférence, celui-ci étant beaucoup plus sombre, plus centré sur l'introspection de l'auteure. Vingt-cinq ans séparent les deux écrits et c'est une Jeanette adulte qui a fait un travail psychologique poussé qui parle désormais et défend la jeune fille esseulée qu'elle était alors. La force qui s'échappait d'elle dans le récit "Les oranges" s'est craquelée, la menant vers une dépression sans doute nécessaire pour panser les blessures et rebondir plus haut. 

Premières phrases :

« Quand ma mère se fâchait contre moi, ce qui lui arrivait souvent, elle disait : « Le Diable nous a dirigés vers le mauvais berceau. »

L’image de Satan prenant congé de la guerre froide et du maccarthysme le temps de faire un crochet par Manchester en 1960 – but de la visite : duper Mrs Winterson – est théâtralement truculente. »

 Vous aimerez aussi :

Du même auteur : Les oranges ne sont pas les seuls fruits de Jeanette WINTERSON

 D’autres avis :

Presse : Télérama Magazine littéraire

Blogs : Cathulu Clara Aifelle  

 Pourquoi être heureux quand on peut être normal, Jeanette Winterson, traduit de l’anglais par Céline Leroy, Editions de l’Olivier, 2012,

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Publié dans Littérature Europe

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